Séance en hémicycle du 12 novembre 2012 à 21h45

Résumé de la séance

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  • PLFSS

La séance

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La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

En application de l’article 45, alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée pour l’examen de la proposition de loi organique relative à la nomination des dirigeants de BPI-Groupe, déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale le 8 novembre 2012.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2013.

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Jean Desessard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Monsieur le président, madame la ministre de la santé, mes chers collègues, au début de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, l’impératif d’un redressement des comptes sociaux qui ne soit pas pour autant effectué au détriment de la santé des Français est très souvent revenu dans les propos. Cette idée forte – cet « élément de langage », comme l’on dit maintenant – a été tellement répétée que je me suis demandé si c’était de l’info ou de l’intox.

Bien sûr, nous partageons le souci de répondre aux besoins présents et futurs de nos concitoyens, mais une telle attitude ne relevait-elle pas de la méthode Coué ? Qu’allions-nous proposer de différent ? Comment allions-nous pallier le déficit chronique de la sécurité sociale, ce « marronnier » annuel, comme diraient les journalistes ? Comment allions-nous réagir aux envolées lyriques sur notre incapacité à y faire face ?

Eh bien, je dois dire qu’à la lecture du projet de loi je me suis senti rassuré. En effet, dans la suite logique du projet de loi de finances rectificative pour 2012, adopté cet été, l’accent a été mis sur la participation de chacun en fonction de ses moyens et sur la mise à contribution de formes de revenus jusque-là peu – voire pas – sollicitées, afin de ne pas privilégier une nouvelle fois déremboursements et autres taxations sur les consultations médicales.

L’augmentation de la taxe sur les stock-options pour les entreprises et les bénéficiaires ou encore celle du taux du forfait social sont de bonnes mesures : elles dissuadent les entreprises de verser de trop fortes « rémunérations complémentaires », à l’instar de celles dont on parle souvent depuis 2008, à savoir les bonus des traders.

Toutefois, d’autres formes de contributions doivent être trouvées, de même que d’autres exceptions ou « niches sociales » doivent être minorées.

Parmi les pistes, je pense bien sûr à celles défendues par ma collègue Aline Archimbaud pour taxer des produits dont l’abus est nocif pour la santé, faire évoluer les comportements et permettre des actions de prévention. Ces actions, aux yeux de certains, apparaissent comme des coûts supplémentaires au lancement, mais, à terme, elles viennent diminuer les coûts de prise en charge des maladies auxquelles ces produits concourent.

Ainsi que le souligne le dossier de presse de présentation du projet de loi de financement de la sécurité sociale, la « progression des besoins de soins résulte notamment d’un nombre croissant de patients soignés pour des pathologies lourdes ou chroniques », comme les cancers.

Il en va un peu de même de notre « problème » économique et écologique : les investissements dans la transition écologique peuvent apparaître comme un luxe en temps de crise, alors même qu’ils lui apportent une réponse.

Bref, en matière de santé comme ailleurs, il s’agit d’anticiper, et de ne pas le faire trop tard.

Mes chers collègues, je vous entends déjà me rétorquer que vous êtes tous écologistes !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Mais il y a deux catégories d’écologistes : ceux qui souhaitent agir tout de suite et ceux qui veulent reporter l’action à demain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Anticiper est d’autant plus nécessaire quand on sait que les scénarios de réduction des déficits du PLFSS se fondent sur des hypothèses de croissance et d’augmentation de la masse salariale, pour 2013 et jusqu’à 2017, largement sujettes à caution.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Mon cher collègue, nous essaierons de faire mentir les chiffres !

Je ne développerai pas plus avant ces considérations d’ordre général sur les recettes.

S’agissant maintenant des dépenses, à quoi a-t-on décidé de les affecter ? Quelles priorités, quelle vision de la société peut-on lire dans les orientations prises ?

Avec Aline Archimbaud, nous nous sommes répartis l’examen des quatre branches : tandis qu’elle étudiait les dispositions du projet concernant la santé et les accidents du travail, je travaillais sur celles relatives à la vieillesse et à la famille. J’aurais pu être content, car, sur ces deux dernières parties, il n’y avait pas grand-chose à dire, et peu de sujets à traiter. Mais peut-on être satisfait pour autant ? Au contraire, le moindre développement des branches vieillesse et famille traduit un léger malaise, celui de ne toujours pas pouvoir accorder à ces postes l’attention qu’ils exigent.

Commençons, mes chers collègues, par la branche vieillesse. J’y inclurai la question des retraites et des contributions nouvellement demandées aux retraités ; vous comprendrez aisément pourquoi.

Dans cet hémicycle, il y a une quinzaine de jours, nous avons examiné la proposition de loi de notre collègue Gérard Roche tendant à élargir la contribution de solidarité pour l’autonomie aux travailleurs non salariés et aux retraités et à compenser aux départements la moitié de leurs dépenses d’allocation personnalisée d’autonomie. Intervenant alors dans le débat, j’avais insisté sur la « caducité » de cette proposition, eu égard à l’article 16 du présent projet de loi.

La contribution des retraités a beaucoup été décriée lors de l’examen du texte de M. Roche à l’Assemblée nationale et ici même. D’ailleurs, dans la rue, beaucoup nous ont interpellés. Pourtant, aujourd’hui, les personnes âgées bénéficient, en moyenne, d’un niveau de vie proche de celui des actifs, et la mesure ne concerne pas les petites retraites. Mais, bien sûr, cela ne se sait pas assez…

Il ne s’agit pas de nier les difficultés rencontrées par nombre des retraités. Pensons notamment aux retraités agricoles, dont les pensions restent plus faibles que la moyenne et qui, pour pouvoir accéder à leurs droits, doivent justifier d’un seuil d’années de cotisation qu’on n’exige pas des autres professions, alors même que leurs horaires hebdomadaires ont largement dépassé les 35 heures et que la convergence de leur niveau de vie avec celui des autres actifs – laquelle est un des objectifs de la politique agricole commune – est loin d’être acquise. D’ailleurs, mon collègue Joël Labbé fera des propositions à ce sujet.

Pour tenir compte du spectre important de la situation des retraités, qui est une réalité, je présenterai un amendement, déposé par les membres de mon groupe, visant à introduire une progressivité dans le montant de la contribution de solidarité, mesure qui nous paraît plus juste et qui devrait également inspirer la CSG.

Toujours à ce sujet, je vous rappelle la situation des personnes en fin de parcours professionnel qui ne trouvent pas d’emploi et qui ont acquis suffisamment de trimestres, mais qui n’ont pas atteint l’âge légal de la retraite. L’abandon de l’allocation équivalent retraite au 1er janvier 2011 n’a été que partiellement comblé par la mise en place de l’allocation transitoire de solidarité. J’espère que l’examen prochain du projet de loi de finances permettra à nouveau d’évoquer ce point.

J’en viens maintenant à la branche famille.

Les dispositions la concernant sont peu nombreuses dans le projet de loi. Plusieurs membres du conseil d’administration de la Caisse nationale des allocations familiales l’ont regretté. D’ailleurs, la CNAF a émis un avis défavorable sur le texte, essentiellement, semble-t-il, en raison d’un décalage de calendrier, une avancée vers une meilleure adéquation des dispositifs aux besoins des familles nous ayant été promise lors de la conférence sociale.

À cet égard, l’article 71 du texte, qui prévoit d’étendre les expérimentations du versement en tiers payant menées par le conseil général de l’Essonne, est intéressant puisqu’il permet aux familles à revenus modestes de ne pas faire l’avance des frais pour la garde de leurs enfants. D’ailleurs, nous présenterons des amendements visant à s’assurer que les conditions seront réunies pour réussir ces expérimentations, notamment sur les territoires sous tension, où les offres de garde sont insuffisantes.

C’est de toutes ces questions qu’il conviendra de discuter, s’il nous est permis d’examiner aussi bien le volet recettes que le volet dépenses du présent projet de loi…

Mes chers collègues, j’espère que nous pourrons évoquer ces sujets !

Mme Laurence Cohen, par un geste, exprime son interrogation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

En conclusion, j’aimerais ouvrir quelques pistes de réflexion.

Dans ce projet de loi, nous essayons autant que possible de traduire une certaine vision de la société. C’est, par exemple, le sens des propositions de nouvelles recettes, que j’évoquais tout à l’heure, découlant de la taxation de produits dont l’abus participe à une dégradation de l’état de santé.

Mais, pour bon nombre de nos concitoyens, cette séquence du PLFSS peut paraître peu compréhensible. En effet, elle semble procéder à des comptes d’apothicaires – ce qui, du reste, nous ne nous éloigne pas trop du sujet !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Nous devrions donc nous astreindre à un effort de lisibilité et, peut-être, pour cela, envisager, à terme, l’examen de ce type de textes à la lumière d’indicateurs sensibles de notre société, comme l’indice de santé sociale. Il s’agit de mesurer, en fonction des âges de la vie – et bien en fonction de ce critère –, si les besoins fondamentaux sont satisfaits et, par là même, de sortir des oppositions entre « retraités », « actifs » et « jeunes » et de rejeter les corporatismes, lesquels, se fondant sur le fantasme de privilèges supposés, conduisent à monter les gens les uns contre les autres.

Le PLFSS doit traduire une vision du vivre-ensemble ; il doit unifier pour construire un projet commun.

Permettez-moi d’adresser quelques mots à mes collègues siégeant sur les travées de gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

La société d’aujourd’hui connaît une mutation. Nous ne sommes plus au lendemain de la guerre. Le monde du travail a changé ; la place du travail a changé. Le temps où l’on exerçait la même activité tout au long de sa vie est révolu. Dès lors, on est bien obligé d’envisager les cotisations sur une autre base que la masse salariale ; on doit bien tenir compte de la santé environnementale, et envisager cette mutation économique.

Par conséquent, vous avez raison, mes chers collègues, il ne faut pas tout abandonner. Mais il faut quand même aussi réfléchir au nouveau contrat social !

Lors du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale, dont je souhaite, madame la ministre, qu’il soit porteur d’une vision d’avenir, nous devons retrouver le nouveau pacte de la sécurité sociale, de la santé sociale, le nouveau contrat de solidarité sociale, pour tenir compte de cette mutation économique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

M. Jean Desessard. Si nous voterons le texte qui est soumis à notre examen, nous serons attentifs à l’avènement d’un projet de sécurité sociale qui tienne compte des mutations économiques, sociales et écologiques de notre société.

Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en débattant du projet de loi de financement de la sécurité sociale, le Parlement exerce chaque année une prérogative essentielle que la Constitution ne lui reconnaît d’ailleurs que depuis seize ans. Comme chaque année, je ne peux m’empêcher de penser avec une certaine reconnaissance au Président Jacques Chirac, à Alain Juppé et à Jacques Barrot, qui prirent l’initiative de ce progrès majeur des droits du Parlement.

Il nous appartient d’être à la hauteur de cette grande ambition, qui consiste à ce que le Parlement prenne ses responsabilités pour permettre à la solidarité nationale de s’exercer pleinement, tout en veillant à sauvegarder les équilibres financiers dont dépend l’avenir de la protection sociale. Nous savons bien, en effet, qu’une solidarité durable ne peut être financée à crédit ou alimentée par un excès de prélèvements sur l’activité et sur l’emploi. C’est à cette aune que les mérites d’un projet de loi de financement de la sécurité sociale se mesurent, et j’avoue que je ne suis guère convaincu, madame la ministre, par la manière dont vous avez tenté de relever, pour la première fois, ce défi.

Je veux revenir, en premier lieu, sur la trajectoire dans laquelle vous inscrivez nos comptes sociaux pour les quatre années à venir, en insistant sur la question des recettes. Les montants et les taux d’évolution que vous avez retenus pour 2013, et au-delà de 2013, ne relèvent pas de prévisions réalistes. Vos engagements resteront un vœu pieux s’ils ne sont pas prolongés par un vigoureux effort de redressement, conduit avec détermination, dans la durée, et portant d’abord sur les dépenses. Or, malgré l’optimisme dont témoignent vos objectifs, ou plutôt vos espérances, vous osez encore prévoir le maintien d’un déficit de 10 milliards d’euros en 2017. C’est à l’évidence un résultat insuffisant au terme d’une si longue période, …

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

… mais, de surcroît, vous ne vous donnez même pas les moyens d’atteindre cet objectif et vous ne cherchez pas à l’atteindre par les bons moyens !

Certes, les hypothèses de croissance ressemblent, par nature, aux bulletins météorologiques : relativement fiables pour le futur immédiat, elles sont aléatoires à plus de quatre ou six mois. Une chose paraît claire, cependant, si l’on se réfère au consensus des économistes : les mois à venir seront plus proches de la stagnation, voire de la récession, que du taux de croissance pourtant médiocre de 0, 8 % sur lequel vous avez fondé vos projets de budget pour 2013.

Les conséquences négatives de cette conjoncture pour les recettes de la sécurité sociale sont déjà fortes et vont encore s’aggraver, ce qui nous inquiète profondément et devrait vous inquiéter aussi.

Vous avez massivement augmenté les prélèvements depuis juillet dernier : 7 milliards d’euros dans le collectif budgétaire, 20 milliards d’euros en loi de finances initiale et, maintenant, près de 5 milliards d’euros de recettes supplémentaires en loi de financement de la sécurité sociale.

Cette politique ne peut donner les mêmes résultats en termes de réduction des déficits qu’une politique de maîtrise renforcée de la dépense, car elle appauvrit les Français et leurs entreprises, aggravant une crise qui diminue déjà les rentrées fiscales et sociales. La hausse brutale des prélèvements, plutôt que le freinage puissant des dépenses par des réformes structurelles et une gestion exigeante, est une solution de facilité.

Je reviendrai dans un instant sur certaines des hausses de prélèvements proposées pour 2013. Cependant, avant même que cette loi de financement ait été adoptée, le Premier ministre vient de rendre caduc l’engagement, figurant dans l’annexe B du projet de loi, de ne pas créer de nouvelles recettes après l’année 2013. Il a en effet décidé une importante réforme du financement de la sécurité sociale, dont les principes, sinon les modalités, semblent d’ailleurs analogues à ceux de la réforme que nous avions adoptée en février 2012 et que vous aviez décidé, en toute hâte, d’abroger dès juillet.

Les Français ont le tournis ! Ils veulent qu’un cap soit donné et qu’il soit tenu. Il est normal que vous corrigiez le plus vite possible vos erreurs, mais la politique financière et sociale de la France demande de la constance. C’est la condition pour créer la confiance des consommateurs, des épargnants, des opérateurs économiques, de nos partenaires européens et aussi des marchés, car ceux-ci existent, et nous avons besoin d’eux pour financer notre dette au moindre coût. Or, de la constance, justement, vous n’en avez pas !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Soit dit en passant, quitte à regretter vos va-et-vient successifs, je préfère que l’évolution de votre réflexion aille dans notre sens, avec la recherche d’un allégement du coût du travail, plutôt qu’en sens contraire, comme au début du quinquennat.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Il reste que nous devons non seulement nous prononcer sur cette loi de financement de la sécurité sociale en fonction de ce qu’elle contient, mais aussi en fonction de ce qu’elle ne contient pas et qui en transformera l’économie générale et l’interprétation.

J’admets qu’une réforme structurelle du financement de la sécurité sociale ne puisse produire son plein effet à court terme, mais si vous voulez qu’elle soit utile à moyen terme, en allégeant fortement le coût du travail et en faisant contribuer nos importations, il faut que cette réforme soit mise en œuvre dans toute son ampleur dès son entrée en vigueur, le plus tôt possible. Puisque telle n’est pas votre intention, l’effet que nous pourrions en attendre sur la croissance et l’emploi sera malheureusement dilué et tardif. Nous n’avons pas tant d’atouts face à la crise actuelle que nous puissions nous permettre de les gâcher. Les prélèvements, c’est maintenant ; les baisses de cotisation, c’est peut-être, et plus tard ! Ce n’est sûrement pas le bon choix !

Le système de crédit d’impôt, ou plutôt de crédit de cotisations, que vous avez l’intention de mettre en place soulèvera de très sérieuses difficultés d’application qui en diminueront l’efficacité. Surtout, il a pour conséquence de différer d’un an encore le bénéfice de la réforme pour les entreprises, alors même que la progressivité de celle-ci, qui vient s’ajouter, j’ai le regret de le dire, à vos atermoiements de l’année 2012, la rend déjà peu incitative. Je le regrette.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Il y a pourtant urgence : les comptes sont mauvais, la conjoncture est atone, le chômage s’étend ainsi que les dépenses résultant du versement du revenu de solidarité active et des allocations de logement.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

On ne peut répondre à cette situation par des mesures cosmétiques dont on attend le plein effet seulement à compter de l’achèvement d’une montée en régime de quatre ans.

