Monsieur le sénateur, vous interrogez M. le ministre de l’intérieur sur l’avenir de la loi du 3 janvier 1969 applicable aux gens du voyage. Comme vous le rappelez, celle-ci se substitua à la loi du 16 juillet 1912 relative au carnet anthropométrique.
Aujourd’hui, plus de quarante ans après sa promulgation, le régime institué par cette loi mérite d’être revu.
Cette nécessité fait quasiment l’unanimité sur les bancs du Parlement. Permettez-moi de citer quelques initiatives.
Le 26 janvier 2011, l’Assemblée nationale a débattu d’une proposition de loi déposée par Pierre-Alain Muet, Jean-Louis Touraine et Dominique Raimbourg, au nom du groupe socialiste, radical et citoyen.
En mars 2011, la commission des lois concluait les travaux d’une mission d’information de Didier Quentin, Charles de La Verpillière et Dominique Raimbourg. Le rapport de cette mission préconisait, notamment, la suppression de la condition de résidence de trois ans pour accéder au droit de vote et la suppression des titres de circulation.
Plus récemment, à l’été 2012, deux propositions de lois ont été déposées. La sénatrice Esther Benbassa propose d’abroger la loi de 1969 et le sénateur Pierre Hérisson traduit en proposition de loi son rapport de juillet 2011 intitulé Gens du voyage : pour un statut proche du droit commun.
Après la décision rendue le 5 octobre dernier par le Conseil constitutionnel, nous sommes désormais dans un contexte différent. En effet, le Conseil constitutionnel, saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité, a déclaré contraires à la Constitution trois dispositions de la loi de 1969.
Premièrement, le carnet de circulation a été censuré parce qu’il constitue une différence de traitement entre les personnes concernées par la détention d’un titre de circulation liée à une condition de ressource et que cette différence de traitement n’est pas en rapport direct avec les fins civiles, sociales, administratives ou judiciaires poursuivies par la loi.
Deuxièmement, la peine d’un an d’emprisonnement frappant les personnes circulant sans carnet de circulation a été censurée. Le Conseil constitutionnel a considéré que cette peine porte une atteinte disproportionnée à l’exercice de la liberté d’aller et de venir au regard du but recherché.
Enfin, l’obligation de justifier de trois ans de rattachement ininterrompu dans la même commune pour être inscrit sur une liste électorale a été censurée, cette disposition portant atteinte à l’exercice des droits civiques des citoyens.
Les autres dispositions de la loi sont déclarées conformes à la Constitution, notamment l’obligation de rattachement des gens du voyage à une commune, le plafonnement à 3 % de la population de chaque commune du nombre de gens du voyage qui y sont rattachés et l’existence d’un livret de circulation propre aux gens du voyage.
Le Gouvernement poursuit sa réflexion, en concertation avec les associations représentatives des gens du voyage, pour faire évoluer le cadre légal et réglementaire qui est applicable à ces derniers. Le Parlement sera évidemment associé à cette modification importante de la législation.