Intervention de Claude Bérit-Débat

Réunion du 11 septembre 2012 à 15h00
Logement — Discussion d'un projet de loi en procédure accélérée

Photo de Claude Bérit-DébatClaude Bérit-Débat, rapporteur :

Chacun d’entre nous peut le constater dans son département et les chiffres le prouvent.

La subvention unitaire de l’État pour un logement social en PLUS, ou prêt locatif à usage social, a été divisée par dix entre 2002 et 2012, passant de 6 000 euros à 600 euros, tandis que la subvention unitaire pour un PLAI, ou prêt locatif aidé d’intégration, était réduite de 15 000 euros à 9 600 euros. Je le répète, les chiffres parlent d’eux-mêmes. Le niveau des subventions des collectivités territoriales est ainsi aujourd’hui équivalent, voire bien souvent supérieur, à celui des subventions de l’État ! Je ne citerai qu’un seul chiffre : les subventions des collectivités territoriales pour un PLUS atteignent en moyenne 7, 7 % du montant de l’opération, contre seulement 2, 7 % pour les subventions de l’État !

Un autre élément doit nous conduire à relativiser l’effort de construction de logements sociaux entrepris au cours des dernières années : quel type de logements sociaux a-t-on en effet construit ? Il apparaît que l’augmentation de la construction de logements sociaux entre 2002 et 2011 s’explique, pour près de la moitié d’entre eux, par le développement des PLS, les prêts locatifs sociaux. Ces derniers représentent par ailleurs près de 35 % des logements sociaux financés en 2011.

Il ne s’agit pas de remettre en cause l’existence des PLS, qui constituent une réponse à certains besoins, notamment dans les zones tendues. Force est de constater cependant que l’effort de construction n’a pas été orienté en priorité vers les logements les plus sociaux.

Face à cette grave crise du logement, le Président de la République et le Gouvernement ont pris des engagements forts. Le Président de la République a ainsi fixé un objectif de construction de 2, 5 millions de logements sur l’ensemble du quinquennat, dont 150 000 logements sociaux par an.

La commission des affaires économiques salue ces objectifs ambitieux, qui doivent contribuer à résoudre la crise du logement. Elle se réjouit également des premières mesures mises en œuvre au cours de l’été par le Gouvernement.

Je pense tout d’abord au décret du 20 juillet 2012, qui encadre l’évolution des loyers à la relocation. Dans le cadre de la discussion, en décembre 2011, du projet de loi renforçant les droits, la protection et l’information des consommateurs, le Sénat avait en effet adopté, sur l’initiative de la commission des affaires économiques, et plus particulièrement de son rapporteur, Alain Fauconnier, un dispositif d’encadrement de l’évolution des loyers à la relocation.

Je pense également à l’augmentation des taux de la taxe sur les logements vacants, introduite sur l’initiative de notre collègue Jacques Mézard dans le collectif budgétaire de l’été.

Je pense enfin au relèvement du plafond du livret A, qui contribuera à soutenir l’effort de construction de logements sociaux.

D’autres mesures sont également urgentes. Au cours des nombreuses auditions que j’ai effectuées sur le projet de loi, une mesure a émergé : la réforme de la taxation des plus-values immobilières réalisées sur les terrains nus constructibles. La commission des affaires économiques estime qu’il est urgent qu’une fiscalité progressive soit mise en place pour ce type de terrains, afin de décourager la rétention foncière – et je sais que cette position est partagée bien au-delà des travées de la majorité sénatoriale.

Le projet de loi relatif à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social que nous examinons aujourd’hui s’intègre pleinement dans la politique ambitieuse annoncée par le Gouvernement en matière de logement.

Il constitue, comme vous le savez tous, la traduction législative de deux engagements forts du Président de la République, lesquels ont été validés par nos concitoyens le 6 mai dernier.

Il comprend ainsi trois volets, qui viennent d’être présentés par Mme la ministre.

Le titre Ier prévoit un cadre juridique pour la cession gratuite de terrains de l’État ou de ses établissements publics afin de construire du logement social.

