La séance est ouverte à quatorze heures trente.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
La conférence des présidents a fixé au 12 décembre la suite de la discussion de la proposition de loi de simplification des normes applicables aux collectivités locales, déposée par notre collègue Éric Doligé.
Il est de tradition au Sénat, lorsque l’examen d’un texte en séance publique est reporté de plus d’un mois, pour ne pas dire deux, de rouvrir le délai limite pour le dépôt des amendements. En deux mois, il peut en effet se passer bien des choses – la présentation du rapport Jospin en est une illustration récente –, et cet usage nous permet d’actualiser nos amendements.
Or, pour une raison que je n’arrive pas à comprendre, la conférence des présidents n’a pas accepté, cette fois-ci, de rouvrir ce délai. Tout en regrettant très vivement cette décision, je souhaite que ce point puisse être réexaminé lors de la prochaine réunion de la conférence des présidents.
Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue.
Sachez qu’une conférence des présidents se tiendra le 21 novembre et que le problème que vous venez de soulever lui sera soumis.
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2013 (projet n° 103, rapport n° 107, avis n° 104).
Nous poursuivons l’examen des articles de la troisième partie concernant les dispositions relatives aux recettes et à l’équilibre général pour l’exercice 2013.
TROISIÈME PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE GÉNÉRAL POUR L’EXERCICE 2013
Section 1
Dispositions relatives aux recettes des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement
Nous en sommes parvenus à l’examen des articles 14 à 15 ter et de l’article 20, ainsi que des amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 20, précédemment réservés à la demande du Gouvernement.
(Supprimé)
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 1 est présenté par M. Daudigny, au nom de la commission des affaires sociales.
L’amendement n° 64 est présenté par M. Watrin, Mmes Cohen et David, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le II de l’article L. 136-2 est complété par un 8° ainsi rédigé :
« 8° Les distributions ou les gains nets afférents à des parts de fonds communs de placement à risques, des actions de sociétés de capital-risque ou des droits représentatifs d’un placement financier dans une entité, constituée dans un État membre de l’Union européenne ou dans un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales et dont l’objet principal est d’investir dans des sociétés dont les titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché d’instruments financiers français ou étranger, ou d’une société qui réalise des prestations de services liées à la gestion de cette entité, donnant lieu à des droits différents sur l’actif net ou les produits du fonds, de la société ou de l’entité, et attribués en fonction de la qualité de la personne ; »
2° L’article L. 136-5 est ainsi modifié :
a) Le début de la première phrase du premier alinéa du I est ainsi rédigé :
« Sous réserve des dispositions particulières mentionnées au présent article, la contribution portant sur les revenus mentionnés aux articles L. 136-1, L. 136-2, L. 136-3 et L. 136-4 est recouvrée
le reste sans changement
b) Au II bis, les mots : «, est établie, recouvrée et contrôlée » sont remplacés par les mots : « et la contribution portant sur les revenus mentionnés au 8° du II de l’article L. 136-2 sont établies, recouvrées et contrôlées » ;
3° Au premier alinéa de l’article L. 137-15, après les mots : « à la charge de l’employeur », sont insérés les mots : « ou de toute autre personne débitrice des sommes en cause » ;
4° Après le douzième alinéa de l’article L. 242-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Sont également exclues de l’assiette des cotisations mentionnées au premier alinéa les distributions et les gains nets mentionnés au 8° du II de l’article L. 136-2. » ;
5° La section 10 du chapitre 7 du titre III du livre Ier est abrogée.
II. – Les dispositions du I s’appliquent aux sommes versées à compter du 1er janvier 2013.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l’amendement n° 1.
Cet amendement vise à rétablir l’article relatif à l’assujettissement au forfait social des plus-values des gestionnaires de fonds de capital-risque. Le régime social de ces revenus est indépendant de leur traitement en matière d’impôt sur le revenu.
Les Français ne comprendraient pas que certains revenus échappent au financement de la protection sociale, en proportion de leurs capacités contributives. S’il n’est pas douteux que les carried interests constituent une prise de risque des gestionnaires salariés des fonds communs de placement à risques sur leur épargne, il n’est pas moins contestable que cet intéressement à la performance est indissociable de leur contrat de travail. Les gestionnaires salariés ont potentiellement un accès aux plus-values de leurs fonds beaucoup plus favorable que celui des investisseurs externes. Il s’agit donc bien d’un dividende du travail.
Soumettre ces revenus aux cotisations sociales ne serait pas totalement justifié. Pour les revenus réalisés dans un cadre professionnel, mais non soumis à cotisations sociales, le régime applicable est celui du forfait social.
On voit mal comment l’intéressement, la participation ou la protection sociale complémentaire pourraient être soumis au forfait social, et non les carried interests, dont les gains sont sans commune mesure avec ces dispositifs. Le rétablissement de cet article permettrait donc d’inscrire au crédit du budget de la sécurité sociale 80 millions d’euros de recettes supplémentaires par rapport au texte adopté par l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Dominique Watrin, pour présenter l’amendement n° 64.
Le présent amendement, dont nous nous félicitons que le texte ait été repris par le rapporteur général, tend à rétablir l’article 14, malheureusement supprimé sur l’initiative du Gouvernement lors du débat à l’Assemblée nationale.
Mes chers collègues, je tiens à appeler votre attention sur l’importance de cet amendement. Si le Sénat décidait de l’approuver, l’article 14 aurait pour effet de soumettre au forfait social ce qu’il est convenu d’appeler les carried interests. Concrètement, il permettrait d’imposer à hauteur de 20 % les rémunérations versées aux gestionnaires de fonds communs de capital-risque, qui prennent généralement la forme d’un reversement aux dirigeants de la plus-value réalisée par le fonds d’investissement, sous la condition que l’investissement ait atteint un certain niveau de rendement défini au préalable.
En réalité, ces mécanismes ne constituent ni plus ni moins qu’une forme de rémunération indirecte du travail accompli par ces gestionnaires. Comment accepter, dès lors, que ces éléments de rémunération, qui s’apparentent peu ou prou à de l’intéressement, ne soient pas soumis au même taux de prélèvements sociaux que les quelques centaines d’euros que peuvent gagner les salariés au titre de la participation ou de l’intéressement ?
Ne pas rétablir cet article reviendrait à entériner le fait que, d’un côté, l’ensemble des rémunérations des salariés doit être soumis à contribution, ce que nous trouvons d’ailleurs légitime, et que, de l’autre, une part non négligeable des rémunérations des dirigeants, qui sont bien plus élevées, peut y échapper.
Les prétendus et autoproclamés « pigeons » ont déclaré que cette mesure était injuste, au motif que les carried interests interviendront au 1er janvier 2013 et seront donc imposables au titre de l’impôt sur le revenu. Pour ces privilégiés, l’acquittement de cet impôt vaudrait solde de tout compte. Les salariés qui, eux, payent l’impôt sur le revenu tout en s’acquittant de leurs cotisations sociales apprécieront !
Nous considérons que, quoi qu’il advienne, le Sénat doit aider le Gouvernement à porter cette mesure jusqu’à son terme, c’est-à-dire l’adoption définitive du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013. Il y va de la justice sociale. Cette disposition permettra, en outre, d’inscrire 80 millions d’euros de recettes supplémentaires au crédit du financement de la sécurité sociale. Qui peut prétendre, au regard du déficit de nos comptes sociaux, que nous pourrions nous priver d’une telle mesure ?
Pour toutes ces raisons, nous vous invitons à voter en faveur du rétablissement de cet article. Nous ferons ainsi la démonstration de la détermination de la majorité de gauche.
Il s’agit d’un sujet délicat.
Dans un premier temps, il nous avait semblé possible de demander à celles et ceux qui bénéficient de ce dispositif de contribuer davantage. Après avoir écouté – au passage, je n’ai pas le souvenir que le mouvement dit des « pigeons » ait porté ce sujet –, consulté, en particulier les conseillers économiques de nos ambassades en Europe, le Gouvernement s’est résolu à supprimer cet article, face aux risques, à notre avis toujours majeurs, de délocalisation de nos entreprises hors de nos frontières et, par voie de conséquence, de perte d’activité et de baisse de nos recettes, que celles-ci soient escomptées ou d’ores et déjà acquises.
Sachez, mesdames, messieurs les sénateurs, que l’amendement de suppression de cet article que nous avons déposé lors du débat à l’Assemblée nationale se situe dans la droite ligne des dispositions qui avaient été adoptées dans le cadre du projet de loi de finances.
Dans un souci de cohérence, je ne peux donc qu’appeler, au nom du Gouvernement, la Haute Assemblée à rejeter ces deux amendements identiques, même si je comprends parfaitement les intentions légitimes de leurs auteurs et des partisans du dispositif qu’ils préconisent.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici le résultat du scrutin n° 28 :
Le Sénat a adopté.
En conséquence, l’article 14 est rétabli dans cette rédaction.
L'amendement n° 67, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen et David, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 14
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre 6 du titre 3 du livre 1er du code de la sécurité sociale est complété par une section 6 ainsi rédigée :
« Section 6
« De la contribution sociale sur les revenus financiers
« Art. L. 136 -9. – L’ensemble des revenus financiers des personnes physiques et des personnes morales provenant des titres émis en France sont assujettis à une contribution sociale dont le taux est égal à la somme du taux défini à l’article L. 136-8 applicable à la contribution sociale mentionnée à l’article L. 136-1, additionné aux taux des cotisations, à la charge de l’employeur et du salarié, prévues à l’article L. 241-1 et aux deuxième et quatrième alinéas de l’article L. 241-3, et du taux de la cotisation, à la charge de l’employeur et du salarié sous le plafond du régime complémentaire conventionnel rendu obligatoire par la loi.
« Sont exonérés de cette contribution sociale les livrets d’épargne populaire, les livrets A, livrets bleus, livrets et comptes d’épargne logement. Les plans épargne populaire courants, avant promulgation de la présente loi, en sont également exonérés pendant cinq ans. Les revenus des biens immobiliers autres que ceux utilisés pour l’usage personnel du propriétaire et de sa famille directe sont assujettis à la même cotisation que les revenus financiers.
« La contribution est assise, contrôlée et recouvrée selon les mêmes règles et sous les mêmes sûretés, privilèges et sanctions que le prélèvement mentionné à l’article 125 A du code général des impôts. Le produit de cette contribution est versé à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale sans déduction d’une retenue pour frais d’assiette et de perception. Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret.
« Les ressources des assurances sociales (maladie, maternité, invalidité, décès et vieillesse) sont abondées par le produit de cette contribution. Un décret fixe les taux de répartition de ces ressources entre les différentes assurances sociales de la sécurité sociale. »
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Nous proposons de corriger une injustice flagrante.
Si les revenus financiers qui bénéficient aux personnes physiques sont taxés – et il me semble que leur taxation a même été augmentée dans le projet de loi de finances rectificative que nous avons voté cet été –, ce n’est toujours pas le cas pour les revenus financiers liés aux placements des entreprises. Or ces placements n’ont cessé d’occuper une place de plus en plus importante dans les bilans financiers des entreprises. Plus de 107 % en dix ans ! Cela représente deux fois le montant du produit intérieur brut. Comme on pourrait le dire trivialement, il y a donc de la marge.
Cette logique de financiarisation de l’économie « sans entraves » doit être, si ce n’est stoppée, du moins découragée et donc taxée.
L’économie virtuelle, qui se nourrit elle-même de la spéculation, est de plus en plus détachée de l’économie réelle. C’est un danger. Nous avons tous pu le constater puisque c’est une des raisons de la crise de 2008. Ce sont en effet les choix spéculatifs des banques qui gèrent les produits financiers des entreprises qui sont, en partie, la cause de cette dernière.
Cette gangrène empêche le développement de l’économie réelle, dont les deux éléments principaux devraient rester l’investissement productif et les salaires. Ce ne sont pas ces choix qui ont été faits, notamment par les grandes entreprises, et nous en payons aujourd'hui les conséquences, y compris en termes de perte de compétitivité. Quand on investit deux fois moins dans la modernisation de l’outil de travail, dans la formation et les salaires que dans la spéculation, on sait où cela mène, et on le voit aujourd'hui.
Nous comprenons que la logique qui sous-tend cet amendement percute de plein fouet les récentes réorientations du Gouvernement en matière de compétitivité, mais, puisque certains cherchent des contreparties aux avantages octroyés aux entreprises, en voilà une !
Notre amendement est un premier pas pour réorienter les profits vers la solidarité. En soumettant ces actifs à une contribution importante, mais en rien confiscatoire, nous entendons contraindre les entreprises à sortir de la logique qui nous a conduits dans le mur. Nous souhaitons aussi les inciter à réinvestir la richesse produite dans l’entreprise elle-même.
Comment ne pas imaginer les effets que l’application immédiate de notre amendement aurait sur la vie économique ? Il serait une arme dissuasive pour conduire les entreprises à faire d’autres choix de placements et à cesser d’investir dans les revenus financiers plutôt que dans l’investissement productif. De plus, il rapporterait des sommes importantes qui permettraient de contribuer à l’équilibre de nos comptes sociaux, et cela sans avoir besoin de recourir à une taxation supplémentaire, sur les retraites par exemple.
Selon un vieux slogan de la prévention routière, « boire ou conduire, il faut choisir ». Eh bien, nous sommes à un carrefour : continuer de spéculer ou contribuer à la solidarité nationale, il faut choisir ! Notre groupe fait ce dernier choix, et nous espérons que nos collègues de gauche nous suivrons dans ce juste combat pour une juste répartition des richesses.
Cet amendement, qui vise à instituer une CSG sur les revenus de placement des personnes morales, ouvre une réflexion utile sur le financement de la protection sociale.
Cela étant, nous avons déjà eu l’occasion de signaler que nous attendions le rapport du Haut Conseil du financement de la protection sociale et que nous étions encore dans l’appréciation de divers éléments. La commission souhaite donc connaître l’avis du Gouvernement.
Le Gouvernement émet un avis défavorable, non parce qu’il condamne l’intention qui a conduit au dépôt de cet amendement ou le fond de celui-ci, mais parce qu’une mission a été confiée au Haut Conseil du financement de la protection sociale, dont les conclusions sont attendues pour la fin de l’année ; il ne nous paraîtrait pas loyal à l’égard de sa présidente, Mme Elbaum, et de celles et de ceux qui travaillent à ses côtés, de contraindre par la loi, car cela reviendrait à cela, sa réflexion.
Lorsque ce rapport aura été remis et les préconisations faites, le Gouvernement comme le Parlement retrouveront leur entière liberté d’action à l’égard desdites préconisations. Mais, dans l’attente, il serait sage que les membres du Haut Conseil n’aient pas le sentiment qu’il leur est demandé de travailler inutilement, sentiment contre lequel je vous mets assez vigoureusement en garde, mesdames, messieurs les sénateurs, car, selon toute probabilité, il pourrait entraîner l’arrêt des travaux, la démission, voire la dissolution de cette instance.
Parce qu’il souhaite éviter de telles issues, le Gouvernement demande donc le retrait de l’amendement et, à défaut, son rejet.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 66, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen et David, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 14
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le chapitre 5 du titre 4 du livre 2 du code de la sécurité sociale est complété par une section 6 ainsi rédigée :
« Section 6
« Contribution des revenus financiers des sociétés financières et non financières
« Art. L. 245 -17. – Les revenus financiers des prestataires de service visés au livre V du code monétaire et financier entendus comme la somme des dividendes bruts et des intérêts nets reçus, sont assujettis à une contribution sociale dont le taux est fixé à 26, 8 %.
« Les revenus financiers des sociétés tenues à l’immatriculation au registre du commerce et des sociétés conformément à l’article L. 123-1 du code de commerce, à l’exclusion des prestataires visés au premier alinéa, entendus comme la somme des dividendes bruts et assimilés et des intérêts bruts perçus, sont assujettis à une contribution sociale dont le taux est fixé à 26, 8 %.
« Les contributions prévues au présent article ne sont pas déductibles de l’assiette de l’impôt sur les sociétés.
« Un décret fixe les taux de répartition de ces ressources entre les différentes branches de la sécurité sociale. »
II. – L’article L. 213-1 du même code est ainsi modifié :
1° Après le 5° bis, il est inséré un 5° ter ainsi rédigé :
« 5° ter Le recouvrement de la contribution mentionnée à l’article L. 245-17 ; » ;
2° Au 6°, après la référence : « 3° », les mots : « et 5° » sont remplacées par les mots : «, 5° et 5° ter ».
III. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article.
La parole est à M. Dominique Watrin.
Cet amendement constitue, avec celui visant à instaurer une modulation des cotisations sociales que nous avons déjà examiné, le socle de nos propositions en matière de financement de la protection sociale.
Il s’agit pour nous de mettre un terme aux errements provoqués par la financiarisation de l’économie, laquelle conduit à ce qu’une part toujours grandissante des richesses créées par les entreprises n’est destinée ni à l’économie réelle, ni aux salaires, ni à l’investissement des entreprises, mais à la rémunération de la rente et à l’acquisition par les sociétés elles-mêmes de revenus financiers, de nature souvent spéculative. Conscients donc des risques que ces dérives font peser sur l’emploi et la sécurité sociale, nous proposons d’instaurer une nouvelle cotisation sociale sur les revenus financiers des entreprises et des institutions financières – en fait, d’aller chercher l’argent là où il est.
Faut-il préciser que ces revenus échappent aujourd’hui à toute forme de contribution sociale ? Il s’agit pourtant de sommes colossales, comme l’attestent les comptes de la nation en 2010 publiés par l’INSEE, qui évalue à 317, 9 milliards d’euros les revenus financiers des entreprises et des banques.
Pour être plus précis, cette somme se décompose ainsi : 218, 4 milliards d’euros au titre des produits financiers des sociétés non financières, c’est-à-dire les dividendes reçus et les intérêts perçus par les sociétés non financières, et 99, 5 milliards d’euros de revenus financiers des sociétés financières, qui correspondent quant à eux aux dividendes reçus et au solde des intérêts versé et perçus.
Démonstration est faite qu’en réalité, contrairement à ce que certains voudraient nous faire croire, l’économie n’est pas atone, en tout cas pas atone pour tout le monde ! Les entreprises ont d’importantes ressources financières, dont l’utilité sociale est cependant toute relative aujourd'hui.
L’instauration de cette cotisation, sur la base du taux commun des cotisations sociales, c'est-à-dire du taux appliqué aux revenus du travail, dégagerait d’importantes ressources, soit plus de 41 milliards d’euros pour la branche maladie, plus de 26 milliards d’euros pour la branche retraite et plus de 17 milliards d’euros pour la branche famille.
Ces nouvelles ressources, dont on s’est jusqu’à présent privé, seraient certainement les bienvenues dans la période actuelle non seulement pour lutter contre le déficit de la sécurité sociale, mais surtout pour animer une politique sociale dynamique répondant aux besoins sociaux. Elles contribueraient probablement aussi à réorienter l’activité économique vers un autre type de développement social et écologique.
Il s’agit donc d’un amendement de fond majeur, que l’on pourrait qualifier aussi d’amendement structurel radical, dont nous pensons qu’il apporte une réponse pertinente, qui devrait au moins être étudiée comme piste et appeler de premiers engagements pour viser un nouveau type de croissance réelle.
Le développement des ressources humaines constitue selon nous un type de développement économique et social qu’il est urgent de mettre en place.
En conclusion, je me référerai à Jean-Paul Delevoye – on voit que mes références ne sont pas exclusives –, qui fut, comme je le suis moi-même, conseiller général du Pas-de-Calais, et qui disait : à une époque où la richesse était agricole, on a créé la taxe foncière ; ensuite, il y a eu la révolution industrielle, et on a créé une taxe professionnelle ; aujourd'hui, on voit bien que la richesse est d’abord financière ; eh bien, taxons cette richesse pour la rendre utile à toute la société !
Comme vient de l’indiquer M. Watrin, cet amendement est lourd de conséquences puisqu’il a pour objet d’assujettir les revenus et produits financiers des entreprises aux cotisations sociales patronales, ce qui représenterait 41, 645 milliards d’euros pour la branche maladie, soit 13, 1 %, 26, 386 milliards d’euros pour la branche retraite, soit 8, 3 %, et 17, 167 milliards d’euros pour la branche famille, soit 5, 4 %. Les recettes envisagées sont, de toute évidence, à la hauteur de l’augmentation des prélèvements obligatoires que propose le groupe CRC dans ses différents amendements.
Compte tenu du poids de la pression fiscale induite, la commission souhaite le retrait de l’amendement, contre lequel elle émettra à défaut un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
I. – L’article L. 133-7 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Les quatre premiers alinéas sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« L’ensemble des cotisations et contributions sociales dues au titre des rémunérations versées aux salariés mentionnés à l’article L. 7221-1 du code du travail et aux personnes mentionnées aux 2° et 3° de l’article L. 722-20 du code rural et de la pêche maritime sont recouvrées sous les garanties et sanctions applicables au recouvrement des cotisations assises sur les salaires, respectivement, du régime général de sécurité sociale et du régime de protection sociale des personnes salariées des professions agricoles. » ;
2° Au cinquième alinéa, la référence : « et à l’article L. 351-21 du code du travail » est supprimée et les mots : « desdites cotisations et contributions sociales » sont remplacés par les mots : « des cotisations d’origine légale ou conventionnelle qui leur sont dues » ;
3° Les trois derniers alinéas sont supprimés.
I bis (nouveau). – Après le I de l’article L. 241-10 du même code, il est inséré un I bis ainsi rédigé :
« I bis. – Chaque heure de travail effectuée par les salariés mentionnés à l’article L. 7221-1 du code du travail ouvre droit à une déduction forfaitaire de la cotisation patronale due au titre des assurances maladie, maternité, invalidité et décès dont le montant est fixé par décret. Cette déduction n’est cumulable ni avec aucune exonération de cotisations sociales, ni avec l’application de taux ou d’assiettes spécifiques ou de montants forfaitaires de cotisations. »
I ter (nouveau). – L’article L. 741-27 du code rural et de la pêche maritime est complété par un IV ainsi rédigé :
« IV. – Les I et I bis de l’article L. 241-10 du code de la sécurité sociale sont applicables aux rémunérations versées aux personnes mentionnées au 2° de l’article L. 722-20 du présent code, employées par des particuliers pour la mise en état et l’entretien des jardins, et au 3° du même article. »
II. – Le I s’applique aux modalités de calcul des cotisations et contributions sociales dues au titre des rémunérations versées à compter du 1er janvier 2013.
III
Alors que nous abordons la discussion de l’article 15, je veux rappeler la position des écologistes sur la suppression du forfait de cotisation : ils y sont favorables.
Bien sûr, nous avons été sollicités – nous avons reçu des coups de fil, des mails, … – afin que cette disposition soit conservée pour les employeurs de salariés à domicile, mais nous, nous estimons qu’il n’y a pas deux catégories de salariés. Les employés qui travaillent à domicile ou dans le secteur des services à la personne ne sont pas des sous-employés et ils doivent relever, comme tous les autres salariés, du régime général. C’est ce principe qui va nous animer lors de la discussion des amendements.
Certes, on nous objecte que les salariés concernés ont la possibilité de refuser la déclaration au forfait, mais, soyons sérieux : le savent-ils même ? Le monde syndical, qui pourrait les appuyer et les informer, est faible dans ce secteur. Et même lorsqu’elles sont informées, ont-elles la possibilité de refuser ce qu’on leur impose ces personnes qui courent d’employeur en employeur et passent beaucoup temps dans les transports pour assurer plusieurs emplois ?
Par conséquent, même si c’est une possibilité, c’est une possibilité très peu employée, soit parce que les salariés n’ont pas l’information, soit parce qu’ils n’ont pas la possibilité de refuser.
Autre argument, qui est vrai, le forfait est une façon de lutter contre le travail non déclaré, mais le secteur des emplois à domicile n’est pas le seul où il y a du travail au noir. Combien d’employeurs, au lieu d’embaucher une personne comme salarié, lui disent, pour que ça leur coûte moins cher, de prendre le statut d’auto-entrepreneur ou de créer une société à laquelle ils donneront du travail ? Ce type de sous-traitance, c’est, en fait, du travail dissimulé.
Il y a donc un vrai travail à faire contre le travail non déclaré, mais pas seulement dans le secteur de l’emploi à domicile.
Nous préférons donc nous en tenir au principe selon lequel il n’y a pas deux catégories de salariés : tout emploi est respectable et doit être respecté, et tout salarié doit relever du régime général.
Je suis contre une nouvelle atteinte au dispositif des services à la personne, déjà mis à mal ces dernières années.
Lors de la discussion générale, j’ai développé les éléments qui prouvent l’efficacité de ce dispositif en termes de créations d’emploi et de rentabilité des finances publiques. Je n’y reviens donc pas.
Je tiens quand même à insister sur le fait que ce dispositif d’aide fiscale et sociale répond à un véritable besoin de la société : il facilite la garde des jeunes enfants, l’accompagnement des personnes âgées, qui ne sont pas toutes obligatoirement dépendantes, ou l’aide aux personnes handicapées. Il permet également à beaucoup de femmes de se maintenir sur le marché du travail en leur offrant un moyen de faire garder leurs enfants. Il présente aussi l’avantage de permettre de concilier vie privée et vie professionnelle, notamment pour les ménages des classes moyennes, qui représentent plus de la moitié des 3, 5 millions de particuliers employeurs ; et toutes ces familles ne sont pas hyper riches !
Ce dispositif permet en outre l’intégration de publics éloignés du marché du travail ou à faible niveau de qualification. Ceux-ci peuvent ainsi obtenir un emploi, bénéficier d’une couverture sociale normale afin de se constituer des droits à la retraite et, bien souvent maintenant, recevoir une formation.
Rappelons que ces emplois sont non délocalisables !
Le projet de loi de finances pour 2011 a supprimé la réduction de 15 points de charges patronales liée à la déclaration au réel des salariés de particuliers employeurs. Cette suppression, à laquelle je m’étais fermement opposée, a représenté environ 30 % de la hausse du montant des cotisations sociales à payer. C’était d’ailleurs l’objectif du gouvernement.
Les données publiées par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS, sur l’activité des particuliers employeurs pour le premier trimestre de 2011 ont montré très clairement cet impact négatif : le nombre de particuliers employeurs a baissé de 0, 5 % et le nombre d’heures déclarées a, quant à lui, diminué de 1, 9 %.
