Intervention de Philippe Marini

Réunion du 7 novembre 2012 à 21h30
Programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 — Article additionnel après l'article 15

Photo de Philippe MariniPhilippe Marini :

Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, en tant que juriste, en tant que praticien du droit, je suis vraiment surpris, voire choqué de ce que l’on nous demande de faire. Par ailleurs, sur le plan économique, mon impatience est grande de pouvoir appréhender le projet de loi de finances rectificative qui devrait développer toutes ces mesures. Mais restons-en, dans un premier temps, au stade de la procédure.

Aux termes de votre amendement, les orientations définies aux différents articles visés « pourront être révisées pour prendre en compte les impacts du pacte national » ― formulation élégante, mais nous y sommes habitués, et ce n’est pas l’essentiel.

Monsieur le ministre délégué, « pourront être révisées », c’est une tautologie. Toute loi peut modifier une loi antérieure. Soit on rectifie dans ce texte les chiffres, même indicatifs, de la programmation budgétaire, soit on s’abstient, car, si je ne me trompe, monsieur le ministre délégué, vous enclenchez un processus qui va nécessiter plusieurs mois de mise au point. Vous nous dites vous-même qu’au premier trimestre 2013 nous aurons à examiner un projet de loi de finances rectificative. J’imagine qu’il va susciter beaucoup de commentaires, que des contradictions vont s’exprimer sur les différentes mesures de ce que le Premier ministre et vous-même appelez un « pacte national ».

Je serais tenté, monsieur le président, si j’en avais la possibilité, de suggérer un sous-amendement visant à substituer les termes : « seront révisées » aux mots : « pourront être révisées ». Ce serait une contrainte, un objectif que le Gouvernement s’assignerait et que le Parlement partagerait. Le libellé serait déjà plus clair et le dispositif un peu plus normatif.

Toujours sur la procédure, je m’interroge ensuite, comme tout à l’heure notre collègue Albéric de Montgolfier, sur le moment où vous réviserez. Vous avez évoqué, peut-être en aparté, lors de la discussion générale, la possibilité que cette révision des articles concernés intervienne par le dépôt d’un nouvel amendement en commission mixte paritaire. Nous l’avons bien entendu ; nous ne l’avons pas inventé.

Il faut alors que l’on nous explique : nous avions un texte ; la procédure accélérée est engagée, donc une lecture à l’Assemblée nationale, une lecture au Sénat. Nous sommes au Sénat le lendemain de l’annonce du Premier ministre et vous nous dites que les articles visés « pourront être » révisés. Quand le seront-ils ? Le seront-ils en commission mixte paritaire ? Le seront-ils, plus naturellement, une fois que la loi de finances rectificative aura été votée ?

Je voudrais, monsieur le ministre délégué, que vous répondiez clairement à cette question, pour que le Sénat sache ce que le Gouvernement entend faire.

Au demeurant, je pense qu’il est juridiquement possible que la loi de finances rectificative révise elle-même la perspective dont il est question, et même qu’elle comporte une annexe qui fournisse la nouvelle série de chiffres.

Enfin, monsieur le ministre délégué, si je comprends bien, les « sous-secteurs des administrations publiques », ce sont l’État, les organismes divers d’administration centrale, les ODAC, la sécurité sociale, les collectivités locales. Cela ne représente pas beaucoup de lignes. Est-il si difficile de nous transmettre cette information complète en temps utile pour que ce texte ait un sens ?

En conclusion, je voudrais dire que je partage le constat de notre collègue Jean Arthuis, qui a fort justement relevé une contradiction : s’il doit s’agir d’un choc, il faut bien que quelque chose se passe dès 2013 ! Or vous nous avez dit que le projet de loi de finances pour 2013 lui-même ne serait pas modifié par le « pacte » annoncé. Mais comment veut-on qu’il y ait un nouveau climat dans le monde des entreprises s’il n’y a aucun moyen concret ? Or il peut y avoir un moyen concret : des créances dont disposeraient les entreprises en question. Mais, s’il y a créances d’un côté, il faut bien qu’il y ait dettes de l’autre !

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