Permettez-moi, avant de conclure, de noter avec satisfaction que le Gouvernement ne nous propose que des amendements de coordination aux conclusions de la commission mixte paritaire. Comme il l'a montré sur de nombreux points tout au long de ce processus budgétaire, il a su se montrer à l'écoute de sa majorité.
En conclusion, je voudrais très brièvement revenir sur quelques considérations de méthode.
Tout d'abord, il est nécessaire, mes chers collègues, monsieur le ministre, que nous réfléchissions ensemble aux conditions d'élaboration des hypothèses économiques qui servent de cadre et de support à la loi de finances.
En effet, on a tendance, trop souvent, à confondre deux choses différentes : d'une part, le taux de croissance de référence, paramètre technique auquel s'ajoute un coefficient d'élasticité et qui est un mode de calcul des recettes de l'Etat - de ce point de vue, il convient d'appliquer le principe de précaution et de se réserver des marges de manoeuvre pour avoir le plus de chances possible de voir apparaître des plus-values de recettes en cours d'exercice - et, d'autre part, la prévision de la croissance, également tout à fait légitime, considérée comme un message adressé aux agents économiques, mobilisateur et porteur d'espoir.
Or il convient de ne pas confondre l'une et l'autre choses, et de ne rien faire qui laisse croire que le Gouvernement ou le Parlement veuillent fixer, ou prétendre pouvoir fixer, le taux de croissance de l'économie, pas plus que l'on ne peut prétendre pouvoir fixer le taux de chômage sur le marché du travail.
En ce qui concerne les hypothèses économiques, nous sommes nombreux à penser que ce processus gagnerait à être encore rendu plus objectif et pluraliste par des approches économiques diverses, comme cela se passe d'ailleurs dans de nombreux Etats européens, afin d'immuniser contre certaines considérations politiques la détermination des paramètres de référence de la loi de finances pour, en quelque sorte, neutraliser ces éléments de calcul de telle sorte que nos débats politiques, bien légitimes au demeurant, ne puissent se traduire ni en procès d'intention ni en discussion sans lien avec la réalité économique.
Enfin, toujours en termes de méthode - nous avons abordé ce sujet lundi dernier, lors de la discussion à laquelle je faisais allusion - les commissions des finances tant de l'Assemblée nationale que du Sénat estiment, de par leur travail, leur réflexion, être en mesure de proposer au Parlement et au Gouvernement un cadre de référence pour l'évolution de la fiscalité et des prélèvements obligatoires. A cet égard, nous sommes souvent amenés à penser, sinon à exprimer, que certaines initiatives prises dans des lois sectorielles, sous la responsabilité de ministères plus techniques, viennent contrarier la bonne visibilité des orientations fiscales du Gouvernement et de la majorité quant à l'évolution du système fiscal, situation dont nous souffrons, monsieur le ministre, dans la mesure où la cohérence à laquelle il nous faut travailler de façon continue et persévérante en souffre elle-même.
C'est pourquoi nous considérons que, si les lois de finances doivent demeurer le cadre essentiel, la matrice de la fiscalité, il ne faut pas minorer l'importance d'autres lois financières portant diverses dispositions d'ordre fiscal ou d'ordre économique et fiscal qui peuvent intervenir en cours d'année. Il s'agit là, en effet, de rendez-vous souvent utiles nous permettant de faire valoir notre expertise et nos travaux, car il ne faut pas oublier qu'après le vote de la loi de finances, et après quelques jours de relâche tout à fait bienvenus, nous allons reprendre ces travaux sous l'autorité bienveillante de M. Jean Arthuis, pour ce qui est du Sénat, avec un programme de travail, un programme de contrôle, et, dans le domaine de la fiscalité, des axes bien clairs de réflexion sur lesquels nous nous efforcerons de cheminer pour vous faire, monsieur le ministre, les propositions les plus utiles possible à l'action gouvernementale et à son succès.
Dans cet esprit et dans cette perspective, nous vous demandons, mes chers collègues, de bien vouloir adopter les conclusions de la commission mixte paritaire. Ainsi, nous pourrons disposer d'un budget pour 2005 et commencer à veiller à sa bonne exécution.