Dans sa note de conjoncture de mars 2012, l’ACOSS indique une baisse de 3 % du volume horaire déclaré en 2011, laquelle n’a pu être compensée par la hausse de 2, 8 % du taux horaire moyen.
En 2011 toujours, la masse salariale nette a baissé de 0, 3 % ainsi, bien entendu, que les charges qui y sont attachées.
Dans sa note de conjoncture d’octobre 2012, l’ACOSS souligne que, « En dépit d’évolutions trimestrielles un peu erratiques, le diagnostic de ralentissement voire de baisse de l’activité des particuliers employeurs se confirme. »
Pour le deuxième trimestre de 2012, les données chiffrées publiées sont les suivantes : une baisse de 0, 3 % du nombre d’employeurs, une diminution de 3, 8 % du volume horaire déclaré et une réduction de 1, 2 % de la masse salariale nette.
Remettre à nouveau en cause ce soutien aux emplois à domicile entraînera, à coup sûr, une diminution du nombre d’heures déclarées, la reprise du travail non déclaré et, bien entendu, la destruction officielle d’emplois.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 134 rectifié est présenté par M. Milon, Mmes Bouchart et Bruguière, M. Cardoux, Mmes Cayeux et Debré, M. Dériot, Mme Deroche, M. Fontaine, Mme Giudicelli, M. Gilles, Mmes Hummel et Kammermann, MM. Laménie, Longuet, Lorrain et Pinton, Mme Procaccia, MM. de Raincourt, Savary, Husson et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 299 est présenté par M. Barbier.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Alain Milon, pour présenter l’amendement n° 134 rectifié.
Cet article vise à supprimer la possibilité de cotiser au forfait pour les particuliers employeurs, qui devront désormais payer les cotisations sur le salaire réel.
Ce passage obligatoire au réel va entraîner un surcoût de la masse salaire. Couplée à la mesure du projet de loi de finances pour 2013 plafonnant à 10 000 euros la déduction fiscale pour l’emploi à domicile, cette disposition provoquera soit des licenciements, soit une baisse des heures déclarées au détriment des salariés.
Pourtant, le secteur des services à la personne a permis la création de plus de 400 000 emplois en équivalent temps plein depuis 2005, et je rappelle qu’il s’agit d’emplois non délocalisables.
Pour ces raisons, nous demandons la suppression de l’article 15 par scrutin public.
La parole est à M. Gilbert Barbier, pour présenter l'amendement n° 299.
Ce qui pourrait apparaître comme une mesure d’équité va en fait bouleverser considérablement l’organisation de beaucoup de foyers. Il est d’ailleurs regrettable qu’aucune étude d’impact n’ait été réalisée sur une mesure si importante pour les personnes âgées, les familles nombreuses et les familles modestes, qui participent à l’embauche de milliers de personnes.
Cette suppression va conduire l’employeur à diminuer le nombre d’heures, à réduire le taux horaire pour ramener le salaire à hauteur du SMIC ou à dissimuler une partie de la rémunération. Nous risquons de voir se développer le travail au noir, comme l’a évoqué M. Desessard, que ce dispositif avait en partie contribué à faire disparaître.
En ajoutant à cela d’autres dispositions telles que le plafonnement à 10 000 euros de la déduction fiscale, nous allons perdre des dizaines, voire des centaines de milliers d’emplois. Ce sont essentiellement des personnes très modestes, des gens qui ne sont pas sur le marché du travail de manière régulière et qui trouvent là un moyen de subsistance, qui seront frappées.
Voilà pourquoi je demande moi aussi la suppression de cet article.
À ce stade de la discussion, je voudrais simplement rappeler que la suppression de l’assiette forfaitaire s’attache à corriger une double injustice : d’une part, le salarié déclaré au forfait est lésé, car, en acquittant moins de cotisations, il perd des droits à prestations ; d’autre part, l’employeur qui déclare le salaire réel est paradoxalement désavantagé par rapport à celui qui déclare sur la base du forfait puisque le premier ne bénéficie plus de l’abattement de 15 points sur les cotisations patronales et le second fait subir une perte de recettes aux organismes sociaux.
Dans le contexte économique et social de notre pays, quand le Gouvernement fixe comme objectif le redressement des comptes du pays – et donc des comptes sociaux – avec un parti pris de justice et d’équité, le maintien de cette option exorbitante du droit commun ne se justifie plus.
La commission a donc émis un avis défavorable.
Faisons un bref rappel historique : dans une très récente loi de financement de la sécurité sociale, le gouvernement précédent, suivi par sa majorité, avait décidé de revenir sur l’abattement qui existait dès lors que l’option au réel était privilégiée.
Le résultat, largement prévisible, ne s’est pas fait attendre, et l’ensemble des employeurs ont privilégié le mécanisme au forfait, entraînant une perte de droits pour les salariés concernés. Cette conséquence était inévitable dès lors que la cotisation ne se faisait plus sur la réalité du salaire versé.
C’est donc pour éviter cela que le Gouvernement propose d’en rester au réel, en supprimant la possibilité de cotiser au forfait. Pour autant, et parce que l’Assemblée nationale a eu le sentiment qu’une période de transition était nécessaire, il a été décidé l’instauration d’un abattement de 8 % à hauteur du SMIC.
Tel qu’il existe aujourd’hui, le dispositif me semble équilibré, et il ne devrait pas rencontrer d’opposition trop farouche. En tout cas, c’est ce que le Gouvernement espère. C’est pourquoi il émet un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
Ces deux amendements tendent à supprimer l’article 15 du PLFSS, au motif que son adoption aurait pour effet de renchérir le prix du travail, contraignant les employeurs à renoncer à ces emplois ou à opter pour le travail non déclaré. Ce dernier argument a au moins le mérite de démontrer ce que nous ne cessons de dire depuis des années : la fraude sociale est d’abord et avant tout une fraude aux cotisations.
Naturellement, bien qu’opposé à la mesure d’exonération de cotisations patronales qui figure dans cet article, …
… le groupe CRC rejettera ces deux amendements identiques, qui méconnaissent une réalité pourtant primordiale pour qui veut appréhender le débat, à savoir celle de la situation sociale et économique des salariés du secteur de l’aide à domicile.
Il faut prendre un parti et s’y tenir, et nous pensons que le meilleur choix sera celui qui prendra prioritairement en compte la situation, de plus en plus difficile, des différents intervenants à domicile en emploi direct et même dans le cadre associatif, certes à but non lucratif, mais soumis à la concurrence sauvage et à la précarisation des conditions de travail. Ce n’est peut-être pas exactement le sujet ici, mais je tenais à dire combien il y a beaucoup de souffrance dans tout le secteur de l’aide à domicile et de l’aide à la personne.
Comme vous le savez, il s’agit ici d’un secteur à la fois exclusivement féminin et concernant des personnes souvent peu ou pas qualifiées. Le temps partiel, bien plus subi que choisi, en est la norme. En outre, les conditions de travail se sont particulièrement dégradées depuis plusieurs années. Alors que dans les années soixante-dix et quatre-vingt, par exemple, les aides ménagères étaient très majoritairement salariées par des centres communaux d’action sociale ou par des associations subventionnées par les municipalités, elles sont aujourd’hui de plus en plus nombreuses à être salariées par un particulier employeur.
Ce mouvement n’est pas anodin puisqu’il s’est aussi accompagné de la suppression des cadres collectifs de travail, qui permettaient aux salariées de pouvoir échanger entre elles, de développer des solidarités professionnelles et aussi de bénéficier d’une représentation et d’un soutien syndical. Tout cela manque cruellement et, aujourd’hui, l’isolement des salariées de l’aide à domicile explique les difficultés accrues qu’elles rencontrent à faire reconnaître leurs droits. Car la réalité de ces salariées, ce sont les bas salaires, la précarité, le manque de reconnaissance !
Les sénatrices et sénateurs du groupe UMP voudraient, avec leur amendement, que la précarité qu’elles connaissent aujourd’hui se poursuive. Or rétablir le forfait, ce serait dire à ces salariées qu’il leur faut, afin que leurs employeurs évitent de ne pas respecter la loi, se résoudre à survivre avec le minimum vieillesse demain, à relever de la CMU, bref, à vivre de la galère toujours plus !
Nous nous y refusons, et nous voterons contre ces deux amendements identiques.
Je souscris à tous les arguments en matière de répercussion sur l’emploi développés par M. Barbier, Mme Dini et M. Milon.
Pour tempérer les affirmations, en particulier celles exprimées par M. Daudigny, selon lesquelles la cotisation au forfait pénaliserait les salariés, je vous propose, mes chers collègues, un calcul très simple en prenant le cas d’une salariée à mi-temps que je connais bien, payée 2 euros au-dessus du SMIC.
En se basant sur le montant réel, la salariée dont j’ai pris l’exemple subira une retenue supplémentaire de 45 euros à la fin du mois, ce qui n’est pas négligeable par les temps qui courent. Il s’agit donc encore d’une amputation de son pouvoir d’achat, et je vous assure que, quand on lui annonce, elle fait la grimace.
Vous me rétorquerez qu’il s’agit d’un calcul à court terme et qu’on ne maîtrise pas le manque à gagner pour la retraite. C’est d’ailleurs dans ce domaine que le problème se pose, car cela ne change rien en matière de remboursements médicaux, non plus qu’en ce qui concerne les indemnités de chômage, qui sont forfaitisées.
Donc, pour reprendre ce calcul – vous me pardonnerez, j’aime particulièrement les mathématiques financières –, si la salariée en question mettait de côté ces 45 euros par mois et les plaçait sur quarante ans, ce qui est la durée d’une carrière normale, à un taux d’intérêt relativement raisonnable de l’ordre de 3 %, les intérêts cumulés représenteraient un capital non négligeable de 37 000 à 40 000 euros au moment de son départ à la retraite. C’est une vue de l’esprit, je vous l’accorde, et il faudrait affiner le calcul, mais, pour la salariée, cela pourrait sans doute compenser le petit manque à gagner sur sa retraite.
Certes, je sais que, par principe, vous refusez de favoriser la retraite par capitalisation, et il est vrai qu'une salariée qui perçoit un faible revenu ne consentira pas cet effort d'épargne, sauf si elle est très précautionneuse. Reste qu’une retenue de 45 euros, chaque mois, au bas de la feuille de paye, sera ressentie durement par les salariés modestes.
Monsieur Watrin, vous avez parlé de dégradation des conditions de travail. Je rappelle que cet article concerne les services à la personne à domicile et non ceux qui sont dispensés en établissement, où, je le reconnais, compte tenu de l’état des personnes dépendantes, le travail est certainement très difficile.
Chez les particuliers employeurs, les conditions de travail ne seront pas plus mauvaises. Par ailleurs, si ceux-ci sont consciencieux, ils ont passé un contrat de travail et prévu un nombre d’heures raisonnable. Je n'ai pas le sentiment que les salariés se plaignent.
Vous avez également parlé de temps partiel. Bien sûr, nous regrettons tous que ceux qui le souhaitent ne puissent pas travailler à temps complet, mais n'oubliez pas que, pour les personnes non qualifiées, c'est déjà bien d’avoir un temps partiel. En outre, la demande est telle que d’autres employeurs peuvent les solliciter et leur permettre de travailler plus. Incitons donc les particuliers employeurs à embaucher des personnes pour les aider !
Il existe des personnes âgées, en particulier des couples, qui ne sont pas dépendantes et n'ont aucune raison de bénéficier de l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA, mais qui doivent pourtant se faire aider. Elles doivent alors rémunérer ces services sur leurs retraites, qui sont moyennes ou peu importantes. Elles ont besoin du dispositif en vigueur, car elles ne peuvent pas dépenser plus qu'un certain montant. Que feront-elles si cette mesure est adoptée ? Elles ne dépenseront pas plus : elles diminueront officiellement le nombre d’heures accomplies par le salarié. Celui-ci recevra donc le même salaire net, mais perdra un certain nombre d'avantages, en particulier pour sa retraite.
Voilà pourquoi je pense que cet article est une erreur.
Cet article est une vraie fausse bonne idée, d’autant que le projet de loi de finances pour 2013 prévoit déjà un certain nombre de contraintes. Je pense au plafonnement à 10 000 euros de l'exonération fiscale pour les particuliers employeurs ou à la hausse de la TVA que devront subir les associations offrant des services à domicile.
Passer du forfait au réel reviendra d'une certaine façon à encourager le salaire au SMIC, puisque celui-ci ne serait pas touché par la mesure prévue à l'article 15. Si cette disposition est adoptée, tous les employeurs qui versent un salaire supérieur au SMIC subiront une augmentation de plus de 50 % de leurs charges. Ce n'est pas rien !
Toutes ces mesures forment un véritable faisceau de convergences contre l’ensemble de la classe moyenne, qui a un peu les moyens d’employer des personnes à domicile. Cela aura pour conséquence la réduction du nombre d’heures travaillées ou, dans le pire des cas, le recours au travail au noir.
Monsieur Watrin, les 3 millions de particuliers employeurs ne font pas de la fraude fiscale, ils utilisent un dispositif légal. Je vous rappelle que cette mesure a remporté un grand succès depuis que Martine Aubry, qui en est à l'origine, l’a instaurée.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous voterons la suppression de cet article.
Mme Dini a très bien recentré le débat : nous parlons des particuliers employeurs.
Au cours de la discussion générale, je suis intervenue sur ce que j'appelle la niche « nounou ». En effet, ce sont surtout les familles ayant recours à des nourrices pour garder leurs enfants en bas âge ou pour récupérer les plus grands à la sortie de l'école afin de leur éviter des journées trop longues qui seront concernées par cette mesure. Les messages qui me proviennent de ma commune, de mon département, ou de plus loin encore évoquent le surcoût que cela entraînera pour elles.
Compte tenu de l’impact financier de cette disposition, je crains que les femmes qui perçoivent un faible salaire préfèrent rester chez elles pour garder leur enfant jusqu'à trois ans. Cela les éloignera encore un peu plus du travail, alors que c'est justement ce que l'on veut éviter.
Monsieur le ministre, j’ai déjà interpellé votre prédécesseur sur ce point : il faudrait revoir la liste des emplois à domicile, car certains d’entre eux n'y ont manifestement pas leur place ; je pense par exemple aux secrétaires particulières à domicile. Malheureusement, cette liste est fixée par arrêté, et le Parlement ne peut pas légiférer sur cette question.
Recentrons les emplois à domicile sur l'aide aux personnes et l'aide aux familles. Nous pourrions ainsi préserver un certain nombre de dispositions pour ceux qui en ont réellement besoin et non pas pour ceux qui recourent, comme je l’ai dénoncé il y a trois ans, à des coachs sportifs.
Sourires.
Je ne suis pas favorable à la suppression de cet article. Je pense que les dispositions prises à l'Assemblée nationale sur le paiement des cotisations sociales au réel sont tout à fait satisfaisantes.
Je rappelle que la suppression par le précédent gouvernement d’un abattement de 15 points des charges patronales a posé quelques problèmes. L'Assemblée nationale a rétabli un abattement forfaitaire de l'ordre de 0, 75 euro par heure. C'est un geste fort de la part du Gouvernement, puisque la perte de recettes est estimée à 210 millions d'euros. Pour tous les employeurs qui ont choisi de payer au réel, il s’agit donc d’une avancée.
Aujourd'hui, 70 % des emplois sont déclarés au réel, les 30 % restants le sont au forfait. C’est pourquoi la suppression brutale de ce mode de déclaration poserait problème. C’est tout le sens de l’amendement que j’ai déposé et que nous aurons, je l’espère, l'occasion d'examiner.
Je suis tout à fait d'accord pour que le forfait disparaisse progressivement, mais cette disposition n'est pas si récente que cela, et nous nous en sommes tous bien accommodés depuis de très nombreuses années. J’ai rarement entendu demander sa suppression, et pour cause ! Cette mesure avait pour but de promouvoir les emplois de service à la personne, au moment où on voulait les développer pour contrebalancer la perte d'emplois industriels.
Supprimer brutalement la déclaration au forfait risquerait d'avoir des conséquences qui ne sont pas négligeables ; elles ont été rappelées. Je souhaite insister sur l’une d’entre elles qui me semble particulièrement importante.
En supprimant cette mesure, on pense évidemment que les salariés concernés bénéficieront d’une meilleure protection sociale et de meilleures cotisations ; c'est certainement vrai. Cependant, si l’on ne prend pas le temps de faire un lissage – si l’on casse la vaisselle d'un coup –, étant donné l'augmentation du coût horaire pour les employeurs, que se passera-t-il ?
Peut-être, et ce serait tout à fait dommageable.
Pour ma part, je crains surtout que l’on n’assiste progressivement à une renégociation des conditions de salaire et à des procédures de révision du salaire horaire net, sur la base du coût global salaires plus charges. Ce risque concerne 30 % des emplois à domicile, c'est-à-dire grosso modo 225 000 employeurs.
On aurait pu conserver la décision prise par l'Assemblée nationale et le Gouvernement, car elle est bonne, et maintenir dans le même temps le forfait en le majorant, pour permettre une meilleure protection sociale et avancer progressivement. Si l'Assemblée nationale, dans sa grande sagesse, a proposé qu'un état des lieux soit réalisé dans un an, c’est bien que tout n’est pas simple !
Dans ces conditions, pourquoi casser la vaisselle maintenant ? Mettons au contraire en place un système progressif. Cela permettra de faire le point, de savoir si cela entraîne des pertes d'emplois parmi les employés déclarés au forfait et de répondre à un certain nombre d'interrogations légitimes. Une position abrupte, dans un sens ou dans un autre, ne me semble pas adaptée à la situation d'aujourd'hui.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Ce débat devient un peu irréel. Faut-il une fois de plus rappeler que le premier enjeu des dispositions qui sont proposées par le Gouvernement, c'est l’élargissement des droits sociaux des salariés ?
Certes, nous avons eu une très belle démonstration des bienfaits de la retraite par capitalisation de la part de M. Cardoux, mais, pour ma part, je préfère un système de retraite, collectif, solidaire à un système fondé sur la capitalisation exercée à titre individuel.
Je le répète, gardons à l’esprit qu'il s'agit d'élargir les droits sociaux des salariés.
Non, on ne peut pas dire que ce sont les classes moyennes qui sont visées par ce dispositif ! Les crédits d'impôt en vigueur sont maintenus, tout comme les exonérations. Il y a donc bien encore un système d’avantages fiscaux qui permettra aux classes moyennes de recourir à des emplois à domicile dans des conditions qui leur seront favorables.
Il existe deux fédérations. La Fédération des particuliers employeurs de France, la FEPEM, est favorable au dispositif aujourd'hui proposé.
La Fédération du service aux particuliers, la FESP, elle, y est défavorable, mais il est vrai qu’elle représente non plus les particuliers employeurs, mais les entreprises, c'est-à-dire les mandataires.
Il existe un certain nombre de cas pour lesquels je n'ai pas d'états d’âme. Je pense aux cours particuliers à domicile. Devons-nous encourager les sociétés qui proposent ces prestations – Acadomia, par exemple – ou l'éducation nationale ?
Exclamations sur les travées de l'UMP.
Cela ne vous plaît pas, mais peu importe ! Pour ma part, je revendique le fait que l'éducation nationale puisse prendre en charge l'ensemble des élèves, quelles que soient leurs difficultés.
M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je ne veux pas que les familles favorisées puissent, plus que d'autres, payer des cours particuliers à domicile.
Applaudissementssur les travées du groupe socialiste.
Nous vivons heureusement dans un pays de liberté – j’espère que cela durera encore longtemps –, mais ce n'est pas à la loi de favoriser ce type de prestation. Il en va de même pour le secrétariat à domicile, madame Procaccia. Nous pourrions d’ailleurs nous retrouver sur ce point.
Et quid des cours de musique à domicile ? Que ceux qui peuvent se les payer le fassent, cela ne me gêne pas, mais qu'ils respectent le droit du travail et le droit des salariés.
Exclamations sur les travées de l'UMP.
Que les enseignants – j'en ai été un, je peux le dire – qui donnent des cours de soutien en plus de leur service ordinaire soient également soumis au droit commun !
L'article 15 est un article de justice sociale : il corrige des iniquités sans nuire aux classes moyennes. Par conséquent, nous devons le soutenir.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 134 rectifié et 299.
J'ai été saisie de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe UMP et, l'autre, du groupe UDI-UC.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici le résultat du scrutin n° 29 :
Le Sénat a adopté. §
En conséquence, l'article 15 est supprimé, et les amendements n° 260 rectifié ter, 261 rectifié ter, 187 rectifié, 226, 65, 199 rectifié bis, 227, et 328 rectifié n'ont plus d'objet.
Pour l’information du Sénat, je rappelle que ces amendements étaient ainsi rédigés :
L’amendement n° 260 rectifié ter, présenté par MM. Gilles, Milon et Cointat, Mlle Joissains, Mmes Deroche et Cayeux, MM. Pinton, Doublet et D. Laurent, Mme Procaccia, MM. Dulait, Pintat, P. Dominati et Saugey, Mme Debré, MM. Leleux, Laménie, B. Fournier et J.P. Fournier, Mme Bruguière et MM. Revet, Houpert, Lefèvre et Chauveau, était ainsi libellé :
I. - Alinéa 3
Compléter cet alinéa par les mots :
sauf pour les particuliers employeurs de plus de 65 ans, dont les revenus sont inférieurs à 1, 5 fois le SMIC
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° 261 rectifié ter, présenté par MM. Gilles, Milon et Cointat, Mlle Joissains, Mmes Deroche et Cayeux, MM. Pinton, Doublet et D. Laurent, Mme Procaccia, MM. Dulait, Pintat, P. Dominati et Saugey, Mme Debré, MM. Leleux, Laménie, B. Fournier et J.P. Fournier, Mme Bruguière et MM. Revet, Houpert, Lefèvre et Chauveau, était ainsi libellé :
I. - Alinéa 3
Compléter cet alinéa par les mots :
sauf pour les couples parents d’enfants scolarisés de moins de 11 ans où le père et la mère exercent une activité professionnelle
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Les amendements identiques n° 187 rectifié, présenté par M. Milon, Mmes Bouchart et Bruguière, M. Cardoux, Mmes Cayeux et Debré, M. Dériot, Mme Deroche, M. Fontaine, Mme Giudicelli, M. Gilles, Mmes Hummel et Kammermann, MM. Laménie, Longuet, Lorrain et Pinton, Mme Procaccia, MM. de Raincourt, Savary et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, apparentés et rattachés, et n° 226, présenté par M. Marseille, Mme Dini, M. Amoudry, Mme Jouanno, MM. Roche et Vanlerenberghe, Mme Létard et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, étaient ainsi libellés :
I. – Après l'alinéa 3, insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
« Les cotisations et contributions sociales visées au premier alinéa du présent article peuvent toutefois être calculées, d’un commun accord entre l’employeur et le salarié, sur une assiette égale, par heure de travail, à une fois la valeur horaire du salaire minimum de croissance applicable au premier jour du trimestre civil considéré :
« a) Soit lorsque le particulier employeur donne mandat à une association ou entreprise déclarée au titre de l’article L. 7232-1-1 du code du travail et certifiée auprès d’une norme qualité reconnue par l’État aux titres des articles L. 115-27 à L. 115-33 du code de la consommation et de l’article R. 7232-9 du code du travail ;
« b) Soit lorsque le particulier employeur emploie un salarié exerçant à titre principal une autre activité professionnelle telle que définie à l’article R. 613-3 du code de la sécurité sociale.
« Préalablement à l’embauche du salarié ou de l’intervenant à domicile, l’employeur lui fournit un document d’information, clair et renseigné, et recueille son accord signé sur les conséquences en matière de prestations contributives en espèce, dans le cadre de l’option forfaitaire. »
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° 65, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen et David, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, était ainsi libellé :
I. – Alinéas 6 et 7
Supprimer ces alinéas.
II. – En conséquence, alinéa 9
Remplacer les références :
Les I et I bis
par la référence :
Le I
L'amendement n° 199 rectifié bis, présenté par M. Godefroy, était ainsi libellé :
Alinéa 7
Remplacer cet alinéa par quatre alinéas ainsi rédigés :
« I bis. - Chaque heure de travail effectuée par les salariés mentionnés à l’article L. 7221-1 du code du travail donne droit :
« - soit à une déduction forfaitaire de la cotisation patronale due au titre des assurances maladie, maternité, invalidité et décès dont le montant est fixé par décret ;
« - soit à une déduction assise sur la valeur horaire du salaire minimum de croissance majorée de 25 % applicable au premier jour du trimestre civil considéré.
« Cette déduction n’est cumulable avec aucune exonération de cotisations sociales. »
L'amendement n° 227, présenté par Mme Dini, MM. Marseille, Vanlerenberghe et Amoudry, Mme Jouanno, M. Roche, Mme Létard et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, était ainsi libellé :
I. - Alinéa 7, première phrase
Remplacer les mots :
par décret
par les mots :
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° 328 rectifié, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin et Fortassin, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano et Vendasi, était ainsi libellé :
Après l'alinéa 10
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
II bis. – Le présent article n'est pas applicable aux salariés visés à l'article L. 7221-1 du code du travail qui bénéficient déjà d'un régime de protection sociale.
L'amendement n° 339, présenté par MM. Antoinette et Antiste, Mme Claireaux et MM. Cornano, Desplan, J. Gillot, S. Larcher, Mohamed Soilihi, Patient, Tuheiava et Vergoz, est ainsi libellé :
Après l'article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – La section 3 du chapitre III bis du titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale est complétée par un article ainsi rédigé :
« Art. L. …. – Dans les départements de Guadeloupe, Guyane, Martinique et la Réunion, les cotisations et contributions sociales d'origine légale et les cotisations et contributions conventionnelles rendues obligatoires par la loi, dues au titre des rémunérations versées aux salariés mentionnés à l'article L. 772-1 du code du travail et aux personnes mentionnées au 2° de l'article L. 722-20 du code rural et de la pêche maritime employées par des particuliers pour la mise en état et l'entretien de jardins, sont calculées, d'un commun accord entre l'employeur et le salarié :
« 1° Soit sur une assiette égale, par heure de travail, à 0, 76 fois dans les départements de Guadeloupe, Guyane et Martinique et 0, 4 fois dans le département de la Réunion la valeur horaire du salaire minimum de croissance applicable au premier jour du trimestre civil considéré ;
« 2° Soit sur les rémunérations réellement versées au salarié.
