Intervention de Laurence Cohen

Réunion du 9 octobre 2012 à 14h30
Bisphénol a — Article 1er

Photo de Laurence CohenLaurence Cohen :

Nous l’avons déjà dit, nous souscrivons au principe de l’interdiction du BPA dans les contenants de produits alimentaires, au titre du principe de précaution. Si l’utilisation d’une composante chimique ou organique peut avoir des conséquences sur la santé, alors les pouvoirs publics doivent prendre les mesures qui s’imposent pour éviter des crises sanitaires, qui ne sont ailleurs pas sans conséquence sur l’environnement, l’économie, voire la démocratie.

Comme d’autres collègues, je souhaite que le Gouvernement puisse se pencher prochainement sur les phtalates ou sur l’huile de palme. En raison de son faible coût, cette dernière est la plus utilisée par les industriels de l’agroalimentaire. Elle est aussi l’une des plus dangereuses pour la santé des consommateurs et son mode de production cause la destruction de la forêt tropicale et entraîne la fragilisation de l’écosystème local.

Mais revenons au BPA. Je dois l’avouer, bien que partageant l’objet de la présente proposition de loi, le groupe CRC aurait souhaité une application plus rapide du texte qui va être adopté. À l’occasion de l’examen de cette proposition de loi par la commission des affaires sociales, nous nous sommes d’ailleurs abstenus sur l’amendement présenté par notre rapporteur qui tendait à reporter la suspension à 2015.

Nous avons entendu les arguments développés tant par Patricia Schillinger que par le Gouvernement relatifs aux conséquences de la longueur de la navette parlementaire sur l’application de la loi. Il aura en effet fallu attendre plus d’un an pour qu’un texte adopté à la quasi-unanimité par l'Assemblée nationale soit inscrit à l’ordre du jour du Sénat. Je vous laisse imaginer, mes chers collègues, quelles en seront les conséquences, prévisibles d’ailleurs, pour les décrets d’application.

Nous savons pertinemment que la question de l’emploi est posée. Un changement trop radical de législation aurait sans doute pu avoir des conséquences néfastes pour les entreprises et les salariés. Mais comment mettre en balance la situation de l’emploi et une question de santé publique ? Dilemme résolu par la commission des affaires sociales, qui a fait le choix d’entériner le rapport.

Pour autant, il nous semble que depuis 2010 les industriels, soucieux de maintenir l’emploi et la production, auraient dû s’engager dans une recherche active en faveur de produits destinés à se substituer au BPA. D’ailleurs, certaines recherches ont débuté et, pour un certain nombre d’usages, de possibles substituts existent. Ne cachons pas que ces derniers présentent l’inconvénient d’être légèrement plus chers que les produits qui sont fabriqués à base de BPA.

Dans la majorité des cas, hélas ! les recherches ne sont pas concluantes, voire n’ont pas commencé. Je veux répéter en cet instant que la recherche industrielle doit être encouragée ; elle doit disposer des moyens adéquats, bénéficier d’une impulsion au plus haut niveau et être soumise à des évaluations régulières et indépendantes.

La situation que nous vivons est d’ailleurs symptomatique du choix de société opéré, qui privilégie en permanence la rémunération de la rente et de l’actionnariat par rapport au travail, à la rénovation de l’outil industriel et à la recherche, n’en déplaise à M. Grosdidier…

Mes chers collègues, comme vous, j’ai reçu de nombreux courriers, dont l’un émanait d’un groupe industriel français bien connu pour commercialiser des salades déjà lavées et découpées. Au cours de l’exercice 2011-2012, ce groupe a fait un chiffre d’affaires de 1 767 millions d’euros, soit une croissance de 2, 4 % par rapport à l’année précédente. Selon l’une de ses communications, il a pu proposer à ses actionnaires une revalorisation des dividendes correspondant à 25% de son résultat net. Dommage que cette bonne santé financière n’ait pas été mise à profit pour faire bénéficier l’ensemble des personnels d’une revalorisation salariale et pour effectuer un important investissement dans le domaine de la recherche !

Au-delà des questions soulevées par l’application de la présente proposition de loi, on le constate, nous devons travailler collectivement afin d’inventer un autre modèle économique et industriel, plus respectueux de l’environnement et des besoins humains.

Selon nous, la constitution d’un pôle public financier, destiné à financer les besoins de modernisation pour permettre aux entreprises françaises d’initier cette mutation, est plus que souhaitable ; elle est nécessaire.

Pour l’heure, nous voterons l’article 1er, car les produits alternatifs au bisphénol A doivent, comme cela a été souligné, être testés avec le recul suffisant, mais sans pour autant que soient allongés les délais, comme certains le préconisent. Pour nous, 2015 est le délai maximal auquel notre groupe peut souscrire.

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