Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, la proposition de loi votée à l’Assemblée nationale le 18 mars dernier, sur l’initiative de Mme Chantal Brunel, vient très utilement compléter, me semble-t-il, les mesures déjà mises en place par le Gouvernement pour assurer un financement suffisant aux PME, dans le contexte économique difficile que nous connaissons.
Alors que la crise, au départ financière, a désormais des implications lourdes pour l’activité des entreprises, il est indispensable d’apporter un soutien durable aux PME, de les protéger face aux difficultés et de tout faire pour que les conditions dans lesquelles elles aborderont la sortie de crise soient les plus favorables possible.
Pour assurer un financement adéquat aux PME, nous devons veiller à assurer une plus grande transparence des opérations bancaires et à favoriser la diversité des sources de financement des entreprises.
La proposition de loi que vous examinez aujourd’hui, mesdames, messieurs les sénateurs, s’inscrit réellement, je le crois, dans la continuité des plans engagés par le Gouvernement pour répondre aux difficultés que rencontrent les entreprises dans l’accès au crédit.
En vertu de la nouvelle procédure issue de la réforme constitutionnelle, ce texte vous est présenté enrichi des amendements adoptés par la commission des finances du Sénat. À cet égard, je relève l’importance des travaux menés, sur ce texte comme sur tant d’autres, par celle-ci, tout particulièrement par son rapporteur, M. Philippe Marini.
Le texte soumis aujourd’hui à votre examen est donc le fruit d’un travail constructif entre les assemblées et le Gouvernement. De fait, nous visons les mêmes objectifs : le soutien du crédit aux PME, la transparence dans l’octroi de ces financements, l’amélioration et la simplification de l’environnement des petites et moyennes entreprises.
Dès le 13 septembre dernier, soit deux jours avant que Lehman Brothers ne fasse faillite, l’ensemble des pays européens avaient demandé à la Banque européenne d’investissements, la BEI, de s’engager davantage en faveur du financement des PME, dans le cadre plus large du Small Business Act, que j’ai eu l’honneur de défendre pendant la présidence française de l’Union européenne.
Les résultats sont là : la Banque européenne d’investissements a accordé 1, 8 milliard d'euros de prêts à des PME françaises en 2008, et 8, 5 milliards d'euros au total dans toute l’Europe, soit une augmentation de 60 % par rapport à 2007. Le président de la BEI doit d’ailleurs proposer au conseil des gouverneurs, aujourd’hui même, une augmentation du niveau de ces prêts aux PME dans les prochains mois.
À l'échelle nationale, nous sommes allés plus loin encore avec le plan de soutien au financement des PME mis en place le 2 octobre dernier et le plan de relance annoncé le 4 décembre dernier par le Président de la République.
Tout d’abord, 17 milliards d'euros de liquidités provenant des ressources excédentaires du livret de développement durable et du livret d’épargne populaire ont été mis à disposition des banques pour financer les entreprises.
Par ailleurs, l’intervention d’OSEO au bénéfice du financement des entreprises a été renforcée. Depuis le début de la crise, Christine Lagarde et moi-même nous sommes efforcés de rendre les outils d’OSEO disponibles au plus vite et de suivre très précisément et très régulièrement leur mise en œuvre.
Aujourd’hui, ces outils, me semble-t-il, sont utilisés efficacement, comme le montre le bilan suivant : 632 millions d'euros de cofinancement supplémentaires et 1, 05 milliard d'euros de prêts supplémentaires bénéficiant d’une garantie classique au 1er mai dernier, ainsi que 1, 09 milliard d'euros de prêts bénéficiant d’une garantie sur les nouveaux fonds au 1er juin. Le dispositif d’OSEO est donc pleinement opérationnel, pour aider les entreprises à trouver les financements nécessaires à la poursuite de leur activité et à leur développement.
Enfin, même si cette mesure ne concerne pas le financement des PME au sens strict, on peut mentionner également que le plan de relance a ouvert la possibilité d’une intervention d’OSEO au profit des entreprises de taille intermédiaire indépendantes, les ETI, à hauteur de 1 milliard d'euros de garantie.
À cet égard, je voudrais rappeler le rôle joué par le Sénat dans la définition de l’entreprise de taille intermédiaire, au cours des débats sur la loi de modernisation de l’économie. Cette dernière, bien loin de mériter les qualificatifs outranciers dont elle a été l’objet voilà quelques minutes, se révèle un texte de progrès, qui met notre pays sur la voie d’une plus grande compétitivité.
Le Gouvernement a aussi agi en faveur d’une plus grande transparence dans la politique de crédit aux PME des banques. Entre mars 2008 et mars 2009, les encours de crédit aux très petites et aux petites et moyennes entreprises ont progressé de 4, 1 % ; il n’y a donc pas eu d’écroulement du crédit aux PME, même s’il y a bien eu décélération, puisque, sur les six derniers mois, son encours n’a augmenté que de 0, 9 %. Nous sommes conscients que la situation est délicate, non pas tant à cause d’un assèchement brutal des liquidités que parce que la conjoncture économique s’est fortement dégradée.
Dans ces conditions, nous avons voulu que toute entreprise ayant des difficultés de financement puisse trouver un appui. Vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, un médiateur du crédit a été nommé, dont la mission est de trouver concrètement, au cas par cas, des solutions pour assurer la continuité de l’activité du plus grand nombre possible d’entreprises rencontrant des difficultés de financement. Son action s’appuie, à l'échelon départemental, sur le réseau de la Banque de France. Au 24 mai dernier, 9 960 dossiers avaient été acceptés en médiation. Dans 66 % des cas, soit 4 644 entreprises, une solution a pu être trouvée, pour des financements représentant près de 1 milliard d'euros.