« En l'absence d'accord entre l'employeur et le salarié ou à défaut de choix mentionné par l'employeur, il est fait application du présent 2°.
« Les conditions de recouvrement des cotisations d'origine légale ou conventionnelle mentionnées au premier alinéa du présent article sont identiques à celles définies aux cinquième et sixième alinéas de l'article L. 133-7 du présent code. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n’a plus d’objet du fait de la suppression de l’article 15.
Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 139, présenté par M. Milon, Mmes Bouchart et Bruguière, M. Cardoux, Mmes Cayeux et Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mmes Giudicelli, Hummel et Kammermann, MM. Laménie, Longuet, Lorrain et Pinton, Mme Procaccia et MM. de Raincourt et Savary, est ainsi libellé :
Après l'article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Les professionnels mentionnés au 7° de l’article L. 161-22 du code de la sécurité sociale exerçant leur activité dans les zones définies dans les conditions fixées par l’article L. 1434-7 du code de la santé publique, où l’offre de soins est déficitaire, sont exonérés d’une partie des cotisations mentionnées au 1° de l’article L. 642-1 du code de la sécurité sociale.
II. – La perte de recettes pour les organismes de la sécurité sociale résultant du I est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Alain Milon.
Cet amendement vise à exonérer partiellement de cotisations retraite les médecins qui exercent en zone sous-dense.
Le cumul emploi-retraite permet de répondre au défi de la pénurie médicale. Il commence à porter ses fruits, mais le gisement reste considérable.
Cependant, beaucoup de médecins retraités sont freinés par l’obligation de payer des cotisations, dans la mesure où celles-ci n’ouvrent pas droit à prestations puisqu’ils ont dépassé l’âge légal de la retraite. Il y a aujourd’hui 10 578 médecins retraités, âgés de soixante-cinq à soixante-dix ans, qui pourraient continuer à exercer leur profession mais ne le font pas à cause de cette obligation de cotiser.
L'amendement n° 315 rectifié, présenté par M. Barbier, est ainsi libellé :
Après l'article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 642-3 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Sont exonérées du paiement des cotisations les praticiens médicaux conventionnés reprenant ou poursuivant une activité relevant de l'article L. 643-6 et exerçant dans les zones caractérisées par une offre médicale insuffisante ou des difficultés dans l'accès aux soins, définies par décret en Conseil d'État. »
II. - La seconde phrase du premier alinéa de l'article L. 645-2 du même code est ainsi rédigée :
« Toutefois, celle-ci n'est pas due pour les assurés reprenant ou poursuivant une activité relevant de l'article L. 643-6. »
III. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I et II ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Gilbert Barbier.
Cet amendement est proche de celui que vient de défendre M. Milon. Il s'agit de répondre en partie au problème de la pénurie médicale, en autorisant les médecins retraités à travailler sans avoir à acquitter des cotisations, puisque dans leur cas celles-ci n’ouvrent pas droit à prestations.
Cet amendement vise donc à exonérer de cotisations d'assurance vieillesse les médecins qui exercent leur activité dans le cadre du cumul emploi-retraite. Cette mesure ne résoudrait certes pas à elle seule le problème de la désertification médicale, mais elle permettrait de lutter contre la pénurie dans certains secteurs.
Le sous-amendement n° 390, présenté par M. Daudigny, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Amendement n° 315 rectifié, alinéas 5 et 6
Rédiger ainsi ces alinéas :
II. - Le premier alinéa de l'article L. 645-2 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« La cotisation, forfaitaire ou proportionnelle, n'est pas due pour les assurés relevant du second alinéa de l'article L. 642-3. »
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter le sous-amendement n° 390 et pour donner l’avis de la commission sur les amendements n° 139 et 315 rectifié.
L’article L. 643-6 du code de la sécurité sociale autorise les personnes exerçant une profession libérale à poursuivre, dans certaines conditions, leur activité après l’attribution de leur pension de retraite.
L’amendement de M. Barbier tend à exonérer de cotisations vieillesse les médecins exerçant leur profession dans les zones caractérisées par une offre médicale insuffisante ou des difficultés dans l’accès aux soins, définies par décret en Conseil d’État. Cette piste me semble intéressante : la mesure ne vise que les médecins exerçant dans une zone sous-dotée, ce qui répond à un objectif de santé publique ; en outre, dans la mesure où les médecins concernés n’acquerront pas de droits supplémentaires à pension, l’absence de cotisations n’est pas injustifiée.
J’ai cependant déposé un sous-amendement afin de modifier le II de cet amendement, car la rédaction proposée conduirait à abroger la seconde phrase de l’article L. 645-2 du code la sécurité sociale, qui peut avoir son utilité. Celle-ci permet en effet de substituer à la cotisation forfaitaire de l’avantage social vieillesse, l’ASV, régime de retraite complémentaire des praticiens et auxiliaires médicaux, une cotisation proportionnelle aux revenus. Actuellement, cette disposition ne s’applique pas seulement aux praticiens qui exercent en zone sous-dense, mais elle concerne tous les praticiens qui reprennent un emploi après avoir atteint l’âge de la retraite. Il me semble excessif de remplacer cette disposition par une exonération complète de cotisations. Je propose donc de n’accorder cette exonération complète qu’aux praticiens qui exercent en zone sous-dotée, afin de valoriser leur démarche.
Cette mesure est proche de celle que prévoit l'amendement n° 139. Cependant, cet amendement est moins précis s'agissant du montant de l’exonération. Par conséquent, je demande son retrait au profit de l’amendement n° 315 rectifié tel que modifié par mon sous-amendement. Ce dernier vise, je le répète, à restreindre l’application de l’exonération de cotisations vieillesse aux médecins qui exercent après la liquidation de leur pension de retraite dans une zone sous-dotée.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements n° 139 et 315 rectifié et sur le sous-amendement n° 390.
Je me rallie au sous-amendement déposé par M. le rapporteur général, qui a fait preuve de perspicacité. Il s’agit bien de favoriser uniquement les praticiens exerçant dans les zones sous-dotées en médecins.
Je voterai l’amendement n° 315 rectifié ainsi sous-amendé.
Nous cherchons depuis des années à attirer des médecins dans les zones rurales, ou du moins à conserver ceux qui y sont déjà installés. Par conséquent, j’estime que cette disposition est de nature à favoriser le maintien de l’offre de soins dans nos territoires mal dotés.
Il appartiendra à M. Milon de préciser, au nom du groupe UMP, s’il maintient ou l’amendement n° 139. En attendant, je veux dire que le dispositif envisagé constitue une avancée, car il permettra aux médecins de passer la main. Les jeunes praticiens ont besoin de sécurité quand ils s’installent, et l’expérience d’anciens médecins leur est tout à fait indispensable à ce moment-là.
Ce lien entre les générations peut également être essentiel pour accélérer l’informatisation des dossiers médicaux. Des anciens médecins peuvent consacrer une partie de leur temps à aider leurs successeurs à enregistrer l’historique des malades.
Il me paraît toutefois restrictif de limiter l’application de cette avancée aux zones sous-dotées. En effet, certaines zones normalement dotées souffrent d’un manque de spécialistes. Je pense notamment aux ophtalmologistes. Ceux-ci sont concentrés dans les villes et, lorsqu’un praticien installé en milieu rural prend sa retraite, il n’est pas remplacé. Peut-être faudrait-il étudier les moyens d’accompagner les médecins spécialistes afin qu’ils reportent leur départ à la retraite ou au moins exercent une activité de soutien auprès de leurs successeurs.
Non, je le retire, madame la présidente. L’amendement n° 315 rectifié est effectivement meilleur que celui que j’ai présenté. J’admets volontiers son petit défaut de rédaction.
J’estime cependant que le sous-amendement déposé par M. le rapporteur général, même s’il est nécessaire, diminue l’efficacité de la mesure proposée par Gilbert Barbier. Le groupe UMP votera malgré tout le sous-amendement et l’amendement.
Le sous-amendement est adopté.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 15.
I. – La seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 241-11 du code de la sécurité sociale est supprimée.
II. – Le I entre en vigueur à compter du 1er janvier 2014.
L’introduction de l’article 15 bis résulte de l’adoption à l’Assemblée nationale d’un amendement d’initiative parlementaire ayant pour objet, selon la présentation qui en a été faite, d’harmoniser les règles de financement de la branche accidents du travail et maladies professionnelles applicables aux associations intermédiaires, au titre des personnes qu’elles emploient.
Actuellement, ces associations sont soumises à un système dual, puisqu’elles cotisent, pour la branche AT-MP, à deux taux de cotisation différents, selon la durée effective de travail des salariés. Lorsque cette dernière est inférieure à 750 heures par an, les employeurs s’acquittent d’une cotisation forfaitaire. Pour les salariés dont l’activité excède cette durée, la cotisation est, en revanche, fixée selon les règles de droit commun, c’est-à-dire en fonction de la sinistralité.
D’après son exposé des motifs, l’adoption de cet amendement, dont le premier signataire à l’Assemblée nationale était M. Grandguillaume, aurait pour effet « de permettre au pouvoir réglementaire de fixer un seul et même taux de cotisation pour ces deux catégories de salariés sur la base de leur sinistralité ».
Si tel devait être le cas, nous n’y serions évidemment pas opposés, puisque cela rapprocherait du droit commun les règles en vigueur pour cette catégorie d’employeurs. Ce n’est toutefois pas l’analyse que nous faisons de cet amendement, devenu article 15 bis. En effet, celui-ci modifie l’article L. 241-11 du code de la sécurité sociale, en supprimant la dernière phrase de son premier alinéa, laquelle prévoit que pour la partie de rémunération égale ou inférieure à 750 heures s’applique « une cotisation forfaitaire d’accident du travail ».
Est-ce à dire que l’application du principe de sinistralité devient alors automatique ? Si tel était le cas, comment comprendre la présentation qu’en fait M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales, qui, dans son rapport relatif à l’examen des articles, présente cette mesure comme une « exonération de cotisation totale au titre d’une partie des personnes employées par les associations intermédiaires ». Une exonération totale n’est bien évidemment pas de même nature que la substitution d’une cotisation forfaitaire par une cotisation assise sur la sinistralité.
Le doute est encore accru lorsque M. le rapporteur général précise reconnaître « l’intérêt de cette mesure d’exonération partielle de cotisations AT-MP pour les associations ».
Aussi, à la lecture du rapport sénatorial, sommes-nous enclins à penser qu’il ne s’agit pas d’une substitution d’un mécanisme de cotisations à un autre, mais bel et bien d’une exonération de cotisations patronales sur la branche AT-MP, dont le montant est d’ailleurs évalué à 2 millions d’euros. Ce serait ainsi la première exonération de cotisations sur cette branche depuis des années, ce que sa nature assurantielle devrait théoriquement interdire, les employeurs devant assumer seuls les dépenses financières imposées à leurs salariés, du fait de la survenue d’une maladie professionnelle ou d’un accident du travail.
À nos yeux, ni la nature de l’employeur ni celle des salariés ne justifie que des employeurs puissent déroger à ce principe, à moins de considérer que les salariés employés par ces associations, qui sont effectivement des publics fragiles, puissent être partiellement responsables de ces accidents et de ces maladies professionnelles.
Pour toutes ces raisons, et dans l’attente d’éclaircissements, notre groupe ne peut adopter l’article 15 bis.
Ces problèmes d’exonération sont toujours extrêmement difficiles à traiter en matière d’accidents du travail et de maladies professionnelles.
Ainsi que nous l’avons souligné dans le rapport d’information réalisé avec Mme Deroche, comme il s’agit d’un système assurantiel, il importe que les cotisations rentrent. Nous avons en effet dit et répété que ces dernières ne peuvent être remplacées par des ressources fiscales.
Je m’interroge donc sur cet article 15 bis, lequel tend à prévoir que la perte de 2 millions d’euros sera compensée par des recettes fiscales. J’aimerais que le Gouvernement nous dise lesquelles. Or, je le répète, pour ce qui concerne la branche, il vaudrait mieux qu’il s’agisse de cotisations. J’ajoute que les emplois d’avenir sont exonérés de charges sociales, à l’exception de celles qui portent sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.
En tant que rapporteur de la branche AT-MP, je rejoins Mme Pasquet pour dire que cet article me pose problème.
L'article 15 bis est adopté.
À la fin du III de l’article 20 de la loi n° 2007-1786 du 19 décembre 2007 de financement de la sécurité sociale pour 2008, l’année : « 2012 » est remplacée par l’année : « 2014 ». –
Adopté.
Mes chers collègues, je vous rappelle que les articles 16 à 19 ont été examinés hier soir.
I. – L’article L. 137-15 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le 3° est ainsi rédigé :
« 3° Des indemnités de licenciement, de mise à la retraite ainsi que de départ volontaire versées dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi qui sont exclues de l’assiette des cotisations de sécurité sociale en application du douzième alinéa de l’article L. 242-1 du présent code ; »
2° Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Sont également soumises à cette contribution les indemnités versées à l’occasion de la rupture conventionnelle mentionnée aux articles L. 1237-11 à L. 1237-15 du code du travail, pour leur part exclue de l’assiette de la contribution mentionnée à l’article L. 136-1 du présent code en application du 5° du II de l’article L. 136-2. »
II. – Au début de la première phrase du 5° du II de l’article L. 136-2 du même code, sont ajoutés les mots : « Indépendamment de leur assujettissement à l’impôt sur le revenu, ».
III. – La deuxième colonne du tableau de l’article L. 137-16 du même code est ainsi modifiée :
1° À la deuxième ligne, le nombre : « 5 » est remplacé par le nombre : « 6, 1 » ;
2° À la troisième ligne, le nombre : « 6 » est remplacée par le nombre : « 5, 6 » ;
3° À la quatrième ligne, le nombre : « 9 » est remplacé par le nombre : « 8, 3 ».
Cet article soumet les petites indemnités de rupture conventionnelle à un forfait social de 20 %, au motif que les employeurs abuseraient de ce dispositif.
J’ai consulté un travail du Centre d’études de l’emploi, qui est, je le rappelle, un établissement public administratif, placé sous la tutelle du ministère chargé du travail et de l’emploi et du ministère chargé de la recherche. Tous les propos qui vont suivre sont tirés d’un rapport de recherche qu’il a publié en octobre dernier, présentant les résultats d’une enquête qualitative sur les usages de la rupture conventionnelle, réalisée dans le cadre d’une convention passée avec la CFDT.
L’enquête dont je fais état a été menée à partir d’une centaine d’entretiens en face à face, conduits d’avril à juillet 2011, avec des salariés choisis au hasard parmi les ruptures conventionnelles signées en novembre 2010 dans cinq départements. Son objet est de rendre compte, en s’appuyant sur le récit de ces salariés, des circonstances de la rupture et de comprendre les logiques d’usage du dispositif.
Il faut savoir que les salariés interrogés occupaient des types de postes variés, avaient une ancienneté très diverse et l’amplitude des salaires était très large. Les secteurs d’activité et la taille des entreprises concernées étaient également très hétérogènes : la moitié d’entre elles avaient subi une baisse importante d’activité, du chiffre d’affaires et/ou des effectifs ; une forte majorité des établissements avait connu des bouleversements récents, tels que rachats, fusions, modifications dans l’organisation du travail, changements managériaux, voire un cumul de ces événements ; de nombreux salariés ont également indiqué que leur entreprise avait subi de fortes restrictions financières.
Ces différents événements avaient souvent constitué, sinon l’explication principale, du moins le déclencheur ayant conduit à la rupture conventionnelle.
Concernant les conditions de l’emploi avant la rupture conventionnelle, un quart des salariés affirmaient être satisfaits à la fois du travail et des conditions de travail ; un autre quart s’était déclaré satisfait du travail, tout en indiquant avoir subi des conditions matérielles difficiles ; la moitié déclarait avoir éprouvé de l’insatisfaction par rapport au travail.
Lorsque la rupture était fondée sur une raison économique, les salariés avaient parfois pu négocier leur départ. En outre, certains employeurs avaient gratifié leurs salariés qui avaient un projet de reconversion professionnelle, parfois dans la perspective d’une poursuite de relations dans un nouveau cadre.
Après la rupture, les trois quarts des salariés interrogés n’avaient pas repris d’activité et étaient toujours inscrits à Pôle emploi. Parmi ces derniers, beaucoup cherchaient à devenir travailleurs indépendants, notamment par la voie du régime de l’auto-entreprenariat.
Les situations de ceux qui avaient repris une activité étaient très diverses : en CDI, CDD ou intérim, avec ou sans reconversion professionnelle.
Les salariés anciens, dont la trajectoire professionnelle était stabilisée six mois après la rupture, étaient ceux qui avaient élaboré très tôt leur projet de reconversion ou avaient suivi des formations.
Sur l’ensemble des entretiens, une majorité des ruptures pouvaient être considérées comme ayant été à l’initiative principale du salarié, et, dans plus de la moitié des cas, pour des raisons conflictuelles. Les autres ruptures conventionnelles, sur l’initiative de l’employeur, étaient fondées principalement sur des motifs économiques.
La conclusion du rapport est la suivante : Quelle que soit la partie à l’initiative de la rupture, les situations et les modalités, une écrasante majorité des enquêtés a porté un jugement positif sur le dispositif s’agissant de leur cas personnel.
Pour pratiquement tous les salariés, l’avantage principal du dispositif est l’indemnisation du chômage. Pour ceux qui ont vécu un licenciement, la rupture conventionnelle apparaît comme moins stigmatisante, et elle évite, surtout dans les milieux professionnels restreints, un mauvais effet « réputationnel ».
Pour ceux qui ont été à l’initiative d’une démission, la rupture conventionnelle présente tous les avantages : prise en charge par l’assurance chômage et indemnités de rupture.
Nous sommes donc bien loin du tableau que nous dressent le Gouvernement et sa majorité, lorsqu’ils nous disent que toutes les ruptures conventionnelles interviennent du fait de l’employeur et qu’elles sont souvent contraintes. Selon eux, il faudrait faire payer l’employeur qui licencie de manière déguisée. §
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 136 est présenté par M. Milon, Mmes Bouchart et Bruguière, M. Cardoux, Mmes Cayeux et Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mmes Giudicelli, Hummel et Kammermann, MM. Laménie, Longuet, Lorrain et Pinton, Mme Procaccia, MM. de Raincourt, Savary et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 218 rectifié est présenté par M. Amoudry, Mmes Dini et Jouanno, MM. Marseille, Roche, Vanlerenberghe, Husson et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. René-Paul Savary, pour présenter l’amendement n° 136.
L’article 20 vise à soumettre au forfait social de 20 % dû par l'employeur la part des indemnités de rupture conventionnelle exonérée de cotisations, celle qui est inférieure à 72 744 euros. Jusqu’à présent, les indemnités versées après une rupture conventionnelle n’étaient soumises à cotisations qu’au-delà de ce montant.
Le Gouvernement prétend que certains employeurs ont recours aux ruptures conventionnelles pour échapper aux règles encadrant le licenciement, mais ce type de dérive n’a jamais été démontré.
Un tel changement dans l’imposition des indemnités de rupture conventionnelle va rendre ce dispositif nettement moins attractif, alors que c’est son caractère souple et novateur qui en a fait, nous semble-t-il, son succès.
Cette mesure risque, une nouvelle fois, de toucher le salarié si l’employeur répercute le montant de la contribution sur l’indemnité. La possibilité de rompre à l’amiable un contrat de travail est pourtant un moyen d’éviter nombre de conflits potentiels.
C’est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.
La parole est à Mme Muguette Dini, pour présenter l'amendement n° 218 rectifié.
Sans revenir en détail sur mon intervention précédente, je tiens à dire que, dans son rapport d’octobre 2012, le Centre d’études de l’emploi a proposé trois aménagements permettant tout à la fois d’améliorer l’information des parties, d’éviter les ruptures brutales et de donner des perspectives au salarié. Si nous pouvions prendre en compte ces trois recommandations, nous n’aurions pas à appliquer la pénalisation préconisée dans l’article 20.
Le rapport propose ainsi de formaliser l’invitation à l’entretien préalable – à l’heure actuelle, elle se fait oralement –, qu’elle ait lieu sur l’initiative de l’employeur ou du salarié. Sur le contenu, étant donné l’ignorance des salariés de leur droit à l’assurance chômage, il serait nécessaire de rendre obligatoire, avant la signature, la réalisation d’un diagnostic de situation des droits du salarié, lequel pourrait être établi soit par Pôle emploi, soit par l’inspection du travail.
Le rapport préconise également que la loi indique précisément les dispositions devant figurer dans la convention de rupture.
Le Centre d’études de l’emploi propose, enfin, de réintroduire un délai de préavis, qui courrait à compter de l’homologation, et dont l’employeur pourrait, le cas échant, dispenser le salarié, ce qui se fait parfois. Les salariés interrogés ont tous souligné, pour s’en féliciter, la rapidité avec laquelle ils se sont trouvés en dehors de l’entreprise.
La solution de taxer les petites indemnités de rupture conventionnelle, au-delà du fait qu’elle n’a rien de constructif, est choquante et, surtout, très pénalisante.
Les amendements identiques n° 136 et 218 rectifié visent à revenir sur l’assujettissement des indemnités de rupture conventionnelle au forfait social en deçà du seuil correspondant à deux plafonds de sécurité sociale. Rappelons que, au-delà, ces indemnités sont déjà soumises à cotisations sociales.
Contrairement à ce que d’aucuns tentent souvent de faire croire – cela me rappelle d’autres débats… –, il ne s’agit pas, au travers de cet article, de remettre en cause la rupture conventionnelle. Il est simplement proposé de modifier le niveau des cotisations sociales payées sur ces indemnités de rupture, afin d’éviter la pérennisation d’une niche sociale, très fréquemment reconnue comme inefficace et inefficiente.
La commission a donc émis un avis défavorable.
Madame Dini, monsieur Savary, vous considérez que la rupture conventionnelle n’est pas une rupture de contrat de travail comme les autres. Vous avez parfaitement raison. Néanmoins, d’autres éléments doivent être pris en compte.
Ainsi, force est de constater qu’un tel dispositif a plutôt contribué à l’éviction des seniors du marché du travail. À la fin de 2010, la rupture conventionnelle représentait 8 % des fins de contrat pour les moins de trente ans, contre 16 % pour les plus de cinquante-cinq ans et 23 % pour les plus de cinquante-huit ans.
Par ailleurs, l’existence d’un consentement mutuel a un caractère assez théorique. Près de 61 % des ruptures conventionnelles sont demandées par l’employeur, qui se voit parfois offrir par ce biais la possibilité d’externaliser des coûts juridiques généralement associés au licenciement.
En l’occurrence, la rupture n’est pas du même type que dans le cadre d’un licenciement ou d’une mise à la retraite. Il convient de compenser par la loi l’avantage que constitue la rupture conventionnelle pour certaines entreprises, quand d’autres n’ont pas le choix et procèdent à des licenciements ou des mises à la retraite, respectant en cela une procédure dont la précédente majorité les avait exonérées en instituant la rupture conventionnelle.
Notre proposition ne concerne que les prélèvements acquittés par les employeurs, les montants dus par les salariés restant inchangés. En conséquence, nous sommes défavorables à ces amendements identiques.
Certes, madame la ministre, monsieur le rapporteur général, vous ne remettez pas en cause la rupture conventionnelle, mais vous continuez à accroître la part fiscale de ce dispositif. En la matière, les travées de gauche de cet hémicycle font preuve d’une certaine constance par rapport aux positions qu’elles ont toujours défendues et qui ne me surprennent pas.
À mes yeux, l’article 20 est source d’instabilité juridique. Pas plus tard que l’année dernière, le « mode d’imposition » de la rupture conventionnelle a déjà été modifié. On recommence aujourd'hui, ce qui pose problème, en particulier pour les salariés.
Mme Dini l’a très bien expliqué, il est plus flatteur de mentionner, sur un CV, une rupture conventionnelle plutôt qu’un licenciement, sans compter que la procédure dure beaucoup moins longtemps.
Madame la ministre, vous avez souligné que la rupture conventionnelle concernait davantage les seniors ; mais c’est évident ! Compte tenu de leur ancienneté dans l’entreprise, de toutes les façons, les indemnités de licenciement représenteraient des sommes beaucoup plus élevées. Les salariés plus jeunes et qui ne sont employés que depuis un, deux ou trois ans ne pourraient pas obtenir grand-chose en termes d’indemnités, qu’il s’agisse d’un licenciement ou d’une rupture conventionnelle.
L’âge du salarié et le montant des indemnités sont liés. En modifiant une nouvelle fois les éléments de calcul, vous remettez en cause d’une certaine manière le dialogue social qu’est en train de préconiser M. Sapin. Celui-ci, que j’avais interrogé en commission, avait affirmé que la rupture conventionnelle n’était nullement remise en cause et qu’il fallait laisser aux partenaires sociaux le soin de discuter de la question et de décider si une remise à plat du dispositif était nécessaire.
Avec une telle mesure, vous remettez tout en question sans laisser au dialogue social la liberté de décision.
Vous parlez des partenaires sociaux, mais vous avez oublié de les solliciter à l’époque !
Je soutiendrai ces amendements, et ce pour deux raisons.
D’une part, la rupture conventionnelle est tout de même très encadrée, l’inspection du travail étant présente à tous les stades de la procédure. Je l’ai moi-même expérimentée dans cette propre maison, et il a fallu reprendre la convention trois fois, l’inspection du travail ayant considéré que le consentement n’était pas assez éclairé.
D’autre part, je viens de le mentionner, le consentement du salarié est très éclairé.
C’est donc un mauvais procès qui est fait à la rupture conventionnelle au travers de cet article.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L’amendement n° 69, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen et David, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La contribution mentionnée à l’alinéa précédent est majorée de 5 % dès lors que les indemnités liées à une rupture conventionnelle sont versées à des salariés âgés de cinquante-cinq ans et plus. Le produit de cette majoration est versé à parts égales à l’organisme gestionnaire du régime d’assurance chômage et au fonds de solidarité vieillesse mentionné à l’article L. 135-1 du code de la sécurité sociale.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Rappelons que c’est à l’occasion de l’examen du projet de loi portant modernisation du marché du travail qu’a été instaurée la rupture conventionnelle, qui s’apparente, aux yeux du groupe CRC, à un véritable ovni juridique.
