Intervention de Jean-Michel Baylet

Réunion du 7 novembre 2012 à 14h30
Prélèvements obligatoires. - programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 — Débat et discussion en procédure accélérée d'un projet de loi

Photo de Jean-Michel BayletJean-Michel Baylet :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le marathon budgétaire n’aura jamais aussi bien porté son nom que cette année.

À la suite de l’adoption du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire et de la loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques, et avant de se saisir des projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2013, notre assemblée examine le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017.

On aurait tort de penser que cette vague de textes constitue une longue litanie ; il s’agit, au contraire, d’un véritable changement de pratiques dans l’élaboration du budget de l’État.

Ce projet de loi de programmation préfigure et inaugure également les nouveaux outils en matière de mesure des finances publiques ; il s’inscrit dans une démarche pluriannuelle, engagée depuis la LOLF, la loi organique relative aux lois de finances, et renforcée par les textes récemment votés par le Parlement.

Le projet dont nous débattons aujourd’hui fixe le cap budgétaire pour les cinq années à venir et même au-delà. L’élaboration d’un tel texte de programmation s’inscrit également dans une perspective plus large de réorientation du budget de la nation et constitue incontestablement une rupture avec la politique menée par la majorité précédente.

Dressons d’abord l’état des lieux.

S’agissant de nos finances publiques, il est assez sombre, comme le souligne la Cour des comptes dans son récent rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques.

À vrai dire, il est même plutôt catastrophique, tant est inquiétant notre déficit structurel, largement supérieur à celui de nos partenaires européens : il s’est établi à 5, 7 % du PIB en 2010 et à 4, 1 % du PIB en 2011, contre respectivement 4, 1 % et 3, 2 % du PIB dans l’ensemble de la zone euro.

Certes, la dérive de nos comptes publics est ancienne, comme l’ont rappelé plusieurs orateurs de part et d’autre ; mis à part quelques rares millésimes, elle a été le fait de nombreux gouvernements au cours des quarante dernières années. La dette qui en résulte va dépasser les 90 % du PIB.

Plus qu’une contrainte européenne, la lutte contre la dette est un impératif politique absolu.

Lors de la campagne présidentielle, François Hollande, aujourd’hui Président de la République, a promis de ramener le déficit de l’État à 3 % du PIB dès 2013 et de parvenir à un budget en équilibre dès 2017. Voilà qui est courageux et qui marque une rupture absolue avec la méthode du gouvernement précédent et de l’ancienne majorité !

En effet, il faut du courage pour prendre de tels engagements et de la détermination pour les mettre en pratique. Je sais, monsieur le ministre, que vous ne manquez ni de l’un ni de l’autre.

Le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 est la concrétisation législative de cet engagement courageux.

Il faut tenir le cap, là où la majorité précédente a laissé totalement filer les déficits. Pour ce faire, nous devons mettre fin aux cadeaux fiscaux consentis ces dernières années et revenir à un effort justement réparti.

L’évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales prévue à l’article 17 du projet de loi de programmation constitue un exemple indéniable d’amélioration.

Nous devons également tirer les enseignements de la mise en œuvre de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 : comme notre collègue François Marc l’indique dans son excellent rapport, fait au nom de la commission des finances, elle a été globalement décevante, du fait notamment des prévisions de croissance surévaluées.

À cet égard, comme mon collègue Jacques Mézard qui montera à cette tribune dans quelques instants, je m’interroge sur l’optimisme qui a prévalu dans la définition des hypothèses macroéconomiques retenues dans le présent projet de loi de programmation, en particulier s’agissant de la croissance.

Puisque notre débat porte aussi sur les prélèvements obligatoires et sur leur évolution, je veux rappeler que, en matière de recettes, la présente législature doit être à mes yeux celle d’une grande réforme de l’imposition des revenus des ménages.

Les radicaux, attachés de longue date à cette idée, répèteront inlassablement leur conviction : l’impôt sur le revenu doit être fusionné avec la CSG dans un grand impôt unique qui soit – c’est là le plus important – progressif et juste

En d’autres temps, j’avais été amené à proposer cette fusion et à la défendre. J’espère que, sur ce sujet comme sur d’autres, les radicaux seront un jour entendus.

Dans la même perspective, il serait opportun de réfléchir à l’instauration d’un impôt sur les sociétés également progressif : l’assiette de cet impôt serait élargie et son taux modulé en fonction des bénéfices.

Concernant les dépenses de l’État, le projet de loi de programmation met en lumière les priorités de la majorité.

La première priorité est l’emploi, dont nous savons qu’il est l’un des grands enjeux de la législature. L’emploi, encore et toujours l’emploi !

Nous nous réjouissons que le Parlement ait déjà adopté la loi portant création des emplois d’avenir ; nous examinerons dans les prochaines semaines le projet de loi relatif aux contrats de génération.

Le Premier ministre a présenté les autres priorités : l’éducation nationale, la jeunesse, la justice et la sécurité.

Il s’agit de redéployer les effectifs de l’État, lesquels resteront stables pendant le quinquennat. En d’autres termes, les secteurs prioritaires verront leurs effectifs renforcés, ces augmentations étant compensées par des réformes structurelles dans les autres secteurs.

En tout cas, mes chers collègues, nous sommes loin de la règle, absurde parce qu’aveugle, du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite.

La politique du Gouvernement permettra tout de même de maîtriser les dépenses de fonctionnement.

Enfin, l’article 8 du projet de loi de programmation prévoit que les collectivités territoriales contribueront également à l’effort de redressement des finances publiques.

En 2013, cet effort se traduira par la stabilisation des concours qui leur sont versés par l’État, hors fonds de compensation pour la TVA. Ces concours baisseront en 2014 et en 2015 selon des modalités et une répartition définies en concertation avec les collectivités territoriales. Naturellement, cet effort devra être équitable grâce à un renforcement de la péréquation.

Comme de nombreux élus locaux, je considère avec attention la disposition prévoyant que les modalités d’association des collectivités territoriales dans le cadre d’un « pacte de confiance et de solidarité » seront négociées en 2014.

Monsieur le ministre, vous qui avez été longtemps un élu local – vous l’êtes d’ailleurs toujours, même si vous n’êtes plus en charge d’un exécutif –, vous savez qu’il ne faut pas trop montrer du doigt les collectivités territoriales, car leur gestion a été meilleure que celle de l’État !

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