Intervention de Jacques Berthou

Réunion du 19 novembre 2012 à 21h30
Débat sur les inondations dans le var et le sud-est de la france en novembre 2011

Photo de Jacques BerthouJacques Berthou :

Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, notre débat de ce soir fait suite aux travaux de la mission commune d’information sur les inondations qui se sont produites dans le sud-est de la France au cours des deux dernières années, représentatives d’une évolution constante de la fréquence de ces événements qui, d’exceptionnels, sont devenus de plus en plus récurrents.

Tout d’abord, comme l’ensemble de mes collègues, je tiens à saluer la qualité des travaux accomplis par la mission commune d’information, en particulier par son rapporteur, M. Pierre-Yves Collombat, et son président, M. Louis Nègre.

Il était nécessaire que le Sénat, en tant que représentant des territoires, se saisisse de cette question pour tirer toutes les conséquences des événements survenus en 2010 et en 2011.

MM. Collombat et Nègre sont tous deux issus de territoires affectés par ces catastrophes. Leur investissement personnel lors de ces épisodes, puis au cours des travaux de la mission commune d’information, témoigne, à mon sens, du lien indéfectible qui unit un élu à son territoire.

La mission commune d’information a établi avec précision, en auditionnant soixante-quatre de leurs acteurs, les faits qui se sont déroulés au cours de cette période.

Comme M. le rapporteur l’a souligné, les inondations survenues respectivement en juin 2010 et en novembre 2011 ne sont pas comparables.

Les 15 et 16 juin 2010, plus de 300 millimètres d’eau en moyenne sont tombés, dans le Var, sur un territoire de 40 à 50 kilomètres carrés autour de Draguignan. Il s’est agi d’un événement limité dans le temps – quelques heures – comme dans l’espace.

En revanche, les inondations qui se sont déroulées du 2 au 8 novembre 2011 correspondent à des phénomènes plus classiques, plus prévisibles, dont la gestion peut être plus aisément organisée en amont.

La violence et l’intensité des inondations de juin 2010 rendent ce type de phénomène imprévisible. Il n’est pas nécessaire que je rappelle les multiples dégâts causés par cet événement, qui a touché des centaines de familles et sinistré l’économie du département du Var, en particulier dans les zones agricoles, à hauteur de 1, 2 milliard d’euros.

Ces deux types d’inondations, clairement distingués par le rapport de la mission commune d’information, relèvent de dispositifs de prévention bien différents, même si, aux yeux de nos concitoyens, ils peuvent apparaître similaires.

La mission commune d’information a abordé de très nombreux sujets, s’agissant notamment de la gestion de l’immédiat après-crise et des insuffisances des régimes d’indemnisation. Pour ma part, j’aimerais insister particulièrement sur trois des vingt-deux préconisations qu’elle a formulées.

Tout d’abord, l’analyse des événements a mis en exergue des failles dans les dispositifs de gestion de crise, pour lesquelles le rapport propose des remèdes.

Comment améliorer le dispositif de prévention des inondations et d’alerte ? Dans le sud-est du pays, les pouvoirs publics se doivent d’appliquer une politique de protection des territoires et des populations en poursuivant la mise en œuvre de certains équipements techniques, tels que des radars ou des stations de surveillance des cours d’eau.

Oui, il est possible d’améliorer les dispositifs de gestion de crise, mais cela revient parfois à procéder à de petits aménagements, qui répondent conjoncturellement à l’ampleur de l’émotion provoquée par les inondations.

Comme le rapporteur, je crois qu’il faut intégrer ces réflexions dans une logique globale d’aménagement du territoire, en changeant notre vision des faits. Une politique d’aménagement territorial aux objectifs précis, dotée de moyens financiers et d’une gouvernance, permettrait, à terme, d’aborder l’avenir avec plus de sérénité, en protégeant les territoires inondables pour mieux les habiter.

L’exemple des Pays-Bas, qui ont consacré 1 % de leur PIB à la protection contre les inondations après la catastrophe de 1953, montre que des investissements massifs peuvent diminuer, pour l’avenir, les coûts liés à ces catastrophes naturelles et permettre aux habitants de vivre dans les zones à risques avec moins de peur et moins d’inquiétude.

Je veux également rappeler le souvenir des inondations de Nîmes, en octobre 1988. Aujourd’hui, près de vingt-cinq ans après cet événement, les travaux d’aménagement viennent juste de se terminer. En la matière, il est nécessaire que les investissements s’inscrivent dans le temps. Le département du Gard a multiplié les initiatives visant à améliorer la prévention des risques, en organisant notamment de grandes campagnes de sensibilisation et des formations destinées aux élus.

J’ai le sentiment qu’il faut qu’un territoire ait subi une inondation pour qu’il en tire toutes les conséquences pour l’avenir, comme si seul le traumatisme infligé par un tel événement pouvait susciter une vision globale de cette problématique.

Par ailleurs, la mission commune d’information propose de rendre plus rapide la réparation des dommages pour les collectivités territoriales. Dans mon département, l’Ain, des pluies torrentielles, avec des précipitations de l’ordre de 1 millimètre d’eau en une heure, ont provoqué des dégâts considérables. C’est dire si je soutiens cette recommandation formulée par la mission commune d’information, qui va dans le sens souhaité par les élus concernés.

En la matière, le pacte de confiance entre l’État et les collectivités territoriales doit être solide. Actuellement, le FCTVA peut verser des remboursements anticipés dans l’année pour les travaux liés à la survenue d’une catastrophe naturelle. La mission commune d’information préconise de rendre automatique un tel remboursement dans l’année pour les travaux réalisés dans des communes déclarées en état de catastrophe naturelle : c’est une bonne recommandation. En rendant plus rapide la réparation des dommages pour les collectivités territoriales, on permettrait à des communes de relancer plus facilement toutes sortes d’activités locales, notamment économiques.

Par ailleurs, on peut regretter que l’État semble se désengager du financement de la prévention. La lutte contre les inondations nécessite l’engagement de l’ensemble des acteurs concernés : l’État, bien sûr, les collectivités territoriales et les populations. Étant donné l’incidence financière des préconisations formulées, je n’ignore pas que tous les travaux nécessaires ne pourront être réalisés immédiatement : ils devront être programmés et effectués selon un échéancier permettant à tous les acteurs de s’engager financièrement sur plusieurs années.

Enfin, je tiens à souligner le rôle majeur que sont susceptibles de jouer les populations à l’occasion de ce type de catastrophe naturelle. Elles doivent être associées en toute transparence au processus de prévention ou d’aménagement. Pour cela, les pouvoirs publics doivent leur transmettre en amont des communications lisibles et compréhensibles et ne pas hésiter à recourir davantage aux volontaires, qui, nombreux lors de ces crises, ne sont pas utilisés de manière efficiente. Il convient de leur donner les moyens d’agir efficacement, …

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