En effet, le fait que la loi prévoit que personne n’est à l’origine de cette rupture n’a pas d’autre but que d’éviter aux employeurs d’avoir à assumer une quelconque responsabilité vis-à-vis de leurs salariés. C’est d’ailleurs pour cette raison que le groupe CRC n’avait pas voté la mesure, craignant que les ruptures conventionnelles ne dissimulent en réalité des plans sociaux et des licenciements économiques déguisés. De ce point de vue, les propos tenus par Mme la ministre sont très éclairants.
Pour notre part, nous nous appuyons sur les dernières statistiques de la DARES, la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, qui datent de mars 2012, pour souligner que 794 000 ruptures conventionnelles ont été enregistrées en France depuis 2008 ; 300 000 rien que l’an dernier ! Sur le premier trimestre de l’année, cela équivaut à près de 13 % des sorties de CDI et au double des licenciements économiques. Pourtant, en période de crise, vous en conviendrez, rares sont les salariés qui font spontanément le choix de quitter un CDI, particulièrement lorsque le taux de chômage ne cesse d’augmenter.
Dans le cadre d’une étude réalisée sur l’initiative d’une grande centrale syndicale, la CFDT pour ne pas la nommer, et se fondant sur une centaine d’entretiens, le Centre d’études de l’emploi met en évidence un double constat : un quart des personnes interrogées ont eu le sentiment d’avoir été poussées vers la sortie ; 40 % des salariés ayant signé une rupture conventionnelle initiée par l’employeur considèrent même qu’elles ont été victimes d’un licenciement déguisé, pour motif économique ou personnel.
Au regard de ces éléments, il y a tout lieu d’être vigilant. Sans doute serait-il opportun de revisiter le dispositif, au moins pour sécuriser le droit des salariés.
En attendant, nous approuvons la démarche suivie dans le cadre de cet article, notamment en vue de protéger les seniors, comme cela a été souligné également par Mme la ministre.
Afin de remédier quelque peu à cette situation, qui affaiblit en réalité les comptes de l’UNEDIC et affaiblira, demain, ceux du FSV, nous souhaiterions que le produit issu de la majoration prévue à l'article 20 soit distribué à parts égales à ces deux organismes.
Tel est l’objet de cet amendement.
Madame Cohen, vous proposez de majorer de 5 % le forfait social calculé sur les indemnités de rupture conventionnelle versées à des personnes âgées de plus de cinquante-cinq ans. L’objectif est sans aucun doute louable, et votre proposition peut se justifier à maints égards, ce qui m’a posé un vrai cas de conscience.
Néanmoins, j’en suis resté au raisonnement selon lequel il était préférable de ne pas multiplier les taux distincts de forfait social, d’autant que l’introduction de celui-ci vient tout juste d’intervenir.
Dans la mesure où vous amenez dans le débat la question des personnes de plus de cinquante-cinq ans et de leur rapport au travail, il pourrait être intéressant que le Parlement s’y intéresse de plus près.
En l’état, la commission demande le retrait de l’amendement, sinon elle émettra un avis défavorable.
Le sujet de l’éviction potentielle des seniors dans certaines entreprises pose des questions importantes. Soumettre les ruptures conventionnelles au forfait social permettra de réguler le recours aux ruptures conventionnelles, en accroissant sensiblement leur coût.
Le taux de 20 % vise la neutralité, entre sommes soumises au forfait social et salaire direct. Il correspond en effet au taux des prélèvements patronaux, à l’exception de ceux qui ouvrent des droits au salarié, autrement dit des cotisations retraite et chômage.
À 25 %, le niveau de prélèvement sur ces indemnités serait déséquilibré, puisque l’employeur paierait davantage sans que soient ouverts plus de droits au salarié. On passerait donc de la neutralité à la pénalité. Or, si le Gouvernement ne souhaitait pas avantager ces indemnités par rapport au salaire, il n’entend pas non plus les pénaliser.
Aussi demandons-nous le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
L’amendement n’est pas adopté.
La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote sur l’article.
Cela a été dit, la possibilité de rompre à l’amiable un contrat de travail est un moyen d’éviter nombre de conflits potentiels.
La modification de l’imposition des indemnités de rupture conventionnelle proposée dans cet article est telle qu’elle va rendre le dispositif moins attractif, alors que c’est son caractère souple et novateur qui a fait son succès. La rupture conventionnelle présente en effet un double intérêt : elle est d’une grande souplesse, ce qui explique d’ailleurs qu’elle soit plébiscitée par les salariés comme par les employeurs ; elle permet de désencombrer la justice prud’homale.
Alors qu’il n’existait auparavant que deux façons de mettre fin à un contrat de travail – le licenciement, sur l’initiative de l’employeur, ou la démission, sur celle du salarié –, le salarié et son employeur ont aujourd'hui la possibilité de convenir d’une rupture d’un commun accord.
La rupture conventionnelle est issue de l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2008 et fut instituée avec le soutien des syndicats patronaux et salariés. C’est d’ailleurs souvent à la demande du salarié que l’employeur propose une rupture conventionnelle. En même temps qu’elle ouvre des droits au salarié, elle limite le risque pour l’employeur d’une procédure devant le conseil des prud’hommes, voire ensuite en appel.
Le dispositif a donc fait ses preuves : il évite les conflits, toujours dommageables aux entreprises, entre employeurs et salariés. Connaissant un grand succès, quelque 300 000 ruptures de ce type ayant d’ores et déjà eu lieu, il contribue, en outre, à désengorger la justice prud’homale et les cours d’appel. À Marseille, par exemple, il faut attendre trois ans en moyenne avant qu’une affaire soit jugée aux prud’hommes.
Taxer davantage les indemnités de rupture conventionnelle dissuadera les employeurs de recourir à un mécanisme qui fonctionne à la satisfaction des deux parties. Pris d’une frénésie de taxes, le Gouvernement risque de tuer un dispositif à succès, mais qui a sans doute, aux yeux de certains, le défaut impardonnable d’avoir été mis en place par le Président Sarkozy et sa majorité.
Murmures sur les travées du groupe socialiste.
Applaudissements sur les travées de l’UMP.
Au fond, pour nous, la question est assez simple. Compte tenu des effets pervers de cette mesure, le risque est grand qu’on la vide de son contenu. Pourtant, elle correspond à un besoin réel, et elle trouve son origine dans la volonté des partenaires sociaux. N’oublions pas tout de même que, plus on taxera les indemnités de rupture conventionnelle, plus on incitera les employeurs à en limiter le montant ou à choisir la procédure du licenciement.
Il existe une première objection de principe à l’adoption de l’article 20 : une indemnité de rupture conventionnelle est non une rémunération, mais une compensation du préjudice qui naît de la rupture du contrat de travail. Et il va de soi que cette rupture n’est pas spontanément désirée par le salarié – il faut que nous en ayons tous conscience !
Il y a une deuxième objection : cette disposition va profondément pénaliser les salariés, même si vous entendez la faire payer par l’entreprise. D’ailleurs, c’est toujours la même idée : vous faites porter un prélèvement sur l’entreprise, au prétexte d’épargner les salariés et les ménages. Mais l’entreprise n’a de ressources que celles qu’elle prélève sur les consommateurs et elle n’a de maîtrise de ses charges que sur les différents facteurs de travail, y compris la masse salariale ! Par conséquent, chaque fois que vous pénalisez l’entreprise, vous pénalisez l’emploi et vous augmentez les prélèvements sur les consommateurs, ce qui diminue leur pouvoir d’achat.
Cet article est donc contraire au principe de la rupture conventionnelle. Il la vide de sa substance et il pénalise directement les travailleurs.
Je mets aux voix l'article 20.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
L'amendement n° 71, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen et David, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 20
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au II bis de l’article L. 137-11 du code de la sécurité sociale, le chiffre : « huit » est remplacé par le chiffre : « cinq ».
La parole est à M. Dominique Watrin.
Cet amendement vise à ramener de huit, chiffre actuellement en vigueur, à cinq plafonds annuels de la sécurité sociale le seuil à partir duquel les retraites chapeaux seraient soumises à une contribution additionnelle de 30 % à la charge des employeurs.
L’article L. 137-11 du code de la sécurité sociale prévoit, en effet, que les employeurs qui servent des retraites chapeaux s’acquittent d’une contribution sociale patronale dont le taux est compris entre 12 % et 24 %, à la condition que le montant des rentes ainsi servies n’excède pas huit fois le plafond annuel de la sécurité sociale.
La loi prévoit également qu’une taxe additionnelle de 30 % s’applique à certaines retraites chapeaux, celles qui excèdent de huit fois le plafond annuel de la sécurité sociale, c’est-à-dire des retraites de 282 816 euros annuels.
Ce régime dérogatoire et la mise en place d’une contribution additionnelle de 30 % dissimulent mal une vérité devenue insupportable pour nos concitoyens, particulièrement dans le contexte socioéconomique actuel.
À l’heure où ce PLFSS nous propose de taxer 7, 5 millions de retraités, il nous semble indispensable de poser la question de la légitimité des retraites chapeaux des dirigeants d’entreprises dont on mesure combien elles sont encore aujourd’hui exceptionnellement privilégiées.
Notre amendement tend donc à apporter une plus grande équité dans ce système, en prévoyant de ramener de huit fois à cinq fois le plafond de la sécurité sociale à partir duquel la contribution additionnelle est due.
Je le rappelle, à l’origine, cet amendement avait une portée plus large puisque le groupe CRC souhaitait fixer ce seuil à trois. Mais vous nous aviez répondu l’an passé, monsieur le rapporteur général, que, bien que vous partagiez notre préoccupation, il fallait procéder « par étapes ». Vous aviez ainsi déposé un sous-amendement afin d’abaisser ce seuil à cinq. C’est donc en ces termes que notre amendement avait été adopté par la majorité sénatoriale.
Osant croire que la position que vous aviez l’an passé résultait d’une conviction commune que nous partageons encore, nous avons redéposé cet amendement dans les termes mêmes du consensus que nous avions trouvé ensemble. Nous espérons qu’il sera de nouveau adopté.
L’objet de cet amendement est que la contribution additionnelle de 30 % à la charge des employeurs soit exigible dès lors que les rentes servies aux employés au titre de l’article L. 137-11 du code de la sécurité sociale excèdent cinq fois le plafond annuel défini à l’article L. 241-3 du même code, et non plus huit fois.
Après réflexion, la commission a décidé d’entendre l’avis du Gouvernement.
ministre déléguée. Les retraites chapeaux constituent en effet un troisième, voire un quatrième étage de retraite. Au-delà de 182 000 euros de rentes chapeaux annuelles, il n’est pas inopportun de porter le prélèvement patronal au taux de 30 % aujourd’hui applicable aux rentes annuelles supérieures à 291 000 euros.
Néanmoins sans doute convient-il de faire attention à ne pas modifier le droit applicable tous les six mois. Vous avez durci le régime des retraites chapeaux en loi de finances rectificative pour 2012, et ces rémunérations font l’objet d’une législation qui a déjà été modifiée à cinq reprises depuis sa mise en place en 2003. On peut certainement penser que c’est déjà un peu trop. Quoi qu’il en soit, nous souhaitons nous en remettre à la sagesse du Sénat.
Ah ! sur les travées du groupe socialiste.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 20.
L'amendement n° 70, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen et David, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 20
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre 7 du titre 3 du livre 1 du code de la sécurité sociale est complété par une section 12 ainsi rédigée :
« Section 12
« Contribution patronale sur la part variable de rémunération des opérateurs de marchés financiers
« Art. L. 137 -27. – Il est institué, au profit des régimes obligatoires d’assurance maladie et d’assurance vieillesse une contribution de 40 %, à la charge de l’employeur, sur la part de rémunération variable dont le montant excède le plafond annuel défini par l’article L. 241-3, versée sous quelque forme que ce soit aux salariés des prestataires de services visés au livre V du code monétaire et financier. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Nous avions déjà proposé l’an dernier un amendement du même ordre, qui avait été adopté par notre assemblée, à un taux de 20 %.
Le présent amendement tend à instaurer une contribution de l’ordre de 40 % sur les bonus que perçoivent celles et ceux qu’il est convenu d’appeler les traders.
En 2010, les bonus des traders des plus gros établissements bancaires, tels que la Société générale, le Crédit agricole et Natixis, étaient de 2 milliards d’euros, soit l’équivalent de 150 000 à 291 000 euros par collaborateur. Bien entendu, cela ne tient pas compte de la rémunération. Donc, même si ces bonus sont légèrement moins élevés pour l’année 2011, ils restent importants, leur diminution étant très relative.
Notre amendement, s’il était adopté, permettrait donc de mettre un terme à ce scandale en rendant plus dissuasif le recours à de tels bonus. D’autant, madame la ministre, que l’encadrement de ces bonus pose problème, comme nous l’avions indiqué l’an dernier au précédent gouvernement, à Mme Pécresse plus précisément. Or nous n’avions pas eu de réponse. J’espère que vous pourrez nous apporter des éclaircissements de nature à apaiser cette inquiétude que vous me semblez partager.
Alors que la directive européenne prévoit que les parts fixe et variable de la rémunération totale doivent être « équilibrées », il semble que cette dimension ne figure plus dans l’arrêté du 13 décembre 2010 transposant le droit européen et que le terme « approprié » l’ait remplacé.
Vous comprendrez que ces deux termes ne sous-tendent pas un objectif identique – les mots ont un sens ! – et qu’il nous paraît donc important que l’ensemble du pays puisse respecter a minima l’encadrement de ces bonus.
En tout état de cause, notre amendement est de nature à apporter de nouvelles ressources à la sécurité sociale en taxant ceux qui profitent du système financier. Quoi de plus juste ?
Cet amendement vise à instaurer une contribution patronale supplémentaire sur la part variable de rémunération des traders.
Une disposition similaire avait déjà été présentée par le groupe CRC lors de l’examen de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 ; elle avait alors été appuyée par le rapporteur général de la commission des affaires sociales.
Comme l’an passé, la commission souhaiterait recueillir l’avis du Gouvernement.
Une réflexion peut effectivement être menée sur l'encadrement des bonus. Il semble néanmoins indispensable de l'accompagner d'une action concertée à l'échelle internationale pour ne pas pénaliser uniquement la place de Paris.
Par ailleurs, des exemples récents, notamment en Grande-Bretagne, montrent que cette mesure est possible et souhaitable et, sous la législature précédente, des projets avaient même émergé ici ou là.
Il reste cependant à définir l'assiette. Plusieurs pistes doivent encore être explorées : une assiette constituée du total des rémunérations dépassant les seuils au-delà desquels il n'y a plus de cotisations chômage et retraite, comme en Grande-Bretagne, ou bien une assiette constituée de la part variable dépassant un pourcentage de la part fixe.
D'autres voies pourraient être explorées, mais comprenez, madame la sénatrice, que cela ne peut pas se faire au détour d'un amendement.
Par ailleurs, nous avons déjà fait beaucoup pour encadrer tous ces éléments de rémunération qui échappent, pour une bonne part, au financement de notre système solidaire de protection sociale, que ce soit en relevant le montant du forfait social, en taxant les stock-options ou – c’est l’objet de deux dispositions de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale – en élargissant l'assiette de la taxe sur les salaires et en créant une tranche supplémentaire pour les salaires dépassant 150 000 euros.
Pour l'ensemble de ces raisons, je vous saurais gré de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, le Gouvernement émettrait un avis défavorable.
J'ai entendu les arguments qu’a avancés Mme la ministre ; à partir du moment où une réflexion est engagée sur la mise en œuvre d’une mesure susceptible d’apaiser notre inquiétude, nous retirons notre amendement, madame la présidente.
Sourires.
Mes chers collègues, nous en sommes parvenus à l’examen de quatre amendements, appelés par priorité à la demande de la commission des affaires sociales.
Ces quatre amendements font l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 7, présenté par M. Daudigny, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I.- La section VI du chapitre 1er du titre III de la première partie du livre 1er du code général des impôts est complétée par un article 520 E ainsi rédigé :
« Art. 520 E. - I. - Il est institué une contribution additionnelle à la taxe spéciale prévue à l’article 1 609 vicies du même code sur les huiles de palme, de palmiste et de coprah destinées à l’alimentation humaine, en l’état ou après incorporation dans tous produits.
« II.- Le taux de la taxe additionnelle est fixé à 300 € la tonne. Ce tarif est relevé au 1er janvier de chaque année, à compter du 1er janvier 2014, dans une proportion égale au taux de croissance de l’indice des prix à la consommation hors tabac de l’avant-dernière année. Les montants obtenus sont arrondis, s’il y a lieu, à la dizaine d’euros supérieure.
« III.- 1. La contribution est due à raison des huiles mentionnées au I ou des produits alimentaires les incorporant par leurs fabricants établis en France, leurs importateurs et les personnes qui en réalisent en France des acquisitions intracommunautaires, sur toutes les quantités livrées ou incorporées à titre onéreux ou gratuit.
« 2. Sont également redevables de la contribution les personnes qui, dans le cadre de leur activité commerciale, incorporent, pour les produits destinés à l’alimentation de leurs clients, les huiles mentionnées au I.
« IV.- Pour les produits alimentaires, la taxation est effectuée selon la quantité entrant dans leur composition.
« V. – Les expéditions vers un autre État membre de l’Union européenne ou un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ainsi que les exportations vers un pays tiers sont exonérées de la contribution lorsqu’elles sont réalisées directement par les personnes mentionnées au 1 du III.
« Les personnes qui acquièrent auprès d’un redevable de la contribution, qui reçoivent en provenance d’un autre État membre de l’Union européenne ou d’un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ou qui importent en provenance de pays tiers des huiles mentionnés au I ou des produits alimentaires incorporant ces huiles qu’elles destinent à une livraison vers un autre État membre de l’Union européenne ou un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ou à une exportation vers un pays tiers acquièrent, reçoivent ou importent ces huiles ou les produits alimentaires incorporant ces huiles en franchise de la contribution.
« Pour bénéficier du deuxième alinéa du présent V, les intéressés doivent adresser au fournisseur, lorsqu’il est situé en France, et, dans tous les cas, au service des douanes dont ils dépendent une attestation certifiant que les huiles ou les produits alimentaires incorporant ces huiles sont destinées à faire l’objet d’une livraison ou d’une exportation mentionnées au même alinéa. Cette attestation comporte l’engagement d’acquitter la contribution au cas où l’huile ou le produit alimentaire ne recevrait pas la destination qui a motivé la franchise. Une copie de l’attestation est conservée à l’appui de la comptabilité des intéressés.
« VI. – La contribution mentionnée au I est acquittée auprès de l’administration des douanes. Elle est recouvrée et contrôlée selon les règles, sanctions, garanties et privilèges applicables au droit spécifique mentionné à l’article 520 A. Le droit de reprise de l’administration s’exerce dans les mêmes délais. »
II. – Après le 3° de l’article L. 731-2 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un 4° ter ainsi rédigé :
« 4° ter Le produit de la contribution mentionnée à l’article 520 E du code général des impôts ; ».
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Mes chers collègues, il existe entre nous un clivage important
Exclamations sur les travées de l'UMP.
Très sincèrement, mes chers collègues, je vous souhaite de ne jamais devoir faire face à de telles situations.
Vous l’aurez compris, j'appartiens à la première catégorie. À ce titre, je porte une attention particulière à l'alimentation et aux composants alimentaires. C’est ainsi qu’est né cet amendement.
Cette disposition soulève plusieurs questions auxquelles je m’efforcerai de répondre.
Première question : pourquoi l’huile de palme ? Cette dernière est l’huile la plus riche en acides gras saturés, qui représentent 50 % de sa composition, si l’on excepte l’huile de coprah, qui en contient plus de 90 %.
Le caractère nocif pour la santé de ces acides a été démontré par toutes les études possibles et imaginables. Certes, ce n'est pas un poison et l’on ne meurt pas en buvant un verre d’huile de coprah, mais la consommation de cette dernière en quantité importante est nocive pour l’organisme. Pour en être convaincu, il suffit de se reporter aux études de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES, selon lesquelles les acides gras saturés sont consommés en excès par la population française – 16 % des apports énergétiques en moyenne, alors que l’apport nutritionnel conseillé est inférieur à 12 %.
L’agence ajoute que, dans l’ensemble de la population, ils contribuent au développement de l’obésité et favorisent les maladies cardiovasculaires.
Deuxième question : quelle est la teneur de cet amendement ?
Pour des motifs de santé publique – et uniquement –, nous avons jugé souhaitable de créer une taxe additionnelle §à la taxe spéciale prévue à l'article L. 1609 vicies du code général des impôts sur les huiles végétales, fluides ou concrètes, effectivement destinées, en état ou après incorporation dans tous les produits alimentaires, à l'alimentation humaine, laquelle est inférieure à 100 euros la tonne.
Cette taxe additionnelle s'appliquerait aux huiles de coprah, de palme et de palmiste, particulièrement nocives pour la santé, et son montant serait fixé à 300 euros la tonne.
Au passage, on remarquera que la taxe ordinaire sur l’huile de palme est deux fois inférieure à la taxe sur l’huile d'olive ; cela étant, je ne vous propose pas aujourd'hui de revoir l'échelle de taxation des huiles !
Si cet amendement est adopté, le montant total de la taxe pesant sur ces huiles sera multiplié par quatre, passant de 100 euros à 400 euros, mais il faut relativiser cette augmentation. Je le répète, l’huile de palme est deux fois moins taxée que l’huile d’olive. En outre, pour mémoire, le cours de la tonne d'huile de palme, sur le marché de Rotterdam, était de 880 dollars en septembre 2012, soit 692 euros, contre 1 100 dollars en mars, soit 866 euros. Vous constaterez ainsi, mes chers collègues, que la taxe proposée est inférieure aux variations des cours de l’huile de palme en l’espace de quelques mois. Il n’y a donc pas péril en la demeure pour les industriels.
Troisième question : quelle est la portée de cet amendement ?
De toute évidence, même si la mesure que nous proposons sera génératrice de nouvelles recettes pour la sécurité sociale – c’est ce qui permet d’ailleurs de l'examiner dans le cadre d'un projet de loi de financement de la sécurité sociale –, il est bien évident que ce n’est pas le produit de cette taxe, si l’amendement est voté, qui permettra de résorber le déficit de nos comptes sociaux.
Cet amendement est donc un signal fort, un signal-prix adressé avant tout aux industriels. Il s'agit de leur demander de ne plus utiliser d’huile de palme, s’ils le peuvent, dans la préparation de substances destinées à l'alimentation ou, à tout le moins, d’en utiliser une quantité plus faible.
Certains prétendent que nous allons pénaliser les consommateurs.
Affirmer cela, c’est mésestimer le montant de la taxe additionnelle que nous proposons de créer. Nous avons fait le calcul : le surcoût pour un pot de cinq kilogrammes d'une pâte à tartiner d'une marque célèbre serait de 30 centimes.
Sourires.
M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Le cas échéant, l'industriel en question ne serait pas obligé de répercuter cette taxe sur son prix de vente. En l’occurrence, l’objectif n’est pas de dissuader le consommateur en le pénalisant
Marques de scepticisme sur les travées de l’UMP.
On s’apercevra bientôt, d'ailleurs, que le dépôt de cet amendement aura permis de lancer un débat que j’estime profitable pour l'ensemble des consommateurs de notre pays.
Quatrième question : existe-il des substituts à l’huile de palme ?
Je me souviens que, voilà peu, nous avons examiné ici même un texte visant à interdire une substance pour laquelle, disait-on, il n’existait pas de substitut immédiat. Dans le cas d’espèce, nous ne sommes pas confrontés à ce problème puisqu’il est parfaitement possible de remplacer l’huile de palme par de l’huile de tournesol, du beurre de cacao ou bien encore de l’huile de coco.
Je voudrais insister sur un autre point.
En 2008 a été signée, dans le cadre du programme national nutrition santé du ministère de la santé, une charte d'engagements volontaires de progrès nutritionnel, aux termes de laquelle trois promesses ont été faites : limiter la quantité de sel, de matières grasses et de sucre ; inciter les consommateurs à manger plus de fruits et de légumes ; améliorer l’information générale des consommateurs.
Sans citer son nom, je voudrais détailler devant vous, mes chers collègues, les actions qu’a entreprises un distributeur signataire de cette charte. À l'époque, sur les 4 000 produits référencés dans ses magasins, plus de 500 contenaient de l’huile de palme ; deux ans plus tard, parmi ceux-ci, 434 n'en contenaient plus.
Il s'agit aussi bien de pâtes à tarte, de biscuits, de chips, de pain de mie et même de pâte à tartiner. Cela prouve bien qu’il est possible de remplacer, totalement ou partiellement, l’huile de palme dans les produits qui en contiennent.
S’agissant de la pâte à tartiner, le produit le plus emblématique, une marque française – nous devrions nous en réjouir –, s'apprête à mettre sur le marché ce qui pourra être considéré comme la première pâte à tartiner sans huile de palme.
D’ailleurs, mes chers collègues, voici une véritable pâte à tartiner fabriquée avec de l’huile de colza et qui, donc, ne contient pas d’huile de palme.
M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales montre un pot de pâte à tartiner. – Exclamations amusé e s.
Sourires.
Mêmes mouvements.
Cela prouve bien qu’il est possible de remplacer l’huile de palme.
(M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales montre cette fois un paquet de chips.) L'argument de vente précise, au dos de ce paquet : « depuis 2007, dans un but de qualité, [notre marque] élabore ses chips avec une huile 100 % tournesol. […] L’huile de tournesol est également plus favorable pour l'environnement, car elle ne contribue pas à la déforestation. »
Brouhaha.
Autre exemple, le fabriquant de ce produit met en avant comme argument de vente la mention « sans huile de palme ». §
Il existe donc bien aujourd'hui des produits de substitution, et un certain nombre de producteurs et de distributeurs se sont engagés à vendre des produits qui ne contiennent plus d’huile de palme ou qui en contiennent moins.
Enfin, dernière question, car vous avez sans doute tous étés témoins de l’emballement médiatique qui a fait suite au vote de cet amendement en commission : cette mesure est-elle acceptée ?
Pour répondre à cette question, je donnerai deux indications.
D’une part, je me référerai à une source que personne, à la droite de cet hémicycle, ne contestera, à savoir le journal Le Figaro.
Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.
La question posée était donc la suivante : faut-il taxer le Nutella ? 64 % des 12 325 personnes interrogées ont répondu « oui » et 36 % se sont prononcées contre cette mesure.