S’agissant, par ailleurs, des mesures de recettes que comporte dès maintenant votre projet de loi de financement de la sécurité sociale, mon sentiment est que vous avez vidé les fonds de tiroirs des administrations.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

Vous aviez tellement raclé, qu’il ne restait même plus de tiroirs !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Il en résulte un véritable bric-à-brac !

Vous avez vraiment tort de pénaliser les entreprises qui procèdent à la rupture conventionnelle du contrat de travail, car c’est le salarié qui, en réalité, sera pénalisé.

Applaudissements sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Ces indemnités ne sont pas un revenu, mais une compensation de la rupture du contrat de travail, une forme de réparation, au moment où un travailleur s’apprête à faire l’expérience du parcours du combattant que représente la recherche d’un emploi. L’application du « forfait social » de 20 %, non pas aux indemnités les plus importantes, mais dès le premier euro d’indemnité, constitue pour l’entreprise une charge que rien ne justifie ; elle transforme la nature de ces indemnités, et elle aura une incidence négative sur leur montant. Vous donnez un coup de canif dans le contrat sur lequel repose le développement remarquable du système de la rupture conventionnelle. Si votre intention est de lui donner un coup d’arrêt, autant le dire franchement et l’assumer clairement devant le monde du travail !

Quant au prélèvement de 0, 3 % que vous créez sur une partie importante des pensions de retraite, il est hautement contestable. Il est destiné au financement d’une réforme de la prise en charge de la dépendance que vous aurez du mal à faire aboutir rapidement dans la conjoncture actuelle, …

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Kerdraon

C’était l’Arlésienne du précédent quinquennat !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

… tandis que la taxe, elle, restera. Dans l’attente de cette réforme, le produit de ce prélèvement n’est pas directement affecté au financement de l’allocation personnalisée d’autonomie, qui en aurait pourtant bien besoin.

Enfin, on ne peut qu’être surpris de constater que la recette de 2013 sera versée au Fonds de solidarité vieillesse pour diminuer la participation de l’État à ce fonds, sans venir le moins du monde soulager les personnes dépendantes au nom desquelles ce prélèvement est effectué. Ce choix relève d’une forme d’imposture vis-à-vis des retraités.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

Vous n’avez pas de leçons à nous donner après ce que vous leur avez fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Ils ne peuvent être contraints de contribuer ainsi, sans rien recevoir d’autre en échange que des promesses pour plus tard.

Et que dire du sort que vous réservez aux travailleurs indépendants ? Vous affichez l’apparence de bonnes intentions : rendre proportionnel le prélèvement social, alors qu’il est aujourd’hui dégressif à cause du plafond qui s’applique aux revenus pris en compte. Mais la réalité de la mesure proposée est tout autre : il s’agit de prélever, dès 2013, plus de 1 milliard d’euros sur le monde artisanal, sous couvert de justice. C’est une mauvaise action, au moment où vous sembliez vous intéresser enfin à la compétitivité de nos entreprises, car vous oubliez sans doute que les artisans sont aujourd’hui les premiers employeurs de France.

Je pourrais m’appesantir aussi sur les dépenses. En ce qui concerne l’assurance maladie, vous relâchez l’effort, certes légèrement, et la Cour des comptes l’a critiqué à juste titre.

Sur les retraites, vous observez le silence, un silence profond, alors que nous savons que les réformes successives de 1993, 2003 et 2010 doivent être prolongées et se poursuivre. Je regrette, à cet égard, que les conclusions du Conseil d’orientation des retraites ne soient connues que le mois prochain, quand nous aurons terminé l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Qu’allez-vous faire pour prolonger la réforme des retraites ? Nous n’aurons pas de réponse cette année, et je crains, car nous nous souvenons de l’expérience du gouvernement Jospin, que vous ne preniez pas à bras-le-corps cette réforme qui continue à préoccuper les Français.

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

Vous prétendiez que le problème était réglé !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

La réforme doit être permanente, elle doit se poursuivre, mais nous ne comptons pas sur vous pour le faire !

Madame la ministre, mes chers collègues, telles sont les principales raisons pour lesquelles nous ne voterons pas le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Ce n’est pas que ses ambitions nous paraissent trop élevées. Au contraire, leur modestie, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

M. Jean Desessard. Pour une fois que les socialistes sont modestes !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

M. Philippe Bas. … l’absence de ligne directrice pour une politique de sécurité sociale soucieuse de préserver notre modèle en l’adaptant, les changements de pied incessants auxquels vous soumettez les Français, l’addition des prélèvements supplémentaires qui résultent de chaque nouveau texte présenté au Parlement depuis six mois, votre silence sur l’avenir des retraites, le peu de gages que vous donnez de votre volonté de mettre en œuvre fermement la maîtrise médicalisée des dépenses de santé, en particulier à l’hôpital, nous font craindre que les objectifs que vous nous présentez ne puissent être atteints sans nouveaux prélèvements. Cette politique, qui n’en est pas une, conduit à une impasse. Nous ne pouvons donc pas l’approuver.

Applaudissements sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Meunier

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’exercice auquel nous sommes soumis dans le cadre de l’examen du PLFSS pour 2013 est difficile, car il est très contraint. Les marges de manœuvre financières sont serrées, mais l’enjeu est bel et bien de définir une politique plus juste. Gageons qu’il s’agit là d’un projet de loi de financement intermédiaire, qui permettra d’assainir progressivement la situation économique grevée par les erreurs et les déficits accumulés par les précédents gouvernements de droite, quoi qu’en pense M. Bas. C’est en tout cas un PLFSS responsable et solidaire.

Malgré tout, le projet de loi de financement pour 2013 accompagne de grandes orientations sociales visant par exemple à assurer une retraite digne à nos concitoyennes et à nos concitoyens, un égal accès aux soins, une meilleure protection des salariés et un soutien renforcé des familles modestes.

Au total, 600 millions d’euros supplémentaires ont été crédités à la branche famille afin de limiter l’ampleur du déficit à 2, 7 milliards d’euros au lieu de 3, 3 milliards d’euros. Ce n’est pas rien !

Des mesures nouvelles sont proposées par le Gouvernement, malgré le contexte tendu, afin de soutenir les familles, notamment les plus exposées à la crise.

Le Gouvernement propose ainsi une méthode et des objectifs afin d’adapter l’offre en matière d’accueil de la petite enfance. Mme la ministre Dominique Bertinotti a par exemple engagé une concertation avec l’ensemble des parties prenantes, non seulement les parents, mais aussi les professionnels et les élus, dans quatre régions françaises métropolitaines. Il s’agit de mieux appréhender les besoins des familles, de faire connaître les bonnes pratiques locales afin, ensuite, de définir les axes prioritaires qui seront intégrés à la convention d’objectifs et de gestion qui sera conclue entre l’État et la CNAF pour la période 2013-2016.

Cette méthode est prometteuse, car il existe de fortes disparités dans les territoires tant en termes de qualité des réponses proposées que de places disponibles. On constate ainsi un écart allant de 26 à 76 places d’accueil pour 100 enfants selon les territoires. Les concertations locales permettront de s’appuyer sur des expériences concrètes qui pourront être analysées, voire généralisées. Cette méthode est la bonne, elle a fait ses preuves.

Les objectifs sont non seulement quantitatifs, mais également qualitatifs, car augmenter le nombre global de places d’accueil ne suffit pas. Il faut adapter l’offre aux lieux de vie des familles et combiner les réponses le plus souvent. Il faut aussi poursuivre la professionnalisation des personnels en charge de la petite enfance. Ces réponses doivent se construire avec l’ensemble des acteurs locaux impliqués.

L’État jouera, en lien avec la CNAF, les collectivités et les familles, son rôle stratégique de cadrage de la politique globale en matière d’accueil de la petite enfance et garantira un accès équitable à ces services sur l’ensemble du territoire national. Agir ainsi, c’est permettre aux parents d’exercer une activité professionnelle. C’est aussi concourir à l’égalité entre les femmes et les hommes sur le plan professionnel et dans la prise en charge des responsabilités familiales.

Parallèlement, le PLFSS pour 2013 vient en aide aux familles modestes confrontées à des difficultés pour financer l’accueil de leurs enfants.

Aujourd’hui, les familles doivent faire l’avance des frais de garde pour l’assistante maternelle ou pour la garde à domicile, en attendant le remboursement de l’aide de la CAF à terme échu. Il est proposé ici de mettre en place, à titre expérimental pour une durée de deux ans, un système de tiers payant pour les ménages ayant des ressources inférieures au montant du RSA dans un premier temps. L’aide de la CAF sera alors versée directement à la salariée. La famille s’acquittera du solde de la rémunération auprès d’elle. Cette mesure sera particulièrement appréciée des familles qui confient leur enfant à une assistante maternelle, notamment en milieu rural, où ce mode d’accueil est le plus fréquent. Nous ferons bien sûr un bilan de cette expérimentation avant de la généraliser.

Voici une méthode qui mérite de devenir plus systématique afin d’innover dans le secteur social : expérimenter grandeur nature, évaluer, analyser avant, le cas échéant, de généraliser.

Une autre mesure est proposée, à la suite des travaux de l’Assemblée nationale, en faveur des familles surendettées risquant d’être expulsées de leur logement. Il s’agit de permettre le rétablissement automatique de toutes les allocations logement, à l’instar de l’aide personnalisée au logement, dès lors qu’un dossier de surendettement est jugé recevable. Le rétablissement de ces droits devrait permettre à ces ménages une sortie plus rapide de l’ornière financière dans laquelle elles se trouvent.

Toutefois, une politique en faveur des familles ne se résume pas aux mesures inscrites à la branche familles du PLFSS. Chaque budget doit pouvoir supporter la part relative aux actions en faveur des enfants, des jeunes et des familles relevant de ses responsabilités. Ainsi, le Fonds national de financement de la protection de l’enfance prévu pour soutenir la politique de protection de l’enfance assurée par les conseils généraux ne peut être abondé uniquement par le budget de la sécurité sociale. En effet, la prise en charge par les départements des mineurs isolés étrangers impacte leurs budgets alors même que ce jeune public relève principalement des politiques liées à l’entrée sur le territoire. Je me réjouis d’ailleurs des discussions qui se sont enfin engagées entre l’Assemblée des départements de France et les ministères concernés afin de trouver des solutions adaptées à la prise en charge de ces jeunes et tenables pour les départements.

Une politique en faveur des familles ne se réduit pas non plus à une politique nataliste. Ce doit être un engagement global misant fortement sur la jeunesse, sur l’avenir. Elle doit prendre en compte les familles dans toute leur diversité, de composition, de lieu d’habitation, de parcours de vie, de niveau de revenus, d’origines culturelles, d’état de santé. Les familles doivent pouvoir trouver des réponses adaptées à leurs besoins tout au long de leur vie et sans discrimination.

Toutes les mesures votées ou actuellement en discussion visant à favoriser l’égalité entre les familles, d’une part, et entre les femmes et les hommes, d’autre part, sont autant de jalons qui construisent l’environnement familial et sociétal de notre jeunesse. Car tout se tient !

L’augmentation de 25 % de l’allocation de rentrée scolaire, soit une hausse de plus de 70 euros par enfant, a été un signe fort pour les trois millions de familles les plus modestes qui en ont bénéficié. Elle a concerné, dans une large majorité, des familles monoparentales. Dans 85 % des cas, ce sont les mères qui sont à la tête de ces familles. De même, se reposer la question de la scolarisation en maternelle dès l’âge de deux ans constitue un axe fort d’une politique familiale plus juste.

Par ailleurs, le PLFSS pour 2013 corrige une iniquité flagrante à l’égard des familles homoparentales, laquelle a d’ailleurs été signalée par la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité, la HALDE. À la suite des travaux de l’Assemblée nationale, un amendement visant à créer un « congé de paternité et d’accueil de l’enfant » sera discuté. Il vise à permettre au compagnon ou à la compagne de la mère qui sera présent lors de l’arrivée de l’enfant de bénéficier de ce congé rémunéré de plein droit.

L’ensemble des mesures d’aide aux familles joue incontestablement un rôle de redistribution, particulièrement en temps de crise. Les collectivités locales, notamment via les centres communaux d’action sociale, les CCAS, soutenus notamment par le milieu associatif, complètent l’aide apportée aux familles rencontrant d’importantes difficultés.

Il nous faudra résolument poursuivre nos efforts pour que les familles les plus modestes soient davantage aidées, comme l’a d’ailleurs souligné Mme la rapporteur Isabelle Pasquet. Je pense notamment aux familles monoparentales, qui sont les plus exposées financièrement, comme le montre le rapport annuel du Secours catholique publié la semaine dernière. Il vaut mieux aider précocement plutôt que de compenser ensuite par des mesures de protection de l’enfance très coûteuses financièrement, mais aussi socialement. Je pense également au congé de maternité, dont sont privées les femmes en situation de précarité face à l’emploi, car elles n’ont pas suffisamment droit aux indemnités journalières. Dans le département de la Loire-Atlantique, la CAF et la CPAM estiment que ces femmes étaient au moins 10 % en 2011. Il nous faut revoir cette question afin de favoriser une plus grande équité.

Nous devons repenser notre système d’aide aux familles afin de renforcer ses fonctions de redistribution et de réduction des inégalités, comme le préconise d’ailleurs la Cour des comptes dans son rapport pour 2012. Une remise à plat s’impose pour redonner une cohérence d’ensemble aux différentes aides. La Cour des comptes insiste sur la nécessité de revoir l’économie d’ensemble des prestations familiales sous conditions et modulables en fonction des ressources des ménages, d’une part, en renforçant l’aide aux familles vulnérables et, d’autre part, en réformant la prestation d’accueil au jeune enfant en ciblant plus étroitement les familles bénéficiaires.

Je souscris tout à fait à ces préconisations, qui vont dans le sens d’une plus grande justice redistributive, car les familles nous attendent.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le système hospitalier public français est un atout majeur pour la qualité des soins dispensés aux populations. L’excellence de la médecine qui y est pratiquée, la force de son maillage territorial, bien qu’il ait été mis à mal par les précédents gouvernements, la disponibilité des équipes médicales et paramédicales, le haut niveau de formation dispensé aux internes, l’application des tarifs opposables, l’accueil de tous les patients, sans distinction de pathologie et d’origine, tel est en quelque sorte l’ADN des hôpitaux publics. Je pense, madame la ministre, que nous sommes d’accord pour convenir que ce sont autant de différences avec le secteur privé lucratif.

Vous avez annoncé la présentation prochaine d’un projet de loi contenant une disposition symbolique : la réintroduction, dans le code de la santé publique, de la notion de service public hospitalier. Cela nous apparaît d’autant plus important que Nicolas Sarkozy et son gouvernement, notamment avec la loi HPST, dont nous souhaitons d’ailleurs l’abrogation, avaient entrepris une œuvre de destruction du service public hospitalier, transformant l’hôpital en « entreprise de soins » et réduisant la démocratie en son sein.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Ce sont les 35 heures qui ont détruit l’hôpital public !

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Cela ne vous plaît pas, mais c’est la réalité !

En confiant de plus en plus de missions de service public aux structures commerciales, en permettant l’émergence de groupements de coopération sanitaire alliant établissements publics et lucratifs, …

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

… Nicolas Sarkozy a tenté de faire croire que, au final, il n’y avait plus de différences entre les hôpitaux publics et les cliniques privées. Se faisant, il a oublié une réalité : les dépassements d’honoraires dans les structures publiques sont l’exception, quand les tarifs prohibitifs dans les cliniques sont légion. Nous attendons donc avec impatience ce projet de loi.

Cette volonté d’assimilation du public et du privé n’est pas récente. L’instauration de la convergence tarifaire entre les hôpitaux et les cliniques y participe pleinement. Vouloir comparer, puis aligner les prix des établissements publics de santé sur ceux des cliniques privées, c’est méconnaître leurs différences fondamentales, que j’ai mentionnées au début de mon propos. Les soins non programmés coûtent incontestablement bien plus chers que les soins programmés. Les fragilités sanitaires et sociales des publics soignés dans les hôpitaux sont évidemment bien plus importantes que celles des patients ayant les moyens financiers d’opter pour des soins dans des cliniques commerciales. Le gel de cette convergence contre nature est donc heureux. Or, si ce gel permet de limiter les dégâts, le projet de loi ne revient pas sur les erreurs du passé, et les tarifs ayant déjà fait l’objet de cette convergence ne seront malheureusement pas revus. Cela nous apparaîtrait pourtant particulièrement nécessaire.

