Intervention de Roland Courteau

Réunion du 25 octobre 2012 à 9h00
Absentéisme scolaire — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Roland CourteauRoland Courteau :

Il portait en lui beaucoup d’ambitions, tant celles de l’institution que celles du tuteur…

Il faut maintenir, coûte que coûte, le lien entre l’élève et l’école.

À cet égard, je me réjouis des mesures récemment annoncées par le Gouvernement contre le décrochage scolaire, notamment la mise en place d’un référent dans les collèges et les lycées professionnels à fort taux d’absentéisme.

Ce référent sera responsable de la prévention du décrochage, des signalements d’élèves qui sortent du système, des relations avec les parents des élèves concernés et, le cas échéant, de l’aide au retour dans l’établissement.

Oui, je le répète volontiers, l’absentéisme est un mal aux multiples causes qui ne saurait connaître un seul remède. Comment maintenir un texte qui, dans un simplisme outrancier, ignore totalement la complexité du phénomène de l’absentéisme ?

Difficultés d’apprentissage, orientation par défaut, problèmes psychologiques, violence subie à l’école, difficultés sociales, exercice dissimulé d’une activité professionnelle en parallèle des études, nécessité d’assumer des responsabilités familiales dans les familles décomposées ou recomposées, phobie scolaire : mes chers collègues, le visage d’un enfant ou d’un jeune absentéiste est multiple.

J’ajoute que, si le problème complexe de l’absentéisme pouvait être résolu par un seul texte de loi, ce ne serait certainement pas par l’instauration d’une sanction financière, mesure sans aucune visée pédagogique, qui affaiblit plus encore les ressources de la famille de l’enfant absentéiste et de l’enfant absentéiste lui-même !

Qui sanctionne-t-on au juste en effet ? Les détenteurs de l’autorité parentale ? Encore faut-il qu’elle existe et, quand elle existe, qu’elle puisse s’exprimer et être entendue !

Il peut aussi arriver que des parents ne perçoivent plus l’intérêt de l’école, le sens de son enseignement, car ils ont peut-être eux-mêmes subi des difficultés scolaires. Peut-être sont-ils eux-mêmes victimes d’exclusion sociale ou souffrent-ils d’isolement. Quel message leur enverrait-on ? Un message négatif, punitif, stigmatisant ? Les sanctionner ne ferait qu’aggraver leur méfiance envers l’école, voire le rejet qu’ils peuvent développer, et ne rétablirait en aucune façon une autorité parentale en faillite.

Le dispositif Ciotti accentue la marginalisation des familles en difficulté. À cet égard, je m’inquiète particulièrement pour les 30 % de femmes chefs de famille monoparentale qui vivent en dessous du seuil de pauvreté et pour qui le prélèvement Ciotti pourrait être catastrophique.

Ce dernier est en outre doublement discriminatoire : d’une part, les familles avec un enfant unique, ne percevant pas d’allocations familiales, ne seraient pas pénalisées, contrairement aux familles nombreuses ; d’autre part, les enfants assidus de la fratrie seraient lésés injustement.

Enfin, mes chers collègues, la gratuité scolaire est un principe fondateur de l’école de la République. Pourquoi le ternir en utilisant l’argent comme un instrument de motivation ou de responsabilisation des élèves et de leurs parents ? Si l’obligation scolaire est son corollaire, elle ne se monnaye pas !

Les allocations familiales ne sont pas non plus la récompense d’une bonne éducation ; elles compensent pour partie le coût d’entretien d’un enfant, qu’il soit présent ou absent à l’école.

Pour toutes ces raisons, monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je me réjouis de voter aujourd'hui l’abrogation de la loi Ciotti. §

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