Un autre journal avait posé une question à peu près similaire : faut-il surtaxer l’huile de palme ? Quelque 69, 6 % des personnes sondées se sont déclarées favorables à cette mesure, 30, 4 % s’y sont opposées, et 2 253 internautes ont voté.
Mes chers collègues, il est suffisamment rare qu’une proposition visant à instaurer une taxe, en particulier sur des produits de consommation courante, donc sur des aliments, reçoive dans les premières consultations une approbation aussi large des personnes interrogées. Cela montre bien que les dispositions de cet amendement répondent à une préoccupation de l’ensemble de nos concitoyens.
Nous discutons d’un projet de loi de financement de la sécurité sociale, et non d’une loi de santé publique. Néanmoins, nous avons l’habitude – ce n’est pas une nouveauté – de présenter dans ce cadre des mesures qui relèvent de la santé publique.
Aujourd’hui, nous avons tous, au sein de la Haute Assemblée, l’occasion d’adresser un signe à l’industrie agroalimentaire, de lui indiquer que nous sommes soucieux de la santé de nos concitoyens. Je ne doute pas que nous partagions cet objectif, sur quelque travée que nous siégions.
Si nous votons cet amendement, nous marquerons que nous ne nous contentons pas de belles paroles et que nous nous manifestons aussi dans les actes.
Vifs applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe écologiste et du groupe CRC. – M. Robert Tropeano applaudit également.
L'amendement n° 340, présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l'article 23 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre III du titre III de la première partie du livre premier du code général des impôts est complété par une section ... ainsi rédigée :
« Section...
« Taxe additionnelle à la taxe spéciale sur les huiles
« Art. L... - I. - Il est institué une contribution additionnelle à la taxe spéciale prévue à l'article 1609 vicies du même code sur les huiles de palme, de palmiste et de coprah effectivement destinées, en l'état ou après incorporation dans tous produits, à l'alimentation humaine.
« II. - Le taux de la taxe additionnelle est fixé par tonne à 300 € en 2013, 500 € en 2014, 700 € en 2015 et 900 € à partir de 2016. Ce tarif est relevé au 1er janvier de chaque année à compter du 1er janvier 2017. À cet effet, les taux de la taxe additionnelle sont révisés chaque année au mois de décembre, par arrêté du ministre chargé du budget publié au Journal officiel, en fonction de l'évolution prévisionnelle en moyenne annuelle pour l'année suivante des prix à la consommation de tous les ménages hors prix du tabac. Les évolutions prévisionnelles prises en compte sont celles qui figurent au rapport économique, social et financier annexé au dernier projet de loi de finances.
« III. - 1. La contribution est due à raison des huiles mentionnées au I ou des produits alimentaires les incorporant par leurs fabricants établis en France, leurs importateurs et les personnes qui en réalisent en France des acquisitions intracommunautaires, sur toutes les quantités livrées ou incorporées à titre onéreux ou gratuit.
« 2. Sont également redevables de la contribution les personnes qui, dans le cadre de leur activité commerciale, incorporent, pour les produits destinés à l'alimentation de leurs clients, les huiles mentionnées au I.
« IV. - Pour les produits alimentaires, la taxation est effectuée selon la quantité d'huiles visées au I entrant dans leur composition.
« V. - Les huiles visées au I ou les produits alimentaires les incorporant exportés de France continentale et de Corse, qui font l'objet d'une livraison exonérée en vertu du I de l'article 262 ter ou d'une livraison dans un lieu situé dans un autre État membre de la Communauté européenne en application de l'article 258 A, ne sont pas soumis à la contribution.
« VI. - La contribution est établie et recouvrée selon les modalités, ainsi que sous les sûretés, garanties et sanctions applicables aux taxes sur le chiffre d'affaires.
« Sont toutefois fixées par décret les mesures particulières et prescriptions d'ordre comptable notamment, nécessaires pour que la contribution ne frappe que les huiles effectivement destinées à l'alimentation humaine, pour qu'elle ne soit perçue qu'une seule fois, et pour qu'elle ne soit pas supportée en cas d'exportation, de livraison exonérée en vertu du I de l'article 262 ter ou de livraison dans un lieu situé dans un autre État membre de la Communauté européenne en application de l'article 258 A.
« VII. - Le produit de cette taxe est affecté au fonds mentionné à l’article L. 135-1 du code de la sécurité sociale. »
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
L’huile de palme est l’huile végétale la plus consommée au monde, présente dans plusieurs milliers de produits alimentaires de consommation très courante. Elle est privilégiée par les industriels pour son faible coût de production, mais son usage pose aujourd’hui des problèmes sanitaires et environnementaux.
D’une part, la consommation, plus exactement la surconsommation d’acides gras saturés contenus dans l’huile de palme, présente dans des milliers de produits et utilisée à 80 % par l’industrie agroalimentaire, accroît notamment le risque de maladies cardiovasculaires.
D’autre part, la culture industrielle du palmier à huile accapare de plus en plus de territoires, provoquant des défrichements qui modifient la destination forestière des sols et portent gravement atteinte aux possibilités de ressources des populations locales et au maintien des équilibres biologiques dans de nombreuses régions du monde ; je pense à l’Indonésie et à l’Afrique, entre autres.
Nous préférons la taxation à une interdiction pure et simple, car la consommation familiale limitée d’huile de palme ne pose pas les mêmes difficultés en termes sanitaires et environnementaux, et ce produit est bon marché : en France, c’est l’une des huiles les moins taxées, comme vient de le souligner M. le rapporteur général.
Cet amendement tend à créer une taxe additionnelle sur l’huile de palme prévue pour augmenter chaque année jusqu’en 2016. Son premier objet est, comme l’amendement précédent, d’inciter les industriels à substituer d’autres matières grasses à l’huile de palme, ce qui est le plus souvent possible. À cette fin, il convient de supprimer l’avantage concurrentiel de cette huile, uniquement dû au fait que le coût des dégâts sanitaires et environnementaux qu’elle occasionne est externalisé et supporté en aval par la collectivité.
De ce point de vue, la progressivité nous paraît indispensable, car elle permet d’aboutir à une taxation dissuasive, tout en laissant aux industriels le temps de s’adapter aux produits de substitution. Les importations sont également taxées.
La substitution progressive de l’huile de palme par d’autres produits réduira l’assiette, donc le rendement de la taxe, mais avant que la substitution ne se mette en place, les recettes générées permettront de financer des politiques de prévention.
La création d’un fonds de prévention par voie d’amendement étant prohibée par l’article 40 de la Constitution, le présent amendement vise à affecter les recettes de cette taxe à l’assurance maladie, même si, je l’ai souligné dans la discussion générale, nous sommes, conformément aux engagements qui ont été pris, très favorables à une augmentation du budget de 1 % pour développer des actions publiques de prévention et de recherche.
Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 257 rectifié bis est présenté par MM. Reichardt, Bockel et Grignon, Mme Keller, MM. Legendre et Lorrain et Mmes Sittler et Troendle.
L'amendement n° 363 rectifié bis est présenté par MM. Husson, Bernard-Reymond, Masson et Türk.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 23 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa du II de l’article 1609 vicies du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le taux de la taxe sur l’huile de palme ne peut pas être inférieur à 550 euros la tonne. »
La parole est à M. André Reichardt, pour présenter l'amendement n° 257 rectifié bis.
Les dispositions de cet amendement, que j’ai déposé avec mes collègues alsaciens, doivent être placées dans un contexte plus général, dans lequel s’inscrit également une autre proposition, que nous examinerons tout à l’heure et qui vise à réduire l’augmentation très importante des droits d’accises sur la bière. En effet, dans la mesure où nous proposons une réduction des recettes, il nous appartenait de trouver des sommes destinées à équilibrer cette mesure.
C’est la raison pour laquelle notre choix s’est porté notamment sur l’huile de palme. Nous souhaitions, pour des motifs de santé publique, qu’un examen très précis ait lieu à cette occasion, mais puisque M. le rapporteur général a déposé un amendement à cet égard et que Mme Archimbaud a fait de même, le débat aura lieu. C’est pourquoi nous retirons cet amendement, madame la présidente.
L’amendement n° 257 rectifié bis est retiré.
La parole est à M. Jean-François Husson, pour présenter l'amendement n° 363 rectifié bis.
Notre objectif est identique. Monsieur le rapporteur général, vous avez expliqué les raisons pour lesquelles vous proposiez avec courage une taxe nouvelle, et nous partageons votre point de vue. Pour notre part, nous ne souhaitons pas qu’elle soit progressive et nous nous associons aux auteurs de l’amendement précédent afin d’avancer dans cette démarche de façon responsable, puisque nous aurons l’occasion, lors de l’examen de quelques amendements, d’aborder un autre sujet, celui des droits d’accises sur la bière.
Pour les mêmes raisons et les mêmes motifs vertueux qui sont à l’origine de la proposition visant à instaurer une taxe, mais aussi pour gagner du temps, nous retirons cet amendement, madame la présidente.
L’amendement n° 363 rectifié bis est retiré.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 340 ?
Cet amendement est de même nature, même s’il est rédigé différemment, que celui que j’ai présenté moi-même – un peu longuement, je le reconnais, mais nous n’abusons pas du temps dans cette assemblée.
Je suggère donc aux auteurs de l’amendement n° 340 de se rallier à celui qui a été adopté par la commission.
Je formulerai deux observations.
En premier lieu, il convient d’aborder cette question dans le cadre plus global de la réforme du financement de la protection sociale.
En second lieu, je me permets de saluer l’implication de l’ensemble de la représentation nationale sur les problématiques nutritionnelles.
On peut également se féliciter que le recours au levier fiscal afin d’infléchir les comportements ne soit pas un tabou. Néanmoins, la réponse à ce problème ne nous semble pas passer nécessairement par la multiplication de taxes sur des assiettes très restreintes. Nous souhaiterions au contraire, au préalable, engager une réflexion plus vaste autour des principaux nutriments dont la consommation excessive est nuisible à la santé et génératrice de dépenses fortes pour l’assurance maladie.
Toutefois, le Gouvernement a bien pris acte de la démarche proposée et, sur l’amendement n° 7, il s’en remet une fois de plus à la sagesse de la Haute Assemblée.
En revanche, il sollicite le retrait de l’amendement n° 340 ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Je tiens tout d’abord à me féliciter que M. le rapporteur général ait repris, par un amendement de la commission des affaires sociales, que je n’avais pas moi-même la possibilité de déposer, cette idée d’une taxation de l’huile de palme. Je me félicite également que d’autres collègues se soient, eux aussi, et de manière peut-être plus inattendue, prononcés en faveur de cette taxation.
Comme je l’ai expliqué en défendant mon amendement, la progressivité dans le temps de la taxation est un élément essentiel du dispositif, si l’on souhaite que celui-ci ne soit pas une simple recette fiscale de plus et qu’il atteigne réellement son objectif sanitaire et environnemental.
Toutefois, j’ai bien entendu votre argument technique, monsieur le rapporteur général, sur l’impossibilité constitutionnelle d’introduire dans le projet de loi cette progressivité temporelle de la taxe. C’est la raison pour laquelle je me rallie à votre amendement en retirant le mien. Je vous proposerai l’année prochaine de revenir sur ce débat.
Je soutiendrai l’amendement de la commission.
Nous n’avons aucun doute aujourd’hui sur les liens entre l’alimentation et la santé. Je voudrais rappeler que notre collègue Gérard Dériot avait, voilà quelques années, engagé un long débat sur l’obésité et les moyens de lutter contre ce fléau. La mesure qui est proposée aujourd’hui est excellente et va dans le bon sens.
Je voudrais également vous rappeler, monsieur le rapporteur général, vous qui avez passé un très long moment à faire œuvre de pédagogie, que, dans cet hémicycle, notre ancien collègue Michel Dreyfus-Schmidt avait longtemps bataillé contre les excès de sel dans l’alimentation, notamment industrielle.
La démonstration que vous avez faite aujourd’hui s’agissant de l’huile de palme est tout à fait d’actualité et particulièrement bienvenue, parce que les maladies cardiovasculaires ne sont pas les seules à être liées aux produits et aux acides gras que vous avez mentionnés. On pourrait également citer l’hypertension artérielle qui est causée par l’excès de sel.
Ce débat ne fait que commencer, il faut absolument le poursuivre. C’est dans cet esprit que les sénateurs de l’UDI-UC voteront cet amendement.
Je ferai plusieurs observations.
Tout d’abord, en vous écoutant, monsieur le rapporteur général, il m’est venu à l’esprit un adage : « Quand on veut tuer son chien, on l’accuse d’avoir la rage ».
Ensuite, se réfugier derrière un problème de santé publique pour justifier l’augmentation ou la mise en place d’une taxe supplémentaire est, à mes yeux, particulièrement fallacieux.
Enfin, ayant beaucoup d’estime pour vous et connaissant vos ennuis de santé, je suis intimement persuadé que vos problèmes cardiaques sont apparus non à cause de l’huile de palme, mais plutôt à cause du beurre, du lait ou des fromages.
Sourires sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.
Mêmes mouvements.
Bien évidemment, certains produits entraînent des dangers pour la santé. Le prix du tabac et de l’alcool a augmenté il y a peu, et c’est une bonne chose.
Toutefois, pourquoi dès lors ne pas imposer les routes, puisqu’il y a des accidents entraînant de graves blessures et la mort dans certains cas, qui coûtent très cher à la sécurité sociale ? Pourquoi ne pas imposer les voitures, les motos, les vélos, les piétons ? En outre, pourquoi ne pas augmenter dans le même temps la taxation sur le beurre, parce que les incidences de la consommation de fromages et de fois gras sur le cholestérol sont évidentes ?
En fait, le véritable problème, ce n’est pas l’huile de palme, mais le phénomène d’addiction conduisant à la surconsommation d’un produit. Lorsque j’exerçais la médecine, je disais toujours à mes patients : vous pouvez manger de tout, mais en petites quantités !
Mme Isabelle Debré. C’est l’excès qui est nuisible, comme disait ma grand-mère !
Sourires.
Si vous consommez de tout modérément, il n’y a pas de problème. Si vous consommez certains aliments avec excès, vous vous exposez nécessairement à des risques.
Or, monsieur le rapporteur général, je vous l’affirme en toute honnêteté : au cours d’une carrière de médecin qui est tout de même déjà très longue, je n’ai pas rencontré un seul patient dépendant de l’huile de palme !
Je conclurai par un mot moins gentil et bien plus polémique – je m’en excuse dès à présent envers vous, et sachez que je ne vous vise pas directement. D’une part, le ministre de l’éducation nationale suggère de légaliser la consommation de cannabis, …
M. Alain Milon. … dont on sait qu’elle est particulièrement dangereuse pour la santé publique ; et, de l’autre, vous proposez de créer de nouvelles taxes sur l’huile de palme, dont on sait qu’elle ne crée pas d’addiction !
Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.
Mes chers collègues, vous connaissez ma position : je l’ai exprimée en commission des affaires sociales lorsque j’ai pris connaissance de cet amendement et que, dans ma surprise, j’ai réagi à chaud.
Ainsi, lorsque j’entends M. le rapporteur général défendre cet amendement pendant plus de quatorze minutes, je m’interroge : au cours de l’examen des précédents articles, nous avons abordé des sujets très importants, et M. Daudigny n’a jamais pris tant de temps pour présenter et justifier les amendements de la commission. J’en conclus qu’il est très mal à l’aise !
Pour ma part, depuis mon intervention en commission, la semaine dernière, j’ai tâché de glaner ici ou là, à droite et à gauche, …
… des informations complémentaires concernant les impacts de l’huile de palme sur la santé. À ce titre, j’ai observé que le rapport de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES, n’est pas si clair que certains le prétendent, puisque ses auteurs précisent que les acides gras saturés sont bien nécessaires. De plus, j’ai découvert l’existence de nombreux autres rapports, y compris à l'échelle européenne.
Le rapport de l’Autorité européenne de sécurité des aliments, l’EFSA, dresse notamment ce constat : une relation existe certes entre les acides gras saturés et le cholestérol, mais les incidences directes de cette corrélation ne peuvent être établies de manière univoque.
Par ailleurs, après avoir évalué la quantité d’huile de palme consommée chaque jour, certains nutritionnistes observent que les effets nuisibles de cette substance sont globalement moindres que ceux d’autres matières grasses. J’ai notamment découvert que le beurre était composé d’acides gras saturés à hauteur de 71 %, contre 50 % pour l’huile de palme !
De plus, j’ai étudié les compositions que j’ai pu obtenir sur Internet – je le rappelle, je ne suis ni médecin, ni nutritionniste – et j’ai pu me conforter dans cette certitude, dont chacun a d’ores et déjà conscience : c’est ce que nous mangeons, c’est notre mode de consommation à l’occidentale, fondé sur des produits entièrement préparés, qui pose problème. §
De fait, nous consommons trop de sel, trop de graisses et trop d’huiles.
Monsieur le rapporteur général, vous affirmez que l’huile de palme peut se voir substituer d’autres graisses. Eh bien, remplacez-la par de l’huile d’olive, qui est bien meilleure pour la santé, …
… comme chacun se plaît à le reconnaître, notamment sur Internet.
Toutefois, on ne peut pas remplacer systématiquement l’huile de palme, qui a pour propriété de ne pas avoir de goût ! Les substituts les plus courants à ce produit sont les graisses animales et les huiles hydrogénées. Or, sauf erreur de ma part, ces dernières sont particulièrement nocives pour la santé, ce qui n’est pas le cas de l’huile de palme.
Par ailleurs, vous avez beau prétendre que l’adoption d’un tel amendement n’aura pas de conséquence sur le coût de l’alimentation, tout en énumérant un certain nombre de produits, j’ai du mal à concevoir que les industriels, quels qu’ils soient, s’adonnent à la philanthropie, …
… et renoncent à augmenter leurs prix. De plus, la pâte à tartiner n’est pas seule concernée, vous l’avez dit : s’ajoutent à elle les viennoiseries – dans ce cas, il ne faut plus en manger ! – le pain de mie et l’ensemble des surgelés – ne mangeons donc plus de surgelés, ni de sucre. Bref, ne mangeons plus rien !
À mes yeux, comme je l’ai déjà affirmé en commission, si l’huile de palme se révélait dangereuse, il faudrait aussitôt l’interdire, et non maintenir l’exportation de produits élaborés à partir de cet ingrédient, sans l’assortir de taxes. Or c’est le choix que vous opérez via cet amendement !
Enfin, Mme Archimbaud a évoqué les problèmes liés à l’environnement, notamment en matière de défrichement.
Chère collègue, je vous le dis clairement : je ne suis pas d’accord avec vous. En effet, j’ai reçu des communiqués de presse très précis, émanant des pays producteurs d’huile de palme. Ce secteur emploie des millions de personnes qui, à travers le monde, vivent déjà sous le seuil de pauvreté.
Bien que n’appartenant pas au groupe sénatorial d’amitié France-Asie du sud-est, je me permets de relayer les propos des représentants malais. Ils nous disent : « Très bien ! Faites-nous la morale ! La Grande-Bretagne a défriché 70 % de ses terres, la France 60 % et la Malaisie, elle, 25 % ! » Or, précisément grâce à l’action des organisations non gouvernementales, les palmiers de Malaisie ne sont plus plantés que sur des terres dégradées et non sur des terres défrichées.
Ainsi, à mes yeux, vous faites également fausse route en matière environnementale. De fait, si la production d’huile de palme était interdite, cette dernière serait remplacée par des huiles de tournesol ou de colza, et ces cultures nécessiteraient 40 % de terres agricoles supplémentaires ! Mais, naturellement, il est plus facile d’interdire aux pays en voie de développement d’alimenter leurs populations et de les faire vivre, alors même que ces productions de substitution ne pousseraient peut-être pas chez eux, et exigeraient surtout 40 % de surfaces agricoles supplémentaires.
Ainsi, à mes yeux, cette idée n’est absolument pas pertinente sur le plan environnemental.
À mon sens, il est important que ce sujet soit examiné par le Sénat. Du reste, cette question a suscité de longs débats au sein du groupe CRC, et les arguments, nombreux en la matière, méritent d’être examinés à tête reposée.
Cela étant, je serai brève, M. le rapporteur général ayant très bien exposé la situation. Non seulement la consommation de l’huile de palme a des incidences sur la santé, mais sa production a un impact sur l’environnement. Il est vrai que, pour étendre la culture du palmier, certaines forêts sont abattues et laissent place à des plantations. En Malaisie, en Indonésie, à Bornéo ou encore à Sumatra, certaines forêts primaires ont été détruites à 90 % avant d’être remplacées par des palmeraies.
Ces évolutions ont une incidence directe sur l’environnement, via l’aggravation des émissions de gaz à effet de serre et l’extinction progressive de nombreuses espèces. Je songe particulièrement aux orangs-outangs, qui voient ainsi disparaître leur habitat naturel. Ces processus sont complexes, mais on observe à quel point les enjeux sont importants sur le plan environnemental.
En tant que législateurs, nous débattons d’une mesure destinée à sensibiliser nos concitoyens aux dangers de l’huile de palme. Pour la majorité d’entre nous, il est indispensable de compléter ce dispositif par une campagne d’information, garantissant une information effective des consommateurs quant aux dangers et aux risques auxquels ils s’exposent.
En la matière, la mise en œuvre de nombreuses mesures est tout à fait réalisable : nous en sommes bien conscients, les changements de comportement ne peuvent pas reposer exclusivement sur des mesures fiscales pesant, au total, sur les ménages ! Voilà pourquoi ces programmes d’information sont nécessaires. Toujours est-il qu’il est capital d’émettre un premier signal, comme l’a souligné M. le rapporteur général.
Certes, nous aurions souhaité que le Sénat se penche sur un dispositif permettant de taxer la marge bénéficiaire des industriels : en effet, un certain nombre d’entre eux préféreront malgré tout continuer à commercialiser des produits dont la composition est néfaste pour la santé comme pour l’environnement. Il aurait notamment été possible de ponctionner le chiffre d’affaires des industriels, d’un montant calculé selon la quantité d’huile de palme employée dans la fabrication de leurs produits. Il s’agit là d’une piste de réflexion.
Quoi qu’il en soit, l’amendement qui nous est soumis est un premier pas. Voilà pourquoi nous le voterons. Nous souhaitons simplement que M. le rapporteur général précise que le produit de cette taxe sera fléché pour partie, si ce n’est en totalité, en direction de la branche maladie. C’est là un enjeu important pour le groupe CRC.
J’ai bien entendu l’ensemble les arguments qui ont été invoqués. Pour ma part, je citerai le cas de deux entreprises de mon département, appartenant aux domaines de la biscuiterie et de la boulangerie.
La première est une entreprise familiale et indépendante, qui occupe une position centrale sur le marché de la fabrication des biscuits sucrés. Elle exporte 20 % de sa production vers les pays européens limitrophes de la France. Sur le marché, ses principaux concurrents sont allemands, belges ou hollandais. En termes d’emplois, elle comprend 900 collaborateurs répartis sur sept sites en France ; dans mon seul département, elle compte 250 salariés. Pour cette société, le surcoût annuel de la taxe, avec une augmentation de 300 %, représente 1, 5 million d’euros ! Inutile de vous préciser qu’une telle mesure exposerait plus violemment encore cette entreprise à la concurrence étrangère.
La seconde entreprise, leader dans le domaine de la boulangerie, subirait, elle, du fait de cette taxe, un surcoût de 3 millions d’euros.
Dans un secteur où le prix même des matières premières augmente – à commencer par celui de la farine ou du sucre –, prétendre que l’impact économique et commercial d’un semblable amendement sera quasi nul, voire indolore, c’est dire une contre-vérité. À mon sens, nous devons également nous attacher à préserver nos emplois.
Par ailleurs, pour faire écho aux propos développés par notre collègue Catherine Procaccia, je souligne que ces deux entreprises se sont engagées à n’acheter que de l’huile de palme dite « durable et ségrégée », certifiée RSPO !
Dans la mesure du possible, elles s’efforcent de supprimer cet ingrédient, de le remplacer, voire de l’associer et de le combiner à d’autres, notamment à l’huile de colza.
Malgré tout, dans certains domaines, la qualité boulangère des produits de substitution n’est tout simplement pas acceptable, en termes de goût ou de cohérence du produit. Voilà pourquoi ces entreprises ne souhaitent pas employer des matières grasses animales, des huiles hydrogénées ou des additifs destinés à pallier le manque de qualité boulangère des matières grasses liquides susceptibles de se substituer à l’huile de palme.
Les deux entreprises que j’ai évoquées s’inscrivent bel et bien dans une démarche environnementale et nutritionnelle. Toutefois, force est de le constater, dans certains cas elles ne peuvent pas avoir recours aux produits de substitution. Or, comme l’a très bien rappelé Alain Milon, défendre la santé publique, c’est certes exercer une attention vigilante sur les aliments, mais c’est aussi et surtout promouvoir une alimentation équilibrée, sans aucun excès – il faut manger de tout, en petites quantités – associée à une activité physique. Il s’agit donc d’un domaine très vaste pouvant justifier divers dispositifs, mais certainement pas une taxe punitive !
Je ne développerais absolument pas les mêmes arguments pour la consommation de tabac ou l’absorption excessive d’alcool – sans évoquer les autres produits susceptibles d’être fumés, mentionnés par Alain Milon. À mon sens, il n’est pas utile d’instaurer un dispositif coercitif d’une telle ampleur concernant l’huile de palme, alors que de nombreux autres produits induisant les mêmes risques sur la santé ne sont pas taxés à ce titre ! C’est la raison pour laquelle, pour ma part, je ne voterai pas cet amendement.
On pourrait comprendre, a priori, l’argument de Mme Deroche. Notre collègue affirme : « Nos entreprises vont subir des taxes, leurs produits deviendront plus chers que ceux de leurs concurrents étrangers et elles seront donc défavorisées par rapport à ces derniers ! » Toutefois, à mon sens, il s’agit d’un mauvais calcul.