Le titre II comprend plusieurs dispositions renforçant le dispositif de l’article 55 de la loi SRU, notamment par le biais du relèvement à 25 % du taux obligatoire de logements sociaux et de la multiplication par cinq des pénalités contre les communes ne respectant pas leurs obligations.

Le titre III, dont l’examen a été délégué à la commission du développement durable et qui sera évoqué après moi par Philippe Esnol, vise à modifier la loi relative au Grand Paris.

Nous ne pouvons que nous réjouir, mes chers collègues, que ce projet de loi s’inspire largement de réflexions du Sénat.

En février 2012, à l’occasion du débat sur le projet de loi relatif à la majoration des droits à construire, le Sénat a ainsi adopté un dispositif de cession gratuite des terrains de l’État, sur l’initiative de la commission des affaires économiques, et plus précisément de son rapporteur, notre ancien collègue Thierry Repentin, aujourd’hui ministre. Le premier volet du projet de loi s’inspire du dispositif adopté à cette occasion.

En juin 2011, le président Jean-Pierre Bel et les membres du groupe socialiste avaient déposé une proposition de loi visant à faire du logement une priorité nationale, qui comprenait plusieurs dispositions renforçant les dispositions de l’article 55, dont le relèvement à 25 % du taux obligatoire de logements sociaux et le renforcement des sanctions contre les communes récalcitrantes.

Cette remarque étant faite, je ne vous surprendrai pas en vous indiquant que la commission des affaires économiques soutient pleinement le projet de loi.

Au terme de mes travaux en tant que rapporteur, notamment de la quinzaine d’auditions que j’ai réalisées et qui m’ont permis de rencontrer les différents acteurs de la politique du logement – élus locaux, bailleurs sociaux, professionnels, associations –, ma conclusion est claire : ce texte est salué par tous les acteurs du logement. Ces derniers considèrent en effet que ce projet de loi est le premier signe de la mobilisation de l’État en faveur d’une politique du logement ambitieuse. Mais ils approuvent également unanimement les deux grands volets du texte.

Ainsi, en ce qui concerne le dispositif de cession gratuite des terrains publics, afin de construire du logement social, la commission des affaires économiques estime qu’il s’agit tout d’abord d’une mesure symbolique forte, illustrant l’exemplarité de l’État. Mais il s’agit également d’une disposition qui peut être très efficace sur le terrain. À cet égard, je vous rappelle que, entre 2008 et 2011, près de 20 % des logements ont été construits en Île-de-France sur du foncier public.

Le Gouvernement projette la réalisation de près de 110 000 logements sur le foncier public entre 2012 et 2016. Cette disposition permettra de débloquer certains projets de construction de logements sociaux – nous connaissons tous des exemples, sur nos territoires respectifs, de projets bloqués – et d’augmenter la capacité de financement des logements sociaux par les bailleurs.

La commission des affaires économiques se félicite de l’application du dispositif de cession gratuite aux établissements publics de l’État, dont certains disposent d’un foncier inutilisé important qui pourrait être mobilisé pour la construction de logements sociaux.

S’agissant ensuite du renforcement des dispositions de l’article 55 de la loi SRU, je souhaite tout d’abord souligner que cet article est aujourd’hui beaucoup moins clivant que par le passé. Les débats parlementaires de l’an 2000 et les anathèmes utilisés alors au sein de cet hémicycle paraissent bien lointains.

Je me rappelle d’ailleurs avoir assisté en 2008, alors que je venais d’être élu sénateur, à la discussion sur le projet de loi Boutin. La Haute Assemblée avait alors refusé, notamment sur l’initiative de notre ancien collègue Dominique Braye, rapporteur du texte au nom de la commission des affaires économiques, que l’accession sociale à la propriété soit intégrée au sein du décompte des logements sociaux. Le Sénat a alors marqué son attachement aux dispositions de l’article 55 de la loi SRU.

Le bilan de l’article 55 est aujourd’hui très largement salué : alors que les objectifs de construction étaient de 200 000 logements sociaux, plus de 310 000 ont été construits sur le territoire des communes soumises à cet article.

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