Intervention de Jean-François Humbert

Réunion du 8 novembre 2012 à 15h00
Journée nationale en mémoire des victimes de la guerre d'algérie et des combats en tunisie et au maroc — Article 2

Photo de Jean-François HumbertJean-François Humbert :

Les questions de mémoire sont toujours délicates pour les parlementaires que nous sommes. En effet, les sujets mémoriels sont souvent abordés par le biais de considérations personnelles ou sous la pression de tel ou tel organisme. Certains sont partisans d’une date, d’autres défendent les revendications d’une association, d’autres encore s’activent pour faire reconnaître tel ou tel préjudice commis à l’époque.

Cependant, nous faisons tous le même triste et regrettable constat lors des rassemblements devant les monuments aux morts : peu nombreux sont ceux qui assistent à ces cérémonies, surtout parmi les jeunes citoyens. Bien sûr, cette désaffection progressive pour les commémorations s’explique d’abord par la disparition des derniers acteurs et des témoins directs des conflits mondiaux.

Le devoir de mémoire et la transmission de notre patrimoine historique et de nos valeurs n’ont pas de prix. C’est la garantie des fondements de notre socle républicain. Ces commémorations sont importantes pour notre République, car elles visent à rassembler nos concitoyens afin qu’ils puissent, ensemble, toutes générations confondues, rendre hommage à ceux qui ont sacrifié leur vie pour la défense des valeurs et des idéaux de la France.

Nous qui nous attristons de voir les monuments aux morts désertés, nous sommes en train de nous déchirer à propos d’une date. Il ne nous revient pas d’écrire l’histoire. Le rôle d’un élu n’est pas de jouer de telle ou telle interprétation de l’histoire. Le rôle d’un parlementaire est de participer à la transmission de l’histoire et d’assurer sa compréhension.

C’est aussi en tant que membre de la commission de la culture et de l’éducation que je m’adresse à vous. Pardonnez-moi, mais je serais plus enclin à souhaiter que nos jeunes sachent ce qu’a représenté la guerre d’Algérie pour tous les Français, peu importe leur statut de l’époque, peu importe la rive de la Méditerranée sur laquelle ils ont vécu. Je forme le vœu que ces jeunes apprennent ce que signifie une guerre, afin qu’ils comprennent la chance qu’ils ont de vivre dans un pays en paix, et en profitent ; je me permets d’y insister, car, en 1962, j’étais en classe de CM2. C’est à cette seule condition qu’ils pourront rendre hommage à ceux qui se sont battus pour eux tout au long de l’histoire de France. Je souhaite que nos jeunes connaissent l’histoire, sa réalité, ses affres, ses victoires, ses valeurs, et je souhaite qu’ils n’en aient pas honte. Pour cela, il importe qu’ils en connaissent toutes les dates et leurs symboles.

Quel message adressons-nous aujourd’hui à nos jeunes ? Que signifie l’inscription à l’ordre du jour de la proposition de loi relative à la reconnaissance du 19 mars comme journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d’Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc ? Nos jeunes ne vont-ils pas retenir qu’il est acceptable d’user des règlements intérieurs de nos assemblées pour faire adopter à tout prix une proposition de loi votée il y a dix ans et huit mois par une Assemblée nationale qui a connu deux renouvellements depuis ? Qu’il est judicieux pour l’apaisement des mémoires de voter une proposition de loi qui fait rejaillir des douleurs profondes ? Qu’il est républicain de raviver des clivages au sein du monde combattant ? Qu’il est respectueux d’agir sans une large concertation avec l’ensemble des associations ?

Pour rédiger votre rapport au nom de la commission des affaires sociales, vous n’avez auditionné que quelques responsables d’association. N’était-il pas nécessaire de rencontrer les associations représentatives de l’ensemble du monde combattant, réunies au sein du groupe des douze ?

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