J'ai écouté avec attention et intérêt chacun des intervenants qui se sont exprimés sur cette proposition de loi de notre collègue et ami Gérard Roche. Les arguments qui ont été exposés ici l’avaient été en commission, même s’ils ont été développés de façon plus détaillée. Je reviendrai sur un certain nombre d’éléments sur lesquels j’avais alors eu l’occasion de m’exprimer.
On confond ici deux problèmes qui appellent chacun un traitement prioritaire.
Premier problème, le financement par les départements des dépenses sociales, problème crucial s’il en est, comme chacun l’a souligné. Nombre de départements, pour des raisons que nous aurons l’occasion d’analyser une autre fois, mais qui tiennent notamment aux dépenses sociales dont ils ont la charge, connaissent des difficultés financières.
Second problème, de fond celui-ci, le financement d'une partie de la perte d'autonomie, notamment celle des personnes âgées dépendantes. Cette question de la perte d'autonomie doit faire l'objet d'une approche systémique, c'est-à-dire que l'on doit aussi prendre en considération, dès lors que le financement est un jeu, l'ensemble des solutions envisageables – je pense en particulier à la perte d'autonomie des personnes handicapées.
Dès l’origine, quand il est apparu que la dépendance nécessiterait des financements considérables, alors même que les moyens dont disposaient les départements diminuaient, il a été décidé que seul serait traité le cas des personnes âgées dépendantes.
S’agissant des solutions, il suffit de se plonger dans tout ce qui a été écrit sur le sujet. Je vous rappelle que, à la suite des conférences qui se sont tenues en régions dans le cadre du grand débat national sur la dépendance, quatre rapports extrêmement importants ont été rendus, fruit du travail de l'ensemble des acteurs s'intéressant à la dépendance – organisations syndicales et patronales, associations, corps médical, ministères. À cette occasion, tout a été écrit, tout a été proposé, et dans un luxe de détails.
Le Conseil économique, social et environnemental a, lui aussi, rendu un avis sur la question et l’ancien Président de la République avait également demandé des rapports.
Enfin, les parlementaires ont également formulé des propositions : notre ancienne collègue députée Valérie Rosso-Debord et notre ancien collègue Alain Vasselle, alors rapporteur général de la commission des affaires sociales au Sénat, avaient l’un et l’autre rédigé un rapport.
Certaines des propositions formulées nous avaient fait dresser les cheveux sur la tête. Je pense notamment à l’idée quelque peu radicale avancée par Mme Rosso-Debord de ne plus attribuer l’APA aux personnes classées dans les groupes iso-ressources 4 de la grille AGGIR. Effectivement, ce faisant, on évacuait entre 60 % et 70 % des problèmes en mettant à contribution d’autres payeurs : les caisses de retraite, les familles, ou autres. C’était un peu facile !
Quant à notre ancien collègue Alain Vasselle, il proposait dans son rapport de rétablir le recours sur succession, à l’instar de ce que nous avions connu avec la prestation spécifique dépendance.
Dans d’autres rapports, il était proposé que les assurances privées interviennent d'une manière ou d'une autre dans le financement de la dépendance.
En quelque sorte, la palette complète des solutions était sur la table et il n’y avait plus qu’à piocher.
Pour ma part, je reproche au gouvernement précédent de ne pas avoir sauté le pas, de ne pas avoir présenté ses propres propositions et de ne pas avoir provoqué un débat au Parlement sur cette question, alors qu’il avait à sa disposition les conclusions des différents rapports que je viens de citer.
Alors, je comprends bien que cette proposition de loi de notre collègue Gérard Roche fasse vibrer nos cœurs de président de conseil général, de vice-président de conseil général chargé de l'action sociale ou de simple conseiller général.
Comme je l'expliquais récemment en commission, alors que j'étais vice-président du conseil général de mon département, on me surnommait Attila : pour financer l’APA, la PCH et le RMI, je prenais tout ! Dans le même temps, les départements demandaient la clause générale de compétence pour financer le sport et la culture...
Cette question du financement de la dépendance est un vrai problème qui doit être non pas évacué, mais traité dans l'acte III de la décentralisation. C'est l'un des volets sur lesquels nous devons nous pencher.
Par ailleurs, on nous a annoncé que, d’ici à 2014, nous serions amenés à examiner un projet de loi relatif à la dépendance. Je ne crois pas que ce soient des paroles en l’air. Ce texte nécessitera un travail de l’ensemble des parlementaires, ici comme à l’Assemblée nationale. Nous ne pourrons pas nous focaliser simplement sur l’APA, nous devrons aussi nous pencher sur le financement du maintien à domicile des personnes en état de dépendance.
D’ailleurs, cette dernière question en soulève deux autres : d’une part, on ne peut envisager de maintenir à leur domicile des personnes âgées dépendantes – 84 % de nos concitoyens veulent pouvoir rester chez eux – sans prévoir un financement de leur prise en charge médicale et médicosociale ; d’autre part, la nécessité de services de proximité est à mettre en lien avec la désertification médicale.