M. le secrétaire d’État nous ayant présenté de manière exhaustive la proposition de loi de Mme Chantal Brunel, je me bornerai à apporter quelques indications supplémentaires.
Cette proposition de loi est un support législatif très utile, compte tenu, tout d’abord, de l’intention initiale de son auteur, puis des adjonctions dont la commission des finances a délibéré.
En effet, le texte a déjà sensiblement évolué entre son dépôt par Mme Chantal Brunel et son adoption en première lecture à l’Assemblée nationale. Nous proposons ici de conserver globalement les dispositifs résultant des votes de l’Assemblée nationale, au prix de quelques ajustements mineurs, et de les compléter par une série de mesures tendant à améliorer le fonctionnement des marchés financiers.
Cette proposition de loi a pour premier objet d’améliorer le suivi des financements destinés aux petites et moyennes entreprises. Nous insistons sur le fait que, dans l’état actuel des choses, le système de collecte statistique en matière de distribution de crédit n’est pas bien adapté au suivi des engagements pris par les banques, plus spécifiquement à l’égard des petites et moyennes entreprises. Nous avons pu prendre pleinement conscience de cette réalité en siégeant au comité de suivi de la crise financière, en présence de représentants de la Banque de France et des services compétents du ministère de l’économie, des finances et de l’industrie.
C’est pourquoi il est utile que l’article 3 de la présente proposition de loi vise à obliger l’autorité de contrôle des assurances et des mutuelles à publier un rapport sur les placements des organismes d’assurances concourant au financement des PME.
C’est pourquoi il est utile que l’article 5 ait pour objet d’imposer, s’agissant du système bancaire dans son ensemble, une obligation de même nature à la Banque de France, qui devra, même si son outil informatique actuel n’est pas fait pour cela, établir des statistiques relatives aux flux de crédits bancaires consentis aux jeunes entreprises et aux PME. On nous transmet des chiffres qui comptabilisent les stocks de crédits. Cela ne suffit pas. Pour apprécier l’évolution de la conjoncture, en particulier, seule l’information sur les flux est pertinente. Peut-être cela pose-t-il des problèmes administratifs et informatiques à la Banque de France, mais celle-ci est un outil, auquel il revient d’obéir à l’impulsion que lui donne le législateur, qui définit les obligations à remplir.
L’article 5 ter vise, à juste titre, à confier à l’autorité de contrôle des assurances et des mutuelles un suivi statistique des encours garantis par les assureurs-crédit. Nous disposons là, comme M. le secrétaire d’État l’a souligné, d’un élément supplémentaire pour que nos entreprises, notamment les PME, puissent bénéficier d’une continuité des concours qui leur sont alloués, qu’il s’agisse des concours bancaires ou de ceux qui sont accordés au titre du régime de l’assurance-crédit.
En effet – c’est le deuxième objet de la proposition de loi –, il convient de responsabiliser les acteurs de la distribution du crédit.
Ainsi, il est prévu, aux termes de l’article 1er, la motivation des réductions ou interruptions de crédit bancaire aux entreprises. De même, l’article 2 tend à obliger les établissements de crédit à communiquer aux entreprises, à leur demande, une explication de la notation interne dont elles font l’objet.
L’article 3 bis vise, quant à lui, à prévoir des sanctions pour les établissements de crédit qui ne respecteraient pas les conditions légales d’emploi des fonds collectés au titre du livret A et du livret de développement durable pour leur part non centralisée à la Caisse des dépôts et consignations.
Enfin, l’article 5 bis tend à imposer aux assureurs-crédit, par symétrie avec ce qui est demandé aux banques, de motiver leurs décisions de refus de garantie aux clients de leurs assurés, sachant qu’est prévu un délai de préavis d’un mois avant que ne prenne effet la cessation de garantie.
Le troisième objet de la proposition de loi est de favoriser le développement de certains segments des marchés financiers.
M. le secrétaire d’État a évoqué à juste titre les conditions de transfert de cotation du marché Euronext, marché à la fois organisé et réglementé, au marché Alternext, qui est un marché organisé mais non pas réglementé.
