Intervention de Michel Berson

Réunion du 8 novembre 2012 à 15h00
Journée nationale en mémoire des victimes de la guerre d'algérie et des combats en tunisie et au maroc — Article 1er

Photo de Michel BersonMichel Berson :

Fatigué que l’on ressasse qu’il était l’homme du 18 juin 1940, le général de Gaulle déclara à son interlocuteur, Jean Lacouture : « Eh quoi, rien depuis lors ? Et l’homme du 25 août 1944 ? Et celui du 8 janvier 1959 ? Et celui du 19 mars 1962, point final à vingt-six ans de guerres ininterrompues ? » J’y insiste : « point final d’une guerre », précisait-il.

Bien sûr, nous le savons, le choix d’une date de commémoration de la fin de la guerre suscite encore, cinquante ans après, bien des controverses. Face aux oppositions, la recherche du consensus paraît toujours un objectif difficile à atteindre, tant les histoires personnelles et collectives de ceux qui furent envoyés dans la tourmente des combats et de ceux qui avaient leurs racines et leur vie en terre algérienne semblent inconciliables.

Personne ne le conteste, la signature des accords d’Évian n’a pas mis un terme immédiat à la guerre d’Algérie. Des enlèvements et des tueries ont été à déplorer jusqu’en juillet 1962. Puis, à la longue liste des morts et des blessés qui furent dénombrés parmi les militaires français et les populations civiles, se sont ajoutées les souffrances du déracinement et de l’exil des rapatriés d’Algérie et des harkis.

Même si cinquante ans se sont écoulés depuis ce tragique épisode de notre histoire nationale, les blessures restent vives et les mémoires plurielles. C’est donc à nous qui avons la charge de la représentation nationale de tenter de tourner cette page douloureuse et de retisser les liens de fraternité entre tous ceux qui eurent à souffrir dans leur chair comme dans leur cœur des conditions dans lesquelles la décolonisation fut engagée en Algérie.

Rien ne serait pire que d’opposer l’espoir tant attendu d’une paix durable entre deux nations au sentiment d’abandon que ressentirent ceux qui redoutaient les conséquences d’un désengagement de la France.

Rien ne serait pire que de renvoyer dos à dos les soldats et les jeunes du contingent, qui ne firent qu’exécuter les ordres, et ces hommes et ces femmes qui pouvaient légitimement revendiquer à la fois la nationalité française et leur attachement à l’Algérie.

Rien ne serait pire que de privilégier une mémoire, celle du monde combattant, au détriment d’une autre, celle des Français d’Algérie.

Aussi la responsabilité qui incombe désormais à la représentation nationale est-elle de renouer les fils d’une histoire nationale, à laquelle nous nous rattachons tous, autour d’une date commémorative, au-delà des épreuves subies, des peines endurées et des appréciations différentes que nous pouvons avoir les uns et les autres sur cet aspect de notre histoire.

La reconnaissance officielle de la date historique du 19 mars comme journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d’Algérie et des combats qui ont eu lieu en Tunisie et au Maroc s’inscrit dans une volonté de réconciliation. Cette reconnaissance porte un message de paix et d’espoir, qui permettra aux mémoires, hier désunies, de se retrouver, afin que chacun puisse affronter les défis d’aujourd’hui.

Mes chers collègues, tel est le sens de l’article 1er. Pour toutes ces raisons, les membres du groupe socialiste le voteront.

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