De même, il nous apparaîtrait indispensable de doter les établissements publics de santé des moyens financiers dont ils ont besoin. Or l’évolution du taux de l’ONDAM, fixé cette année à 2, 6 % pour les hôpitaux, nous semble insuffisante. Il faudrait au moins porter ce taux à 3 %, ne serait-ce que pour permettre aux hôpitaux de faire face aux dépenses contraintes, liées par exemple à l’amélioration des rémunérations ou encore à la hausse des prix de l’énergie ou des dépenses propres aux hôpitaux.

D’après les estimations de la Fédération hospitalière de France, cette année encore, l’effort financier exigé des établissements publics de santé serait de 650 millions d’euros, soit, à peu de choses près, le montant exigé en 2012. Chaque établissement aujourd’hui rogne sur le matériel médical, la maintenance, jusqu’à celle des ascenseurs ! Cet effort financier a également eu pour effet la suppression de 8 000 postes, ce qui a aggravé les conditions de travail, déjà mauvaises, des personnels et réduit, de fait, la qualité des soins dispensés aux patients. Les salariés de l’AP-HP, le plus important CHU d’Europe, que j’ai auditionnés la semaine dernière, sont tout à fait éloquents et alarmants. Ils traduisent une réelle souffrance au travail, comme en atteste la hausse du nombre des suicides, dont on ne parle pas.

Les mêmes causes produisant les mêmes effets, nous sommes inquiets. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous demandons un moratoire sur la fermeture des établissements publics de santé et sur les regroupements de leurs services. On nous oppose l’argument de la sécurité, mais les hôpitaux de proximité, tout comme les cliniques d’ailleurs, constituent parfois la seule structure de soins vers laquelle les patients peuvent s’orienter.

Comment justifier par exemple que, pour des raisons de sécurité, on impose aux femmes enceintes de faire, en Guadeloupe, plus d’une heure de bateau pour se rendre au CHU de Pointe-à-Pitre ? Est-ce véritablement plus sûr que d’accoucher à la maternité de Marie-Galante ? Nous ne le pensons pas.

Vous souhaitez à juste titre, madame la ministre, établir un pacte de confiance pour l’hôpital. Nous soutenons ce pacte, à condition qu’il institue une véritable démocratie sanitaire, qu’il redonne le pouvoir aux personnels, à leurs syndicats, aux patients et aux élus, et qu’il mette fin à la toute-puissance des directeurs des agences régionales de santé.

Bien entendu, les mesures que nous proposons exigent le respect d’une condition préalable : sortir du paiement à l’acte et mieux prendre en compte les missions de service public. La commission des affaires sociales du Sénat a d’ailleurs remis un rapport fort intéressant allant ce sens.

Enfin, ne pouvant intervenir plus longuement, je voudrais dire notre inquiétude face à la proposition, qui a été formulée par le Gouvernement et qui figure au sein du présent PLFSS, visant à autoriser les hôpitaux à émettre des billets de trésorerie. Nous aurions pour notre part préféré que la Caisse des dépôts et consignations puisse être autorisée à proposer des prêts à taux zéro aux hôpitaux.

L’insuffisance de l’ONDAM, l’autorisation d’émettre des billets de trésorerie, la mesure adoptée sur votre initiative, madame la ministre, concernant la biologie hospitalière, ainsi que la hausse de la taxe sur les salaires nous paraissent des mesures peu compatibles avec votre objectif de renforcement du service public hospitalier.

Le groupe CRC n’y souscrit pas. C’est pourquoi nous nous exprimerons sur chacune des mesures touchant à l’hôpital, au cas par cas. Nous espérons que les choses évolueront ainsi dans le bon sens.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je ne me livrerai pas à la critique des propositions budgétaires émises par le Gouvernement, car d’autres l’ont déjà fait, ou le feront.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

M. Serge Dassault. Je tiens simplement à formuler quelques remarques. Tout d’abord, il faut le reconnaître, le déficit de nos installations hospitalières est dû, en grande partie, aux 35 heures.

Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Kerdraon

Cela faisait longtemps ! On a bien fait de venir !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Plancade

M. Dassault est un homme fidèle à ses convictions…

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Or vous ne voulez pas le comprendre.

Les 35 heures ont eu pour conséquence l’augmentation du nombre de personnels et l’aggravation du déficit. Il faut bien que quelqu’un paie. Car lorsqu’on ne travaille pas, cela coûte plus cher !

Je voudrais également vous faire remarquer que, si le budget de la sécurité sociale est indépendant du budget de l’État, il n’y a qu’un seul financeur, le contribuable.

En outre, le déficit de la sécurité sociale ne s’ajoute pas, pour le moment, à celui du budget voté dans la loi de finances. Il est soigneusement rangé dans un organisme, appelé la CADES, la Caisse d’amortissement de la dette sociale, où les déficits accumulés sont financés par des emprunts qui s’ajoutent à ceux du budget de l’État. À la fin de l’année 2012, ils atteindront 1 800 milliards d’euros au sens de Maastricht. C’est ce que l’on appelle pudiquement des dépenses hors budget.

Toutefois, au moment où chacun essaie de réduire les charges sur salaires de façon substantielle, sans pour autant y arriver, je voudrais vous soumettre une solution. §Écoutez bien, car elle n’est pas facile à exposer.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Je vous propose de réduire les charges sur salaires de 55 %, sans aucune augmentation d’impôt ou de TVA, tout en finançant totalement le budget de la sécurité sociale, y compris son déficit. Cette opération facilitera en outre les embauches, les augmentations de salaire et les ventes, tout en réduisant les coûts de production.

Je vous rappelle, avant tout, que les charges pesant sur les salaires des entreprises sont de deux ordres. Il existe, d'une part, des charges liées directement aux salariés, finançant les retraites, les indemnisations du chômage et les accidents de travail, et, d'autre part, des charges liées à la maladie et la famille, la CRDS et la CSG, qui sont déterminées par le Gouvernement.

Je vous propose de dissocier totalement ces deux types de charges.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Ce système ne s’appliquerait qu’aux entreprises marchandes.

En 2009 – ce sont des chiffres à retenir –, la totalité des charges sur salaires a représenté une somme de 393 milliards d’euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Le financement des retraites ainsi que l’indemnisation du chômage et des accidents du travail représentent un montant de 176 milliards d’euros. Les charges affectées aux dépenses maladie ou famille, financées par la CSG et la CRDS, se sont, quant à elles, établies à 217 milliards d’euros, hors déficit.

Je vous propose de garder seulement, comme charges sur les salaires, les 176 milliards d’euros acquittés par les entreprises, qui financent les retraites, les indemnisations du chômage et des accidents du travail. Les charges pesant sur les salariés des entreprises seront donc réduites de 55 %, puisque, au lieu de payer 393 milliards d’euros, les entreprises ne s’acquitteront que de 176 milliards d’euros de charges sur salaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Vous remarquerez que ces charges, d’un montant de 45 % du salaire, seront toutes patronales, si bien que, désormais, tous les salaires seront nets.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Cette opération facilitera les embauches, qui coûteront moins cher, les augmentations de salaire, qui coûteront moins cher, elle réduira les coûts de production et elle permettra d’augmenter les ventes.

Comment payer le reste, me direz-vous ?

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Les 217 milliards d’euros restants seront payés par entreprises elles-mêmes sous forme de frais généraux, comme les loyers ou les factures EDF. Elles le feront à l’aide d’une formule qui favorisera les entreprises de main-d’œuvre, donc le travail, employant de nombreux salariés. Les charges seront ainsi réparties entre les entreprises utilisant beaucoup de main-d’œuvre, qui payeront moins, et celles, comme les entreprises de services, qui réalisent un gros chiffre d’affaires avec peu de personnel, qui payeront plus.

Il en ira de même pour les entreprises qui emploient du personnel étranger ou qui délocalisent, car la formule de réduction des charges ne prendra en compte que le personnel français. Avec cette formule retranchant la masse salariale du chiffre d’affaires, ces entreprises payeront plus de charges. Les entreprises qui délocalisent et celles qui importent seront donc défavorisées.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Pour cela, il faudra mettre en place ce que j’appelle un coefficient d’activité, couvrant toutes les entreprises marchandes. Chaque société calculera ses charges en multipliant ce coefficient par son chiffre d’affaires moins sa masse salariale. C’est là qu’intervient l’astuce : plus la masse salariale est importante, moins l’entreprise paie ; moins la masse salariale est importante, plus elle paie. Cela favorise l’activité et encourage la réduction du chômage.

Mes chers collègues, je ne vous livrerai pas aujourd'hui pas la formule complète, car elle est trop compliquée, mais je vous la donnerai plus tard !

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Je tiens tout de même à vous signaler qu’un coefficient de 6, 6 permet d’obtenir une somme de 217 milliards d’euros, c’est-à-dire le total de la part payée pour les branches famille et maladie de la sécurité sociale.

Néanmoins, l’intérêt de l’opération vient également de ce qu’il sera possible d’y intégrer le déficit de la sécurité sociale, quel qu’il soit. Si ce déficit se monte à 20 milliards d’euros, votre dépense sera non plus de 217 milliards d’euros, mais de 237 milliards d’euros. Si le déficit est moins élevé, cette somme diminuera.

Cette formule permettra donc de rapporter à l’État 20 milliards d’euros de plus, et partant de réduire le déficit budgétaire.

Un rapide calcul permet de nous apercevoir d’un point très important sur le plan financier : une simple augmentation de 0, 6 point du coefficient d’activité rapporte 20 milliards d’euros à l’État. C’est une sorte de TVA, qui n’en est pas une mais qui rapporte beaucoup parce que son assiette est large et son taux faible.

Il suffira donc de faire passer le coefficient d’activité de 6, 6 à 7, 2 pour obtenir 20 milliards d’euros supplémentaires et équilibrer ainsi le budget de la sécurité sociale, quel qu’il soit.

Voilà, madame la ministre, ce que je voulais vous proposer : la baisse de 55 % des charges sur salaires – ce n’est pas rien, tout de même ! – sans que cela ne coûte un euro à l’État et sans mise en place d’une quelconque TVA sociale – cela, c’est fini, ça ne sert à rien, on n’en parle plus.

Une telle solution permettra d’équilibrer le budget de la sécurité sociale, sans qu’il soit nécessaire d’augmenter les d’impôts. Les charges des entreprises de main-d’œuvre seront moins lourdes et celles des entreprises de services plus élevées, sans aucune conséquence pour le budget de l’État. Le chômage pourra diminuer du fait de l’augmentation du nombre d’embauches, la croissance reprendra grâce à l’amélioration du pouvoir d’achat provoquée par la hausse des salaires, sur lesquels pèseront non plus 100 % de charges, mais seulement 55 %.

Je trouve, madame la ministre, que cette mesure méritait de vous être proposée.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

M. Serge Dassault. Je présenterai une proposition de loi sur ce sujet, qui est quelque peu complexe. J’espère que vous la défendrez !

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Samia Ghali

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 traduit la priorité que constitue le secteur médico-social pour le Gouvernement, et ce malgré un contexte budgétaire difficile.

Ainsi, avec une progression de l’ONDAM médico-social de l’ordre de 4 %, quelque 650 millions d’euros de mesures nouvelles seront consacrés à la prise en charge des personnes âgées et des personnes en situation de handicap.

Cette décision traduit dans les faits et les chiffres les engagements pris par le Président de la République.

Au cours des cinq dernières années, les budgets furent trop souvent guidés par la volonté de faire des effets d’annonce. Par exemple, les objectifs de création de places prévues par le plan solidarité grand âge avaient été gonflés, et la lenteur de leur réalisation avait été insuffisamment prise en compte.

A contrario, le PLFSS pour 2013 donne la priorité aux établissements et services, en finançant un taux de reconduction de leurs moyens de 1, 4 %, ce qui est beaucoup par rapport à la quasi-stagnation qu’ils ont subie auparavant.

En outre, un effort important est consacré à la médicalisation des établissements, ce qui devrait permettre de créer, à terme, 7 000 postes de personnels soignants.

Pour autant, les plans de création de places ne sont pas délaissés, puisque les crédits prévus permettront l’ouverture de 3 200 places pour les personnes âgées et de 3 000 places pour les personnes handicapées.

Je ne reviendrai pas sur l’examen des quatre principaux articles rattachés spécifiquement au secteur qui nous occupe, ni sur les deux articles complétés par nos collègues de l’Assemblée nationale. Les éléments afférents ont été abondamment développés par notre excellent rapporteur, Ronan Kerdraon, dont je tiens à saluer ici la qualité des travaux.

Sourires sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Samia Ghali

J’insisterai en revanche sur un point, la mise en chantier du dossier de la dépendance et l’annonce d’un projet de loi sur la prise en charge de la perte d’autonomie, prévu pour le début de l’année 2014 par le Gouvernement.

Promise par Nicolas Sarkozy en 2007, indéfiniment repoussée tout au long du quinquennat, cette réforme avait été définitivement abandonnée en septembre 2011.

Il était urgent d’agir et de rassurer nos anciens et leurs familles, qui sont de plus en plus nombreux à être confrontés à des situations difficiles et douloureuses.

Il nous faut donc rapidement dégager des moyens supplémentaires, afin, d’une part, de réduire le reste à charge des personnes hébergées en établissement et, d’autre part, de remédier aux difficultés des départements pour financer l’allocation personnalisée d’autonomie.

Le présent PLFSS prévoit donc, d’ores et déjà, 700 millions d’euros de recettes supplémentaires pour la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées à partir de 2014, prévus par l’article 16.

Soyons clairs, mes chers collègues, la progression des cotisations pour assurer le financement était attendue. Réagissant aux conclusions du rapport parlementaire sur la dépendance rédigé par la députée UMP Valérie Rosso-Debord, qui préconisait la souscription obligatoire à une assurance privée, François Hollande, à l’époque candidat, avait affiché sa position sans détour, lors d’une émission télévisée du 12 février dernier, lorsqu’il déclara : « Il n’y aura pas de contrat d’assurance privée ». Lors de cette interview, il annonça en outre, non sans courage, l’instauration d’une cotisation dépendance pour l’ensemble des Français.

Que prévoit donc l’article 16 ? Au 1er avril 2013, les retraités imposables, dont l’impôt dépasserait 61 euros, seront soumis à un prélèvement de 0, 3 %. Tous ne seront donc pas touchés – c’est important de le souligner ! – par cette contribution, contrairement à ce qu’on veut nous faire croire ici ou là.

Concrètement, pour une personne seule percevant une pension de 1 300 euros, le montant prélevé sera de 3, 90 euros par mois en 2014. Rapportons cela aux inquiétudes des familles : je crois que c’est tout de même une somme dérisoire, mes chers collègues !

La mesure est bien une mesure solidaire et juste. Globalement, les retraités se disent prêts d’ailleurs à participer à un tel effort de solidarité si l’objectif est clairement défini. Or c’est le cas. Il y a aujourd'hui un gouvernement qui agit !

C’est aussi le sens des dispositions de l’article 41, qui visent à fluidifier les parcours de soin des personnes âgées pour leur permettre de recevoir les bons soins au bon moment et de choisir librement d’aller dans un établissement ou de rester à domicile.

Une telle disposition inaugure la politique de prévention, qui devra être développée et qui permettra de réduire le coût global de la dépendance. Le chantier de la dépendance est engagé. Le Gouvernement agit avec courage et justice. C’est, me semble-t-il, ce qu’attendent aujourd'hui les Français ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, j’ai entendu tout à l’heure les déclarations de Mmes Touraine et Bertinotti sur les priorités du projet de loi de financement de la sécurité sociale en matière de famille, mais je demeure frappée par l’indigence du texte sur le sujet. Si je devais qualifier ce budget, j’emploierais volontiers l’adjectif « vide ».

Vide, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale l’est d’un point de vue textuel, puisque seuls deux articles concernent la famille.

Vide, il l’est également d’un point de vue financier. Les 400 millions d’euros de recettes votés dans le cadre du projet de loi de finances rectificative de cet été ont été intégralement dépensés dans l’éphémère augmentation de l’allocation de rentrée scolaire, déjà été oubliée par tous. En outre, vous n’avez pas cherché à réduire le déficit de la branche, ni à présenter des mesures plus ambitieuses.

