Intervention de Marisol Touraine

Réunion du 9 octobre 2012 à 14h30
Bisphénol a — Article 1er, amendement 25

Marisol Touraine, ministre :

Je serai brève pour ne pas risquer la redondance après l’excellente argumentation de Mme la rapporteur, que le Gouvernement partage pleinement, et les propos tenus lors de la discussion générale.

L’amendement n° 25 vise à étendre la mesure envisagée aux dispositifs médicaux. Je voudrais insister sur ce point très important, qui fera l’objet de discussions ultérieures. Le bisphénol A est aujourd’hui utilisé dans de nombreux dispositifs médicaux, notamment des respirateurs, des instruments à usage unique, des tubulures ou des poches de perfusion.

Nous n’avons pas aujourd’hui connaissance d’alternatives satisfaisantes pour ces produits. Il nous faut en effet trouver des matériaux qui fassent preuve à la fois de transparence, de souplesse et de résistance à la stérilisation.

Un travail a donc été engagé par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l’ANSM, avec les industriels, pour les accompagner dans la recherche d’un produit de substitution.

La Commission européenne a été saisie. Elle doit remettre un rapport avant la fin de l’année, qui nous permettra d’évaluer les risques existants et de constituer un répertoire des dispositifs en circulation. Ce travail nous permettra ensuite, y compris au niveau strictement national si nous le jugeons utile, d’engager des démarches en vue de l’interdiction du bisphénol A dans les dispositifs médicaux, dès lors que des produits de substitution fiables seront disponibles.

Toutefois, nous ne sommes pas en mesure de le faire aujourd’hui, compte tenu de l’absence d’alternatives crédibles. C’est pourquoi je vous invite à retirer cet amendement, madame la sénatrice. Il ne faut surtout pas y voir un signe de mauvaise volonté du Gouvernement à l’égard de la démarche du groupe écologiste. Nous avons vraiment la volonté de travailler sur ce problème, mais, aujourd’hui, nous ne sommes pas en mesure d’apporter une réponse technique satisfaisante pour que votre amendement, s’il est maintenu, puisse être mis en œuvre.

Les amendements n° 1 rectifié, 17 rectifié, 10 et 22 rectifié visent à modifier la rédaction du texte, de manière à substituer les mots « produit à base de » aux mots « comportant du ».

Je voudrais rappeler que la rédaction qui a été retenue dans la proposition de loi consiste à prendre en compte le produit tel qu’il se présente au moment de la consommation, et non simplement au stade de la production. Or, quand on parle d’un conditionnement « produit à base de », on se réfère à l’objet tel qu’il se présente au moment où il sort de la chaîne de production, sans tenir compte de ses conditions éventuelles de stockage, de transport ou de transformation.

Cette rédaction nous semble donc insuffisamment protectrice, raison pour laquelle j’émets un avis défavorable sur ces amendements.

En ce qui concerne l’amendement n° 6 rectifié bis, je ne peux que donner un avis défavorable : ce qui n’est pas bon pour le consommateur français ne saurait être considéré comme acceptable pour le consommateur étranger.

L’amendement n° 7 rectifié bis, également présenté par M. Paul, nous semble obéir à la même logique. Dès lors que nous considérons que les biberons sont dangereux, nous ne pouvons pas accepter de ne pas protéger le plus vite possible, dans la mesure où cela est réalisable, les nourrissons.

En conséquence, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

L’amendement n° 14 de M. Philippe Adnot s’inscrit dans le prolongement des amendements rédactionnels précédents, puisqu’il vise à remplacer les mots « conditionnement, contenant » par les mots « matériau d’emballage destiné à entrer en contact direct avec des denrées alimentaires ». Nous ne souhaitons pas qu’il soit adopté, car nous pensons que le fait de limiter le champ d’application de la présente proposition de loi aux seuls matériaux d’emballage constituerait une restriction excessive. Il s’agit pour nous d’aller au-delà et d’être même des précurseurs en Europe.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Par l’amendement n° 16 rectifié, M. Dériot pose le problème des dates. Nous avons déjà eu une discussion sur ce sujet. Cet amendement, bien qu’il soit plus précis que d’autres, va aussi dans le sens d’une extension du délai d’entrée en vigueur de l’interdiction pour les produits destinés aux enfants. Nous n’y sommes pas favorables.

