Pour autant, nous estimons qu’il est important que le Sénat puisse en débattre.
Cet amendement vise à réduire progressivement les exonérations de cotisations mentionnées à l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale à raison de 20 % par an, jusqu’à extinction complète de ce dispositif. Il s’agit, vous l’avez compris, des « exonérations Fillon », du nom du ministre qui les a instaurées.
Pour mémoire, ces exonérations sont présentées comme des mesures incitatives à l’emploi. Nous contestons bien entendu cette idée et je rappellerai volontiers que la Cour des comptes a qualifié ces exonérations, à de très nombreuses reprises, de « trappes à bas salaires ». Effectivement, les entreprises qui voudraient réduire le montant total de leurs cotisations patronales sont incitées à contenir les rémunérations de leurs salariés, puisque plus les salaires sont faibles, moins les employeurs cotisent !
Comment espérer, dans cette situation, que les salariés puissent obtenir par la voie de négociations de véritables revalorisations salariales ? Pour eux, c’est la double peine : ils sont tout d’abord plongés dans la précarité et ensuite victimes du sous-financement de la sécurité sociale. Au regard de cette situation, qui est factuelle et objective, je dois vous dire, monsieur le ministre, ma déception à la lecture l’annexe 5 de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale qui présente ces exonérations générales comme une mesure destinée à « favoriser l’emploi des salariés peu qualifiés, en diminuant le coût du travail ». Ce faisant, vous faites vôtre l’idée que nous combattons, avec de nombreuses organisations syndicales : le coût du travail serait trop important en France et il faudrait le réduire pour relancer l’emploi.
Ces exonérations, monsieur le ministre, plongent les salariés les plus modestes dans un cercle vicieux. Aujourd’hui, 10 millions de salariés voient leurs salaires gelés et maintenus en dessous du seuil au-delà duquel l’exonération est supprimée. Ne pas abroger ce dispositif revient, au final, à leur interdire toute progression de salaire.
J’ajoute que le coût de ces exonérations est énorme pour les comptes sociaux. L’annexe 5 que je viens de citer l’évalue à plus de 20 milliards d’euros, qui manquent, par exemple, pour financer la prise en charge de la dépendance, supprimer les franchises médicales, voire rembourser une partie de la dette sociale et arracher ainsi notre régime de protection sociale aux griffes des spéculateurs entre lesquelles il se trouve actuellement, précisément en raison de son financement défaillant.