Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dernière oratrice de la discussion générale, je répéterai sans doute des propos déjà exprimés. Je voudrais cependant insister sur les atouts de ces écoles qui, comme l’a souligné Jean-Claude Carle, souffrent d’une précarité juridique à laquelle cette proposition de loi vise à remédier.
Depuis l’ouverture de la première école de production en 1882 – l’atelier Boisard, à Vaulx-en-Velin –, ces établissements d’enseignement technique privés ont gardé leur originalité.
L’une des particularités de ces écoles réside dans le fait que la formation pratique et la formation théorique ont lieu sur le même site, avec les mêmes formateurs pour les matières professionnelles. Par ailleurs, la formation du jeune s’inscrit pour deux tiers de son temps dans la production de commandes aux conditions du marché, pour de vrais clients, industriels ou particuliers. De ce fait, le jeune et son formateur sont soumis aux mêmes exigences de coût, de qualité et de délai imposées par le client.
L’alliance de la responsabilité et de l’accompagnement dans une œuvre commune avec un maître professionnel va très tôt entraîner le jeune dans une logique de réussite et de valorisation de ses capacités.
En effet, l’élève ne travaille pas uniquement pour des notes, mais pour satisfaire des clients de secteurs différents et de prestige, tels l’aménagement de bâtiments classés ou certaines industries de haute technologie. Le travail doit être parfaitement réalisé pour satisfaire ces clients en temps et en heure, ce qui est très motivant et responsabilisant.
Cette démarche pédagogique efficace redonne confiance aux jeunes. Elle leur rend le goût de se former alors qu’ils se trouvaient bien souvent en situation de rupture scolaire et qu’ils n’avaient plus le désir de poursuivre leurs études dans une filière traditionnelle.
Ces écoles viennent également en aide à certains jeunes qui, démotivés et en situation d’échec, n’arrivent pas à trouver d’entreprise pour signer un contrat d’apprentissage. Enfin, elles accueillent des élèves qui, faute d’une maturité suffisante, rencontrent des difficultés pour s’insérer directement dans le monde du travail en suivant une démarche d’apprentissage classique. Un travail éducatif est alors indispensable, lequel n’est pas du ressort d’une entreprise ordinaire.
L’enseignement général et professionnel théorique est, autant que possible, relié directement aux situations de production. Il est réparti tout au long de la semaine, ce qui permet d’éviter des phénomènes de rejet par les élèves. Les écoles de production atteignent ainsi leur objectif premier, qui est d’être un lieu d’intégration progressive à la vie professionnelle et adulte. Cette insertion dans le monde du travail est aussi importante que l’obtention du diplôme.
L’autre atout de ces « écoles-entreprises » est de conduire à l’emploi : 90 % des élèves obtiennent leur diplôme et 45 % d’entre eux choisissent de poursuivre leur formation professionnelle. Les jeunes formés par ces écoles sont appréciés des entreprises, car ils possèdent une réelle expérience professionnelle. Trois ans de formation en baccalauréat professionnel équivalent à trois années d’expérience en atelier, en conditions réelles de production. D’où l’intérêt des recruteurs pour ces jeunes.
Les employeurs ne s’y trompent pas : pour eux, le jeune ainsi formé est « du métier ». Il s’agit d’un atout décisif, et il n’est pas rare que des élèves finissent l’école avec plusieurs propositions d’emploi. Le taux de placement en fin de cursus avoisine souvent les 100 %. Par ailleurs, un nombre significatif d’élèves se mettent à leur compte, notamment en tant qu’artisans.
Une formation professionnelle qualifiante, une préparation à l’exercice d’un métier et une intégration à la vie professionnelle, tels sont les principaux atouts des écoles de production.
Cependant, ces établissements sont peu connus. Je remercie donc Jean-Claude Carle d’avoir jeté la lumière sur ces écoles en déposant une proposition de loi, cosignée par nombre de sénateurs du groupe UMP, qui vise à introduire une nouvelle réglementation soutenant leur développement. Je ne reviendrai pas sur les différents points de la proposition quant au statut, à la taxe d’apprentissage ou aux nouvelles aides que pourraient percevoir les élèves.
Les performances réalisées par ce type d’établissement montrent combien cette filière mérite d’être encouragée. Tel est l’objet du texte qui nous est proposé aujourd’hui. La situation actuelle de nos jeunes exige de mettre à leur disposition des outils variés, adaptés aux différentes situations et innovants. Cette proposition a attiré l’attention sur l’un de ces outils, que l’on ne peut certes qualifier d’innovant tant il est ancien, mais qui est trop peu connu.
Vouloir tout faire régir par un même statut et refuser certaines spécificités pédagogiques ne permet pas de répondre aux exigences actuelles. Il est de notre responsabilité d’offrir à nos jeunes le plus grand panel de possibilités. Tel est l’objet de cette proposition de loi, que notre groupe votera.