J’ai été également très étonnée de découvrir votre position sur la taxe spéciale sur les conventions d’assurance, la TSCA, pour les contrats d’assurance maladie dits « responsables et solidaires » ; vous vous êtes résignés à son maintien alors que vous étiez farouchement opposés au mécanisme. Je le rappelle, l’an dernier, la commission avait déposé un amendement – je salue M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales, qui en avait pris l’initiative – tendant à la suppression du dispositif. Ayant toujours été hostile à cette taxe, parce que ce sont les assurés qui, je le répète, paient le surcoût, je vous aurais suivi avec plaisir dans cette voie, même s’il s’agissait d’une des propositions du candidat Hollande. Cependant, pour l’instant, il n’y a rien sur la TSCA !

Je voudrais faire plusieurs remarques concernant les dépenses.

Tout d’abord, le versement en tiers payant du complément mode de garde pour les familles modestes recentre les problématiques d’accueil des jeunes enfants et du choix du mode de garde par leurs parents. J’y suis favorable.

J’en profite pour souligner l’action volontariste du gouvernement de François Fillon, qui aura tenu son engagement d’atteindre 200 000 places d’accueil, dont la moitié en accueil collectif.

La garde à domicile demeure le mode de garde le plus répandu, en raison, d’une part, de la souplesse qu’il offre sur l’ensemble du territoire et, d’autre part, de la flexibilité de ses horaires, plus importante qu’en accueil collectif. Toutefois, c’est aussi le mode le plus coûteux pour les parents. À cet égard, je crains les conséquences du tour de vis donné à la niche « nounou ». §

En effet, le projet de loi table naïvement sur l’hypothèse que les familles vont conserver leurs modes de garde et les mêmes modalités de paiement. Or il n’en sera rien. En touchant au crédit d’impôt, vous allez démolir le vecteur fiscal qui a permis de lutter en partie contre le travail dissimulé. Il est donc réaliste de prévoir un retour aux pratiques de fraude et de travail non déclaré, qui étaient si répandues avant l’adoption de la loi du 26 juillet 2005 relative au développement des services à la personne et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale.

De nombreux parents qui ont déjà énormément de difficultés pour trouver une nounou qui accepte d’être déclarée – car telle la réalité en région parisienne, dans mon département et dans ma commune ! – vont revenir au système D, en déclarant moins d’heures ou en optant pour un tarif plus faible.

En Espagne, où le même dispositif a été voté récemment, le volume mensuel d’heures de travail déclarées des nourrices a diminué de 30 %. Cette mesure aura pour conséquence immédiate de faire basculer dans l’illégalité plusieurs milliers de salariés, ainsi que les entreprises spécialisées les employant, et de diminuer les rentrées fiscales. C’est le contraire de l’objectif visé !

En outre, je crains que cela ne touche de plein fouet les femmes, plus encore les femmes seules, car le surenchérissement du coût incitera celles qui perçoivent les salaires les plus modestes à rester chez elles, les éloignant ainsi un peu plus de l’emploi.

À mon avis, vous roulez à contresens, et à grande vitesse. C’est dangereux. Vous allez provoquer un accident démographique en remettant en cause un élément important de la politique familiale.

Un dernier point a attiré toute mon attention et m’a d’autant plus surprise qu’il n’a pas sa place dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, me semble-t-il. Je parle du congé de paternité et d’accueil de l’enfant. Plusieurs ministres l’ont évoqué pour s’en féliciter.

Or une telle transformation, adoptée par voie d’amendement à l’Assemblée nationale, me paraît prématurée. Le conseil des ministres vient d’adopter votre projet de mariage entre personnes de même sexe ; le texte devrait être débattu dans quelques mois au Parlement. Non seulement cela constituerait un cadre juridique plus approprié que le PLFSS, mais, en plus, vous n’anticiperiez ainsi pas sur des dispositions souhaitées par une minorité de personnes et que vous voulez opposer à toutes les familles.

Et je n’évoque pas les aspects juridiques d’une telle disposition. En reconnaissant le rôle du ou de la partenaire de la mère en matière de congé, vous niez totalement le père naturel de l’enfant, qui peut, lui aussi, vouloir contribuer à l’accueil de ce dernier. Qui arbitrera ce conflit ? Quels en seront les recours ? Telles sont les raisons pour lesquels, avec mes collègues, nous souhaitons la suppression de cet article.

Enfin, et même si ce point ne relève pas formellement de la branche famille, je souhaite terminer mon intervention sur la contraception des mineures. La limite minimale à quinze ans me paraît incompréhensible. Préférez-vous qu’une jeune fille âgée de quatorze ans et quelques mois soit obligée de subir une IVG plutôt que de rembourser ses contraceptifs ?

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

Nos collègues médecins devraient vous confirmer qu’ils ont déjà dû prendre très souvent en charge des jeunes filles de moins de quinze ans. J’avais déposé un amendement visant à répondre à ce problème, mais le couperet de l’article 40 de la Constitution est tombé, tel celui d’une guillotine.

L’âge de quinze ans a peut-être été choisi parce que c’était auparavant l’âge minimal pour se marier. Toutefois, ce n’est plus le cas aujourd'hui. Et il me paraît très dangereux de limiter les mesures relatives à la contraception des mineures aux jeunes filles de plus de quinze ans.

Contrairement à ce que vous avez déclaré cet après-midi, votre projet de budget pour la branche famille ne traduit absolument pas votre volonté d’aider les familles et de continuer à les inciter à avoir des enfants, ces enfants qui, jusqu’à présent, étaient notre richesse ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Schillinger

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je centrerai essentiellement mon propos sur la branche vieillesse. Je tiens d'ailleurs à souligner ici l’excellent travail de Mme la rapporteur Christiane Demontès.

Le redressement de la situation financière de la branche vieillesse s’inscrit parfaitement dans la stratégie globale des finances publiques que le Gouvernement a décidé de mettre en œuvre.

Le budget qui nous est proposé aujourd’hui pour la branche vieillesse est responsable : le déficit de la branche retraite, tous régimes de base confondus, sera ramené à 5, 4 milliards d’euros, contre 7, 1 milliards d’euros en 2012. De même, le déficit du Fonds de solidarité vieillesse s’élèvera à 2, 6 milliards d’euros, contre 4, 1 milliards d’euros l’année précédente. On ne peut que s’en féliciter. Ainsi, le Gouvernement a pris la pleine mesure de la gravité de la situation, en adoptant des mesures de justice tout en réduisant les déficits.

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale prend en compte les difficultés financières croissantes que connaissent certains régimes de retraite de base autres que le régime général. Plus d’un milliard d’euros de recettes supplémentaires bénéficiera à la branche vieillesse du régime des exploitants agricoles, à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, à la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérables et au régime de retraite spécial des industries électriques et gazières.

Dès sa prise de fonctions, le Gouvernement a montré sa volonté de rétablir la justice sociale. En effet, au mois de juillet dernier, il a élargi aux personnes ayant commencé à travailler avant 20 ans la possibilité de partir à la retraite dès 60 ans lorsqu’elles ont cotisé une carrière complète. Il s’agit d’une mesure d’équité pour les assurés ayant cotisé la durée nécessaire.

D’autres dispositions mettent fin à des injustices. Je pense à l’attribution de points gratuits de retraite proportionnelle aux exploitants agricoles contraints de cesser leurs activités pour infirmité ou maladie grave, ainsi qu’aux nouvelles règles relatives aux pensions de réversion pour les professions médicales et le régime des marins.

Permettez-moi de m’attarder sur la mesure essentielle qui concerne les exploitants agricoles. Aujourd’hui, les non-salariés agricoles ayant dû cesser leur activité en raison d’une maladie ou d’une infirmité grave et bénéficiaires soit d’une pension d’invalidité, soit d’une rente d’incapacité, soit de l’allocation adulte handicapé, l’AAH, ne s’ouvrent des droits qu’à la retraite forfaitaire. Ils n’ont aucun droit à la retraite proportionnelle, qui constitue pourtant, avec la pension forfaitaire, la retraite de base des non-salariés agricoles.

Conformément à l’engagement pris par le Président de la République, l’article 60 prévoit d’attribuer des points gratuits de retraite proportionnelle aux exploitants agricoles ayant dû cesser leur activité en raison d’une maladie ou d’une infirmité grave.

Les périodes d’interruption de l’activité feront l’objet d’une validation au titre de la retraite proportionnelle des agriculteurs et de l’attribution d’un nombre minimal de points gratuits.

Les non-salariés concernés sont les chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole, ainsi que les collaborateurs d’exploitation et les aides familiaux, qui bénéficient de la retraite proportionnelle. Selon l’étude d’impact, le nombre forfaitaire de points de retraite proportionnelle sera de vingt-trois pour les chefs d’exploitation et de seize pour les collaborateurs d’exploitation et les aides familiaux. Ces points seront même attribués pour les périodes d’invalidité antérieures à la publication de la loi.

Une telle mesure de justice sociale prouve la volonté du Gouvernement de prendre en compte la condition sociale de nos agriculteurs et de protéger certains salariés lors de leur retraite. Je vous en remercie, madame la ministre.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Schillinger

Je souhaiterais également évoquer un problème qui me tient particulièrement à cœur : celui de l’allocation équivalent retraite, l’AER. À mon avis, ce dispositif, qui était essentiel, doit être revu. L’allocation, qui repose sur la solidarité nationale, répondait à une urgence sociale, celle que vivent des dizaines de milliers de personnes sans revenu ayant commencé leur carrière professionnelle très tôt, disposant des trimestres de cotisation requis, souvent au chômage depuis plusieurs années, mais n’ayant pas atteint l’âge de 60 ans pour partir en retraite. Le dispositif a, je le rappelle, permis à des milliers de chômeurs de ne pas sombrer dans la précarité.

Lors du vote du projet de loi de finances pour 2008, la majorité de droite décidait la fin de l’AER pour le 1er janvier 2009 sous prétexte d’économies et surtout au nom du fameux « travailler plus pour gagner plus ». Le calcul était simple : ces anciens allocataires allaient vite retrouver un travail et ne coûteraient ainsi plus rien à la collectivité nationale.

Malheureusement, la crise est passée par là en 2008 et elle a été particulièrement violente pour les plus de 55 ans. Nombre d’entre eux ont été incités à partir en pleine tourmente, pensant sauver une entreprise ou libérer une place pour les plus jeunes, confortés dans l’idée que l’AER allait les aider à passer le cap douloureux d’un chômage de longue durée.

Hélas, ces personnes ont vite découvert avec effroi qu’elles pouvaient tout juste prétendre à l’Allocation spécifique de solidarité, l’ASS. Ainsi, dans l’attente de leur retraite, la moitié des seniors concernés n’ont perçu que 50 % des 960 euros de revenu maximum prévus par l’AER.

Devant l’ampleur de la contestation, mais aussi face à la réalité économique, le gouvernement Fillon a finalement prorogé l’AER à deux reprises, en 2009 et en 2010. L’allocation transitoire de solidarité, l’ATS, a été mise place au 1er janvier 2012 ; elle est en théorie destinée à résoudre les difficultés de ces chômeurs en fin de droit.

Preuve est faite, jour après jour, que ce dispositif manque sa cible, puisque, comme par hasard, moins de 10 % des allocataires potentiels en sont bénéficiaires.

Aujourd’hui, nous devons agir vite, et je fais confiance au Gouvernement pour qu’il trouve une solution.

Ce PLFSS doit être l’occasion de réparer une faute magistrale de la droite. Il doit aussi permettre de rappeler à nos concitoyens qu’ils peuvent compter sur la solidarité nationale.

Par ailleurs, je me réjouis de la décision du Gouvernement d’entreprendre, en 2013, une réforme globale du système des retraites. Celle-ci permettra non seulement de remettre à plat ces dispositifs, mais aussi de combler les déséquilibres et les inégalités.

Il faudra, par exemple, revenir sur la prise en compte de la pénibilité dans le droit à la retraite. Il s’agit là d’un enjeu d’équité de grande importance.

On constate de fortes inégalités d’espérance de vie entre catégories socioprofessionnelles. Or les critères de mise en œuvre de la retraite pour pénibilité se sont révélés trop restrictifs. Le nombre de demandes de retraite pour pénibilité se situe d’ailleurs bien en deçà des prévisions établies en 2010.

De plus, la situation de la branche vieillesse risque fortement de se dégrader à l’horizon 2017, en l’absence de mesures structurelles nouvelles décidées en 2013.

Une réforme globale des retraites est donc très attendue. L’issue de la concertation prévue au premier semestre de 2013 sur le fondement des projections démographiques et financières établies à la fin de 2012 par le Conseil d’orientation des retraites, le COR, permettra de prendre de nouvelles mesures.

Pour finir, ces dernières années, nous avons vu les déficits s’accumuler sans qu’apparaissent des réponses à la hauteur des problèmes.

Après cinq PLFSS de régression, nous passons enfin à un PLFSS de protection, tout en redressant les comptes sociaux.

Le PLFSS présenté par le Gouvernement réduit les injustices faites à certains salariés au moment de leur départ à la retraite, aux familles vulnérables, aux Français en situation difficile et aux femmes.

Face au contexte financier particulièrement difficile et à l’inquiétude grandissante des Français, l’ambition du PLFSS porte sur la protection, le redressement et la modernisation. Il répond aux attentes sociales de justice et de proximité des Français.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, mon intervention portera sur le secteur médico-social et sur la politique de la famille, mon confrère Alain Milon ayant déjà développé les arguments de notre groupe sur les dispositions du volet sanitaire.

Le secteur médico-social intéresse des chapitres particulièrement importants de ce PLFSS : plus de 13 milliards d’euros seront notamment consacrés aux établissements pour personnes âgées et personnes handicapées. L’ONDAM médico-social progressera d’ailleurs en 2013 de 4 %, donc plus vite que l’ONDAM global.

En période de disette budgétaire – le mot est faible –, cela intrigue. Ce gouvernement semblerait faire mieux que les précédents, sans propositions nouvelles sur la dépendance. À y regarder de plus près, toutefois, l’affaire est plus subtile que cela.

Marques d’ironie sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Je me suis attardé sur les mesures affectant les conseils généraux, acteurs essentiels du secteur médico-social, et cela d’autant plus que le Premier ministre avait déclaré, lors de l’entretien entre le Président de la République et les présidents de conseils généraux, qu’il serait prêt à considérer avec bienveillance les amendements susceptibles de prendre en compte certains problèmes collectivement reconnus.

Il faut en convenir, l’articulation entre le sanitaire et le médico-social n’est pas facile. Les intervenants sont nombreux : sécurité sociale, CNSA, ARS, CNAF…

Dans les territoires, ce sont les présidents de conseils généraux qui sont en première ligne et qui portent cette lourde responsabilité.

Si la situation s’aggrave au fil du temps pour certains – je pense aux conseils généraux –, d’autres ne dépensent pas tout leur budget ; je pense notamment à la CNSA et au fait que certaines sommes ne soient pas affectées à leur destination première, par exemple le Fonds national pour l’enfance.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

En ce qui concerne la médicalisation des établissements hébergeant des personnes âgées, la sous-consommation de l’objectif de gestion délégué, l’OGD, de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie devrait atteindre 200 millions d’euros en 2012.

En dépit de cette sous-consommation, vous avez annoncé, madame la ministre, que 160 millions d’euros seraient affectés à la poursuite du programme de médicalisation des établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes, les EHPAD, dans le cadre de la généralisation de ce qu’il est convenu d’appeler la « pathossification ».

Il conviendrait peut-être de mettre fin à une situation que l’on peut qualifier, sans exagération aucune, d’absurde.

En effet, si l’État peut librement décider d’améliorer la médicalisation des EHPAD et dégager des financements à travers ce PLFSS, il ne peut exiger que les départements accompagnent systématiquement et mécaniquement cette médicalisation en la complétant à hauteur de 30 % sur l’APA en établissement.

Dans le contexte financier actuel, les départements ne peuvent prendre en compte cette charge incluse sur l’APA en établissement, qui a aussi pour effet d’accroître le ticket modérateur, donc le « reste à charge » des résidents.

Les départements refusant de cofinancer cette médicalisation qui n’était pas prévue au départ, les crédits de l’assurance maladie ne sont pas consommés. Cette situation permet à la CNSA d’être excédentaire.

