Un projet de loi de financement de la sécurité sociale porte sur le passé, sur le présent et sur l'avenir.
Le passé, c'est le lourd passif des années 2008-2011. Le solde structurel était déjà négatif en 2008 lorsque la crise a commencé, alors qu'il devrait être excédentaire pour faire face aux défis du vieillissement ! Il s'est creusé jusqu'en 2010 où il a atteint 0,9 point de PIB, les effets d'une gestion peu responsable s'ajoutant à la crise. Depuis 2011, le déficit tend à se réduire. La composante structurelle représentait 60 % du déficit des administrations de sécurité sociale en 2009, 75 % en 2010 et environ 66 % en 2011. Indépendante des effets de la croissance, elle résulte exclusivement du pilotage des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale. Le fonds de réserve des retraites (FRR) et la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) sont structurellement excédentaires, et le mode de gestion de l'Unedic par les partenaires sociaux le fait tendre vers l'équilibre structurel, même si d'importants déséquilibres conjoncturels peuvent survenir.
Le montant des déficits a été de 29,6 milliards d'euros en 2010, et de 22,6 milliards d'euros en 2011. L'article 2 nous présente un tableau patrimonial au 31 décembre 2011 inédit : un passif financier net de 111,2 milliards d'euros, soit 5,5 % du PIB, contre 96 milliards d'euros, soit 4,9 % du PIB, au 31 décembre 2010, l'endettement financier atteignant 170,1 milliards d'euros contre 146,8 milliards un an avant.
En 2012, le déficit de l'ensemble des régimes de base et du fonds de solidarité vieillesse (FSV) devrait être de l'ordre de 19,3 milliards d'euros, dont 13,1 milliards pour le régime général. C'est le double de ce qui avait été enregistré en 2008, mais c'est 10 milliards de moins qu'en 2010, la réduction ayant été moins forte en 2012 qu'en 2011, car la progression de la masse salariale a été moins importante : 2,5 % en 2012 contre 3,6 % en 2011.
La bonne tenue de l'année 2012 résulte des collectifs budgétaires et en particulier de celui du 16 août : la loi de financement initiale fixait un objectif de 13,8 milliards d'euros pour le déficit du régime général, mais avant le collectif de l'été, la commission des comptes de la sécurité sociale anticipait un déficit de 15,5 milliards ! Elle l'a réévalué à 14,6 milliards après une première estimation des mesures du collectif, puis en octobre, à 13,1 milliards, ce qui correspond à une amélioration par rapport aux objectifs fixés par la loi de financement initiale.
La nouvelle majorité sénatoriale a pris ses responsabilités il y a un an, en adoptant neuf principaux amendements sur le PLFSS pour 2012, avec un double objectif : réduire les niches sociales, suivant ainsi à la fois les préconisations de la Cour des comptes visant à les diminuer de 10 milliards d'euros et celles du rapport du comité d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales, présidé par M. Henri Guillaume, inspecteur général des finances ; augmenter les prélèvements sur le capital. Le Sénat a donc voté plus de 8,2 milliards d'euros de recettes nouvelles, dont 5,2 milliards au profit de la sécurité sociale, mais ses propositions ont été rejetées par le précédent gouvernement. En 2012, sept de ces neuf mesures ont été adoptées en lois de finances rectificatives, et notamment toutes celles qui proposaient de s'attaquer aux niches sociales. La gauche a donc nettement participé à l'amélioration des comptes de la sécurité sociale, ainsi qu'à accroître l'équité dans la répartition de la charge.
Nous sommes encore plus ambitieux pour 2013, puisque nous visons un redressement des comptes représentant 32,3 % du solde tendanciel, contre 29,8 % pour 2012, avec une répartition de l'effort modifiée : 35 % des mesures nouvelles en recettes consistent en suppressions de niches sociales, contre 10 % pour 2012, année où 73 % des mesures nouvelles étaient des créations de taxes.
Le passé, c'est aussi la dette sociale, qu'il nous faut financer. Le PLFSS ne prévoit aucune reprise de dette des déficits pour 2012 de la branche famille et de la branche maladie par la Cades. L'Acoss bénéficie en effet de taux courts particulièrement attractifs qui pourraient se maintenir en 2013, c'est donc elle qui financera à court terme le déficit de ces branches pour 2012, mais je souhaite que la Cades reprenne ces dettes au plus tôt, sans doute en 2014 : dette et trésorerie ne doivent pas être confondues.
Pour la période 2012-2017, les projections prévoient un déficit cumulé de ces deux branches de 34,6 milliards d'euros. Dans l'hypothèse d'une reprise au fil de l'eau à compter de 2014, avec reprise initiale des déficits 2012 et 2013 en 2014, le surcroît nécessaire de recettes nouvelles sera de l'ordre de 3,5 milliards d'euros pour une extinction dès 2024, soit l'équivalent de 0,25 point de CRDS. Pour éviter des charges plus lourdes encore, il nous faut prévoir une reprise des déficits sociaux par la Cades au plus tôt.
Ce PLFSS est respectueux de nos engagements et des positions exprimées il y a un an par la majorité sénatoriale. Pour la première fois nous passons, en matière de niches sociales, des discours aux actes, même si cela fait grincer des dents. C'est une oeuvre nécessaire et juste pour porter les recettes à la hauteur des besoins sociaux que nous devons financer. Je recommanderai donc en séance publique que nous adoptions ce texte.