En 1962, les projections du film Octobre à Paris de Jacques Panijel sont interdites. Le pouvoir en place, puis les gouvernements successifs organiseront l’oubli autant que possible et aussi longtemps que possible.
Il faudra attendre l’arrivée de la gauche au pouvoir – vingt ans plus tard ! – pour que, le 17 octobre 1981, le journaliste Marcel Trillat diffuse, au cours du journal télévisé du soir, un reportage sur ce sujet, faisant soudain rejaillir ces événements dans la mémoire collective.
En 1984, c’est le romancier Didier Daeninckx qui, dans son livre Meurtres pour mémoire, évoque ces événements, au fil d’une intrigue où s’entrecroisent l’histoire de la Résistance et celle du 17 octobre.
Le 17 octobre 1991, une première manifestation d’ampleur a lieu dans le cadre de la commémoration de ces événements.
Enfin, et c’est le premier acte de reconnaissance fort, le 23 septembre 2001, le Conseil de Paris vote la pose d’une plaque commémorative, qui est inaugurée le 17 octobre suivant. La ville de Gennevilliers, quant à elle, inaugure, le 19 février 2007, une place du 17 octobre 1961.
Le 50e anniversaire de ce drame marque une étape plus importante encore dans ce parcours mémoriel. La mobilisation grandit et s’élargit. Seuls les plus réactionnaires continuent de donner de la voix pour déclarer que ces commémorations constituent une « provocation » et qu’il n’est pas question que la France présente ses excuses et reconnaisse le crime.
Du reste, dans la même veine, le maire de Neuilly, Jean-Christophe Fromantin, refuse de s’associer à une cérémonie organisée par les maires de Nanterre, Argenteuil, Asnières, Gennevilliers, Colombes et d’autres villes pour rendre hommage aux victimes du massacre du 17 octobre sur le pont de Neuilly. Il affirme simplement qu’il s’en tient « au calendrier des commémorations de l’État » et que Neuilly n’a « jamais été associé à ce terrible événement par le passé ».
Même si, à l’instar de la fondation pour la mémoire de la guerre d’Algérie, dotée de moyens publics importants et placée sous la coupe d’associations nostalgiques, nombreux sont ceux qui, à droite et à l’extrême droite, tentent encore de vanter les « aspects positifs de la colonisation », l’idée d’une liberté d’accès aux archives pour tous fait de plus en plus son chemin.
Toutefois, il faut le noter, les forces de la réaction §n’ont pas encore tout à fait renoncé à leur travail de déni de l’histoire.
C’est évidemment le cas du Front national, dont les représentants étaient et sont toujours à la pointe de l’abjection, sur ce sujet comme sur bien d’autres. Mais il faut également relever les propos extrêmement navrants venus des rangs de la droite. Je songe, notamment, aux réflexions du chef de file des députés UMP. À propos des déclarations de François Hollande au sujet de la répression sanglante du 17 octobre 1961, Christian Jacob a estimé qu’il était « intolérable de mettre en cause la police républicaine et avec elle la République tout entière ».