Mes chers collègues, il y a douze ou treize ans, j’ai eu l’occasion de rencontrer les constructeurs automobiles. Au lieu de se préoccuper de l’avenir du secteur, ils m’ont affirmé que l’Europe et les pouvoirs publics imposaient trop de normes environnementales ! Au lieu de s’adapter, ils ont donc tenté de résister à l’essor de voitures plus propres. Aujourd’hui, on peut juger du résultat obtenu…
Dans le domaine alimentaire, il en va de même : quelle sera, selon vous, la situation d’ici à quelques années ? Dans tous les pays, une exigence se fera jour en faveur d’une meilleure qualité de vie. Et ceux qui, dès maintenant, auront commencé à investir seront plus compétitifs demain. Il ne faut donc pas raisonner à court terme sur de tels sujets. Je le répète, nous devrons faire face à une exigence de qualité ! Or, la qualité environnementale – non seulement via le respect des forêts, à l’échelle planétaire, mais aussi via la composition des aliments – nous permettra précisément d’être compétitifs à l’avenir, si nous accomplissons aujourd’hui les efforts nécessaires.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Ainsi, M. le rapporteur général a fait preuve de respect. Effectivement, il a parlé longuement ; faut-il cependant vous rappeler que son temps de parole n’est pas décompté, au cours de nos débats ?
Exclamations sur les travées de l'UMP.
Au même titre que le rapporteur général de la commission des finances, lors de l’examen du projet de loi de finances, le rapporteur général de la commission des affaires sociales peut s’exprimer au cours de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, s’il estime qu’un sujet mérite des explications. Je le répète, son temps de parole n’est pas décompté. Je ne vois donc pas pourquoi on ferait remarquer à M. Daudigny qu’il a parlé plus longuement que d’autres orateurs !
Il appartient au rapporteur général d’user du temps qu’il juge nécessaire pour expliquer un amendement de la commission. Et de même qu’il respecte l’ensemble des orateurs lorsqu’il prend la parole, il mériterait d’être écouté dans la sérénité lorsqu’il s’exprime au nom de la commission.
Pour le reste, je suis d’accord avec M. Milon et Mme Deroche : en matière de santé publique et d’alimentation, c’est effectivement l’excès qui est néfaste.
Yves Daudigny nous a présenté quelques-uns des produits élaborés sans huile de palme. Malheureusement, de nombreux autres aliments en contiennent. Parfois, on consomme de l’huile de palme sans vraiment le savoir. C’est là aussi que réside le danger : on consomme des produits contenant de l’huile de palme, sans vraiment savoir quelle quantité on ingère. L’excès de consommation d’huile de palme n’est donc pas forcément volontaire.
Sur le fléchage que vous demandez, madame Cohen, je précise que les taxes de ce type sont déjà toutes fléchées en direction de la branche maladie. Votre inquiétude n’a donc pas lieu d’être.
Je souligne également que les deux amendements qui ont été présentés, l’un par les sénatrices et sénateurs alsaciens de l’UMP – il me semble que vous avez présenté votre amendement de cette façon, monsieur Reichardt –, l’autre par M. Husson – cet amendement a depuis lors été retiré au profit de celui de M. le rapporteur –, tendaient à aller beaucoup plus loin que l’amendement n° 7. En effet, tandis que ce dernier vise à instituer une taxe de 400 euros la tonne, vous alliez pour votre part jusqu’à 550 euros la tonne, ce qui était encore plus ambitieux.
Je précise enfin, madame la présidente, que la commission demande un scrutin public sur le vote de l’amendement n° 7.
Si ce genre de matière grasse présente incontestablement une toxicité, il ne faudrait pas pour autant classer l’huile de palme parmi les produits toxiques. Il existe suffisamment de substances contestables dans l’ensemble de l’alimentation pour ne pas s’acharner spécifiquement sur l’une d’entre elles.
Ce sont les graisses en général qui sont toxiques pour l’organisme, et certaines modifications comportementales à l’œuvre dans l’alimentation des jeunes Français font qu’ils consomment effectivement plus de graisses aujourd’hui qu’hier. Non seulement les produits en contiennent davantage, mais l’éducation alimentaire de nos concitoyens a également changé.
Il me semble important d’agir à la fois sur l’éducation à l’alimentation et la consommation de matières grasses. En revanche, nous ne devrions pas nous acharner sur une matière grasse en particulier.
Le rapport de Mme Procaccia nous permettra d’améliorer quelque peu nos connaissances dans ce domaine et, peut-être, de cibler différemment nos actions.
Toutefois, je le répète, ce sont les accumulations de graisse qui vont générer du cholestérol, plus précisément du mauvais cholestérol ou LDL-cholestérol qui, à un certain taux et associé à d’autres facteurs de risques tels que l’âge, l’hypertension, le diabète ou le tabac, va entraîner des problèmes cardio-vasculaires.
Restons donc mesurés dans les précautions à prendre, et respectons aussi l’ensemble des matières qui composent notre alimentation.
Les propos de M. Savary, qui rejoignent ceux de M. Daudigny, me rappellent en outre que j’ai oublié un élément dans mon intervention précédente.
L’amendement de la commission ne vise ni à interdire l’huile de palme ni à la pointer du doigt comme étant le seul danger dans notre alimentation. La consommation excessive d’huile de palme s’explique en effet aujourd’hui par un ensemble de facteurs.
La commission et son rapporteur général souhaitent simplement adresser le signal suivant aux industriels : attention, il existe des produits de substitution à l’huile de palme, et si vous utilisiez davantage ces produits et moins cette huile de palme, on pourrait éviter la surconsommation, qui est la vraie responsable des problèmes de santé.
Je mets aux voix l’amendement n° 7.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires sociales.
Je rappelle que le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici le résultat du scrutin n° 31 :
Nombre de votants345Nombre de suffrages exprimés345Majorité absolue des suffrages exprimés173Pour l’adoption212Contre 133Le Sénat a adopté.
Mme Aline Archimbaud applaudit.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 23 bis.
Mes chers collègues, nous reprenons maintenant le cours normal de l’examen des articles.
I. – Le a du I de l’article 520 A du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au début du deuxième alinéa, le montant : « 1, 38 € » est remplacé par le montant : « 3, 60 € » ;
2° Au début du troisième alinéa, le montant : « 2, 75 € » est remplacé par le montant : « 7, 20 € » ;
3° Au début du sixième alinéa, le montant : « 1, 38 € » est remplacé par le montant : « 3, 60 € » ;
4° Au début du septième alinéa, le montant : « 1, 64 € » est remplacé par le montant : « 3, 60 € » ;
5° Au début de l’avant-dernier alinéa, le montant : « 2, 07 € » est remplacé par le montant : « 3, 60 € ».
II. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le 7° de l’article L. 131-8 est ainsi modifié :
a) À la fin du a, le taux : « 58, 10 % » est remplacé par le taux : « 68, 14 % » ;
b) À la fin du b, le taux : « 7, 86 % » est remplacé par le taux : « 7, 27 % » ;
c) À la fin du c, le taux : « 15, 44 % » est remplacé par le taux : « 9, 46 % » ;
d) Après le mot : « article », la fin du h est ainsi rédigée : « L. 862-1 du présent code, pour une fraction correspondant à 3, 15 % ; »
e) Le i est abrogé ;
2° §(nouveau) Le premier alinéa et les a à e de l’article L. 862-3 sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« Les recettes du fonds institué à l’article L. 862-1 sont constituées du produit de la taxe mentionnée au I de l’article L. 862-4 et d’une fraction, fixée à l’article L. 131-8, du produit du droit de consommation mentionné à l’article 575 du code général des impôts. »
III. – Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° §(nouveau) L’article L. 731-2 est ainsi modifié :
a) Il est rétabli un 4° ainsi rédigé :
« 4° Le produit des contributions mentionnées aux articles 520 B et 520 C du code général des impôts ; »
b) Au 5°, le taux : « 43, 7 % » est remplacé par le taux : « 57, 8 % » ;
2° Au 3° de l’article L. 731-3, le taux : « 56, 3 % » est remplacé par le taux : « 42, 2 % ».
IV
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l’article 23 vise à relever les droits d’accises sur les bières et à affecter le produit de cette hausse au régime vieillesse des non-salariés du régime agricole, ce qui est plutôt louable en soi.
La proposition est pourtant impressionnante, puisqu’il s’agit d’une augmentation de 160 %. On nous objectera que, compte tenu du prix très bas du produit de base, cela aura peu d’incidence sur le consommateur.
Nous débattons à la fois d’un sujet culturel et d’un enjeu de santé publique. Dans notre pays, on ne peut s’empêcher d’opposer les deux !
La France peut s’enorgueillir de la richesse et de la diversité de ses produits alcoolisés, qu’il s’agisse d’alcools plus prestigieux les uns que les autres, de productions viticoles que le monde entier nous envie ou de boissons très diversifiées comme les cidres et les bières, ces dernières nous occupant aujourd’hui.
C’est un patrimoine que nous pouvons revendiquer ; c’est aussi une activité économique prospère dont les incidences sociales sont importantes.
Toutefois, nous savons également que, dès lors que ces produits alcoolisés sont consommés de façon excessive, les conséquences médicales peuvent être très lourdes : nous avons donc la responsabilité d’en empêcher les excès de consommation, pour protéger nos concitoyens au nom des enjeux de santé publique auxquels nous sommes tous très attachés.
Dès lors, nous taxons, en arguant, sans doute avec raison, de l’effet dissuasif. Et, dans le même temps, nous finançons des régimes sociaux. C’est ce que nous avons acté l’année dernière en taxant les alcools avec un rendement des plus intéressants, puisque, en 2012, le produit de cette taxation s’élèvera à 3, 3 milliards d’euros.
Pour 2013, le Gouvernement entend taxer les bières au moment de leur consommation.
Madame la ministre, vous proposez par ailleurs d’analyser dans un rapport gouvernemental, pour la fin de 2013, les conséquences globales des différentes taxations sur l’ensemble des boissons alcoolisées.
Au-delà de la proposition de M. le rapporteur général, qui souhaite que ce rapport soit d’initiative parlementaire, je pense que nous inversons là les problématiques – tout à l’heure, vous m’avez d’ailleurs donné raison sur ce point, madame la ministre.
Il me semble important que le rapport anticipe toute nouvelle proposition de taxation, ce qui permettrait, après une étude d’impact approfondie, d’une part, en matière de taxation, de définir des solutions raisonnables et globales qui ne donnent pas l’impression de stigmatiser certaines boissons, en l’occurrence les bières, et, d’autre part, en matière de santé publique, de sensibiliser, d’informer et de responsabiliser nos concitoyens, en particulier les jeunes.
Aujourd’hui, nous débattons d’une taxation des bières et, malgré les améliorations apportées par nos collègues de l’Assemblée nationale, les risques de problèmes économiques et sociaux sont loin d’être anodins, particulièrement dans les régions frontalières du Nord et de l’Est, terroirs qui ont soutenu ces dernières années le renouveau de la fabrication de bières artisanales.
Avec le rapporteur général, nous avons tenté d’améliorer le dispositif issu des débats de l’Assemblée nationale. Certains d’entre nous défendront également des amendements en ce sens. Néanmoins, les voies sont étroites.
Aussi, la solution, madame la ministre, est de votre côté. Le Gouvernement devrait proposer une diminution globale de l’augmentation de 160 %, tout en préservant les améliorations apportées par l’Assemblée nationale.
Proposition déraisonnable, répondrez-vous : le manque à gagner serait de 180 millions d’euros, puisque les bières ont déjà participé pour 2012 à hauteur de 300 millions d’euros au titre des taxes alcool. Face à la nécessité de trouver une compensation, nous avons fait un certain nombre de propositions. Je ne reviens pas sur le long débat que nous avons eu sur la taxation de l’huile de palme. Toutefois, nous vous proposerons aussi une taxation complémentaire à celle votée par l’Assemblée nationale, portant sur les boissons énergisantes, auxquelles il est difficile de trouver un attrait culturel, mais qui, lorsqu’elles sont consommées en excès, peuvent également avoir des conséquences médicales lourdes.
Nous ferons également des propositions en matière de taxation complémentaire des prémix.
Madame la ministre, mes chers collègues, le débat sur l’article 23 s’annonce passionnant !
Madame la présidente, madame la ministre, je ne vous ferai pas un cours sur le houblon, après celui sur l’huile de palme – je ne peux pas me permettre, comme notre rapporteur général, de parler pendant quatorze minutes !
Je voudrais plutôt vous parler de la filière bière, qui correspond à 3 000 emplois directs et à près de 65 000 emplois indirects. Ce secteur contribue fortement à l’économie française, puisqu’il a réalisé en 2011 quelque 2 milliards d’euros de chiffre d’affaires.
La bière est également un produit apprécié par toutes les classes de la population et par toutes les catégories d’âge.
Catherine Génisson l’a souligné à juste titre, les brasseries contribuent au patrimoine régional, au travers de leurs productions locales. C’est le cas dans le Nord-Pas-de-Calais et en Alsace, mais vous me permettrez d’avoir également une pensée pour la région de Bretagne dont je suis l’élu. Comme notre rapporteur général, j’aurais pu venir avec quelques produits locaux : la Coreff, les Bonnets Rouges, la Duchesse Anne, la Wezet, autant de bières régionales bretonnes de qualité qui contribuent à maintenir dans nos territoires des emplois non délocalisables. Ces entreprises constituent également un maillage économique important et participent à l’essor économique de nos régions.
Aussi, madame la ministre, nous souhaitons vous alerter et attirer votre attention sur les inquiétudes exprimées notamment par les brasseurs régionaux. Ceux-ci considèrent que l’augmentation des droits d’accise à un tel niveau est injuste. Par exemple, une brasserie de ma région a acquitté environ 274 000 euros de droits d’accises cette année. La nouvelle taxation pourrait lui coûter près de 470 000 euros, soit près de 88 % de son résultat net. Ces entreprises risquent également de se trouver fragilisées auprès des banquiers, ce qui pourrait obérer leur développement et avoir des conséquences en termes d’emplois.
Les brasseurs sont prêts à participer à la politique de prévention de l’alcoolisme des jeunes comme, dans une proportion mesurée, à l’effort solidaire de réduction des déficits publics.
Chacun comprend et approuve la volonté du Gouvernement de faire de la prévention en direction des jeunes. Ceux-ci sont certes susceptibles d’abuser de la bière, mais d’autres boissons aussi ! Nous aurons ainsi l’occasion de présenter et de défendre des amendements concernant notamment les boissons énergisantes et les prémix.
Je joins donc ma voix à celle de Catherine Génisson pour appeler le Gouvernement à un peu plus d’imagination dans la recherche de solutions alternatives.
Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.
Je souhaite préciser l’esprit dans lequel a travaillé la commission des affaires sociales sur le sujet de la taxation de la bière. Nous avons cherché, je pense avec succès, à respecter la directive 92/83/CEE du 19 octobre 1992 concernant l’harmonisation des structures des droits d’accises sur l’alcool et les boissons alcooliques. Ce texte nous impose deux contraintes.
Tout d'abord, son article 4 dispose que des petites brasseries indépendantes peuvent bénéficier d’abattements par rapport au taux normal ― ici de 7, 20 euros par hectolitre, si ma mémoire est bonne ―, dans le respect d’un certain nombre de limites de production fixées dans le texte. Toutefois, ces abattements ne peuvent pas dépasser 50 % du taux normal, et la limite au-delà de laquelle celui-ci n’est plus applicable se calcule sur le total de la production, incluant donc les volumes brassés sous licence. Nous avons veillé au respect de ces principes dans notre lecture des amendements proposés.
Ensuite, concernant la vodka, nous sommes cette fois dans le domaine des alcools éthyliques, évoqués à l’article 21 de la directive. Celui-ci prévoit que « les États membres appliquent le même taux d’accise à tous les produits soumis à l’accise sur l’alcool éthylique. » Il n’est donc pas possible de reporter une taxe uniquement sur la vodka ou sur une autre boisson spécifiquement visée.
L'amendement n° 357, présenté par M. Lecerf, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Je suis saisie de quinze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les amendements n° 258 rectifié bis et 362 rectifié bis sont identiques.
L'amendement n° 258 rectifié bis est présenté par MM. Reichardt, Bockel et Grignon, Mme Keller, MM. Legendre et Lorrain et Mmes Sittler et Troendle.
L'amendement n° 362 rectifié bis est présenté par MM. Husson, Bernard-Reymond, Masson et Türk.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rédiger ainsi cet article :
Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au début de l’article L. 245-8, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La cotisation est due à raison de l’importation ou de la livraison aux consommateurs de la vodka telle que définie par le règlement (CE) n° 110/2008 du Parlement européen et du Conseil du 15 janvier 2008 concernant la définition, la désignation, la présentation, l'étiquetage et la protection des indications géographiques des boissons spiritueuses et abrogeant le règlement (CE) n° 1576/89 du Conseil. » ;
2° Au début de l’article L. 245-9, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le montant de la cotisation est fixé à 700 € par hectolitre d’alcool pur pour la vodka telle que définie à l’article L. 245-8. »
La parole est à M. André Reichardt, pour présenter l’amendement n° 258 rectifié bis.
Dans un souci de renforcement de la politique de santé publique, l’augmentation des droits sur les bières figurant dans ce projet de loi commande aussi, assurément, une hausse des droits sur un autre alcool qui me paraît poser problème, la vodka.
M. le ministre Jérôme Cahuzac a indiqué lundi dernier lors de la discussion générale de ce PLFSS que la taxe sur les bières en débat ne posait pas de problème de compétitivité, mais relevait seulement d’une question de santé publique. Permettez-moi de douter que taxer la bière ait un impact sur la santé publique ! En revanche, imposer la vodka peut véritablement en avoir un, et je vais essayer de l’expliquer.
Ma collègue écologiste Corinne Bouchoux et moi-même sommes les auteurs d’un rapport très récent pour la commission des lois sur l’hyper-alcoolisation des jeunes dans le cadre de rassemblements festifs.
Toutes les auditions que nous avons menées ont montré que la vodka contribuait fortement au phénomène d’hyperalcoolisation que l’on nomme dans une autre langue le binge drinking – l’expression est difficile à traduire –, très en vogue chez les jeunes. Cette pratique consiste à obtenir l’ivresse la plus profonde dans le plus court délai possible. Ses conséquences les plus extrêmes peuvent être des accidents graves, des comas éthyliques, des violences, des viols, des décès ; certains cas sont ainsi présentés dans le rapport que je viens d’évoquer.
Un chiffre est particulièrement étonnant : selon une étude tout à fait sérieuse, en cinq ans, le nombre de jeunes adolescents qui disent avoir connu un épisode d’hyperalcoolisation durant le mois précédant l’interview est passé de 28 % à 45 %. Cela n’est pas dû à une consommation de bière, même massive, mais bien à l’ingestion de mélanges plus ou moins détonants. La consommation d’alcool est par ailleurs souvent mêlée à celle de stupéfiants, que je n’évoquerai pas ici. Or les jeunes et les représentants des associations d’étudiants que nous avons auditionnés nous affirment que la vodka a un rôle essentiel dans ce phénomène.
Le plus souvent, d’ailleurs, ces jeunes mélangent l’alcool avec d’autres boissons, en particulier des boissons énergisantes qui en masquent le goût et, en leur permettant de « tenir » plus longtemps, augmentent encore leur consommation. Pour preuve, la consommation de vodka a été multipliée par sept sur dix ans, soit une croissance de 610 %, en raison d’un prix inférieur à 10 euros pour une bouteille de 70 centilitres.
C’est la raison pour laquelle mes collègues sénateurs alsaciens, les membres du groupe UMP et moi-même proposons de mettre en place une contribution spécifique sur la vodka. Notre amendement vise à prévenir la consommation excessive, souvent par des adolescents, de cet alcool mélangé à des boissons énergisantes.
Cette mesure contribuerait à renforcer la politique de santé publique menée par les gouvernements successifs, notamment vis-à-vis des plus jeunes, et à apurer la dette en vue du rétablissement des comptes publics. Le produit de l’augmentation des droits s’élèverait en effet à plus de 70 millions d’euros.
Mes chers collègues, je vous donne rendez-vous tout à l’heure pour un autre amendement sur la bière au travers duquel nous proposerons une déduction des recettes du même montant en divisant par deux l’augmentation des droits d’accises portant sur cette boisson.
La parole est à M. Jean-François Husson, pour présenter l'amendement n° 362 rectifié bis.
Avec la réduction des droits d’accises sur la bière, nous abordons une question importante. Notre collègue André Reichardt, en présentant excellemment les enjeux de santé publique qui s’attachent à ce texte, a montré que nous pouvions participer à la lutte contre l’excès d’alcoolisation des jeunes.
De temps à autre, nous devons, au-delà de nos sensibilités politiques, faire montre d’esprit de responsabilité au regard des enjeux de santé publique et de la nécessité, parfois un peu douloureuse, d’augmenter les recettes. Il nous revient de viser ces deux objectifs conjointement, en étant attentifs à la fois à celles et à ceux qui sont concernés par les mesures que nous ciblons et aux signes que nous envoyons à la jeunesse. Si tel est le cas, je crois que nous ferons œuvre utile.
Les amendements n° 198 et 274 sont identiques.
L'amendement n° 198 est présenté par M. Ries, Mme Schillinger, M. Delebarre, Mmes Génisson et Claireaux et M. Vandierendonck.
L'amendement n° 274 est présenté par MM. Reichardt, Bockel et Grignon, Mme Keller, M. Lorrain et Mmes Sittler et Troendle.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rédiger ainsi cet article :
I. - Le huitième alinéa du a du I de l'article 520 A du code général des impôts est complété par les mots et une phrase ainsi rédigée : «, ce volume correspondant à la production de bières sous marques dont la brasserie est propriétaire. En sont exclues les bières brassées sous licence, sous marques de distributeurs, et les bières produites en sous-traitance. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Catherine Génisson, pour présenter l’amendement n° 198.
Je présente cet amendement au nom de mes collègues et en particulier de ma collègue alsacienne Patricia Schillinger.
Cet amendement tend à éviter que les brasseries PME indépendantes souffrent d’une distorsion de concurrence lorsque leur production totale franchit le seuil de 200 000 hectolitres du seul fait qu’elles brassent, en plus de leurs propres produits, des bières pour le compte de tiers, notamment sous marques de distributeurs, de manière à utiliser autant que possible leurs capacités de production et à préserver ainsi l’emploi.
Ces petites brasseries bénéficieront donc d’un droit spécifique de 3, 60 euros par hectolitre et par degré d’alcool, alors que le droit spécifique normal sera augmenté de 2, 75 euros par hectolitre et par degré à 7, 20 euros pour toutes les autres brasseries.
Madame la ministre, notre ministre du budget est dans l’erreur quand il prétend que le secteur de la bière ne connait pas de problème de compétitivité. Dans les zones frontalières, nous faisons face à la concurrence de bières étrangères, allemandes en Alsace, belges dans le Nord-Pas-de-Calais. Il s'agit donc, au contraire, d’un secteur très concurrentiel.
Dès lors, il est capital d’être vigilant sur l’impact économique et social d’une augmentation disproportionnée des droits d’accises sur les bières, comme l’a souligné notre collègue Ronan Kerdraon, en rappelant que l’on fabriquait aussi de la bière en Bretagne.
M. Ronan Kerdraon acquiesce.
Cette question est très importante. Une telle augmentation de taxe concentrée exclusivement sur les bières est vécue comme une injustice profonde, alors même que nous devrions mener un débat de fond sur la taxation de l’ensemble des boissons alcoolisées et présenter, en regard de cette fiscalité, des mesures de santé publique.
La parole est à M. André Reichardt, pour présenter l'amendement n° 274.
Cet amendement, identique au précédent, est fondamental pour nombre de brasseries indépendantes de taille moyenne, qui fondent de grands espoirs sur le Sénat en ce moment.
Aux termes du projet de loi, la hausse de la taxation de la bière sera réduite pour les brasseries dont la production annuelle est inférieure ou égale à 200 000 hectolitres.
Ces brasseries bénéficieront d’un droit spécifique de 3, 60 euros par hectolitre et par degré d’alcool, alors que le droit spécifique normal sera porté à 7, 20 euros par hectolitre et par degré d’alcool pour ce qui concerne les plus grandes brasseries.
Cet amendement a pour objet d’éviter que les brasseries PME indépendantes, souvent familiales, ne subissent une distorsion de concurrence insupportable lorsque leur production totale franchit le seuil de 200 000 hectolitres du seul fait qu’elles brassent, outre leurs propres produits, des bières pour le compte de tiers, notamment des sous-marques de distributeurs, afin d’utiliser autant que possible leurs capacités de production et, bien sûr, de préserver l’emploi, un objectif qui nous tient tous à cœur.
Si nous n’adoptons pas ces amendements identiques, je vous le dis solennellement, mes chers collègues, ces brasseries de taille moyenne seront doublement fragilisées.
Elles se retrouveront fragilisées du fait de la concurrence, d’une part, des petites brasseries, qui seront moins taxées, ainsi que je l’ai expliqué, et, d’autre part, des grands groupes internationaux, dont les moyens ne sont naturellement en rien comparables. Je le répète, il faut donc les soutenir.
Franchement, il n’est pas acceptable de taxer au même taux que les brasseries industrielles ces brasseries indépendantes de taille moyenne – elles ne sont d’ailleurs pas nombreuses –, qui ont le seul tort de franchir le seuil des 200 000 hectolitres en vue, vous l’aurez compris, mes chers collègues, d’utiliser de la meilleure façon possible leurs capacités de production.
Aussi, je vous prie d’accorder une attention toute particulière à ces deux amendements identiques, qui sont soutenus par des sénateurs issus de régions brassicoles.
Les amendements n° 212, 220 rectifié, 255 rectifié et 361 rectifié bis sont identiques.
L'amendement n° 212 est présenté par Mme Schillinger, MM. Ries et Delebarre, Mme Génisson, M. Kerdraon, Mmes Printz et Meunier, MM. J.C. Leroy, Carvounas, Vandierendonck, D. Bailly et Percheron et Mmes Bataille, Duriez et Claireaux.
L'amendement n° 220 rectifié est présenté par M. Amoudry, Mme Dini, MM. Marseille, Roche et Vanlerenberghe, Mme Létard et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.
L'amendement n° 255 rectifié est présenté par MM. Reichardt, Bockel et Grignon, Mme Keller, MM. Legendre et Lorrain, Mmes Sittler, Troendle et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.
L'amendement n° 361 rectifié bis est présenté par MM. Husson, Bernard-Reymond, Masson et Türk.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Rédiger ainsi cet article :
I. – L’article L. 245-8 du code de la sécurité sociale est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« La cotisation est due à raison de l’importation ou de la livraison aux consommateurs de la vodka telle que définie par le règlement (CE) n° 110/2008 du Parlement européen et du Conseil du 15 janvier 2008 concernant la définition, la désignation, la présentation, l'étiquetage et la protection des indications géographiques des boissons spiritueuses et abrogeant le règlement (CE) n° 1576/89 du Conseil.
