Intervention de Michel Sapin

Commission des affaires sociales — Réunion du 21 novembre 2012 : 3ème réunion
Loi de finances pour 2013 — Audition de M. Michel Sapin ministre du travail de l'emploi de la formation professionnelle et du dialogue social

Michel Sapin, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social :

ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. - Le contexte dans lequel nous avons élaboré ce budget vous est connu. D'une part, après dix-sept mois consécutifs de hausse du chômage, le nombre de demandeurs d'emploi dépasse les trois millions, et certaines catégories (jeunes, chômeurs âgés, chômeurs de longue durée) posent des problèmes difficiles à résoudre. D'autre part, la contrainte des finances publiques a conduit le Gouvernement à vouloir maîtriser le déficit budgétaire afin de faire décroître notre endettement. Nous avons donc choisi de nous battre activement sur le front du chômage, tout en faisant preuve de responsabilité sur le plan budgétaire.

Les crédits budgétaires consacrés au travail, à l'emploi, à la formation professionnelle et au dialogue social augmentent de 4 % : c'est considérable, mais ce n'est pas à cela que nous jugeons de la qualité du budget. D'ailleurs, toutes les actions que nous conduirons en 2013 ne sont pas inscrites dans ce budget. Le contrat de génération, après une négociation réussie entre les partenaires sociaux, sera adopté en conseil des ministres le 12 décembre et débattu au Parlement en janvier, nous ne pouvions donc pas encore en prévoir les conséquences dans le projet de loi de finances. De même, la grande négociation sur la sécurisation de l'emploi, complexe mais si importante pour l'avenir de notre pays, pourrait avoir des conséquences sur le budget : meilleure mobilisation du chômage partiel ou des capacités de formation avant licenciement.

Ce budget finance d'abord l'urgence : les contrats aidés et les emplois d'avenir. Il y aura 1,479 milliard d'euros en crédits de paiement pour créer 340 000 contrats aidés dans le secteur non marchand, et 50 000 dans le secteur marchand, comme l'année passée. Mais nous étalerons ces créations tout au long de l'année, et nous allongerons la durée de ces contrats, qui n'a cessé de décroître à mesure que le nombre de bénéficiaires augmentait : j'ai donné des instructions très fermes aux préfets de région à cet égard. Les emplois d'avenir ne sont pas financés par une diminution des crédits consacrés aux emplois aidés. Nous commençons à les mettre en oeuvre, et l'émotion qui se dégage des réunions organisées à cette occasion confirme, s'il en était besoin, que nous avons visé juste. D'ailleurs, des élus de tout bord nous rejoignent sur ce dispositif, même s'ils s'y étaient opposés au plan national. Les autorisations d'engagements s'élèvent à plus de 2 milliards d'euros, et les crédits de paiement sont calculés en retenant l'hypothèse d'une montée en puissance progressive au cours de l'année - mais si elle devait être plus rapide que prévu, nous ferons les choix nécessaires pour que rien ne l'entrave.

Ce budget finance la consolidation du service public de l'emploi, particulièrement en renforçant les moyens de Pôle emploi. Dès le mois de juin dernier, dans l'urgence, j'avais décidé de renforcer ces moyens par l'embauche en CDI de 2 000 agents supplémentaires. Leur recrutement est progressif, et 2 000 autres viendront les renforcer grâce à des redéploiements internes, de sorte que ce sont 4 000 agents supplémentaires qui accompagneront les demandeurs d'emploi. Nous augmentons donc en conséquence la subvention à Pôle emploi pour qu'il puisse financer ces postes supplémentaires. Les missions locales, autre pilier du service public de l'emploi, voient également leurs crédits maintenus, et même augmentés, puisque 30 .millions destinés à l'accompagnement des emplois d'avenir iront vers les missions locales. Les maisons de l'emploi, enfin, dont les crédits avaient diminué, quoiqu'elles fussent de création assez récente, bénéficient d'une reconduction de leurs crédits. L'accompagnement financier des demandeurs d'emploi en formation est l'objet d'une participation volontaire du fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP). Les allocations de solidarité sont également financées à hauteur de 834 millions d'euros.