La commission a été très attentive à cette proposition et l’a approuvée. Toutefois, elle a insisté sur la nécessité de la transparence et sur le fait que l’assemblée générale de la société concernée doit délibérer de ce transfert. Il faut, en quelque sorte, prêter attention à la voix des actionnaires minoritaires, des détenteurs individuels de titres, le cas échéant, s’il en existe, car ce changement de cote modifie les obligations d’information à la charge de l’entreprise, et il convient d’en être parfaitement conscient.
Nous avons profité de l’examen de ce texte pour ratifier, moyennant quelques modifications qui sont plutôt du domaine de la coordination, trois ordonnances relatives au droit financier : l’ordonnance du 23 octobre 2008 relative à la gestion d’actifs, l’ordonnance du 30 janvier 2009 relative aux déclarations de franchissement de seuil et aux déclarations d’intention, l’ordonnance du 30 janvier 2009 relative aux sociétés d’investissement à capital fermé et aux fonds dits fermés.
Surtout, nous utilisons ce texte pour poser un jalon dans une démarche de renforcement de la compétitivité de la place financière de Paris, reprenant en cela un travail mené déjà depuis un certain temps par la commission des finances du Sénat pour qu’elle puisse accueillir plus commodément des fonds en provenance du Moyen-Orient, notamment, et des opérations menées selon les techniques de la finance dite islamique.
Dans cette perspective, il est ici proposé d’adapter le régime de la fiducie, lequel résulte d’une loi de février 2007, elle-même modifiée et étendue déjà à plusieurs reprises. Ce régime de la fiducie peut être le véhicule susceptible d’accueillir les émissions d’obligations conformes au principe de la finance dite islamique. Après tout, il n’y a aucune espèce de raison que toutes ces opérations se déroulent ailleurs qu’à Paris, notamment à Londres, où, depuis plus d’une dizaine d’années, les adaptations réglementaires, législatives, fiscales et de régulation financière nécessaires sont mises en œuvre pour permettre l’émergence et le développement de ce compartiment. Je serais tenté de dire, en adaptant quelque peu un mot historique, que la place de Paris vaut bien une messe, et qu’il nous faut disposer, dans nos panoplies de services financiers, de tous éléments nécessaires pour que les acteurs de ces émissions puissent opérer à Paris, comme cela est déjà le cas sur d’autres places, avec un bon degré de sécurité juridique, et, autant qu’il est possible, le souci de la transparence et d’une bonne régulation.
Enfin, nous avons également inséré quelques dispositions plus ponctuelles, par exemple une procédure exceptionnelle permettant d’adapter les plans d’épargne interentreprises à certaines obligations issues de la loi de modernisation de l’économie votée l’an dernier.
Je n’irai pas plus loin dans le détail, mes chers collègues. La commission a examiné avec intérêt les différents amendements qui lui sont parvenus, dont certains lui ont paru particulièrement utiles. Je pense ici à un amendement de M. Gérard Longuet relatif à l’application du régime micro-social simplifié dans les départements d’outre-mer, à un amendement de M. Albéric de Montgolfier tendant à rétablir, pour les experts-comptables, la situation juridique qui a été supprimée malencontreusement par une ordonnance du 30 janvier 2009 en ce qui concerne les obligations auxquelles ils doivent obéir en matière de blanchiment de capitaux, enfin à un amendement important du Gouvernement qui vise à autoriser le ministre des finances à verser au Fonds monétaire international, sur les ressources du Trésor, une somme correspondant à des prêts remboursable dans la limite de 11, 06 milliards d’euros. Cette dernière mesure fait suite aux récents sommets internationaux et à la réunion du G8 qui s’est tenue à Londres.
On constatera qu’au fur et à mesure de l’examen du texte nous nous sommes quelque peu éloignés du domaine des petites et moyennes entreprises, ce qui, je le suppose, vous permettra, mes chers collègues, d’adhérer à notre proposition de compléter l’intitulé de la proposition de loi en y ajoutant les mots « et à améliorer le fonctionnement des marchés financiers ».
Au bénéfice de ces observations, la commission invite le Sénat à adopter la proposition de loi dans la rédaction qu’elle a établie.