« La cotisation est due à raison de l’importation ou de la livraison aux consommateurs de bières d’une teneur en alcool supérieure à 8 % volume et en boîte d’un volume supérieur ou égal à 50 cl. »
II. – L’article L. 245-9 du code de la sécurité sociale est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le montant de la cotisation est fixé à 700 € par hectolitre d’alcool pur pour la vodka telle que définie à l’article L. 245-8 du code de la sécurité sociale.
« Le montant de la cotisation est fixé à 120 € par hectolitre pour la bière telle que définie à l’article L. 245-8 du code de la sécurité sociale. »
III. – L’article 520 A du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au troisième alinéa, le montant : « 1, 38 » est remplacé par le montant : « 2, 48 » ;
2° Au quatrième alinéa, le montant : « 2, 75 » est remplacé par le montant : « 4, 95 » ;
3° Au septième alinéa, le montant : « 1, 38 » est remplacé par le montant : « 2, 48 » ;
4° Au huitième alinéa, le montant : « 1, 64 » est remplacé par le montant : « 2, 95 » ;
5° Au neuvième alinéa, le montant : « 2, 07 » est remplacé par le montant : « 3, 73 ».
La parole est à M. Ronan Kerdraon, pour présenter l’amendement n° 212.
Je veux associer nos collègues Patricia Schillinger, Roland Ries et Michel Delebarre à la défense de cet amendement.
Nous comprenons la volonté du Gouvernement de faire de la santé publique un objectif majeur de sa politique et de lutter contre l’hyperalcoolisation des jeunes, une question abordée par notre collègue André Reichardt dans son rapport d’information. D'ailleurs, dans le cadre du groupe de travail sur la protection sociale et la santé des étudiants, Catherine Procaccia et moi-même avons pu constater – tous les témoignages concordent à cet égard – que ce phénomène se généralisait.
Toutefois, veillons à ne pas stigmatiser un produit : si la bière était le seul alcool en cause, cela se saurait !
En tant qu’élu local, maire d’une collectivité de 14 000 habitants, j’ai parfois l’occasion d’aller sur le terrain avec la gendarmerie ou la police municipale.
Sourires.
Parfois, en effet, cher collègue !
Je vois donc les jeunes qui sortent le soir, et ils sont loin de ne boire que de la bière. Ils consomment d’autres boissons, ainsi que cela a été dit précédemment, tels que les mélanges vodka-Red Bull. Il faut donc taxer aussi ces boissons.
Nous sommes tous, me semble-t-il, les défenseurs à la fois de la santé publique, des petites et moyennes entreprises et des emplois dans nos régions. Les objectifs de santé publique du Gouvernement ne sont pas incompatibles avec notre souci de préserver l’activité économique dans nos départements, bien au contraire !
Aussi, dans un souci de justice fiscale et conformément au principe d’égalité devant les charges publiques, cet amendement vise à faire contribuer les producteurs de bière et de vodka à l’effort budgétaire, en vue du rétablissement des comptes publics.
La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour présenter l'amendement n° 220 rectifié.
Je m’associe à nos collègues qui se sont exprimés pour défendre cette boisson locale qu’est la bière, qu’il s’agisse d’André Reichardt, pour l’Alsace, de Catherine Génisson, pour le Nord-Pas-de-Calais ou de Ronan Kerdraon, pour la Normandie…
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Veuillez m’excuser, cher collègue, mais les sénateurs normands pourraient sans aucun doute se joindre également à notre débat !
Sourires.
Cet amendement ne vise pas uniquement à défendre une boisson qui a d’ailleurs trouvé, au fil des siècles, sa justification ; à l’origine, je le rappelle, dans ma région et en Belgique, elle avait pour objet non pas de chercher l’ivresse, mais d’éviter la consommation d’eau non potable, et elle répondait donc à un objectif de santé publique.
J’en viens à l’objet de cet amendement. Pourquoi cibler si fortement la bière alors que, comme cela a été dit en commission, d’autres boissons telles que le vin – mais je ne veux pas susciter une nouvelle tempête au Sénat ! – sont beaucoup moins taxées ?
Nous sommes consommateurs à la fois de vin et de bière ; il ne s’agit donc pas d’opposer les uns aux autres. Comme notre collègue Catherine Génisson l’a demandé tout à l'heure à Mme la ministre déléguée, il faut trouver un équilibre.
On le sait, cette mesure budgétaire doit rapporter 480 millions d’euros, mais la santé publique nous importe tout autant. Cela a été souligné sur toutes les travées, l’objectif principal est la lutte contre le binge drinking, un phénomène très en vogue chez les jeunes. Toutefois, c’est non pas la bière qui est ici en cause, mais le mélange de vodka et de boissons énergisantes.
J’ai bien entendu, monsieur le rapporteur général, que l’on ne pouvait pas viser la vodka seule. Ciblons donc les alcools forts, de même, peut-être, que les bières fortes, qui sont concernées par ce phénomène.
C'est pourquoi notre amendement vise à diminuer la hausse des droits d’accises sur la bière de 162 % à 80 %, en prévoyant une compensation avec l’augmentation des droits sur les bières fortes et la vodka. J’indique que nous soutiendrons bien sûr les mesures de taxation relatives aux boissons énergisantes, dont nous discuterons ultérieurement.
La parole est à M. André Reichardt, pour présenter l'amendement n° 255 rectifié.
Aux termes du projet de loi, l’augmentation des droits d'accises sur la bière doit rapporter 480 millions d'euros de recettes budgétaires supplémentaires.
Dans un souci de justice fiscale et conformément au principe d'égalité devant les charges publiques, l’amendement que j’ai l’honneur de vous présenter, mes chers collègues, vise à faire contribuer non seulement les producteurs de bières, mais également ceux de vodka, à l’effort budgétaire en vue du rétablissement des comptes publics.
En effet, nous sommes quelques-uns à penser que l’augmentation de la pression fiscale de 162 % appliquée aux seuls producteurs de bière n’est franchement pas convenable.
M. Cahuzac a indiqué, lundi dernier, que la répercussion sur le prix de vente au consommateur serait de cinq centimes. Madame la ministre, permettez-moi de vous faire part de mon étonnement, car ce n’est pas exact.
Pour une bière vendue en grande surface – dans notre pays, 75 % des volumes de bière sont écoulés par la grande distribution – à 1, 20 euro le litre, le prix de vente au consommateur augmenterait entre 20 % et 25 %. Ainsi, le pack emblématique du rayon passerait de 10 euros à 12 euros.
Dans les cafés-hôtels-restaurants, la hausse serait de 8 centimes par verre de 25 centilitres, et non pas de 5 centimes, comme le disait M. Cahuzac. Et il conviendrait de lui appliquer un coefficient que vous connaissez bien, mes chers collègues – je veux parler du coefficient multiplicateur de cinq sanctuarisé par l’administration fiscale lors de ses contrôles dans les cafés –, ce qui porterait l’augmentation à 40 centimes par verre, faisant passer le demi de bière au prix moyen de 2, 60 euros à 3 euros minimum.
À n’en pas douter, cette hausse aurait pour conséquence de fragiliser davantage encore le circuit de consommation hors foyer, qui, notamment dans les territoires ruraux, que nous sommes nombreux à représenter ici, assume aussi des missions de service public. Vous le savez, la vente de bière représente souvent pour le petit commerce de proximité ou le bistrot installé ici ou là des revenus. Il faut naturellement prendre très sérieusement en compte cette question.
De plus, la hausse de la taxation aurait également des conséquences sur les emplois liés au secteur de la bière, déjà fortement fragilisé par la baisse structurelle de la consommation.
M. Cahuzac nous a très justement fait remarquer que les droits d’accises sur la bière étaient bien moins élevés en France qu’en Belgique, aux Pays-Bas, au Royaume-Uni ou en Irlande. Toutefois, il a omis de préciser que la France est l’un des pays européens où la consommation de bière est l’une des plus faibles – notre pays se situe à l’avant-dernier rang.
Les pays où les taxes sont les plus élevées sont aussi ceux où la consommation est trois fois supérieure à celle de la France. Voilà qui prouve la relativité des taxes, quelles qu’elles soient.
Dès lors, dans un souci de renforcement de la politique de santé publique, certes, mais aussi eu égard à la recherche d’une solution de justice élémentaire, l’augmentation des droits sur les bières commanderait également une hausse des droits sur la vodka, mais je ne reviendrai pas sur ce point, que j’ai déjà eu l’occasion de développer précédemment.
Pour autant, les brasseurs sont conscients de leurs responsabilités sociales et ne souhaitent pas s’en exonérer. Aussi proposons-nous de plafonner la hausse des droits sur la bière à 80 %, au lieu de 162 %. Franchement, peut-on faire moins ou plus ?
En outre, nous proposons – les brasseurs en sont d’accord – de créer une contribution sur les bières fortes, celles qui comptent plus de 8 degrés d’alcool et sont vendues en boites supérieures ou égales à 50 centilitres, d’un montant de 120 euros par hectolitre, et cela afin d’accroître l’effort en matière de protection de la santé publique.
Oui, ces mesures contribueront à renforcer la politique de santé publique menée par le Gouvernement, notamment à l’égard des plus jeunes, mais elles serviront aussi assurément à apurer la dette publique en vue du rétablissement de nos comptes.
C’est pourquoi je vous propose, mes chers collègues, de voter ces amendements identiques, empreints de la plus grande des sagesses.
La parole est à M. Jean-François Husson, pour présenter l'amendement n° 361 rectifié bis.
À entendre mes collègues, quelles que soient les régions dont ils sont les élus, j’ai le sentiment que nous allons faire preuve d’une certaine sagesse. Je souscris aux propos tenus par mon collègue alsacien André Reichardt : la Lorraine, voisine de l’Alsace, est également une terre de brasseurs.
Certes, les grandes entreprises ont connu de nombreuses mutations, mais on note également la résurgence de brasseries plus artisanales, qui non seulement sont dans l’air du temps, mais sont même très courues. En effet, on redécouvre le mérite du travail artisanal.
Elles s’insèrent dans les circuits courts de distribution. Avec la fameuse économie circulaire, dans tel ou tel village, dans tel ou tel canton, dans telle ou telle région, nous remettons au goût du jour le produit de certaines recherches.
Je vous rappelle aussi que ma région, la Lorraine, partage avec d’autres l’honneur d’être associée à la mémoire de Louis Pasteur, qui est venu y terminer ses travaux sur la levure et sur le procédé auquel il a donné son nom. C’est pourquoi de nombreuses rues, qui accueillent elles-mêmes des cafés ou des restaurants, y portent le nom de ce savant célèbre, comme à Vézelise, à Champigneulles ou à Tantonville.
Toutefois, quand on parle de la bière, on ne se tourne pas seulement vers le passé ; on se projette aussi dans l’avenir !
Je le répète, j’en appelle à l’effort budgétaire, y compris par la création de nouvelles taxes. Néanmoins, je considère aussi que nous devons faire preuve de respect et de mesure. Et comme les orateurs qui viennent de s’exprimer, j’ai le sentiment que la disposition proposée par le Gouvernement est manifestement excessive.
Mon collègue Reichardt a eu raison d’insister sur l’importance de l’emploi dans nos territoires. Cet enjeu se pose, même si c’est à des échelles différentes, pour les plus grandes unités industrielles comme pour un certain nombre de petits producteurs qui relancent des circuits de distribution courts et réalisent de manière artisanale des bières originales assez recherchées.
Mes chers collègues, même si ce n’est pas toujours à la mode, faisons preuve de tact et de mesure en adoucissant l’augmentation proposée par le Gouvernement pour les bières les moins fortes et en alourdissant les taxes applicables aux autres.
Nous rétablirons ainsi un équilibre de bon aloi qui satisfera aux objectifs de santé publique pour les populations de tous âges, car il ne faut pas stigmatiser les jeunes. En outre, dans le même esprit de responsabilité, nous contribuerons à l’apurement de notre dette.
Mes chers collègues, je devine que, en fin de compte, nous serons unanimes à faire ce choix.
L'amendement n° 302 rectifié, présenté par MM. Barbier, Mézard, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Plancade, Requier et Tropeano, est ainsi libellé :
Alinéas 2 à 6
Remplacer ces alinéas par sept alinéas ainsi rédigés :
1° Au deuxième alinéa, le montant : « 1, 38 € » est remplacé par le montant : « 2, 48 € » ;
2° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 4, 95 € par degré alcoométrique pour les bières dont le titre alcoométrique excède 2, 8 % vol. et n'excède pas 8 % vol. » ;
3° Au cinquième alinéa, après les mots : « excède 2, 8 % vol. », sont insérés les mots : « et n'excède pas 8 % vol. » ;
4° Au sixième alinéa, le montant : « 1, 38 € » est remplacé par le montant : « 2, 48 € » ;
5° Au septième alinéa, le montant : « 1, 64 € » est remplacé par le montant : « 2, 95 € » ;
6° Au huitième alinéa, le montant : « 2, 07 € » est remplacé par le montant : « 3, 73 € ».
La parole est à M. Gilbert Barbier.
M. Gilbert Barbier. Monsieur Husson, qui vous êtes approprié Louis Pasteur, sachez que les habitants de Dole, sa ville natale, veulent le garder pour eux – pour défendre la bière !
Sourires.
Madame la présidente, je défendrai en même temps les amendements n° 302 rectifié et 301 rectifié, dont les dispositifs sont un peu différents mais qui ont un objet identique.
Les orateurs précédents, toutes tendances politiques confondues, se sont émus de l’augmentation du tarif spécifique applicable à la bière que propose le Gouvernement.
Certes, la fiscalité de la bière dans notre pays est plutôt faible par comparaison avec celle qui est en vigueur dans d’autres pays européens. En outre, à la différence des impositions qui frappent les autres alcools, elle n’a pas été modifiée depuis quinze ans. Toutefois, avouez, madame la ministre, qu’une augmentation de 160 % est brutale et que vous placez la barre un peu haut !
Bien des arguments ont déjà été présentés au sujet des conséquences de cette mesure sur le secteur brassicole ainsi que sur les cafés et les brasseries, notamment en zones rurales ; je ne les reprendrai pas.
Pour ma part, je tiens à corriger une contre-vérité qui a été énoncée à l’Assemblée nationale par le ministre du budget. Le 25 octobre dernier, M. Cahuzac a soutenu que, la taxe sur la bière étant « un droit d’accise, donc, par définition, une taxe sur la consommation », la production ne serait pas touchée.
L’ennui, c’est qu’on nous explique par ailleurs qu’il s’agit de renchérir le prix des bières pour faire baisser la consommation… Il y a donc une certaine contradiction dans les arguments du Gouvernement ! Dès lors que la consommation baissera, je ne vois pas comment les producteurs, qui supportent des charges fixes, pourront ne pas être directement affectés.
Entendons-nous bien : nous souscrivons pleinement à l’objectif du Gouvernement de lutter conter l’alcoolisation massive, notamment celle des jeunes, qui a été évoquée à plusieurs reprises.
Le Gouvernement prétend que le demi de bière augmenterait seulement de 5 centimes. Toutefois, la démonstration vient de nous être faite par M. Reichardt – je ne la reprendrai pas – que l’augmentation se monterait en réalité à 40 centimes environ pour le consommateur.
Une hausse aussi énorme aura sûrement un effet dissuasif, mais elle affectera inévitablement le pouvoir d’achat d’une frange de la population, bien souvent populaire, qui est déjà durement touchée par la crise économique.
Je vous rappelle que, en trente ans, la consommation de bière a déjà chuté de près de 30 % ; ce déclin lent et inéluctable a d’ailleurs entraîné quelques restructurations industrielles importantes.
Par ailleurs, chacun sait que la bière n’est pas en cause dans les comportements de type binge drinking, contrairement à la vodka.
S’il s’agit réellement de répondre à un souci de santé publique, et non pas de trouver des recettes supplémentaires, adoptons une fiscalité éducative et proportionnelle, qui taxe davantage les boissons fortes, addictives ou ayant les effets les plus néfastes sur la santé. Puisque nous avons déjà mis en place un tel système pour les alcools titrant à plus de 18 degrés, poursuivons dans cette voie !
Tel est l’objet de notre amendement n° 302 rectifié, qui tend à augmenter de 80 % le taux d’accise sur les bières dont le titre alcoométrique n’excède pas 8 degrés. Cette augmentation, deux fois inférieure à celle qui est proposée par le Gouvernement, serait mieux proportionnée aux risques pour la santé publique. Je pense qu’elle serait supportable à la fois pour les consommateurs et pour l’ensemble de la filière brassicole.
L’amendement tend également à créer un nouveau tarif de 7, 2 euros applicable aux bières dont le titre alcoométrique excède 8 degrés, qu’elles soient produites par les petites ou par les grandes brasseries.
Quant à l’amendement n° 301 rectifié, il vise seulement, compte tenu des explications données en commission, à limiter la hausse de la taxe à 80 %, ce qui est plus raisonnable et peut-être plus juste.
En effet, ce qui nous choque dans le dispositif adopté par l’Assemblée nationale, c’est que les plus petites brasseries, celles qui produisent moins de 10 000 hectolitres – on en compte plus de 400 sur notre territoire, dont certaines en Franche Comté – sont finalement les plus pénalisées, puisqu’elles restent soumises à l’augmentation de 160 %, comme les entreprises industrielles.
En l’état actuel de la réglementation européenne, si nous voulons ne pas trop pénaliser les micro-brasseries, nous devons limiter la hausse du droit de consommation pour tous les producteurs.
La volonté du Gouvernement de réduire le déficit de la sécurité sociale est salutaire, mais la filière brassicole ne mérite pas un matraquage fiscal de cette ampleur. Il y aura d’autres abus à sanctionner et d’autres sources d’économies à trouver !
L'amendement n° 301 rectifié, présenté par MM. Barbier, Mézard, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Plancade, Requier et Tropeano, est ainsi libellé :
1° Alinéa 2
Remplacer le montant :
par le montant :
2° Alinéa 3
Remplacer le montant :
par le montant :
3° Alinéa 4
Remplacer le montant :
par le montant :
4° Alinéa 5
Remplacer le montant :
par le montant :
5° Alinéa 6
Remplacer le montant :
par le montant :
Cet amendement a déjà été défendu.
Les amendements n° 206 rectifié et 358 sont identiques.
L'amendement n° 206 rectifié est présenté par MM. Darniche, B. Fournier, du Luart et Dufaut, Mme Duchêne et MM. Leleux, Bécot, Pinton et Chauveau.
L'amendement n° 358 est présenté par M. Lecerf.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 2
Remplacer le nombre :
par le nombre :
II. – Alinéa 3
Remplacer le nombre :
par le nombre :
III. – Alinéa 4
Remplacer le nombre :
par le nombre :
IV. – Alinéa 5
Remplacer le nombre :
par le nombre :
V. – Alinéa 6
Remplacer le nombre :
par le nombre :
La parole est à M. Philippe Darniche, pour présenter l’amendement n° 206 rectifié.
M. Philippe Darniche. Venant d’un département, la Vendée, où les brasseurs sont très connus, puisqu’il n’y en a que deux
Sourires.
Les deux petites brasseries artisanales qui existent en Vendée se sont adressées à moi et j’ai été marqué par les arguments qui m’ont été présentés et que mes collègues viennent de développer.
Il est incontestable que la barre a été mise beaucoup trop haut pour une filière que, par ailleurs, le Gouvernement a qualifiée de filière d’excellence. Une multiplication par 2, 6 des droits d'accises sur la bière serait, à mes yeux, impossible à supporter pour la profession.
Au demeurant, la filière brassicole admet le principe d’une augmentation raisonnable de ses taxes, qui représentent tout de même déjà 337 millions d’euros, pour contribuer à l'effort collectif. Malheureusement, l'effort demandé n'est ni raisonnable, ni équitable, ni supportable.
Il s'agit donc de trouver un compromis. Celui que la profession elle-même propose me paraît sensée. Il consiste à diviser par deux la taxe prévue par le Gouvernement, ce qui laisserait à la filière la possibilité de s'adapter et de ressentir de façon moins brutale cette mise à contribution qui aura forcément des conséquences sur la consommation et sur les emplois.
Je le rappelle, la filière brassicole fait vivre aujourd'hui, directement ou indirectement, 71 000 personnes, depuis l’agriculteur producteur d’orge jusqu’aux brasseurs et aux malteurs, sans oublier les différentes catégories de distributeurs que sont les cafés, les restaurants et la grande distribution.
Je crois, moi aussi, qu’il faut un peu de sagesse. Même si, du fait de ma profession, je suis attaché aux enjeux de santé publique et comprends que l’on fasse porter un effort particulier sur la taxation des alcools, je considère que l’augmentation actuellement prévue est démesurée et je suis convaincu que le Gouvernement nous entendra.
L'amendement n° 358 n'est pas soutenu.
L'amendement n° 310 rectifié, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin et Fortassin, Mme Laborde et MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
I bis. - Les dispositions visées aux 1° et 2° du I ne sont pas applicables aux 10 000 premiers hectolitres.
La parole est à M. Jacques Mézard.
Après les amendements n° 302 rectifié et 301 rectifié, que notre collègue Gilbert Barbier a excellemment défendus, nous présentons à présent un amendement de repli visant à ne pas soumettre à l’augmentation du tarif du droit de consommation 10 000 hectolitres de bière produits.
Autrement dit, il s’agit d’instaurer une franchise pour 10 000 hectolitres de bière produits par chaque brasserie.
En effet, nous assistons aujourd'hui – c’est aussi le fait d’exercer un mandat local qui nous permet de le constater – à une croissance exponentielle du nombre des brasseries artisanales, y compris dans des régions qui ne sont pas traditionnellement brassicoles, comme la Corse ou Midi-Pyrénées ; en 2011, cette dernière région comptait 25 sites produisant environ 10 000 hectolitres chacun.
Les brasseurs artisanaux, souvent des passionnés, jouent sur la qualité, la diversité et le terroir ; sur un marché plutôt en berne, leurs ventes progressent depuis plusieurs années.
Pour autant, les bières de spécialité, ou bières régionales, représentent moins de 2 % de la consommation totale de bière en France. Il s’agit donc encore d’un marché de niche, dont le développement risque d’être freiné par l’augmentation du droit d’accise que le Gouvernement propose.
Cette hausse remettrait en cause tout le modèle de l’industrie brassicole, qui nécessite des investissements lourds. Même pour produire une petite quantité de bière, un minimum de matériel est nécessaire. En outre, les petites brasseries sont parfois trop récentes pour avoir amorti leurs investissements de départ.
Par ailleurs, les bières artisanales sont généralement plus chères que les autres. Si leur prix augmente encore, la consommation risque de baisser, ce qui porterait un coup sérieux à des personnes qui s’investissent beaucoup, alors que le prix de l’orge a déjà plus que doublé en quelques années.
Ces arguments ont été entendus, puisque l’Assemblée nationale a adopté un amendement limitant l’augmentation de la taxe pour les bières produites par les petites brasseries indépendantes. Aussi l’article 23 du projet de loi de financement de la sécurité sociale, dans sa rédaction actuelle, prévoit-il un tarif unique de 3, 60 euros jusqu’à 200 000 hectolitres.
On aurait pu se réjouir de cette avancée. Seulement, en y regardant de plus près, on constate que les petites brasseries ne sont nullement épargnées, puisqu’elles risquent de subir une augmentation de taxe comprise entre 75 % et 160 %.
Pis encore, les plus petites entreprises, celles qui produisent moins de 10 000 hectolitres, seraient les plus pénalisées, puisqu’elles resteraient soumises à l’augmentation de 160 %, comme les entreprises industrielles.
Ce paradoxe résulte de la réglementation européenne, qui impose un écart maximal de 50 % entre le tarif du droit de consommation relatif aux petites brasseries indépendantes et celui qui est applicable aux autres.
L’amendement n° 310 rectifié vise à contourner subtilement cette exigence communautaire en exonérant de l’augmentation proposée 10 000 hectolitres de bière. Cette disposition, qui ne touche pas au tarif et qui est d’application générale, ne semble pas devoir poser problème.
Madame la ministre, nous sommes prêts à sous-amender cet amendement de repli car, en visant spécialement les 10 000 premiers hectolitres, on complique le dispositif et on pousse les producteurs qui dépassent ce seuil à brasser en premier les bières les plus fortes, ce qui serait évidemment contre-productif du point de vue de la santé publique.
Je le répète, notre intention est de protéger les petits brasseurs en instaurant une franchise pour 10 000 hectolitres de bière.
Madame la présidente, au nom de la commission des affaires sociales, je sollicite une suspension de séance d’une quinzaine de minutes.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-huit heures quinze, est reprise à dix-huit heures quarante-cinq.
La séance est reprise.
Dans la suite de la discussion commune de quinze amendements, nous en sommes parvenus à l’amendement n° 5, présenté par M. Daudigny, au nom de la commission des affaires sociales, et ainsi libellé :
Alinéa 22
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. le rapporteur général.
Je crois que, sur cet amendement, je ne tiendrai pas quatorze minutes !
Je n’en doute pas !
Le présent amendement vise à supprimer un rapport qui n’entre pas complètement dans le champ du PLFSS.
Néanmoins, comme nous sommes très motivés par le sujet dont il est ici question, nous suggérons que ce soit le Parlement qui prenne lui-même l’initiative de réaliser un rapport sur la fiscalité comportementale, en incluant la fiscalité sur les produits contenant de l’alcool.
L'amendement n° 59 rectifié bis, présenté par M. Courteau, Mme Alquier, M. Carvounas, Mme Schillinger, MM. Bérit-Débat, Filleul, Guillaume et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 22
Rédiger ainsi cet alinéa :
IV. – Le Gouvernement présente au Parlement, avant le 31 décembre 2013, un rapport sur l’état des lieux de la fiscalité appliquée à l’ensemble des boissons alcoolisées et comparée à celle en vigueur notamment dans les pays producteurs des boissons de même nature de l’Union européenne.
La parole est à M. Ronan Kerdraon.
Je demande qu’il soit statué par priorité sur l’amendement n° 301 rectifié, qui a été présenté par M. Gilbert Barbier et sur lequel je m’apprête à déposer un sous-amendement.
La priorité est de droit.
En attendant le dépôt de votre sous-amendement, monsieur le rapporteur général, peut-être pourriez-vous nous exposer l’avis de la commission sur les différents amendements en discussion ?