L’amendement n° 12 de M. Adnot aboutirait, là encore, s’il était adopté, à renverser la charge de la preuve, en dispensant les industriels de leur obligation de démontrer l’innocuité des produits.

Le Gouvernement est défavorable à cette démarche.

L’amendement n° 8 de M. Adnot, qui rejoint les amendements n° 11 et 18 rectifié bis, obéit à la même logique que certains des amendements précédents. D’une part, nous ne souhaitons pas repousser l’entrée en vigueur de ce texte, parce que nous considérons aujourd’hui que les industriels sont en mesure de répondre aux nouvelles normes que vous vous apprêtez, je l’espère, à leur fixer. D’autre part, nous ne voulons pas inverser la charge de la preuve au profit des industriels.

En conséquence, l'avis est défavorable.

Les amendements identiques n° 4, 15 rectifié et 24 rectifié concernent aussi un problème de calendrier. Je me contenterai d’ajouter à ce stade, notamment à l’intention de Mme Dini, qui a évoqué plusieurs études un peu anciennes, que les industriels ont été informés et ont pris conscience de la nécessité de rechercher des produits de substitution. Aujourd’hui, ils déclarent très majoritairement et très massivement qu’ils sont en mesure de satisfaire à cette nouvelle obligation.

J’émets donc un avis défavorable sur ces trois amendements identiques.

L’amendement n° 27, de Mme Leila Aïchi, va en sens inverse. Je vais émettre un avis défavorable, et j’en suis vraiment désolée, madame la sénatrice.

Il n’entre pas dans notre intention de donner, par principe, du temps aux industriels. Il s’agit de respecter la logique du dispositif législatif initial, qui donnait à ces derniers un délai de deux ans pour s’adapter. Ce délai peut être respecté dans les mêmes conditions dès lors que la navette entre l’Assemblée nationale et le Sénat a pris un peu de retard. Il me semble que nous avons trouvé un compromis qui me paraît honnêtement acceptable par tous les acteurs.

En ce qui concerne l’amendement n° 2 rectifié, je salue l’esprit de synthèse – ou de compromis – de son auteur, M. Gilbert Barbier. Nous pourrions en effet trouver des points de rencontre. Mais, au fond, il y a déjà eu un report, dans la mesure où nous avons souhaité tenir compte du retard pris dans la transmission du texte entre l’Assemblée nationale et le Sénat, lequel s’explique par diverses raisons, le processus électoral n’étant pas une des moindres.

Le report d’un an prévu dans le texte nous semble donc suffisant et l’avis sur l’amendement est défavorable.

J’en viens à l’amendement n° 9. Monsieur Adnot, ce n’est pas parce que nous sommes en période de transition que nous sommes pour autant dispensés d’engager un processus d’avertissement sanitaire en direction des populations à risque. L’absence d’information même dans cette période transitoire serait inacceptable.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Enfin, l’amendement n° 5 rectifié revient, lui aussi, à restreindre l’obligation d’avertissement sanitaire, cette fois aux seuls produits fabriqués après publication du décret.

Je comprends la démarche qui consiste à dire que nous ne pourrons sans doute pas traiter de la même manière les produits déjà existants et ceux qui vont arriver sur le marché. Il me semble toutefois que ce sera au décret d’application de traiter ce problème et qu’il n’est pas utile d’intervenir à ce stade par la loi. Je m’efforcerai de proposer des conditions d’application adaptées lors de la rédaction du texte réglementaire.

En conséquence, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.

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