Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, étrange débat, parfois marqué par des déchirements et des polémiques, dont nous aurions été sages de faire l’économie !
Je suis persuadé que nous avons tous le désir très fort de limiter au maximum l’absentéisme, car nous savons bien qu’un élève absentéiste est un élève qui décroche et peut même être gagné par la délinquance, même si je ne lie évidemment pas absentéisme et délinquance. Dans tous les cas, c’est un élève en danger, et le devoir de tous est de l’aider à sortir de cette situation.
Depuis toujours, des tentatives ont été faites, d’une part, pour faire face à l’absentéisme – déjà, la loi du 28 mars 1882, qui a érigé l’obligation scolaire en principe républicain, liait celle-ci à la lutte contre l’absentéisme – et, d’autre part, pour responsabiliser l’ensemble du corps social et plus particulièrement les parents, qui sont évidemment les premiers concernés.
Le principe de l’obligation scolaire a été réaffirmé et sa mise en œuvre actualisée dans l’ordonnance du 6 janvier 1959.
Sous le gouvernement de M. Raffarin, de nouvelles propositions sont formulées, notamment par le ministre de l’éducation nationale d’alors, M. Ferry et, dans le cadre du plan de cohésion sociale, par M. Borloo, dans une approche pragmatique. Un système de contrats passés entre les familles et les services de l’État est mis en place.
Nous avons constaté que peu de ces contrats été passés et que l’absentéisme, lui, continuait à progresser, d’où une nouvelle tentative, cette fois sur l’initiative de M. Éric Ciotti, qui, en tant que président de conseil général, a aussi une expérience dans ce domaine.
C’est ainsi qu’a été mis en place un dispositif gradué, dont l’objectif n’est évidemment pas de supprimer les allocations familiales – sur ces travées aussi, nous convenons tous de leur nécessité et nous ne voulons pas en priver les familles ! –, mais de bien faire comprendre aux parents que, s’ils ne prennent pas, aux côtés de tous ceux qui sont prêts à les accompagner, leur part dans l’éducation de leurs enfants, ils seront sous la menace, mais en ultime recours seulement – ultima ratio, comme on disait dans le temps –, d’une interruption du versement de ces allocations.
Mes chers collègues, je suis étonné que certains aient invoqué, pour critiquer ce dispositif, le très faible nombre de suspensions ou de suppressions. C’est heureux ! L’objectif n’est absolument pas, je le répète, de supprimer les allocations familiales, mais de remettre les enfants à l’école, qu’ils n’auraient jamais dû quitter !
J’ajoute, n’en déplaise à Mme Cartron et à M. Assouline, que ce dispositif a seulement deux ans puisqu’il est issu d’une loi de septembre 2010. Le Gouvernement préparant un texte dit de refondation de l’école, il aurait été parfaitement normal que, comme dans la loi de 1882, soient présentées dans ce texte de nouvelles mesures pour faire face à l’absentéisme. Contre ce fléau aux origines, en effet, très diverses, vous auriez peut-être pu présenter alors un dispositif différent, mais au moins aurions-nous eu le temps, avant que le texte ne vienne en discussion, de faire le bilan de l’application de la loi Ciotti.
Actuellement, il n’y a pas de bilan exact et incontesté de cette loi. Le comité d’évaluation prévu n’avait pas encore été mis en place. Il aurait été parfaitement légitime de votre part de l’installer, de constater ses résultats et d’appuyer ensuite, éventuellement, de nouvelles propositions sur ceux-ci.
Au lieu de cela, nous débattons aujourd’hui, parfois même en nous déchirant, alors que nous sommes tous évidemment d’accord pour préserver dans toute la mesure du possible les allocations familiales et pour faire en sorte que les enfants aillent à l’école.
Mes chers collègues, nous ne voterons pas la présente proposition de loi.