Rappelons que c’est à l’occasion de l’examen du projet de loi portant modernisation du marché du travail qu’a été instaurée la rupture conventionnelle, qui s’apparente, aux yeux du groupe CRC, à un véritable ovni juridique.
En effet, le fait que la loi prévoit que personne n’est à l’origine de cette rupture n’a pas d’autre but que d’éviter aux employeurs d’avoir à assumer une quelconque responsabilité vis-à-vis de leurs salariés. C’est d’ailleurs pour cette raison que le groupe CRC n’avait pas voté la mesure, craignant que les ruptures conventionnelles ne dissimulent en réalité des plans sociaux et des licenciements économiques déguisés. De ce point de vue, les propos tenus par Mme la ministre sont très éclairants.
Pour notre part, nous nous appuyons sur les dernières statistiques de la DARES, la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, qui datent de mars 2012, pour souligner que 794 000 ruptures conventionnelles ont été enregistrées en France depuis 2008 ; 300 000 rien que l’an dernier ! Sur le premier trimestre de l’année, cela équivaut à près de 13 % des sorties de CDI et au double des licenciements économiques. Pourtant, en période de crise, vous en conviendrez, rares sont les salariés qui font spontanément le choix de quitter un CDI, particulièrement lorsque le taux de chômage ne cesse d’augmenter.
Dans le cadre d’une étude réalisée sur l’initiative d’une grande centrale syndicale, la CFDT pour ne pas la nommer, et se fondant sur une centaine d’entretiens, le Centre d’études de l’emploi met en évidence un double constat : un quart des personnes interrogées ont eu le sentiment d’avoir été poussées vers la sortie ; 40 % des salariés ayant signé une rupture conventionnelle initiée par l’employeur considèrent même qu’elles ont été victimes d’un licenciement déguisé, pour motif économique ou personnel.