Cette sous-consommation permettrait opportunément de constituer un fonds d’urgence afin de venir en aide aux départements en difficulté – ils le sont presque tous maintenant ! Ce serait un juste retour : rappelons-le, quelque 54 % du montant de la contribution de solidarité pour l’autonomie, au lieu d’être affectés à la compensation de l’APA et de la PCH, renforceront l’ONDAM de l’assurance maladie.

Cependant, quels que soient les efforts, le compte n’y est pas. C’est près d’un milliard d’euros qui manque aux départements pour compenser l’APA à 50 %.

Permettez-moi de revenir sur la politique de la famille et la prise en charge des mineurs étrangers isolés, car il serait temps de trouver une solution aux problèmes qui se posent en la matière.

Faute de dispositifs d’accueil par l’État – lequel devrait logiquement mettre en place des établissements de protection de l’enfance en amont –, ce sont les structures de droit commun de l’aide sociale à l’enfance des départements qui sont conduites à prendre intégralement en charge les mineurs étrangers isolés, souvent remis directement par les forces de police.

Cette prise en charge devient insupportable. Elle relève de la politique de l’immigration. Les frais d’entretien et d’accompagnement au titre des mineurs étrangers isolés, accueillis par les établissements tarifés par les présidents de conseil généraux, devraient donc être refacturés et, en tout cas, imputés sur le Fonds national de protection de l’enfance. Au cours du débat, nous proposerons plusieurs amendements en ce sens.

En conclusion, madame la ministre, un certain nombre de crédits ne sont pas affectés là où il le faudrait. La prise en charge médico-sociale est une affaire partenariale. Les difficultés des conseils généraux, gravement affaiblis par le manque grandissant de compensation des trois allocations de solidarité, ne sont pas suffisamment prises en compte.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Absolument, chers collègues, et j’y reviendrai.

Pis, certaines décisions contribueront à aggraver leur situation. La médicalisation et la prise en charge des mineurs isolés en offrent deux illustrations, mais certains facteurs d’aggravation sont directement imputables au gouvernement actuel : les cotisations AT-MP des élus, qui porteront, notamment, sur le budget des départements ; l’augmentation des taux de la CNRACL, la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales ; la hausse du coût des transports scolaires avec une demi-journée d’école supplémentaire ; l’accroissement du nombre des bénéficiaires du RSA – dans un département comme le mien, il s’agit d’1 % d’allocataires en plus chaque mois ; les pénalités URSSAF sur les allocations mensuelles de l’aide sociale à l’enfance – j’ai cru voir qu’un arrêté venait d’être pris à ce sujet. Tout cela va continuer à aggraver le sort des départements.

C’est afin d’améliorer certaines situations sur le terrain, insuffisamment prises en compte dans ce PLFSS trop technique, que des amendements méritent d’être adoptés. Du reste, ils visent simplement à permettre à chaque acteur d’exercer pleinement ses responsabilités.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Si, comme l’a annoncé le Premier ministre, le Gouvernement considère avec bienveillance certaines propositions formulées par voie d’amendement afin de soutenir les départements, alors la situation peut s’améliorer. En tout cas, espérons-le : 2014 et la future loi sur l’autonomie sont encore loin, et certains départements n’attendront pas.

Outre la prise en charge intégrale de la médicalisation par l’assurance maladie dans les EPHAD, outre la prise en charge financière des mineurs étrangers isolés par l’État, j’ai formulé des propositions, en accord avec l’Assemblée des départements de France, l’ADF, comme chaque année, sur des modifications de prise en charge des patients entrant dans le cadre du plan Alzheimer ou sur la prise en compte de la progression de la masse salariale liée à des décisions nationales, et non locales, pour les établissements sociaux et médico-sociaux.

Madame la ministre, ces réclamations n’ont pas changé. Elles sont soutenues depuis des années par l’ADF. Elles paraissent comprises par tous. Or aucun signe n’a encore été donné. Et si la proposition de loi Roche, qui envisageait une compensation de l’APA à 50 % pour les départements grâce à l’élargissement des bases prises en compte pour la journée de solidarité a été votée par le Sénat il y a quelques semaines, ce n’est pas avec l’accord du Gouvernement.

Madame la ministre, nous attendons de pied ferme que des actes soient enfin pris dans ce PLFSS, car nous ne voyons encore rien venir.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’appréciation de notre groupe sur la branche accidents du travail-maladies professionnelles, ou AT-MP, sur laquelle je souhaite intervenir ce soir, s’inscrit dans une volonté forte et permanente de voir consolidé notre système de protection sociale.

Dans cet esprit, mon intervention portera, tout d’abord, sur l’évocation des dernières statistiques inquiétantes de sinistralité, ensuite, sur la situation financière de la branche ATMP, enfin, sur les mesures de justice ayant trait à cette branche contenues dans le présent PLFSS.

Selon les derniers chiffres officiels disponibles, ceux de l’année 2010, le nombre d’accidents du travail et de maladies professionnelles a augmenté. On compte ainsi 680 000 accidents du travail, soit une hausse de 1, 1 %, dont 45 000 accidents graves, et 55 057 maladies professionnelles, soit une augmentation de 2, 7 %.

Chaque jour, plus d’une personne décède d’un accident du travail ou des suites d’une maladie professionnelle ; chaque année, 3 000 personnes meurent en France en raison de l’amiante.

Par ailleurs, on observe une augmentation du travail de nuit, qui concerne aujourd’hui 3, 5 millions de personnes.

Pour les femmes, cette hausse constitue un facteur de risque supplémentaire. L’étude CECILE, menée en 2010 par l’Institut national de la santé et de la recherche médicale, l’INSERM, dans mon département d’Ille-et-Vilaine et dans celui de la Côte-d’Or, montre que le risque de cancer du sein augmente de 30 % chez les femmes ayant travaillé de nuit.

Les conditions de travail ont un impact direct sur la santé. Les personnes les plus exposées à la pénibilité sont celles dont l’espérance de vie à 35 ans est la plus faible.

Les conditions d’emploi ont aussi une incidence non négligeable. Les salariés sous contrat précaire sont plus exposés à des troubles dépressifs, à des accidents et à des maladies, dans la mesure où leur formation à la sécurité est moindre et où ils travaillent sur des postes à risques.

Enfin, il faut rappeler que, sur une longue période, depuis 2001, les dépenses de la branche AT-MP pour les maladies professionnelles sont passées de 1 milliard d'euros à 2, 2 milliards d'euros, soit 20 % des dépenses de la branche.

Cette évolution négative de la sinistralité liée au travail n’est pas admissible sur le plan humain et elle est de moins en moins supportable sur le plan financier.

La situation financière de la branche AT-MP est très fragilisée depuis 2003. La dette cumulée a notamment augmenté, et la branche se trouve en déficit après une quarantaine d’années au cours desquelles elle était excédentaire.

Depuis 2003, la branche a connu une succession de déficits allant de 100 millions d'euros à 700 millions d'euros en 2009 et 2010, ce qui explique que la dette cumulée atteigne 1, 7 milliard d’euros, selon le rapport sénatorial d’information de Jean-Pierre Godefroy et Catherine Deroche au mois de juillet 2012.

En 2012, pour la deuxième année consécutive, la Cour des comptes a refusé de certifier les comptes de la branche AT-MP : « Les insuffisances cumulatives du contrôle interne [...] et de l’activité de recouvrement portent atteinte à l’exhaustivité et à l’exactitude des cotisations sociales affectées à la branche AT-MP. » Vocabulaire inimitable pour qualifier l’obscurité de gestion...

Les causes de la dette sont tout autant structurelles que conjoncturelles.

Les transferts vers d’autres régimes ont été, en 2011, de 2, 562 milliards d'euros, en augmentation de 1, 8 % par rapport à 2010. Ils représentent maintenant 21, 7 % des charges imputables à la branche AT-MP, ce qui, sur le plan structurel, ne manque pas d’étonner.

En 2012, le transfert vers la branche maladie s’élève à 790 millions d’euros, au motif habituel de la sous-déclaration et de la sous-reconnaissance des AT-MP.

En ce qui concerne la branche vieillesse, la contribution pour les départs anticipés à la retraite pour pénibilité est de 110 millions d’euros en 2012, après 35 millions d'euros en 2011. Elle ne figure pas dans l’avant-projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013. Le Gouvernement indique que les crédits non utilisés de 2012 sont suffisants pour couvrir les prévisions de 2013, à raison de 300 à 400 demandes par mois. Il est prévu que cette contribution n’existe plus à la suite de la prochaine réforme de 2013 sur les retraites, ce qui nous semble sain et opportun.

J’en viens aux fonds destinés aux victimes de l’amiante.

Pour 2013, les montants proposés sont respectivement de 115 millions d’euros pour le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, le FIVA, soit une économie de 200 millions d'euros par rapport à 2011 et à 2012, et de 890 millions d'euros pour le Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, le FCAATA. Pour le FIVA, le Gouvernement indique que le fonds de roulement de 350 millions d'euros est suffisant pour couvrir 2013, ce dont nous prenons acte, et que la dotation sera revue au niveau nécessaire pour couvrir les besoins en 2014. Sur ce dernier point, nous faisons totalement confiance au Gouvernement.

La faiblesse de la progression de la masse salariale – chômage partiel, licenciements, précarité, etc. – dans les secteurs à forte sinistralité constitue une autre raison de la dette. Dans ces conditions, il est absolument nécessaire de relancer la croissance. C’est ce à quoi s’attelle le Gouvernement.

Le coût des procédures contentieuses pour la branche AT-MP a explosé depuis plusieurs années. Il a augmenté de 70 millions d'euros par rapport à 2010, pour atteindre 520 millions d'euros en 2011. Il pèse donc de façon non négligeable sur le résultat comptable de la branche.

La réforme de l’instruction des procédures d’AT-MP, prévue par le décret du 29 juillet 2009 et entrée en application le 1er janvier 2010, a pour objet de limiter cette inflation procédurière.

C’est en effet un véritable marché qui s’est peu à peu créé sur ce point avec l’externalisation de la gestion du risque AT-MP vers des cabinets spécialisés et la systématisation des recours. Ce faisant, nombre de grandes entreprises ont cessé de s’impliquer dans la gestion de ce risque, ce qui est particulièrement regrettable.

Quelle solution peut être proposée pour assainir la situation de cette branche ?

Avec un déficit cumulé de 1, 7 milliard d’euros, que l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS, estime à 2, 2 milliards d’euros en prenant en compte les besoins du fonds de roulement et le calendrier des transferts sur d’autres branches, il est évident qu’une augmentation des cotisations des employeurs devient inévitable.

Au demeurant, il convient de rappeler que, si le taux moyen actuel n’est que de 2, 385 % de la masse salariale, il était en 1981 de 4 %. Depuis lors, il a connu une série de baisses, dont une importante diminution en 1993, passant alors à 2, 6 %, sans que celle-ci soit justifiée par une réduction significative des accidents du travail et maladies professionnelles ou une responsabilisation particulièrement remarquable des entreprises en matière de prévention.

Considérant que 0, 1 point de cotisations représente environ 500 millions d'euros payés par 2, 3 millions d’employeurs cotisants, une augmentation unique de 0, 4 point représenterait immédiatement la résorption de la dette. Ce pourrait être une solution. Toutefois, cette mesure budgétaire est inappropriée dans le contexte économique actuel.

Le Gouvernement propose donc une autre approche, plus adaptée, pour à la fois prendre en compte la fragilité de la situation financière de la branche AT-MP et commencer à apurer la dette cumulée, tout en créant et finançant des mesures de justice pour mieux accompagner les victimes du monde du travail. Cela ne peut que recueillir l’adhésion de notre groupe parlementaire.

Comment améliorer la structure financière de la branche ?

En 2013, en tendanciel, c’est-à-dire sans mesures correctrices, le déficit de la branche devrait atteindre 154 millions d’euros. Avec les nouvelles mesures proposées dans le projet de budget qui nous est présenté, à savoir le relèvement de 0, 05 point des cotisations dues par les employeurs, l’amélioration du recouvrement des sommes dues en cas de faute inexcusable de l’employeur prévue à l’article 66, qui devrait rapporter 10 millions d’euros en 2013, et la diminution, aujourd’hui possible, de la dotation au FIVA, le régime général de la branche AT-MP sera excédentaire à hauteur de 300 millions d’euros. Il s’agit donc là d’un point très positif, puisque serait enfin stoppée l’augmentation de la dette avec, en perspective, sa résorption à moyen terme.

S’agissant des mesures de justice et d’équité prévues dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, elles étaient attendues avec impatience par les intéressés et leurs associations représentatives.

Ainsi, l’actuelle majoration pour tierce personne sera remplacée par la création de la prestation d’aide à l’emploi pour tierce personne pour les victimes d’AT-MP, mesure prévue à l’article 65. Cette dernière disposition répond à une revendication justifiée des partenaires sociaux dans l’accord interprofessionnel du 12 mars 2007 sur la prévention, la tarification et la réparation des risques professionnels.

Les salariés dont l’incapacité permanente, à la suite d’un sinistre professionnel, est d’au moins 80 % et qui sont dans l’incapacité d’effectuer les actes ordinaires de l’existence sans l’assistance d’autrui bénéficient d’une majoration pour tierce personne.

Aujourd’hui, le montant de cette prestation n’est pas fondé sur leurs besoins réels.

L’article 65, applicable au 1er janvier 2013, crée donc une nouvelle prestation, dont le montant ne dépendra plus de celui de la rente, mais sera fonction des seuls besoins d’assistance de la personne.

Il s’agit bien d’une mesure de justice sociale et d’équité qui est tout à l’honneur du Gouvernement. Le financement de cette mesure représente 0, 01 point de hausse des cotisations employeurs, inclus dans le 0, 05 point dont j’ai fait état précédemment.

Il en est également ainsi des mesures prévues à l’article 66, comme l’obligation d’un remboursement immédiat par l’employeur du capital représentatif de la hausse de la rente, en cas de faute inexcusable ayant causé un accident du travail ou une maladie professionnelle.

Enfin, pour les travailleurs victimes de l’amiante, l’article 67 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 étend à tous les régimes de retraite la possibilité pour les bénéficiaires d’une allocation de cessation anticipée d’activité de liquider leur pension dès 60 ans en cas de carrière complète. Auparavant, cette possibilité n’était ouverte que dans certains régimes. Des différences de traitement injustifiées et particulièrement choquantes pourront donc être corrigées.

Je conclurai mon intervention en soulignant que les mesures contenues dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, notamment celles qui concernent le volet AT-MP, vont dans le bon sens. Mon groupe votera donc les articles relatifs à la branche accidents du travail et maladies professionnelles, tout comme il votera, en toute confiance, l’ensemble de ce texte.

Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Excellente intervention !

Souriressur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Étienne Antoinette

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le thème de la transition semble être le fil conducteur de la discussion de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013.

Tout d’abord, on constate une amélioration, puisqu’à un héritage financier catastrophique succède un effort important de redressement des comptes sociaux.

Ensuite, on note une temporisation, car s’il reprend nombre d’objectifs formulés par le Sénat, ce texte ne porte pas encore les réformes d’ampleur nécessaires au renforcement de notre protection sociale. Cependant, en laissant du temps au Haut Conseil du financement de la protection sociale, ce projet de budget pour 2013 propose des mesures importantes pour protéger notre système de santé contre les atteintes qui lui ont été portées. C’est donc bien de rénovation qu’il s’agit.

Enfin, on remarque une transition dans l’examen législatif. La tension que les élus d’outre-mer connaissent particulièrement bien entre les préoccupations sociales légitimes, les solutions que l’on pense les mieux adaptées pour améliorer la condition de nos concitoyens et la nécessaire solidarité avec un Gouvernement que l’on souhaite toujours plus à l’écoute menace de réduire la discussion de ce texte devant notre assemblée à un bref épisode entre deux prises de décisions de nos collègues du Palais-Bourbon.

Ce risque me conduit à évoquer plus particulièrement deux mesures sur lesquelles je souhaite attirer l’attention.

Il s’agit, tout d’abord, du financement de l’hôpital.

À raison, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 abroge la convergence tarifaire et reporte l’application de la tarification à l’acte.

À raison encore, ce budget double la dotation destinée au Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés et illustre la priorité donnée à l’hôpital.

Il me revient cependant d’insister une nouvelle fois sur la faiblesse de la prise en compte du caractère singulier de la situation des établissements de santé en outre-mer.

