L’examen de ce tableau, mes chers collègues, n’est pas rassurant et atteste de l’ampleur des déficits cumulés par la sécurité sociale et transmis à la CADES. Cette dette est, au demeurant, le fruit de choix politiques et économiques auxquels nous ne souscrivons pas.
La multiplication des mesures d’exonérations de cotisations sociales et d’exemptions d’assiettes ont considérablement réduit les ressources allouées à notre protection sociale, le dernier exemple étant sans doute l’exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires réalisées dans le cadre de la loi TEPA. La suppression de ce dispositif à l’occasion de l’adoption par le Parlement de la loi de finances rectificative pour 2012 a permis de susciter plus de 3 milliards d’euros de ressources nouvelles, au profit de la sécurité sociale.
Pour autant, mon intervention portera non pas sur ce sujet, mais sur le Fonds de réserve des retraites. Selon les informations communiquées le 27 août dernier sur sa situation économique, son actif s’élevait, au 30 juin 2012, à 34, 4 milliards d’euros. Or la valeur de l’actif net du Fonds était, au 31 décembre 2011, de 35, 1 milliards d’euros, soit une réduction de 0, 7 milliard d’euros en six mois.
Cette réduction aurait pu être plus importante et le rendement être donc encore plus dégradé si la Banque centrale européenne n’avait pas engagé des opérations de refinancement à long terme. Cette décision aurait permis une progression de la valeur des actions de la zone euro de 10 % à 12 %. Toutefois, cette amélioration risque d’être toute relative et de courte durée puisque la crise bancaire espagnole a, de son côté, entraîné des corrections à la baisse.
On le voit bien, le devenir du Fonds de réserve des retraites est étroitement lié, en raison de la composition de son portefeuille, à la situation des marchés financiers. Bien qu’il concoure au niveau élevé de protection sociale de nos concitoyens en reversant 2, 1 milliards d’euros à la CADES chaque année entre 2011 et 2024, le Fonds de réserve des retraites est le seul organisme qui tire ses ressources de la spéculation. En somme, mieux la Bourse se tient, c’est-à-dire plus elle suscite de spéculation, avec les conséquences que cela entraîne sur l’emploi, plus les rendements du Fonds de réserve des retraites sont bons ! Néanmoins, je vous pose la question : qu’adviendrait-il si, demain, les marchés financiers s’effondraient ?
En outre, je dois dire que j’ai été particulièrement choqué à la lecture du rapport annuel du Fonds de réserve des retraites. Celui-ci se félicite de la constitution d’un gouvernement technique d’union nationale à Athènes au début du mois de novembre, avec à sa tête l’ancien gouverneur de la Banque centrale grecque et ex-vice-président de la BCE, ainsi que du départ forcé, quelques jours plus tard, du président du Conseil italien, remplacé lui aussi par un technicien, ancien commissaire européen, deux changements qui auraient amorcé un « retour au calme ».
Ce rapport sous-tend donc l’idée qu’il faudrait, pour rassurer les marchés financiers et, par voie de conséquence, garantir le bon rendement du fonds, que les gouvernements soient progressivement remplacés par des gouvernements techniques, en dépit des orientations et des choix politiques exprimés par les peuples. Nous ne pouvons accepter pareille déclaration, qui remet en cause les fondements même de notre démocratie !
Nous ne souscrivons pas davantage à l’idée qu’il faudrait appliquer partout en Europe une politique d’austérité de nature à rassurer les spéculateurs pour que le rendement du Fonds de réserve des retraites progresse.
Au contraire, nous pensons que, pour réduire la dette sociale sur la durée, il faut rompre avec cette logique et investir dans l’emploi.
Pour répondre à notre excellent collègue Jean Desessard, si l’on veut tenir compte des mutations de la société, alors, oui, il faut innover et taxer la richesse financière des entreprises. On ne dira jamais assez que, selon l’INSEE, et contrairement aux chiffres cités par M. Serge Dassault, les entreprises non financières versent deux fois plus de dividendes aux actionnaires et d’intérêts aux banques que de cotisations sociales ! Je n’invente rien : ce sont les chiffres de l’INSEE pour 2011.
Pour finir, nous nous abstiendrons sur cet article.