Intervention de Yves Pozzo di Borgo

Réunion du 23 octobre 2012 à 15h00
Reconnaissance de la répression d'une manifestation à paris le 17 octobre 1961 — Adoption d'une proposition de résolution

Photo de Yves Pozzo di BorgoYves Pozzo di Borgo :

Voilà l’absurdité de l’histoire ! Pourquoi ne commémore-t-on pas non plus ces drames ?

Qui se souvient de ces victimes ? N’ont-elles pas, elles aussi, droit au souvenir ? On ne saurait demander la reconnaissance du 17 octobre sans demander à l’Algérie de réaliser ce même travail sur elle-même. Il faut être deux pour faire une guerre, et nombreuses sont les familles, françaises et algériennes, à avoir été frappées par ce qui s’est produit, il y a plus d’un demi-siècle, au sud de la Méditerranée.

Cette question, si elle est légitime, n’aurait pas dû être traitée de cette manière. Il ne s’agit pas de nous satisfaire d’avoir, dans notre coin, reconnu nos torts, non plus que de nous complaire dans une certaine autosatisfaction. Il ne s’agit pas davantage d’inaugurer une quelconque stèle pour y déposer des fleurs à la faveur du calendrier commémoratif. Le Conseil de Paris peut le faire, pas le Parlement !

Le Gouvernement a été vertement critiqué pour son goût prononcé pour les commissions. Or, mes chers collègues, s’il y a un sujet sur lequel il aurait eu raison de recourir à cette méthode, c’est bien celui des reconnaissances et des commémorations !

Aussi, le groupe de l’Union centriste et républicaine, dans sa grande majorité, n’est pas favorable à la proposition de résolution telle qu’elle nous est présentée. En revanche, nous demandons qu’une large concertation soit organisée en association avec l’Algérie, par exemple par le biais du groupe d’amitié. C’est seulement en avançant ensemble, dans la réciprocité et le parallélisme, que nous parviendrons peut-être à trouver, chacun de notre côté de la mer, les justes mots vers la route du pardon mutuel.

C’est la seule voie raisonnable pour rendre justice à l’ensemble des victimes de toutes les exactions commises pendant cette guerre. C’est la seule voie possible pour parvenir à rendre une justice, même toute symbolique, aux familles françaises et algériennes qui continuent, de part et d’autre de la mer et du siècle, à souffrir des zones d’ombre, des mensonges d’État – des deux côtés – et du sang inutilement versé.

Dimanche dernier, Jean-Louis Borloo a lancé un appel aux progressistes et aux patriotes tolérants. Dans un monde qui change, les représentations de l’histoire changent également. Nous devons tendre la main à nos amis algériens dans la voie du rassemblement et de la pacification.

Rappelons-nous ces mots écrits par Albert Camus dans une lettre adressée en 1955 à un militant algérien – pardonnez, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon émotion – : « L’essentiel est de maintenir, si restreinte soit-elle, la place du dialogue encore possible. […] Et pour cela, il faut que chacun de nous prêche l’apaisement aux siens. […] Si vous autres, démocrates arabes, faillissez à votre tâche d’apaisement, notre action à nous, Français libéraux, sera d’avance vouée à l’échec. »

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