L’offre de soins dans ces départements est plus qu’insuffisante, les difficultés y sont multipliées par les charges qui restent bien supérieures à celles qui sont supportées par les établissements métropolitains : frais des évacuations sanitaires de la Guyane vers la Martinique ou la métropole, difficultés de recrutement de praticiens spécialistes, indemnités de vie chère des personnels...

Est-il encore besoin de rappeler ce qui fait le surcoût financier des entreprises de santé en outre-mer ?

Un exemple suffit pour illustrer les conditions d’exercice budgétaire proprement hallucinantes du centre hospitalier de Cayenne : le mètre cube d’oxygène liquide revient à 9 800 euros, alors qu’il coûte environ 300 euros en métropole. Le surcoût dépasse ainsi 1 million d’euros pour le budget annuel de cet établissement.

Il paraît donc nécessaire que la revalorisation du coefficient géographique correcteur et la répartition du financement des missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation se réalisent et tiennent compte des besoins des acteurs locaux de santé pour une offre de soins d’une qualité identique sur l’ensemble du territoire.

Les praticiens ont chiffré à 30 % le coefficient géographique, contre 26 % aujourd’hui, en Guyane, mais également en Martinique ou en Guadeloupe. Cette mesure nécessaire pour éviter l’étranglement financier des centres de soins dans les départements français d’Amérique aura-t-elle une traduction d’ici au mois de mars prochain ?

Par ailleurs, comme dans de nombreuses régions de France, la démographie médicale est sinistrée en outre-mer, notamment en Guyane.

Si, en dehors des différentes incitations financières visant à augmenter l’attractivité d’un territoire vis-à-vis des professionnels de santé, les réponses à apporter interviennent sur plusieurs champs qui vont bien au-delà du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, il est important que cette problématique soit avancée comme une priorité lors de nos débats.

L’offre de soins étant déterminée par l’État, au moyen, notamment, du numerus clausus et de différents schémas d’organisation, peut-être faudrait-il utiliser la voie législative pour mieux organiser, de manière plus égalitaire, la répartition de cette offre de soins sur le territoire français.

Je pense qu’il est inutile de rappeler que les inégalités de santé ont, elles aussi, un impact défavorable sur les dépenses : une prise en charge tardive des patients alourdit le coût de leur traitement.

La seconde transition que je souhaite aborder est celle du régime de cotisation des particuliers employeurs. Le Gouvernement avance de sérieux arguments en faveur de la suppression de l’assiette forfaitaire : l’abrogation de cette niche fiscale qui ne renforce pas la protection sociale des employés se justifie au regard de son coût.

Toutefois, la suppression de la possibilité de choisir la cotisation forfaitaire entraînerait celle d’autres régimes spéciaux fondés sur cette possibilité. Dans les départements d’outre-mer, la cotisation sociale forfaitaire due pour l’emploi à domicile était établie, depuis 1994, sur une assiette de 0, 76 SMIC dans les Antilles et la Guyane et de 0, 4 SMIC à la Réunion.

L’étude d’impact du PLFSS pour 2013 reste muette sur les conséquences de l’application de cette abrogation générale dans les départements d’outre-mer, qui bénéficiaient de ce régime forfaitaire avantageux. Madame la ministre, je ne peux penser que vous ne serez pas attentive à cette situation particulière, et j’espère donc que vous conserverez le dispositif en l’état, au moins jusqu’à la réception des travaux du Haut Conseil du financement de la protection sociale au printemps prochain, ou d’une étude circonstanciée des effets de l’abrogation de cette cotisation forfaitaire dans les départements d’outre-mer.

Enfin, je souhaite aborder la question du pouvoir d'achat des retraités, qui fait l’objet de plus de débats encore que celui des autres citoyens. En effet, l’augmentation de la pauvreté des personnes âgées conduit de plus en plus de retraités à poursuivre une activité professionnelle au-delà de 70 ans. Cette situation remet en cause le principe même de la protection sociale dans notre démocratie.

L’évolution est particulièrement problématique dans les outre-mer : alors même que le coût de la vie y est élevé, les seniors doivent faire face à une baisse brutale de leurs revenus du fait de la suppression de la majoration de 40 %, qui s’ajoute au manque à gagner résultant du mode de calcul de la pension. La pauvreté étant un déterminant de la santé, si nous n’opérons pas rapidement une transition permettant une hausse du niveau de vie des seniors, il y aura inéluctablement à terme un impact négatif sur les dépenses de santé, d’autant que les seniors représentent une part croissante de la population.

La transition entre notre protection sociale actuelle et celle que nous souhaitons pour les années à venir doit se traduire par une amélioration. L’offre de soins, déjà à l’agonie en outre-mer, ne saurait résister à une nouvelle dégradation.

En conclusion, je voterai le PLFSS pour 2013, mais je resterai vigilant quant aux réponses du Gouvernement aux préoccupations que je viens d’exposer.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Fichet

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la question des déserts médicaux a pris une large place dans les débats à l’Assemblée nationale. À cette occasion, madame la ministre, vous avez réaffirmé que les difficultés d’accès aux soins étaient une réalité et que le Gouvernement mènerait plusieurs actions pour y remédier.

L’accord sur les dépassements d’honoraires est une première étape dans la lutte contre la barrière financière. La création d’un contrat de praticien territorial en est une autre. Vous avez annoncé qu’un plan global serait mis en œuvre, et nous ne pouvons que nous en féliciter.

La présence ou non de professionnels de santé est un facteur essentiel pour la survie de nos zones rurales, mais aussi périurbaines. Cette question est fondamentale pour l’aménagement du territoire.

C’est la raison pour laquelle la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire du Sénat s’est saisie de cette problématique, au travers de la création d’un groupe de travail sur la présence médicale, que j’ai l’honneur de présider. Hervé Maurey, qui en est le rapporteur, les autres membres du groupe et moi-même avons d’ores et déjà procédé à de nombreuses auditions. Nous rendrons nos conclusions au début de l’année 2013. Ce sera, je l’espère, madame la ministre, l’occasion de formuler des propositions nouvelles, au plus près des attentes de nos concitoyens, tout en répondant au souhait des professionnels de n’être plus seuls dans l’exercice d’une profession exigeante et de bénéficier de meilleures conditions de travail.

Sans préjuger des conclusions de notre groupe de travail, mais afin que cette question soit très présente au moment où nous examinons le PLFSS pour 2013, j’ai déposé un amendement pour que le débat soit ouvert et différentes pistes explorées. Je souhaite profiter de cette discussion pour rappeler que, sur cette question, l’attente des élus est immense. Nous l’avons vu : l’Association des maires de France et l’Association des maires ruraux de France ont, chacune à leur tour, lancé un appel au secours.

Si la présence médicale est une grande préoccupation des élus, et au premier chef des maires, c’est parce que c’est vers eux que se tournent les administrés quand le service public de la santé est mis à mal. Ce sont les élus qui tentent d’apporter des solutions en investissant dans des pôles ou des maisons de santé, qui doivent constituer de véritables solutions pérennes.

Aujourd’hui, les pharmaciens et les infirmières doivent prendre en compte l’offre existante dans les territoires avant leur installation et orienter leur projet vers les zones en situation de besoin. C’est ce même esprit qui peut nous guider pour améliorer l’offre médicale dans les secteurs en difficulté, que ce soit en milieu rural ou dans les zones périurbaines.

J’ai souhaité déposer deux autres amendements, cosignés par l’ensemble de mes collègues du groupe socialiste. Le premier tend à engager le dialogue sur les conséquences positives qu’aurait la réhabilitation du métier d’herboriste sur les comptes de la sécurité sociale. Cette question me tient particulièrement à cœur, madame la ministre. J’ai en effet déposé, le 12 juillet 2011, une proposition de loi visant à créer un diplôme et organiser la profession d’herboriste.

Le Centre d’analyse stratégique, qui dépend du Premier ministre, a tout récemment publié une étude dans laquelle il plaide pour une reconnaissance des médecines non conventionnelles, et en particulier de la phytothérapie. L’achat de plantes médicinales, écrit son auteur, est « en forte croissance depuis dix ans […], notamment avec la hausse de l’automédication ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Fichet

Elle ajoute : « En 2003, la vente de plantes médicinales a été estimée à presque 4 milliards d’euros sur le marché européen. La France, où la phytothérapie est la deuxième pratique non conventionnelle la plus utilisée, est le deuxième marché européen des plantes médicinales, derrière l’Allemagne. »

Le Centre d’analyse stratégique classe la phytothérapie et l’aromathérapie parmi les quatre médecines non conventionnelles les plus courantes, avec l’homéopathie et l’acupuncture.

Le développement de l’herboristerie permettrait de protéger le consommateur, de donner des gages de qualité et d’agir efficacement, en complément des traitements traditionnels. Il participerait ainsi à la maîtrise du déficit de notre système de sécurité sociale. Il contribuerait également à améliorer la prévention et le bien-être. En effet, les plantes médicinales interviennent dans les traitements contre le sida ou les cancers, notamment pour éliminer certains effets secondaires des traitements. Les plantes sont entrées à l’hôpital, mais leur utilité dans le processus des soins de support est trop souvent méconnue.

Par ailleurs, des médecins spécialement formés à l’emploi des plantes, les phytothérapeutes, prescrivent déjà l’utilisation de ces dernières. Cet engouement pour les plantes médicinales a très certainement des conséquences financières pour notre système de santé, puisqu’il entraîne une consommation moins importante de médicaments. Il convient donc, madame la ministre, d’avancer vers une reconnaissance de la profession d’herboriste.

Cette reconnaissance permettrait de créer de nouveaux emplois dans de multiples domaines, d’améliorer la protection des consommateurs et de lutter contre les charlatans qui pullulent sur Internet, de favoriser la qualité, la transparence et le respect des ressources dans une volonté de développement durable, de rendre plus dynamique la filière agricole des plantes, en particulier en favorisant sa transition vers l’agriculture biologique, enfin de conserver notre patrimoine culturel commun. Aujourd’hui, plus de 80 % des plantes utilisées en France sont importées.

Le second amendement que j’ai déposé avec mes collègues du groupe socialiste vise à demander au Gouvernement de remettre en vigueur l’allocation équivalent retraite, l’AER, ou, à défaut, d’instaurer un dispositif moins restrictif que l’allocation transitoire de solidarité, l’ATS, afin de permettre aux anciens salariés concernés, qui seraient près de 30 000, dont de nombreuses femmes, de conserver une vie décente jusqu’à leur retraite.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine

Je voudrais tout d'abord m’adresser à l’opposition, qui s’est évertuée à faire passer l’idée que nous ne proposions pas de ligne directrice ni de mesure forte pour les Français.

À mon sens, c’est plutôt le manque de courage – ou de volonté, je ne sais – de la droite qui a été criant ces dernières années. Le résultat est sans appel, mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition : non seulement vous n’avez pas engagé les réformes de fond qui étaient attendues – vous avez dit vous-mêmes qu’elles répondaient à des attentes fortes –, qu’il s’agisse de l’accès aux soins, de la réduction des déserts médicaux, de la maîtrise médicalisée des dépenses de santé, de la réforme des retraites ou encore de la politique familiale, …

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

La réforme des retraites, ce n’est pas une réforme de fond ?

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

… mais vous avez laissé se creuser un déficit spectaculaire, abyssal même, qui a réduit les protections auxquelles nos concitoyens sont en droit de prétendre. Par conséquent, vous êtes mal placés pour nous accuser aujourd'hui de ne pas présenter une vision cohérente et globale.

Monsieur Milon, vous nous avez reproché de nous en tenir à une vision comptable des problèmes. Je sais cependant que, dans votre bouche, il s'agit d’une critique minimale, puisque certaines de vos propositions ont été intégralement reprises dans ce PLFSS pour 2013. Il vous est donc difficile, malgré vos efforts, de vous démarquer de ces mesures… Il reste que vous vous êtes exprimé avec une courtoise toute républicaine.

Cependant, vos propos entrent avec contradiction avec ceux de Philippe Bas, que j’ai écoutés attentivement. En effet, votre collègue nous a reproché non pas de nous en tenir à une vision comptable, ce qui signifierait que nous ne préoccuperions que des objectifs financiers, mais de faire preuve d’inconstance en matière budgétaire. Il a notamment fait référence aux propositions que nous avons récemment mises en avant pour améliorer la compétitivité de notre économie.

Or il s’agit d’un raccourci difficilement compréhensible, puisque l’un des axes forts du plan de compétitivité annoncé voilà quelques jours est précisément d’établir une distinction claire entre, d'une part, la stratégie de compétitivité de nos entreprises, et, d'autre part, la question du financement de la protection sociale, afin de mettre fin à la confusion des genres qu’avait introduite, au début de l’année, la majorité que vous souteniez, monsieur Bas.

Les travaux du Haut conseil du financement de la protection sociale sont en cours. Ils déboucheront sur des propositions au début de l’année prochaine. L’enjeu est de sécuriser dans la durée le financement d’une protection sociale à laquelle notre majorité est attachée et dont nous savons que son coût ne va pas diminuer dans les années à venir, compte tenu du vieillissement de la population, de l’accroissement des besoins causé par le développement des maladies chroniques et de l’amélioration d’un certain nombre de traitements.

Contrairement à ce que vous avez indiqué, il existe une différence très nette dans notre esprit entre une stratégie en faveur de la compétitivité des entreprises et la mise en place d’un financement pérenne de la protection sociale.

Vous avez regretté avec une mauvaise foi souriante, je dois le reconnaître, mais une mauvaise foi tout de même, que nous ne mettions pas en place suffisamment vite une politique de prise en charge de la perte d’autonomie. Je veux y voir un trait d’humour, compte tenu de la rapidité toute manifeste avec laquelle la droite au pouvoir s’est emparée du sujet ces dernières années… §

Quant à la question des retraites, nous avons annoncé l’engagement d’une concertation pour l’année prochaine, mais, dès ce projet de loi, nous avons apporté 7 milliards d’euros de recettes supplémentaires au régime de retraite, excusez-nous du peu ! C’est bien que nous avons la volonté de mettre en place des réformes structurelles. Pour ce qui est de la mesure de « retour » à 60 ans pour une partie de la population, elle est entièrement financée par une hausse, qui reste minime, d’un prélèvement alimentant la sécurité sociale.

J’ai bien entendu les propositions de M. Dassault, évoquées rapidement, pour un financement pérenne de notre protection sociale.

Monsieur Vanlerenberghe, vous m’avez interrogée sur notre calendrier de retour à l’équilibre. L’engagement du Président de la République et de la majorité est bien celui d’un redressement des comptes publics à l’horizon 2017. Cet objectif sera atteint

M. Jean-Marie Vanlerenberghe manifeste son scepticisme.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

Madame Dini, vous avez évoqué la T2A, la tarification à l’activité, et ses prétendus effets salutaires. Je vous rappelle que le rapport de la MECSS – dont les auteurs sont MM. Milon et Le Menn –, voté à l’unanimité, a exprimé fortement la nécessité d’une évolution du système de tarification de l’hôpital vers plus de transparence et de justice dans l’allocation des ressources, pour améliorer la qualité de service. Nous avons pris cela en compte dans le PLFSS.

Pourtant, monsieur Milon, vous en arrivez à critiquer une mesure que vous avez vous-même préconisée, à savoir la fin de la convergence tarifaire, en affirmant qu’une suspension serait plus efficace aujourd’hui qu’une abrogation.

M. Alain Milon fait des signes de dénégation.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

Sachez qu’il n’est pas question pour nous d’une simple parenthèse. Il s’agit d’une mesure forte, attendue par les acteurs du système de santé et par les patients, même si ces derniers, en réalité, se préoccupent assez peu des mécanismes de financement de l’hôpital, car ils veulent surtout que celui-ci soit garanti et conforté dans ses missions.

Enfin, vous m’avez interrogée sur le devenir du service de médecine de l’adolescence du CHU du Kremlin-Bicêtre. Soyez rassuré, il n’est pas menacé. Bien au contraire, cet établissement hospitalier est en train d’élaborer un projet d’envergure, qui permettra la prise en charge globale des adolescents, intégrant également le traitement des maladies chroniques et de l’obésité.

Monsieur Barbier, vous avez estimé que l’accord sur les dépassements d’honoraires emportait une stigmatisation des professionnels de santé, des médecins. À mes yeux, le choix de la négociation est tout le contraire. Le fait que l’accord ait été signé par trois syndicats majoritaires indique que les médecins, dans leur immense majorité, ne se sont pas sentis stigmatisés.

