Intervention de Jean-Claude Requier

Réunion du 7 novembre 2012 à 21h30
Régulation économique outre-mer — Adoption des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire

Photo de Jean-Claude RequierJean-Claude Requier :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, quelques semaines avant son élection à la présidence de la République, François Hollande avait présenté trente engagements pour les outre-mer. Au terme de l’examen du projet de loi relatif à la régulation économique outre-mer, nous allons concrétiser trois de ces engagements visant à lutter contre la vie chère.

L’adoption de ce texte permettra ainsi de marquer une première étape en faveur du rétablissement de l’équité dans les territoires subissant des écarts de prix avec l’Hexagone, insoutenables pour beaucoup de nos concitoyens ultramarins. Ces derniers attendaient une action vigoureuse dans le domaine du contrôle des prix. Beaucoup d’orateurs l’ont rappelé, le problème de la « vie chère » était au cœur des mouvements de contestation sociale qui avaient éclaté en 2009 en Guadeloupe, en Martinique et à Mayotte, et qui se sont poursuivis dans d’autres collectivités en 2010.

Ce projet de loi est donc porteur d’espérances, et ce d’autant plus que les mesures visant à lutter contre la vie chère contenues dans la loi du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer n’ont pas produit les effets escomptés sur les prix. Davantage fondée sur un principe de réglementation des prix plutôt que sur le rétablissement d’une concurrence propice à la baisse de ces prix, la LODEOM a montré ses limites.

C’est pourquoi la nouvelle approche privilégiée par le Gouvernement me semble plus pertinente. Le projet de loi s’attaque au problème de la cherté outre-mer en amont, c’est-à-dire en agissant sur la formation des prix. Il s’agit en effet d’agir sur l’environnement concurrentiel, afin de mettre un terme aux dérives monopolistiques et oligopolistiques dont les conséquences sont bien mesurées sur les étals et dans les rayons des supermarchés ultramarins. Les prix des produits alimentaires outre-mer sont de 30 % à 50 % plus élevés que dans l’Hexagone. Le prix de l’eau minérale ordinaire, par exemple, est quelquefois deux à trois fois plus élevé.

Ce constat combiné à d’autres données, toujours en défaveur de l’outre-mer – je pense notamment au revenu médian et au taux de chômage –, justifie l’exaspération de nos concitoyens vivant dans les territoires concernés.

Certes, la distribution évolue dans un cadre aux multiples contraintes - elles se résument en quelques mots : insularité, éloignement et étroitesse des marchés -, mais, si l’on ne peut pas ignorer ces spécificités et leurs conséquences économiques, elles ne doivent pas non plus être le prétexte à des pratiques abusives, comme c’est malheureusement le cas.

Par exemple, la concentration n’est en rien incompatible avec la répercussion des marges arrière sur les prix. Or, forts de leurs positions économiques, les opérateurs ne font pas ces efforts commerciaux en direction des consommateurs. Par ailleurs, l’existence fréquente d’exclusivités territoriales est un autre frein à une saine concurrence.

Dans ces conditions, le projet de loi apporte des réponses adaptées, avec notamment l’encadrement des opérations de concentration, le renforcement des pouvoirs de l’Autorité de la concurrence et l’instauration d’un « bouclier qualité-prix ».

À cet égard, on a entendu parler de risque d’économie administrée. Je précise, comme l’ont fait avec talent nos collègues rapporteurs, qu’il s’agit avant tout de régulation. Quand tous les mécanismes classiques de la concurrence ne sont pas présents pour des raisons structurelles, il revient aux pouvoirs publics de mettre en œuvre des instruments pour faciliter le jeu de la concurrence. Compenser ce déficit de concurrence préjudiciable aux consommateurs ultramarins relève bien de notre responsabilité.

Nous avons longuement débattu en première lecture de tous les dispositifs du projet de loi. L’Assemblée nationale a apporté de nombreuses modifications, sans toutefois bouleverser l’esprit général du texte. Le constat d’une cherté de la vie outre-mer est partagé autant que la nécessité d’y remédier. Ce consensus a facilité le travail de la commission mixte paritaire, et je m’en félicite. Les sénateurs et les députés se sont accordés sur l’essentiel des dispositions restant en discussion, même si l’article 11 bis ouvrant aux chambres de commerce et d’industrie la possibilité de tenir le registre du commerce et des sociétés a suscité de vifs débats.

Sur ce point, une nouvelle rédaction devrait permettre de garantir à la fois l’efficacité de la tenue des registres du commerce là où elle fait défaut et la sécurité juridique d’un régime dérogatoire au droit commun.

Mes chers collègues, aussi bien dans mon département, le Lot, qu’au Sénat, je me bats, comme beaucoup d’entre vous, pour l’égal accès au service public ou encore aux soins. Alors, naturellement, en ma qualité de membre de la délégation sénatoriale à l’outre-mer, je veux être du combat pour un égal accès aux produits de consommation courante pour tous nos concitoyens ultramarins.

Le principe d’égalité est au cœur des valeurs républicaines de notre pays. C’est pourquoi, quand il est rompu dans certains de nos territoires, il est de notre devoir de tout mettre en œuvre pour le rétablir.

En conséquence, les membres du RDSE, et notamment les radicaux de gauche, voteront les conclusions de la CMP.

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