Comme je l’ai indiqué au début de l’examen de cet article, la position de la commission s’appuie sur la directive européenne du 19 octobre 1992 concernant l’harmonisation des structures des droits d’accises sur l’alcool et les boissons alcooliques, en particulier sur ses articles 4 et 23.
L’article 4 de cette directive, qui concerne les « petites brasseries indépendantes », prévoit, d’une part, que tout ce qui est produit sous licence pour une autre marque doit être inclus dans le calcul des volumes produits et, d’autre part, que les abattements pratiqués sur le prix de base ne peuvent pas être supérieurs à 50 %. En vertu de cet article 4, un certain nombre des amendements en discussion ne peuvent être acceptés.
Selon l’article 23 de la directive, le taux d’accise doit être le même pour tous les produits soumis à l’accise sur l’alcool éthylique, c’est-à-dire ceux qui relèvent de la distillation. Par conséquent, il est impossible d’effectuer un report sur un alcool donné, par exemple la vodka ou le whisky, comme cela est préconisé dans certains amendements, qui, pour cette raison, ne peuvent pas non plus être acceptés.
En d’autres termes, c’est au regard de ces deux articles de la directive que la commission a été « mécaniquement » amenée à émettre un avis défavorable sur un certain nombre des amendements en discussion.
C’est le cas des amendements identiques n° 258 rectifié bis et 362 rectifié bis, qui sont contraires à l’article 23 de la directive et que je qualifierai d’« amendements de type vodka ».
Sourires.
La commission est également défavorable aux amendements identiques n° 198 et 274, qui sont contraires à l’article 4 de la directive puisqu’ils prévoient d’exclure du calcul des volumes « les bières brassées sous licence, sous marques de distributeurs, et les bières produites en sous-traitance ».
Les amendements identiques n° 212, 220 rectifié, 255 rectifié et 361 rectifié bis, sont des amendements de type vodka et recueillent à ce titre un avis défavorable.
La commission est défavorable à l’amendement n° 302, qui, prévoyant un abattement de 65 %, est contraire à l’article 4 de la directive.
Je reviendrai sur l’amendement n° 301 rectifié lorsque je présenterai mon sous-amendement.
L’avis est défavorable sur l’amendement n° 206 rectifié, contraire à l’article 4 de la directive. Il en va de même pour l’amendement n° 310 rectifié.
La commission demande le retrait de l’amendement n° 59 rectifié bis au profit de l’amendement n° 5 de la commission. Les objectifs poursuivis sont en effet voisins.
L’amendement déposé par le groupe socialiste vise à demander au Gouvernement un rapport sur la fiscalité appliquée aux boissons alcoolisées en France et, par comparaison, dans les autres pays européens. Pour sa part, la commission estime que c’est le Parlement qui doit se saisir de ce sujet et produire un rapport incluant l’étude de la fiscalité sur les produits contenant de l’alcool.
Quel est l’avis du Gouvernement sur tous les amendements, à l’exception de l’amendement n° 301 rectifié, sur lequel M. le rapporteur général a indiqué qu’il préparait un sous-amendement ?
J’ai bien entendu les arguments des uns et des autres. Cependant, nous devons avoir présent à l’esprit que, si l’on diminue les recettes, il sera beaucoup plus difficile de tenir un certain nombre d’engagements sociaux sur l’ensemble de nos territoires. Par conséquent, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, je vous appelle à examiner avec une très grande attention tout ce qui peut viser à réduire le niveau des recettes dans le cadre de ce PLFSS.
Je voudrais prendre le temps de revenir sur le débat très riche qui s’est tenu sur la fiscalité des bières, en réexpliquant dans le détail la raison pour laquelle cette mesure est proposée par le Gouvernement. Je souhaite décrire clairement et en toute transparence l’ensemble de ses incidences.
Nous pouvons sans doute en convenir, la mesure proposée vise à limiter la consommation d’alcool, particulièrement chez les jeunes. Permettez-moi de rappeler quelques chiffres en la matière. Avec 30 000 décès environ par an, l’alcool reste la deuxième cause évitable de mortalité par cancers, après le tabac. Et ce chiffre n’inclut pas les décès liés à des accidents de la route, lesquels concernent pourtant aussi des consommateurs d’alcool, souvent jeunes.
Selon l’INSERM, 80 % des jeunes de dix-sept ans ont bu de l’alcool au cours des trente derniers jours et 50 % ont pratiqué le binge drinking, autrement dit l’ivresse rapide, sur la même période.
Alors que la quantité d’alcool pur consommée par habitant sous forme de vin a été presque divisée par trois depuis cinquante ans, celle qui a été consommée sous forme de bière est restée stable, à 2, 5 litres par an. La part de la bière dans la quantité d’alcool pur consommée par les Français est passée de moins de 10 % à près de 20 %.
La bière, je tiens à le souligner, constitue le point d’entrée des jeunes dans l’alcool. Elle est la boisson qu’ils consomment le plus fréquemment.
Son très faible coût – je pense à la bière de premier prix vendue en supermarché, qui peut être assez fortement alcoolisée – contribue au maintien d’un accès à l’alcool par cette boisson. Je vous rappelle qu’il est possible de trouver des packs de bière de premier prix à 4, 5 degrés d’alcool pour 20 centimes d’euro le demi de 25 centilitres, soit le même prix au litre que l’eau de Contrexéville ou d’Évian. Une pinte de bière à 8 degrés peut être vendue pour 1 euro.
Le prix d’accès à la bière est donc extrêmement faible. Du reste, hors bière discount et campagne promotionnelle, on trouve dans les grandes surfaces le litre de « bière de luxe », mention qui figure sous un certain nombre de grandes marques, ou le litre de bière forte aux alentours de 2 euros. Ainsi, il est possible d’atteindre, avec un produit qui conserve une image largement positive et une qualité tout à fait acceptable, des états d’ébriété dépassés pour 5 à 6 euros.
Cette accessibilité de la bière s’explique en partie par le niveau de taxation français. En effet, pour ce qui concerne les droits d’accises sur la bière, la France se classe au vingt-deuxième rang sur les vingt-sept pays de l’Union européenne : ces droits sont six fois moindres qu’en Irlande, huit fois moindres qu’au Royaume-Uni, et près de douze fois moindres qu’aux Pays-Bas.
Les droits de consommation sur les alcools forts, qui figurent également parmi les boissons privilégiées pour parvenir à une alcoolisation rapide, ont été fortement relevés l’an dernier : de plus de 20 %.
La mesure qui vous est ici proposée a donc, très clairement, une finalité de santé publique.
Au-delà de ses motivations sanitaires, cette disposition produira des effets sur lesquels je tiens à insister eu égard aux propos erronés, parfois relayés par la presse, qui ont été tenus à ce sujet.
Premièrement, le dispositif est identique quel que soit le réseau de distribution. Cela signifie que la hausse ne sera pas plus forte en supermarché qu’au comptoir.
Deuxièmement, l’ampleur de l’augmentation est proportionnelle à la fois au volume et au degré d’alcool de la bière. Les droits d’accises augmenteront de 1, 2 centime par demi et par degré d’alcool. Autrement dit, l’augmentation sera de 5 centimes pour un demi de bière à 4, 5 degrés. Si, pour un demi ordinaire, la hausse du prix final est finalement plus importante, c’est parce que les acteurs en profiteront pour accroître leurs marges. Ces 5 centimes sont à rapporter au prix d’une bière vendue en grande surface, à savoir 20 centimes pour une bière discount et 50 centimes pour une bière de marque courante.
Pour un consommateur moyen, qui boit 32 litres de bière par an, et qui ne modifiera pas son comportement, l’impact de la mesure sera de 6 euros par an. Même pour un consommateur qui absorberait 100 litres de bière par an, ce qui représente une consommation de 2 litres par semaine, l’impact serait de 20 euros, soit 1, 60 euro par mois.
La hausse touchera plus fortement la consommation de volumes importants et/ou de bières plus fortes, ce qui est conforme à l’objectif recherché en termes de santé publique : rendre plus coûteux pour les jeunes l’accès aux produits qu’ils privilégient pour parvenir à une alcoolisation rapide.
La consommation conviviale au comptoir sera peu touchée : pour un demi à 2, 50 euros, une hausse de 5 centimes ne représente que 2 % d’augmentation. La dégustation de bière de qualité et de tradition régionale sera également peu concernée. Sur ces bières, aux prix plus élevés, la majoration sera peu significative en proportion du prix.
Les droits d’accises pratiqués en France se situeront ainsi dans la moyenne de l’Union européenne à vingt-sept et resteront très inférieurs à ceux qui sont appliqués dans les pays où la consommation de bière revêt une dimension culturelle plus marquée. Cela veut dire, très concrètement, que ces droits seront encore très loin de ceux des Pays-Bas, du Royaume-Uni ou de l’Irlande.
Un impact sur les prix pour les produits les plus alcoolisés ou les moins chers est une conséquence – je le dis avec une gravité pleinement assumée et même revendiquée – de l’augmentation des droits d’accises. Certains brasseurs estiment cependant qu’ils ne seront pas en mesure de répercuter la hausse sur les prix et qu’ils devront réduire leurs marges. Permettez-moi d’en douter au vu de la structure du marché et de la taille des acteurs, puisque le marché français de la bière connaît, à l’image du marché mondial, une très grande concentration industrielle, trois groupes internationaux – Carlsberg, Heineken et InBev – concentrant 85 % du marché.
Du fait de leur poids, ces grands groupes seront largement en situation de répercuter la hausse des droits dans les prix de vente aux grandes et moyennes surfaces, qui commercialisent 75 % des bières. Au reste, ils sont en bonne santé économique : Heineken a enregistré 800 millions d’euros environ de bénéfices au premier semestre de 2012 et Carlsberg, 1, 2 milliard d’euros en 2011.
Le texte issu de l’Assemblée nationale permet d’aboutir à un équilibre satisfaisant puisque l’ensemble des petits brasseurs – brassant tout de même jusqu’à 200 000 hectolitres par an – bénéficiera d’un taux réduit correspondant à 50 % du taux normal, soit l’abattement maximal autorisé par le droit communautaire. La hausse des droits d’accises sera donc plus faible pour les produits concernés. Ainsi, pour une bière comme la Ch’ti, produite dans une brasserie à 45 000 hectolitres par an, la hausse sera plus de deux fois moindre que pour une bière de grande brasserie au même titre d’alcool : sur un demi à 6, 4 degrés, moins de 3 centimes d’euros, contre 7 centimes.
Par ailleurs, il me paraît clair que le développement des petits brasseurs relève d’un attrait du consommateur pour la spécificité de leur offre : terroir, goût typé, arôme particulier, image d’authenticité, aspect artisanal et haut niveau de qualité des produits. L’effet de droits d’accises modiques sur les prix de ces produits plus coûteux sera donc très limité.
Il faut rappeler également que la taxation ne portera que sur la consommation française. Les bières produites en France et exportées ne seront pas taxées, à l’inverse des bières étrangères importées, soumises en France aux mêmes prélèvements que les bières produites sur le territoire national.
Enfin, s’agissant de la filière brassicole, il convient de noter que 80 % environ de la production nationale de houblon et de malt est destinée à l’exportation.
Je vous appelle, mesdames, messieurs les sénateurs, au nom de la cohérence, de la responsabilité, de l’intérêt général et du respect du droit communautaire, à faire preuve de responsabilité en la matière.
Je conclurai en disant qu’il n’existe aucun argument rationnel permettant de démontrer, d’une part, que le relèvement des droits d’accises sur les bières proposé dans ce PLFSS ne constitue pas une mesure de santé publique, d’autre part, que son impact tant sur le pouvoir d’achat que sur la filière est disproportionné.
En conséquence, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements, à l’exception des amendements n° 5 et 59 rectifié bis, sur lesquels il s’en remettra à la sagesse de la Haute Assemblée.
Je laisse volontairement de côté la question du sous-amendement à l’amendement n° 301 rectifié, que M. le rapporteur général ne nous a pas encore présenté.
Le sous-amendement n° 399, présenté par M. Daudigny, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Amendement n° 301 rectifié
1° Alinéa 5
Remplacer le montant :
par le montant :
2° Alinéa 10
Remplacer le montant :
par le montant :
3° Alinéa 15
Remplacer le montant :
par le montant :
4° Alinéa 20
Remplacer le montant :
par le montant :
5° Alinéa 25
Remplacer le montant :
par le montant :
La parole est à M. le rapporteur général.
Le sous-amendement n° 399 à l’amendement n° 301 rectifié vise à introduire une solution de compromis ; il ne satisfera donc personne ! En effet, il déplaira à ceux qui souhaitent, et ils sont nombreux ici, le maintien du texte tel qu’il est proposé par le Gouvernement, mais aussi à ceux qui ne sont prêts à accepter qu’une augmentation très modeste des droits d’accises.
Toutefois, assumant mes responsabilités de rapporteur général de la commission des affaires sociales, j’ai choisi de vous le présenter, mes chers collègues, dans l’esprit de conciliation qui préside traditionnellement – et, je l’espère, encore aujourd’hui – aux travaux du Sénat.
Nous proposons que les droits d’accises de base, qui étaient de 2, 75 euros par hectolitre, soient portés à 6, 50 euros par hectolitre, alors que le texte dont nous débattons visait à les fixer à 7, 20 euros par hectolitre. La commission se situe donc à mi-parcours entre le texte défendu par le Gouvernement et l’amendement présenté par M. Barbier.
Du point de vue financier, le Gouvernement attendait 480 millions d’euros de la hausse de la fiscalité sur les bières. L’adoption de l’amendement déposé par M. Barbier aurait réduit ce surcroît de recettes de moitié, le ramenant à 240 millions d’euros. Le sous-amendement n° 399 offre une solution médiane, avec une recette nouvelle de 360 millions d’euros.
Pour votre information, mes chers collègues, et parce qu’un tel rappel n’est pas inintéressant dans ce débat, j’aimerais enfin vous indiquer quelle est aujourd'hui la fiscalité sur différents produits, pour 10 grammes d’alcool pur : pour un demi à 5 degrés, elle oscille entre 1, 7 et 3, 4 centimes d’euro ; pour une coupe de champagne à 12 degrés, elle représente 0, 9 centime d’euro ; pour un verre de vin à 12 degrés, 0, 4 centime ; pour un verre d’apéritif à 18 degrés, 12, 6 centimes ; pour un verre de whisky à 40 degrés, 27, 4 centimes d’euros. Je vous laisse imaginer la difficulté à laquelle se trouveraient confrontés celles et ceux qui voudraient établir une fiscalité proportionnelle à la teneur réelle d’alcool dans une boisson !
Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 301 rectifié et sur le sous-amendement n° 399 ?
Mesdames, messieurs les sénateurs, puisqu’il a été fait référence à la sagesse de votre assemblée, je tiens à attirer votre attention sur le fait que la sécurité sociale se voit d’ores et déjà amputée, du fait des amendements que vous avez votés, de 820 millions d’euros de recettes.
Or, si cet amendement et ce sous-amendement sont adoptés, cette perte sera encore augmentée de 120 millions d’euros : nous friserons alors le milliard d’euros de recettes en moins pour la sécurité sociale ! Vous comprendrez que, dans de telles circonstances, le Gouvernement ne puisse émettre un avis favorable sur l’amendement n° 301 rectifié, fût-il modifié par le sous-amendement n° 399.
Je ne reviens pas sur le calcul effectué par Mme la ministre, qui est tout à fait exact. Je veux seulement souligner que trois décisions prises aujourd'hui s’annulent.
La réduction de la taxation de la bière dans les conditions suggérées par la commission diminuerait en effet les recettes prévues de 120 millions d’euros. Cependant, le rétablissement de l’article 14, relatif aux carried interests, représente une recette de 80 millions d’euros. Quant à l’amendement sur l’huile de palme, qui vous a valu une longue – trop longue aux yeux de certains – intervention du rapporteur général
Sourires.
La parole est à Mme Fabienne Keller, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 399.
Tout en remerciant le rapporteur général de l’important travail qu’il a réalisé dans des délais très courts, je souhaite réagir à la hausse substantielle des taux de fiscalisation de la bière, qui demeurent plus proches des 160 % prévus dans la rédaction initiale que des 80 % sollicités au travers des différents amendements.
Mme la ministre déléguée s’est livrée à une attaque en règle contre la bière, dont la consommation, a-t-elle dit, représente en moyenne l’absorption de 2, 5 litres d’alcool pur par an. Or ce volume est bien plus important pour d’autres alcools ! Focaliser l’attention sur la bière revient à méconnaître le sujet plus global, non de la consommation d’alcool, mais de la consommation excessive d’alcool, qui est le véritable problème sur lequel nous pouvons nous rejoindre.
Vous avez également indiqué, madame la ministre, que la production était pour l’essentiel concentrée sur trois grands groupes de brasserie. Pour notre part, nous combattons cette concentration. C’est la raison pour laquelle je regrette que n’ait pas été retenu notre amendement tendant à défendre les brasseries de taille moyenne, ces grosses PME d’Alsace et du nord de la France, au travers de la création d’un seuil de 200 000 hectolitres, non pas global mais en marque propre.
J’ai bien compris le raisonnement du rapporteur général sur l’article 4 de la directive européenne. Néanmoins, nous ne devons pas nous étonner du faible nombre de PME de taille moyenne dans notre pays : elles sont tuées par les effets de seuil contenus dans notre dispositif législatif, coincées qu’elles sont entre les petites entreprises protégées par des seuils bas et les très grandes, qui disposent d’une capacité de négociation avec la grande distribution et peuvent optimiser leur fiscalité grâce à des localisations particulièrement favorables.
Je souhaite enfin plaider, monsieur le rapporteur général, en faveur de taux de fiscalisation plus bas. J’espère que mon argument sera entendu.
Nous sommes tout à fait responsables et conscients des besoins de financement de la sécurité sociale, mais nous déplorons la focalisation sur la bière, qui induit des taux particulièrement élevés.
Pourquoi ne pas prendre en compte d’autres assiettes ? Certaines propositions ont sans doute été maladroites, comme celle qui mettait en avant la vodka. Mais pourquoi ne pas mieux répartir l’effort en taxant les boissons énergisantes, tout aussi dangereuses et systématiquement utilisées en mélange lors des séances de binge drinking ?La consommation excessive de ces produits, je le rappelle, est dangereuse pour la santé.
L’amendement n° 310 rectifié est retiré.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 399.
Le sous-amendement est adopté.
L’amendement est adopté.
En conséquence, les amendements n° 258 rectifié bis et 362 rectifié bis, identiques, 198 et 274, identiques, 212, 220 rectifié, 255 rectifié et 361 rectifié bis, identiques, 302 rectifié et 206 rectifié n’ont plus d’objet.
Je mets aux voix l’amendement n° 5.
L’amendement est adopté.
En conséquence, l’amendement n° 59 rectifié bis n’a plus d’objet.
La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote sur l’article.
Nous voici parvenus au terme de l’examen de l’article 23, qui a suscité de nombreuses interventions sur l’ensemble des travées, généralement de grande qualité. Toutes ont mis en évidence le problème de la consommation excessive d’alcool, qui fait l’objet, comme l’a rappelé Mme la ministre déléguée, d’un combat permanent à tous les niveaux.
Certains de nos collègues ont par ailleurs insisté sur les enjeux économiques en présence. Il a notamment été question de préserver, à côté des grands groupes, les petites brasseries.
Plusieurs d’entre nous ont fait état des dérapages que, malheureusement, nous observons chez les jeunes, qui n’hésitent pas à consommer des mélanges à base de vodka ou d’autres alcools forts. Cet alcoolisme des jeunes est, du reste, tout aussi présent dans nos villes que dans nos campagnes.
Nous sommes un certain nombre ici à représenter des départements ruraux, voire de petites communes. Combien de maires, assistés par les bénévoles des comités des fêtes, renoncent à organiser dans leur commune ne serait-ce que des fêtes patronales, à cause de ces problèmes d’alcoolisme ! Il arrive, hélas, qu’au cours de ces manifestations des jeunes venant d’ailleurs apportent des bouteilles dans les coffres de leurs voitures. Ce problème de société a évidemment aussi des répercussions en termes de sécurité publique.
Alors que nous allons nous prononcer sur le volet « recettes » de la sécurité sociale, nous comprenons tous, quel que soit le groupe politique auquel nous appartenons, l’enjeu financier que constitue l’équilibre des comptes publics de la sécurité sociale.
La santé publique, on l’a rappelé sur toutes les travées, représente également une préoccupation particulièrement importante. L’alcoolisme est un véritable fléau et c’est pourquoi il nous faut le combattre de toutes les manières possibles.
Sur cet article, je me rallierai à la position de mon groupe.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi de vous faire part de ma grande déception.
Je le dis à titre personnel, mais aussi au nom des sénateurs alsaciens qui ont bien voulu cosigner plusieurs amendements : nous ne pouvons pas voter cet article dans sa rédaction actuelle.
Je regrette, une nouvelle fois, que l’anathème soit ainsi jeté sur une boisson populaire, qui n’est absolument pas nocive en termes de santé publique, contrairement à ce que certains s’acharnent à faire croire.
Je ne veux pas refaire le débat, car je vois bien que mon propos en agace certains ; je demande simplement que l’on nous montre quels dégâts sont causés par la bière !
des dégâts, ce sont ces mélanges, les « mix », consommés lors de soirées au cours desquelles on fume également. La bière n’y est pour rien et ne justifie pas un tel anathème.
Même si l’augmentation initialement prévue de 160 % de la taxation a été rejetée, nous n’en sommes guère loin. Or une telle augmentation n’est pas convenable.
Je réitère donc ma déception, tout en rendant hommage à M. Barbier et au rapporteur général, qui a manifesté la volonté de trouver une solution, ce qui n’était certes pas facile.
Encore une fois, il n’était ni convenable ni même admissible d’augmenter à ce point les droits d’accises sur cette boisson.
On ne peut être satisfait de ce débat sur la bière, et ce pour des raisons tant de fond que de forme.
Le Gouvernement, qui proclame en permanence sa volonté de recourir sur tous les sujets à la concertation, a agi en l’espèce sans consulter les principaux acteurs.
Par ailleurs, il faut bien reconnaître qu’il y a une sorte d’hypocrisie : comme on se refuse à taxer le vin, on cherche des taxations de substitution et l’on cible la bière ! Au demeurant, on se garde bien de parler d’autres boissons parce qu’on ne veut pas fâcher : rhum, calvados, cidre, et j’en passe. Des boissons alcoolisées, dont on sait pourtant très bien quels dégâts elles peuvent causer, sont donc relativement épargnées. Il y a une rupture d’égalité puisque c’est un seul produit qui se voit stigmatisé.
Je le dis d’autant plus librement que je suis élue dans un département qui compte une seule petite brasserie, je considère que, sur le fond comme sur la forme, ce débat n’est absolument pas satisfaisant.
J’ajoute que les associations de lutte contre l’alcoolisme attirent notre attention sur le fait que cette fiscalité débridée, désorganisée et mal ciblée est contraire à l’intérêt des personnes victimes de ce fléau et que l’augmentation de la taxation n’aura pas, sur le terrain, les effets qu’elle est supposée avoir.
Telles sont les raisons et de fond et de forme pour lesquelles nous ne voterons pas l’article 23.
Un minimum de concertation préalable aurait sans doute évité ce long débat, de surcroît certainement voué à l’échec puisqu’il semble que la Haute Assemblée, du moins une majorité de ses membres, ait décidé de ne pas voter les recettes inscrites dans ce PLFSS.
Je n’avais pas particulièrement l’intention de prendre la parole, mais l’intervention de M. Reichardt me conduit à le faire.
Si certains d’entre nous ont défendu les brasseurs et demandé qu’une taxation un peu plus raisonnable et mesurée soit appliquée à la bière, je crois tout aussi louable que d’autres aient souhaité taxer davantage celle-ci pour les motifs de santé publique avancés, notamment, par Mme la ministre.
Dans ces conditions, l’amendement de M. le rapporteur général est, comme il l’a très bien dit lui-même, un amendement de compromis : chacun a fait un pas vers l’autre.
Certes, on peut considérer que le verre est à moitié vide ou à moitié plein – c’est le cas de le dire ! – mais, pour ma part, j’estime que le travail réalisé par notre assemblée cet après-midi nous permet une sortie « par le haut ». Ont été pris en compte non seulement les arguments de ceux qui, pour des motifs de santé publique, considéraient qu’il fallait renforcer davantage la taxation, mais aussi les légitimes intérêts des régions concernées et des petits brasseurs locaux.
Ainsi, nous avons fait acte, je le pense, de réalisme et de pragmatisme.
Mme Catherine Génisson. Je fais miens les arguments de M. Kerdraon et, en réponse à notre collègue André Reichardt, je me contenterai d’ajouter que, au-delà de l’alcoolisme aigu et chronique ainsi que des enjeux de santé publique relatifs aux jeunes, la bière pose des problèmes spécifiques. En particulier, certaines pathologies cardiaques comme la cardiomyopathie sont dues à une consommation excessive de bière.
M. Alain Milon manifeste son dissentiment.
Mon cher collègue, c’est une pathologie que les cardiologues reconnaissent dans le Nord-Pas-de-Calais et qui est tout de même plutôt spécifique à l’intoxication aiguë et chronique à la bière.
Comme l’a dit le rapporteur général, personne, bien entendu, n’est satisfait, …
… ni ceux qui sont pour une taxation élevée, ni ceux qui veulent protéger une industrie et sa place sur nos territoires.
L’amendement que j’ai proposé et qui a été sous-amendé par le rapporteur général est un moyen terme et il ne peut effectivement pas, en tant que tel, satisfaire tout le monde, mais je le crois raisonnable.
D’une part, avec le nouveau niveau de taxe, on ne peut pas considérer que la totalité des brasseurs sera déstabilisée ; les petits brasseurs, notamment, devraient être plutôt satisfaits par l’évolution du texte.
D’autre part, ce n’est pas à moi qu’on peut reprocher de ne pas avoir lutté pour la santé publique !
Madame la ministre, il faut être raisonnable en tout. Cet amendement, qui me paraît satisfaisant, permet en tout cas, comme cela vient d’être dit, une sortie « par le haut » à notre assemblée.
Je mets aux voix l'article 23, modifié.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici le résultat du scrutin n° 32 :
Le Sénat a adopté.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante, est reprise à vingt-et-une heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Didier Guillaume.