En tout cas, je tiens à le redire, les médecins sont évidemment essentiels au fonctionnement de notre système de santé. Il ne peut pas y avoir de système de santé sans médecins et personne n’a eu l’idée de soutenir le contraire ! J’ajouterai même qu’il ne peut pas y avoir, dans notre pays, compte tenu de son histoire et de la manière dont s’est structurée et organisée l’offre de soins, de système efficace et adapté sans professionnels libéraux.

Est-ce à dire qu’une régulation est inutile ? Je ne le pense pas. Les patients attendent non pas des discours idéologiques sur ces questions, mais précisément la mise en place d’un système qui les sécurise dans leur accès aux soins. Vous le voyez, nous sommes bien loin de la stigmatisation que vous avez évoquée.

Madame Procaccia, vous avez consacré l’essentiel de votre propos à la branche famille. Au travers de ce PLFSS, c’est une politique familiale résolument à gauche, ancrée dans la solidarité entre les familles que nous proposons. Elle reconnaît toutes les familles et tend à l’égalité entre les hommes et les femmes, ainsi qu’à la prise en compte des nouvelles formes familiales existant aujourd’hui.

Monsieur Savary, je vous rappelle que l’ONDAM pour 2013 permet de préserver des moyens en hausse substantielle pour le secteur médico-social. Je ne suis pas certaine d’avoir bien suivi votre démonstration selon laquelle il y aurait un sous-ONDAM à 4 %, qui cacherait en réalité un taux probablement inférieur puisque nous ne faisions pas la réforme de la dépendance – que vous reconnaissez n’avoir pas faite vous-même lorsque vous étiez au pouvoir. En gros, vous nous dites que, dans la mesure où vous n’avez pas fait grand-chose, …

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

… vous ne voyez pas bien comment nous pourrions faire plus ! Je vous remercie de cette démonstration, qui a au moins le mérite de montrer que la précédente majorité n’a pas beaucoup agi.

Pour le reste, soyez rassuré, la qualité des relations avec les conseils généraux est une priorité pour nous. Pour ma part, j’y suis extrêmement attachée, puisque je ne peux pas oublier les fonctions que j’ai occupées par le passé.

À l’évidence, nous avons besoin de consolider et de sécuriser les départements dans la prise en charge des allocations universelles leur incombant, en particulier l’allocation personnalisée d’autonomie, qui a été très souvent abordée dans le débat aujourd’hui, y compris par vous, monsieur Savary. On pourrait aussi évoquer le RSA et la PCH, pour ce qui est des conseils généraux, même s’il faut noter la forte montée en puissance, en quelque sorte en miroir, de l’AAH pour l’État.

Vous voyez bien que ce travail suppose de s’inscrire dans la durée et, comme j’ai eu l’occasion de le dire, nous allons organiser des concertations approfondies dans la perspective à la fois de la décentralisation et de la réforme de la perte d’autonomie. Il s’agira d’améliorer les relations entre l’État et les conseils généraux. Cela passe aussi par une réflexion sur les modes de financement pérennes des allocations, qui n’a jamais été menée par le passé.

Je souhaite maintenant remercier les parlementaires de la majorité du soutien fort et affirmé qu’ils m’ont apporté, après celui qui a été exprimé par les différents rapporteurs en introduction de ce débat. Néanmoins, certains d’entre eux ont fait part de quelques interrogations, ce qui me paraît normal et salutaire dans une démocratie comme la nôtre.

Madame Génisson, au-delà du soutien que vous avez manifesté aux mesures fortes, décidées notamment dans le domaine de la santé, vous m’avez interrogée sur la revalorisation des actes dans le cadre de l’accord sur les dépassements d’honoraires. S’agissant d’un enjeu effectivement important, un effort substantiel a été consenti sur le tarif opposable d’une série d’actes. Il faut mesurer la valeur que représente cet engagement en période de crise et de restrictions financières. Cet accord, j’y insiste, a un objet fondamental, l’accès aux soins de nos concitoyens. Il vise aussi à lever les obstacles existants.

Tout d'abord, il comporte tout d’abord des mesures de valorisation du travail des médecins engagés en secteur 1, au travers de l’amélioration du forfait médecin traitant.

Ensuite, il prévoit la revalorisation d’un certain nombre d’actes de médecins exerçant tant en secteur 1 qu’en secteur 2, qui pratiquent donc, ou non, le dépassement d’honoraires. Ainsi, certains actes, en particulier en chirurgie, dont on parle beaucoup aujourd’hui, feront l’objet d’une revalorisation sur les trois prochaines années, ce qui n’avait pas été le cas depuis longtemps.

M. Gilbert Barbier manifeste son scepticisme.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

Monsieur Watrin, vous avez appelé de vos vœux un PLFSS marquant le changement. À mes yeux, c’est bien ce qui caractérise le texte que nous vous présentons. Vous avez vous-même, et je vous en remercie, rappelé les grandes mesures qu’il contient.

Cependant, vous avez affirmé que l’institution d’une contribution additionnelle de solidarité sur les pensions de retraite et d’invalidité, prévue à l’article 16, était « une mesure de droite ». Je ne sais pas si l’opposition, dans cet hémicycle, partagera votre analyse ! En tout cas, pour ma part, je n’y souscris pas. À ce sujet, je tiens d’ailleurs à remercier Mme Ghali et M. Desessard, qui ont rappelé que cette mesure de justice ne touchait pas les petites retraites et qu’elle s’inscrivait dans une logique d’équité.

Je le répète, dans l’opposition comme aujourd'hui dans la majorité, nous avons toujours souhaité une grande réforme pour l’autonomie des personnes âgées, longtemps promise et jamais réalisée jusqu’à ce jour. Pour que cette réforme puisse s’engager sur les bases d’un financement relevant non pas de l’assurance privée, mais de la solidarité, nous avons besoin de solliciter la participation de tous. Personne ne comprendrait que les retraités imposables – j’insiste sur ce qualificatif – soient la seule catégorie de la population à ne pas être mise à contribution pour la dépendance et la perte d’autonomie.

Comme j’ai déjà eu l’occasion de vous le dire, je serai extrêmement attentive à ce que l’évolution de notre système de protection sociale se fasse bien dans la cohésion et le rassemblement de l’ensemble de la population. L’un des enjeux est la lisibilité de notre système de protection sociale et la confiance que tous les Français, en particulier, aujourd’hui, les jeunes actifs, ont dans sa capacité à leur apporter des garanties dans la durée.

S’agissant de la dépendance, nous évoquons évidemment un phénomène qui arrive tard et même, souhaitons-le, le plus tard possible dans la vie de chacun. Il est compréhensible que les jeunes actifs de 30 ans ou 35 ans, à qui l’on demande d’apporter une contribution pour créer un nouveau droit, car c’est bien de cela qu’il s’agit, au profit de générations qui ont moins connu le chômage que celles d’aujourd'hui, qui ont connu des carrières plus continues, moins interrompues, moins difficiles, s’interrogent sur la légitimité et le bien-fondé de notre système de protection sociale.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

J’y insiste, la question de la cohérence, de la cohésion, de l’égalité de la contribution demandée à chacun n’est pas simplement d’ordre financier. Il s’agit, certes, de dire qu’à revenu égal la contribution doit être égale, quel que soit l’âge que l’on a. Au fond, un retraité qui touche une pension de 2 000 ou 2 500 euros a autant le devoir de contribuer que l’actif qui bénéficie d’un revenu équivalent.

Toutefois, au-delà de cette exigence d’équité financière, et dès lors, encore une fois, que nous parlons des retraités imposables, il y va de la solidité, de la crédibilité, de la légitimité de notre système de protection sociale. Permettez-moi d’insister sur ce point, car j’entends souvent les jeunes générations s’interroger sur le devenir de ce système, en ayant le sentiment qu’elles sont confrontées à des conditions de vie, de travail, d’acquisition des droits sociaux bien plus difficiles que celles qu’ont connues les générations passées, compte tenu de l’évolution globale de la situation économique.

Il ne s’agit pas de stigmatiser les générations passées, et tant mieux si la situation a pu être pour elles plus facile et meilleure. Pour autant, il nous faut l’entendre, la solidarité entre les générations passe aussi par un financement intergénérationnel des droits que nous voulons construire.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

Madame Schillinger, je vous confirme que, dans le cadre de ce PLFSS, le Gouvernement a souhaité prendre une mesure immédiate pour relever le niveau des retraites des agriculteurs qui ont dû interrompre leurs activités pour cause d’invalidité ou de longue maladie. Ne l’oublions pas, d’autres mesures devront suivre ; elles seront élaborées l’année prochaine, à l’occasion d’une réflexion d’ensemble sur les retraites, menée notamment dans le cadre d’un groupe de travail conduit avec le ministre de l’agriculture, Stéphane Le Foll.

Vous m’avez également interrogée sur la situation des chômeurs âgés, soulignant combien la suppression de l’AER fut éprouvante pour nombre de nos concitoyens. Je le répète une fois de plus, je suis parfaitement consciente des difficultés et très attentive aux situations qui ont pu être ainsi créées. Le Gouvernement a permis le retour à la retraite à 60 ans pour une partie de la population. C’est une première réponse. Nous devons prendre le temps d’évaluer les effets précis de la suppression de l’AER avant de décider si d’autres évolutions sont nécessaires pour y faire face : des études sont en cours et, sur cette base, le Gouvernement examinera les réponses envisageables.

Dans votre propos, madame Cohen, vous avez salué le gel de la convergence tarifaire. Je tiens à vous le préciser, il s’agit non pas simplement d’un gel, mais bel et bien d’une suppression, puisque la convergence est injuste dans ses principes, inéquitable dans son application et inefficace dans ses résultats.

Cette suppression s’inscrit dans la perspective de la réhabilitation du service public hospitalier et de la reconnaissance des missions spécifiques réalisées par l’hôpital public, pour lesquelles des mesures figurent d’ailleurs aussi dans ce PLFSS.

Vous avez fortement regretté que le taux de progression de l’ONDAM ait été fixé à 2, 7 % et qu’il n’atteigne pas 3 %, car il s'agit pour vous d’un point important. Dans le contexte financier que nous connaissons, le Gouvernement assume parfaitement ses choix, tant il est vrai que les comptes sociaux doivent participer à la trajectoire de rétablissement de l’équilibre de nos comptes publics.

Pour autant, la santé est une priorité, ce qui explique que le taux de progression ait été porté à 2, 7 %, contre 2, 5 % en 2012. Il ne s’agit pas d’accompagner l’évolution des dépenses au fil de l’eau, car alors une hausse de 3 % n’aurait même pas été suffisante : il aurait fallu prévoir bien davantage.

Nous nous donnons les moyens d’investir dans des réformes de fond, qui nous permettront à la fois de mieux répondre aux attentes des patients et de réaliser très concrètement des économies.

Pour mieux soigner, pour aboutir à des traitements plus efficaces ou pour accompagner le vieillissement, il nous faut dégager des marges financières suffisantes : cela suppose aussi d’étudier les pistes d’économies possibles.

Il est inenvisageable, je l’affirme clairement, de vouloir répondre aux besoins nouveaux sans procéder à une évaluation des politiques existantes.

Plus généralement, mesdames, messieurs les sénatrices et sénateurs de la majorité, je veux vous remercier d’avoir souligné les avancées contenues dans ce PLFSS.

Ainsi, Jean-Pierre Plancade a rappelé que le texte s’inscrivait dans une démarche d’équité et de justice, au travers de la mise en place de praticiens territoriaux de médecine générale, des nouvelles modalités de versement du complément de mode de garde ou des mesures prises en faveur des femmes, en particulier pour ce qui concerne l’IVG.

Pour leur part, Aline Archimbaud et Jean Desessard ont évoqué un PLFSS de rupture, soulignant qu’il n’introduisait aucune remise en cause des prestations tout en permettant de nouvelles avancées essentielles.

Vous avez regretté, madame Archimbaud, qu’il ne comporte pas de mesures plus fortes en faveur de la santé environnementale. Or le projet de loi de santé publique que nous sommes en train de préparer permettra de donner, en 2013, un élan véritable à un domaine qui a en effet été totalement oublié au cours des dernières années. Pour autant, des mesures ont d'ores et déjà été prises. Je pense à l’adoption de la proposition de loi relative à l’interdiction du bisphénol A et à la volonté du Gouvernement d’afficher, dans le PLFSS, une volonté plus marquée en direction des stratégies comportementales, et ce dans la droite ligne des annonces faites à l’issue de la grande conférence environnementale.

Madame Meunier, vous avez rappelé les avancées majeures pour les familles que contient ce PLFSS. Il était en effet important de conforter, de consolider dans notre société, loin de toute vision abstraite, le rôle des familles, de toutes les familles, y compris les plus modestes. D’où l’expérimentation du tiers payant pour le financement des gardes d’enfants et l’instauration d’un congé d’accueil de l’enfant, deux mesures que vous avez particulièrement évoquées.

En ce qui concerne la branche AT-MP, vous avez, monsieur Le Menn, détaillé les mesures de justice présentes dans le texte tout en exprimant votre préoccupation sur le taux de sinistralité observé et la dette cumulée de la branche.

La sinistralité sera l’un des enjeux majeurs de la prochaine convention d’objectifs et de gestion, discutée l’an prochain et qui s’attachera à renforcer les dispositifs de protection.

En outre, le Gouvernement a adopté, dans cette période de crise, une approche équilibrée de la dette de la branche AT-MP : la croissance modérée des cotisations patronales devrait permettre d’enrayer le phénomène d’accumulation constaté.

Par ailleurs, je voudrais dire à Jean-Étienne Antoinette que le Gouvernement prend parfaitement en compte les spécificités de l’outre-mer dans le financement de l’hôpital. Dans le cadre de la réforme de la tarification à l’activité engagée, il conviendra naturellement de mieux intégrer les surcoûts spécifiques de certaines activités hospitalières outre-mer, liés notamment à l’isolement. C’est l’un des objectifs de l’opération « transparence et qualité », qui sera prochainement lancée.

Enfin, je vous remercie, monsieur Fichet, d’avoir mis l’accent dans votre intervention sur l’accès aux soins. Vous l’avez indiqué, je présenterai dans quelques semaines des mesures globales incitatives d’accompagnement en faveur de l’installation des professionnels de santé – des médecins, mais pas uniquement – dans des territoires apparaissant aujourd’hui, souvent injustement, comme peu attractifs et qui connaissent, de ce fait, une certaine désertification. C’est un enjeu important à la fois pour tous les élus locaux et pour le Gouvernement.

Vous avez également marqué votre volonté de voir reconnue l’activité d’herboriste. Je crois savoir que vous serez prochainement reçu à mon cabinet pour évoquer la question. §Si je ne doute pas qu’une place puisse être faite à une telle profession, je tiens néanmoins à indiquer que, s’agissant des pathologies graves que vous avez évoquées, il ne faut pas introduire de confusion dans l’esprit des patients.

Tels sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les éléments de réponse que je tenais à vous fournir.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles.

Nous allons examiner la première partie du projet de loi concernant les dispositions relatives à l’exercice 2011.

PREMIÈRE PARTIE

DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXERCICE 2011

Au titre de l’exercice 2011, sont approuvés :

1° Le tableau d’équilibre, par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

En milliards d’euros

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

Vieillesse

Famille

Accidents du travail et maladies professionnelles

Toutes branches (hors transferts entre branches)

2° Le tableau d’équilibre, par branche, du régime général de sécurité sociale :

En milliards d’euros

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

Vieillesse

Famille

Accidents du travail et maladies professionnelles

Toutes branches (hors transferts entre branches)

3° Le tableau d’équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

En milliards d’euros

Recettes

Dépenses

Solde

Fonds de solidarité vieillesse

4° Les dépenses constatées relevant du champ de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, s’élevant à 166, 3 milliards d’euros ;

5° Les recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites, lesquelles sont nulles ;

6° Les recettes mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse, s’élevant à 0, 4 milliard d’euros ;

7° Le montant de la dette amortie par la Caisse d’amortissement de la dette sociale, s’élevant à 11, 7 milliards d’euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme chaque année à pareille époque, l’examen de la première partie et de l’article 1er du PLFSS est pour nous l’occasion de revenir sur les prévisions de recettes et de dépenses du régime général obligatoire de base, telles qu’elles sont issues des travaux du Parlement. Il s’agit d’un exercice important, qui nous permet d’analyser a posteriori l’exactitude des estimations, voire leur sincérité.