Ce budget renforce le soutien à des publics spécifiques qu'il s'agit d'aider à entrer dans l'emploi. Les mesures en faveur des personnes handicapées sont significativement développées, avec des crédits de 337 millions d'euros - en hausse de 9 % - pour les aides aux postes dans les entreprises adaptées, ce qui permettra de créer mille places supplémentaires. Cet engagement avait été pris au cours de la conférence nationale du handicap de juin 2011, et sera tenu sur plusieurs années. Les crédits pour l'insertion par l'activité économique (IAE) sont reconduits à 197 millions d'euros et l'Assemblée nationale les a augmentés de 10 millions d'euros, créant ainsi ce que j'ai appelé une provision pour réforme à venir : il faut simplifier les dispositifs d'insertion par l'activité économique, et une mission conjointe de l'Igas et de l'IGF est lancée pour faire le point - pour simplifier et rendre plus efficace, non pour diminuer, comme en témoigne cette provision. Nous avons préservé les sommes nécessaires pour que le contrat d'insertion dans la vie sociale (Civis) continue à soutenir 135 000 jeunes. Un nouveau marché public va être mis en oeuvre pour assurer le volet pédagogique des formations professionnelles à destination des publics spécifiques (détenus, ultra-marins, Français de l'étranger), en attendant de voir ce qu'ils deviendront par la suite dans le cadre de la décentralisation. Les crédits pour les écoles de la deuxième chance sont également conservés. Et le fonds d'insertion professionnelle des jeunes (FIPJ) est renforcé par un amendement adopté à l'Assemblée nationale.

Ce budget vise aussi à anticiper et à accompagner les restructurations industrielles et les mutations économiques, dans le but de prévenir les licenciements, en développant l'activité partielle, la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC), la formation : c'est là que les conséquences de la négociation sur la sécurisation de l'emploi rendront sans doute nécessaires des évolutions du budget en cours d'année. Ce sont 60 millions d'euros de crédits budgétaires qui sont mobilisés pour financer les accords de GPEC déjà signés, ou qui le seront l'an prochain, chiffre que l'Assemblée nationale a augmenté de 15 millions prélevés sur d'autres actions de mon ministère. Nous avons prévu 70 millions de crédits budgétaires pour l'activité partielle : c'est la dépense constatée en 2011, nous verrons si c'est le bon niveau. La dotation globale de restructuration est également reconduite, ainsi que les conventions de formation et d'adaptation du FNE et les cellules d'appui à la sécurisation professionnelle. Pour l'accompagnement social des restructurations, l'allocation temporaire dégressive est reconduite au niveau de 11 millions d'euros. Nous pérennisons le contrat de sécurisation professionnelle, pour un coût prévisionnel de 70 millions d'euros.

Ce budget finance l'adaptation des qualifications, la reconnaissance des compétences, la formation professionnelle et l'alternance. M. Repentin développera ce point.

Notons aussi les actions en faveur du développement de l'emploi : l'Etat compense à la sécurité sociale des exonérations de cotisations patronales spécifiques en fonction du territoire ou du secteur d'activité. Nous finançons aussi la création ou la reprise d'entreprises, avec des dispositifs comme le Nacre, qui est utile, le fonds de cohésion sociale, l'exonération liée au régime des micro-entreprises. Les conventions pour la promotion de l'emploi ou les dispositifs locaux d'accompagnement développent d'autres formes d'emploi.

Quelques mots enfin des moyens de la politique du travail : santé et sécurité au travail, qualité et effectivité du droit, dialogue social et démocratie sociale sont des sujets très importants pour nous. Le deuxième plan « santé au travail » sera donc financé par une augmentation sensible des crédits de paiement inscrits sur la ligne « recherche et exploitation des études », et la fixation à 9 millions d'euros de la subvention à l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail. Des crédits de 10,6 millions d'euros sont aussi prévus pour la préparation des élections prudhommales, 7,2 millions pour la formation des conseillers prudhommes et 24 millions pour la formation économique, sociale et syndicale des salariés appelés à exercer des fonctions syndicales.

Ce budget, enfin, participe à l'effort de réduction des déficits. Le schéma d'emplois du ministère intègre 141 suppressions de postes - c'est moins que ce qui se faisait auparavant, mais c'est notre participation à la création de postes dans les secteurs prioritaires : éducation, justice et police. Les dépenses de fonctionnement sont en baisse de 3,7 % grâce à des efforts sur les dépenses de fonctionnement courant, de gestion et d'entretien du parc, d'infrastructure et de réseau. Par ailleurs, l'alignement du dispositif d'auto-entrepreneur sur celui d'entrepreneur individuel a pour effet de réduire la compensation à la sécurité sociale de 130 millions d'euros.

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