Le Gouvernement est donc pleinement mobilisé face à ce problème, s'agissant notamment du crédit bancaire, même si cela ne signifie pas que nous ne puissions faire mieux.
La proposition de loi que vous allez examiner, mesdames, messieurs les sénateurs, comporte un certain nombre d’avancées notables en faveur des PME, en particulier dans trois directions.
Il s’agit tout d’abord d’assurer une plus grande transparence dans les relations contractuelles entre les entreprises, d’une part, et les établissements de crédit et les assureurs-crédit, d’autre part.
Grâce aux dispositions de la présente proposition de loi, les entreprises pourront connaître les raisons de la réduction ou de l’interruption d’un concours bancaire à durée indéterminée par un établissement de crédit. Elles pourront également obtenir une explication sur les éléments ayant conduit aux décisions de notation les concernant.
En outre, l’assureur-crédit devra désormais motiver sa décision de coupure de garantie, ce qui devrait permettre d’améliorer la compréhension des décisions prises à l’égard des assurés.
Lors de la réunion présidée par le Premier ministre le 12 mai dernier, en présence de Christine Lagarde et de moi-même, les assureurs-crédit se sont engagés, en complément, à respecter un délai de préavis d’un mois en cas de coupure de garantie et à mettre gratuitement à la disposition des entreprises clientes de leurs assurés la notation et l’encours global garanti les concernant.
Mme Christine Lagarde a d’ailleurs réuni les assureurs-crédit hier, avant son départ pour Bruxelles, pour vérifier le respect effectif de ces engagements.
La proposition de loi permettra également de garantir un suivi régulier des encours de crédits bancaires consentis aux PME, en prévoyant que la Banque de France publiera sur une base trimestrielle les encours de crédits aux PME et aux jeunes entreprises.
Cette publication permettra de relayer le suivi des encours des établissements adhérents à la Société de financement de l’économie française, dont le dispositif arrive à échéance en décembre 2009. Comme cela est très bien montré dans le rapport de M. Marini, le pilotage du dispositif par la Banque de France, dont le gouverneur a été auditionné par la commission des finances du Sénat, permettrait de garantir la fiabilité et la comparabilité dans le temps des données publiées.
Aux termes d’un amendement adopté à l’Assemblée nationale, une publication consolidée des informations sur l’investissement des assureurs dans les PME sera par ailleurs assurée. L’autorité de contrôle des assurances et des mutuelles recueillera les données et fera un rapport annuel. L’amendement adopté par la commission des finances du Sénat permettra de préciser dans ce reporting la part spécifiquement investie dans les entreprises non cotées, ce qui est tout à fait utile.
Enfin, sont prévues dans la proposition de loi un certain nombre de mesures de simplification des procédures pour les PME. Il s’agit, notamment, de prévoir pour les PME cotées sur le marché réglementé Euronext une procédure de transfert vers le marché non réglementé qu’est Alternext.
La commission des finances du Sénat a souhaité, à juste titre, réserver cette possibilité de transfert organisé aux sociétés cotées dont la capitalisation boursière est inférieure à 1 milliard d’euros, afin d’éviter que les sociétés les plus importantes cotées sur Euronext ne cherchent à rejoindre Alternext pour bénéficier des exigences simplifiées en vigueur sur ce marché.
En revanche, ces dispositions permettront aux PME de choisir une cotation moins coûteuse, tout en restant très encadrée, et de continuer à se financer sur le marché.
La commission a également trouvé un bon équilibre concernant les sanctions prévues en cas de non-respect de l’obligation de financer les PME à l’aide des ressources collectées par les banques au travers du livret A et du livret de développement durable.
Il est essentiel que les banques « jouent le jeu », en particulier dans la période économique difficile que nous traversons, et utilisent, conformément à la loi, les encours qui sont laissés à leur bilan. À l’article 3 bis est prévu le niveau des sanctions infligées aux banques qui ne respecteraient pas leurs obligations d’utiliser les ressources du livret A et du livret de développement durable pour le financement des PME et le financement des travaux en vue de réaliser des économies d’énergie. Les données détaillées transmises par les banques et relatives au premier trimestre de 2009 sont pour l’heure rassurantes : les banques remplissent toutes cette obligation et l’ensemble des établissements de crédit consacrent globalement le double des sommes qui leur sont confiées au financement des PME et des travaux précités.
Au vu de cette situation, le texte issu des travaux de la commission des finances du Sénat me semble atteindre le bon équilibre : en cas de manquement à l’obligation d’utiliser les ressources du livret A et du livret de développement durable pour financer les PME, une double sanction doit être appliquée, en premier lieu par la recentralisation des ressources, en second lieu par la non-rémunération de ces ressources recentralisées.
Enfin, je tiens d’emblée à indiquer que je suis tout à fait favorable aux amendements relatifs à la réglementation des marchés financiers déposés par M. le rapporteur : la commission a ainsi adopté des dispositions tendant à ratifier des ordonnances dans le domaine du droit financier, à préciser le régime juridique applicable aux fiducies et celui qui concerne les plans d’épargne interentreprises. Ces dispositions viennent utilement compléter la proposition de loi initiale.
Tel est, mesdames, messieurs les sénateurs, le jugement du Gouvernement sur ce texte, qui me semble pouvoir être adopté aujourd’hui dans de très bonnes conditions.