J'ai souhaité vous faire un point sur l'examen par l'Assemblée nationale, la semaine dernière, de la proposition de loi visant à assurer l'aménagement numérique du territoire que le Sénat avait adoptée en première lecture au mois de février 2012. Elle avait été inscrite par le groupe UDI dans son ordre du jour réservé. Une précision de procédure : j'ai été invité par le président de la commission des affaires économiques, François Brottes, à présenter aux députés ce texte dont je suis l'auteur avec Philippe Leroy.
Comme vous le savez, la discussion de la proposition de loi a conduit à son rejet par l'Assemblée nationale. Mais je voudrais insister sur certaines positions assez dures prises par le gouvernement. Je n'ai jamais pensé que ce texte était la solution définitive et devait être adopté tel quel, mais j'estimais qu'il pourrait être un véhicule législatif susceptible d'être corrigé et complété. Les mots choisis par la ministre en charge de l'économie numérique sont cependant sans aucune concession. Elle a déclaré qu'il s'agissait d'un texte « idéologique et court-termiste », qui était déjà « obsolète » compte tenu du changement de politique voulu par le gouvernement. Nous n'observons pourtant pas vraiment de changement pour l'instant. La ministre a opposé au texte d'autres arguments auxquels nous ne pouvons pas souscrire. Elle a ainsi mis en doute sa solidité juridique, alors que nous avions pris soin de recueillir l'avis de l'autorité de la concurrence sur les aspects de compatibilité avec le droit communautaire. Elle lui a reproché également de ne pas comporter de volet relatif au financement. Mais vous vous souvenez que ce volet financier, qui existait bien dans le texte initial de la proposition de loi, a été rejeté par la majorité du Sénat, compte tenu de la période pré-électorale dans laquelle nous étions, au mois de février dernier.
Le gouvernement a donc déposé des amendements de suppression sur tous les articles de la proposition de loi. Même sur ceux qui ne posaient pas de problème ou qui résultaient d'amendements du groupe socialiste du Sénat, tel que celui qui prévoyait l'équipement des immeubles nouveaux en gaines pour fibre optique, ou celui qui faisait obligation aux opérateurs de préciser dans leurs réponses aux appels d'offres l'usage envisagé pour les réseaux qu'ils se proposent de déployer. La ministre a soutenu ces amendements de suppression avec des arguments parfois très proches de ceux de son prédécesseur. Je dois avouer mes craintes quant à l'influence des opérateurs sur les ministres successifs en charge du numérique successifs, quelle que soit leur couleur politique.
Au final, le gouvernement a renvoyé le débat à la mission en cours, qui doit rendre ses conclusions au mois de décembre. Je veux bien que l'on attende, mais ce ne sera pas possible encore très longtemps. Le président de la République a promis le très haut débit pour tous à l'horizon de dix ans, c'est-à-dire un calendrier encore plus court que celui de son prédécesseur. Si l'on veut avoir une chance d'atteindre cet objectif, tout le monde doit s'y mettre sans plus tarder.
J'ajoute, pour que votre information soit complète, que les députés verts ont reconnu quelques qualités à cette proposition de loi, notamment celle de « remettre les collectivités territoriales au centre du dispositif », mais se sont néanmoins abstenus. Les députés communistes ont retenu la même position. Les députés UMP ont voté pour l'adoption du texte. Les députés socialistes ont suivi le gouvernement, et voté contre. J'espère que, lorsque le Sénat se saisira à nouveau du sujet, nous éviterons le clivage droite-gauche et que nous saurons retrouver l'unanimité qui avait présidé à nos débats au mois de février dernier. J'ai eu l'occasion de dire à la ministre que je serais prêt à la soutenir si ses propositions allaient dans le bon sens.