Cette année, l’exercice est particulièrement intéressant, puisque, en dépit d’une estimation de croissance abusivement volontariste, les tableaux d’équilibre de l’exercice 2011 se révèlent meilleurs que ce qui était initialement prévu dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011.

Ainsi, le résultat définitif pour 2011 fait apparaître un déficit de 19, 1 milliards d’euros, alors que les prévisions tablaient sur 22, 4 milliards d’euros.

La démonstration est faite que la sécurité sociale souffre, d’abord et avant tout, d’un manque de recettes. Comment ne pas faire le lien entre la moindre dégradation des comptes sociaux en 2011 et une plus forte progression de la masse salariale ? Cette dernière a rapporté, à elle seule, 1, 5 milliard d’euros de cotisations supplémentaires. L’apport de recettes nouvelles à destination de la protection sociale constitue donc le levier le plus fort pour remédier à la dégradation continue des comptes sociaux.

Ainsi, la hausse des prélèvements sociaux sur les revenus du capital a contribué à réduire la dette sociale.

Rechercher du côté du capital une piste de financement de la sécurité sociale est une idée à porter jusqu’au bout, jusqu’à ce que celui-ci soit soumis aux mêmes prélèvements que le travail. Il n’y a en effet aucune raison que les milliards qui servent à la spéculation, qui échappent à la rémunération du travail, voire qui participent à la destruction de l’emploi ne soient pas soumis à cotisations sociales.

Nous ne pouvons nous satisfaire que, dans le même temps, les ménages, c’est-à-dire les salariés, aient été pour leur part soumis à de nouveaux prélèvements injustes, amputant leur pouvoir d’achat.

Je pense plus particulièrement au doublement de la taxe sur les contrats mutualistes dits « complémentaires ». Cette mesure fiscale est prise en dépit du bon sens, puisqu’elle pénalise en fait des contrats dont le principe repose sur une réduction du reste à charge supporté par les patients qui respecteraient un parcours de soins, censé limiter les dépenses supportées par la sécurité sociale.

Au final, le doublement de la taxe se traduit par une augmentation du prix de ces contrats. Certains de nos concitoyens les plus modestes se résolvent à réduire la formule de leur complémentaire et, ainsi, à diminuer le montant de leur prise en charge. D’autres renoncent aux contrats responsables, ce qui induit des dépenses supplémentaires pour la sécurité sociale. D’autres encore vont jusqu’à ne plus souscrire une mutuelle, avec les conséquences que l’on connaît sur la santé et particulièrement sur la prévention. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous continuons à demander la suppression de cette mesure.

Nous mesurons à quel point la politique des gouvernements précédents, qui n’a consisté qu’à réduire les dépenses sociales tout en restant très timide sur la recherche de recettes nouvelles, a eu d’importantes conséquences pour les assurés sociaux.

Ainsi, l’ONDAM enregistre une moindre dépense en 2011, puisqu’il s’élève à 166, 3 milliards d’euros, contre 167, 1 milliards d’euros prévus au départ. Or, nous ne le savons que trop, ce qu’il est courant d’appeler la maîtrise de l’ONDAM résulte à la fois de l’application stricte de la convergence tarifaire et du gel en début d’année des dotations allouées au titre des missions d’intérêt général. Ce mécanisme, sur lequel entend revenir le Gouvernement, pénalise lourdement les établissements publics de santé, qui supportent seuls les efforts de réduction des dépenses hospitalières, alors que les cliniques commerciales contribuent à les accroître.

De même, force est de constater que la moindre dégradation de la CADES n’est pas le fruit d’un apport nouveau de recettes. Il s’agit, en réalité, pour 2011 du moins, d’une réduction du taux des crédits appliqués à la Caisse par les marchés financiers, non pas, comme nous avons pu le constater à la suite de l’élection présidentielle, parce que les opérateurs présents sur les marchés internationaux ont baissé leur taux, démontrant ainsi qu’ils faisaient plus confiance à la gauche qu’à la droite pour résorber la dette sociale, mais parce que la CADES a refinancé à moyen et long termes des emprunts contractés à court terme.

C’est le fait que le taux des emprunts à long terme soit inférieur à celui des emprunts à court terme qui explique le ralentissement de la dégradation des comptes de la CADES. La situation est pour autant loin d’être satisfaisante, puisque, ce faisant, le coût total des charges de crédits supporté par la CADES va mécaniquement s’accroître dans la durée.

Pour toutes ces raisons, et parce que la situation des comptes pour 2011 résulte d’un manque de volontarisme quant à l’apport de ressources complémentaires à la sécurité sociale, qui soient assises sur une base juste et solidaire, le groupe CRC s’abstiendra sur l’article 1er.

L'article 1 er est adopté.

Est approuvé le rapport figurant en annexe A à la présente loi présentant un tableau, établi au 31 décembre 2011, retraçant la situation patrimoniale des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement, à l’amortissement de leur dette ou à la mise en réserve de recettes à leur profit et décrivant les mesures prévues la couverture des déficits, tels qu’ils sont constatés dans les tableaux d’équilibre relatifs à l’exercice 2011 figurant à l’article 1er.

ANNEXE A

Rapport retraçant la situation patrimoniale, au 31 décembre 2011, des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement, à l’amortissement de leur dette ou à la mise en réserve de recettes à leur profit et décrivant les mesures prévues pour la couverture des déficits constatés pour l’exercice 2011

I. – Situation patrimoniale de la sécurité sociale au 31 décembre 2011

En milliards d’euros

Actif

Passif

Immobilisations

Capitaux propres

Immobilisations non financières

Dotations

Régime général

Prêts, dépôts de garantie et autres

Autres régimes

Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES)

Fonds de réserve pour les retraites (FRR)

Avances, prêts accordés à des organismes de la sphère sociale (Unions pour la gestion des établissements des caisses d’assurance maladie, unions immobilières des organismes de sécurité sociale)

Réserves

Régime général

Autres régimes

FRR

Report à nouveau

Régime général

Autres régimes

Fonds de solidarité vieillesse (FSV)

CADES

Résultat de l’exercice

Régime général

Autres régimes

FSV

CADES

FRR

Autres

FRR

Provisions pour risques et charges

Actif financier

Passif financier

Valeurs mobilières et titres de placement

Dettes représentées par un titre (obligations, billets de trésorerie, ECP)

Autres régimes

CADES

Régime général

FRR

CADES

Encours bancaire

Dettes à l’égard d’établissements de crédits

Régime général

Régime général (y compris prêts Caisse des dépôts et consignations)

Autres régimes

Autres régimes (y compris prêts Caisse des dépôts et consignations)

FSV.

CADES

CADES

Dépôts

FRR

Régime général

Créances nettes au titre des instruments financiers

Dettes nettes au titre des instruments financiers

CADES

FRR

Autres

Régime général

Autres régimes

CADES

Actif circulant

Passif circulant

Créances sur prestations

Dettes et charges à payer (CAP) à l’égard des bénéficiaires

Créances de cotisations, contributions sociales et d’impôts de sécurité sociale

Produits à recevoir de cotisations, contributions sociales et impôts de sécurité sociale

Dettes à l’égard des cotisants

Créances sur l’État et autres entités publiques

Dettes et CAP à l’égard de l’État et autres entités publiques

Produits à recevoir de l’État

Autres actifs (débiteurs divers, comptes d’attente et de régularisation)

Autres passifs (créditeurs divers, comptes d’attente et de régularisation) dont soulte des industries électriques et gazières

Total de l’actif

Total du passif

Nota : Les données figurant dans la colonne « 2010 » ont fait l’objet, par rapport à ce qui figure en LFSS pour 2012, des retraitements méthodologiques décrits en annexe 9 au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013.

Sur le champ de l’ensemble des régimes de base, du Fonds de solidarité vieillesse (FSV), de la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) et du Fonds de réserve pour les retraites (FRR), le passif net (ou « dette ») de la sécurité sociale, mesuré par ses capitaux propres, s’élevait à 100, 6 milliards d’euros au 31 décembre 2011, soit l’équivalent de 5 points de produit intérieur brut (PIB). Ce passif net a augmenté de 13, 4 milliards d’euros par rapport à celui constaté au 31 décembre 2010 (87, 1 milliards d’euros) en raison essentiellement des déficits des régimes et du FSV pour l’année 2011 (soit 22, 7 milliards d’euros), minorés de l’amortissement de la dette portée par la CADES (11, 7 milliards d’euros), dont une partie (2, 1 milliards d’euros) correspond à la mobilisation des réserves du FRR.

Compte tenu des sommes placées ou détenues en trésorerie (58, 8 milliards d’euros, dont environ 60 % par le FRR et 23 % par la CADES dans le cadre de sa stratégie d’endettement à fin 2011), du besoin en fonds de roulement (différence de 21, 7 milliards d’euros entre les actifs et passifs circulants) ainsi que des immobilisations et provisions, l’endettement financier s’élevait à 170, 1 milliards d’euros au 31 décembre 2011 (contre 146, 8 milliards d’euros au 31 décembre 2010).

L’ensemble de ces éléments sont détaillés en annexe 9 au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013.

II. – Couverture des déficits constatés sur l’exercice 2011

Les comptes du régime général ont été déficitaires de 17, 4 milliards d’euros en 2011. La branche Maladie a ainsi enregistré un déficit de 8, 6 milliards d’euros, la branche Vieillesse un déficit de 6, 0 milliards d’euros, la branche Famille un déficit de 2, 6 milliards d’euros et la branche Accidents du travail-maladies professionnelles (AT-MP) un déficit de 0, 2 milliard d’euros. Par ailleurs, le FSV a enregistré un déficit de 3, 4 milliards d’euros.

Dans le cadre fixé par la loi organique n° 2010-1380 du 13 novembre 2010 relative à la gestion de la dette sociale, la loi n° 2010-1594 du 20 décembre 2010 de financement de la sécurité sociale pour 2011 a organisé le transfert à la CADES, dès l’année 2011, des déficits 2011 des branches Maladie et Famille du régime général, et, au cours de l’année 2012, des déficits 2011 de la branche Vieillesse du régime général et du FSV. Conformément aux dispositions organiques, la CADES a été affectataire de ressources lui permettant de financer ces sommes.

La plupart des régimes de base autres que le régime général présentent par construction des résultats annuels équilibrés ou très proches de l’équilibre. Il en est ainsi des régimes intégrés financièrement au régime général (régimes agricoles hors branche Retraite du régime des exploitants, régimes maladie des militaires, des ministres des cultes et des marins), des régimes de retraite équilibrés par des subventions de l’État (SNCF, RATP, régimes des mines et des marins), des régimes d’employeurs (fonction publique de l’État) équilibrés par ces derniers et enfin du régime social des indépendants dont les déficits sont couverts par une affectation à due proportion du produit de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés.

Cependant, deux régimes ne bénéficiant par de tels mécanismes d’équilibrage ont enregistré en 2011 des résultats déficitaires.

S’agissant, d’une part, de la branche Retraite du régime des exploitants agricoles, le déficit s’est élevé à 1, 2 milliard d’euros (contre 1, 3 milliard d’euros en 2010) et a fait l’objet d’un financement bancaire dans le respect du plafond fixé par la loi n° 2010-1594 du 20 décembre 2010 précitée. Il convient de rappeler que cette dernière avait par ailleurs transféré à la CADES les déficits cumulés de cette branche du régime des exploitants agricoles au titre des exercices 2009 et 2010.

S’agissant, d’autre part, de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), devenue déficitaire en 2010, le déficit s’est élevé à 0, 4 milliard d’euros (après 0, 5 milliard d’euros en 2010).

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

L’examen de ce tableau, mes chers collègues, n’est pas rassurant et atteste de l’ampleur des déficits cumulés par la sécurité sociale et transmis à la CADES. Cette dette est, au demeurant, le fruit de choix politiques et économiques auxquels nous ne souscrivons pas.

La multiplication des mesures d’exonérations de cotisations sociales et d’exemptions d’assiettes ont considérablement réduit les ressources allouées à notre protection sociale, le dernier exemple étant sans doute l’exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires réalisées dans le cadre de la loi TEPA. La suppression de ce dispositif à l’occasion de l’adoption par le Parlement de la loi de finances rectificative pour 2012 a permis de susciter plus de 3 milliards d’euros de ressources nouvelles, au profit de la sécurité sociale.

Pour autant, mon intervention portera non pas sur ce sujet, mais sur le Fonds de réserve des retraites. Selon les informations communiquées le 27 août dernier sur sa situation économique, son actif s’élevait, au 30 juin 2012, à 34, 4 milliards d’euros. Or la valeur de l’actif net du Fonds était, au 31 décembre 2011, de 35, 1 milliards d’euros, soit une réduction de 0, 7 milliard d’euros en six mois.

Cette réduction aurait pu être plus importante et le rendement être donc encore plus dégradé si la Banque centrale européenne n’avait pas engagé des opérations de refinancement à long terme. Cette décision aurait permis une progression de la valeur des actions de la zone euro de 10 % à 12 %. Toutefois, cette amélioration risque d’être toute relative et de courte durée puisque la crise bancaire espagnole a, de son côté, entraîné des corrections à la baisse.

On le voit bien, le devenir du Fonds de réserve des retraites est étroitement lié, en raison de la composition de son portefeuille, à la situation des marchés financiers. Bien qu’il concoure au niveau élevé de protection sociale de nos concitoyens en reversant 2, 1 milliards d’euros à la CADES chaque année entre 2011 et 2024, le Fonds de réserve des retraites est le seul organisme qui tire ses ressources de la spéculation. En somme, mieux la Bourse se tient, c’est-à-dire plus elle suscite de spéculation, avec les conséquences que cela entraîne sur l’emploi, plus les rendements du Fonds de réserve des retraites sont bons ! Néanmoins, je vous pose la question : qu’adviendrait-il si, demain, les marchés financiers s’effondraient ?

En outre, je dois dire que j’ai été particulièrement choqué à la lecture du rapport annuel du Fonds de réserve des retraites. Celui-ci se félicite de la constitution d’un gouvernement technique d’union nationale à Athènes au début du mois de novembre, avec à sa tête l’ancien gouverneur de la Banque centrale grecque et ex-vice-président de la BCE, ainsi que du départ forcé, quelques jours plus tard, du président du Conseil italien, remplacé lui aussi par un technicien, ancien commissaire européen, deux changements qui auraient amorcé un « retour au calme ».

Ce rapport sous-tend donc l’idée qu’il faudrait, pour rassurer les marchés financiers et, par voie de conséquence, garantir le bon rendement du fonds, que les gouvernements soient progressivement remplacés par des gouvernements techniques, en dépit des orientations et des choix politiques exprimés par les peuples. Nous ne pouvons accepter pareille déclaration, qui remet en cause les fondements même de notre démocratie !

Nous ne souscrivons pas davantage à l’idée qu’il faudrait appliquer partout en Europe une politique d’austérité de nature à rassurer les spéculateurs pour que le rendement du Fonds de réserve des retraites progresse.

Au contraire, nous pensons que, pour réduire la dette sociale sur la durée, il faut rompre avec cette logique et investir dans l’emploi.

Pour répondre à notre excellent collègue Jean Desessard, si l’on veut tenir compte des mutations de la société, alors, oui, il faut innover et taxer la richesse financière des entreprises. On ne dira jamais assez que, selon l’INSEE, et contrairement aux chiffres cités par M. Serge Dassault, les entreprises non financières versent deux fois plus de dividendes aux actionnaires et d’intérêts aux banques que de cotisations sociales ! Je n’invente rien : ce sont les chiffres de l’INSEE pour 2011.

Pour finir, nous nous abstiendrons sur cet article.

L'article 2 et l'annexe A sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Je mets aux voix l’ensemble de la première partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013.

La première partie du projet de loi est adoptée.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

Nous ne sommes pas sur le point de débuter l’examen de la troisième partie de ce texte, loin s’en faut. Je voulais donc, avant la levée de la séance, indiquer que la réserve des articles demandée n’avait plus lieu d’être.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

J’en prends acte, madame la ministre.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mardi 13 novembre 2012, à 14 heures 30 et le soir :

- Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2013 (103, 2012-2013) ;

Rapport de MM. Yves Daudigny, Ronan Kerdraon, Mmes Isabelle Pasquet, Christiane Demontès et M. Jean-Pierre Godefroy, fait au nom de la commission des affaires sociales (107, 2012-2013) ;

Avis de M. Jean-Pierre Caffet, fait au nom de la commission des finances (104, 2012 2013).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée le mardi 13 novembre 2012, à zéro heure vingt.