L'équation budgétaire pour 2013 est l'une des plus compliquée que nous ayons jamais eu à résoudre. La procédure pour déficit excessif prévue par le pacte de stabilité a été engagée le 27 avril 2009 et il convient de ramener le déficit des administrations publiques sous le seuil de 3 % avant la fin de l'année 2013. Six autres Etats sont soumis à la même obligation : le Danemark, l'Autriche, la République tchèque, les Pays-Bas, la Slovénie et la Slovaquie. Pour la France, cela implique de réduire en une seule année - la procédure date d'avril 2009, j'y insiste - notre déficit de 1,5 point de PIB, pour le faire passer de 4,5 % à 3 % du PIB. Un tel effort n'a jamais été consenti depuis 1960, date du début de la série statistique dont nous disposons.
Si la France décidait de s'affranchir de l'objectif assigné, la crédibilité de sa politique budgétaire serait remise en cause et elle le payerait très cher en termes de coût de financement de sa dette. L'objectif du Gouvernement est donc de tenir notre pays à l'écart d'une augmentation autoréalisatrice des taux d'intérêt de notre dette, comme en Espagne et en Italie, de façon à préserver des marges de manoeuvre budgétaires... et notre modèle social. Mais parallèlement à cette exigence de discipline budgétaire, le Gouvernement doit aussi mettre en oeuvre les réformes sur la base desquelles le président de la République et sa majorité ont été élus : amélioration de la progressivité de l'impôt sur le revenu, uniformisation des conditions de taxation entre capital et travail, rééquilibrage de la fiscalité des entreprises entre grands groupes et PME.
Le projet de loi de finances est particulièrement dense : 45 articles initiaux en première partie, contre 30 l'année dernière. L'Assemblée nationale n'a ajouté que 17 articles nouveaux, contre 29 l'année dernière : le projet de loi de finances 2013 est un bloc cohérent, qui laisse peu de place pour des ajouts ou des modifications substantielles. Deux articles relatifs à la fiscalité du patrimoine, et en particulier celui sur la fiscalité des plus-values de cession de valeurs mobilières, ont été réécrits, totalement ou partiellement, lors des débats. En outre, depuis l'adoption de la première partie à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a annoncé une importante réforme fiscale pour l'année prochaine.
Dans ces conditions, que doit faire le Sénat ? D'abord, soutenir sans état d'âme la démarche vertueuse du Gouvernement et son effort de redressement des comptes publics. Ensuite, rechercher la lisibilité de l'action publique : les mesures annoncées doivent être assimilées par les intéressés, il y a peut-être lieu de les préciser, sans revenir sur des dispositifs complexes déjà révélés à l'opinion publique. Enfin, le Sénat doit être présent là où il est attendu et creuser son sillon.
Ainsi nous avons apporté une contribution significative à la loi organique sur la programmation et la gouvernance des finances publiques, notamment pour affirmer les droits du Parlement. Sur ce thème, j'ai déposé une proposition de loi organique pour faire en sorte que les futurs dirigeants de la Banque publique d'investissement soient nommés dans les conditions prévues à l'article 13 de la Constitution, comme les dirigeants d'Oséo. Cette initiative a été reprise par les députés et nous aurons à en discuter. Nous nous sommes emparés de la question de l'accession sociale à la propriété à la suite de la défaillance du Crédit immobilier de France (CIF) et nous devons aller au bout de notre démarche.
Nous examinerons en deuxième partie les dispositions relatives au financement des collectivités territoriales. Compte tenu des réductions annoncées des dotations de l'Etat et du renforcement en cours - et souhaitable - de la péréquation, nous devons anticiper. Je ferai des propositions soit dans la seconde partie, soit en collectif budgétaire. Il serait pertinent de retenir la préconisation du rapport Guené-Escoffier consistant à indexer sur l'inflation les tarifs des impositions forfaitaires sur les entreprises de réseaux (Ifer). Surtout il convient d'engager une expérimentation sur la révision des valeurs locatives des locaux d'habitation, comme nous l'avions fait, il y a deux ans, pour les valeurs locatives des locaux professionnels : à l'initiative du Sénat, cette expérimentation a été généralisée dans le collectif budgétaire du mois de juillet.