Intervention de Jean-Marie Bockel

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 28 novembre 2012 : 1ère réunion
Loi de finances pour 2013 — Mission défense - programme « soutien de la politique de la défense» - examen du rapport pour avis

Photo de Jean-Marie BockelJean-Marie Bockel, co-rapporteur du programme 212 :

Dans un cadre général de redressement des finances publiques, le programme 212 porte l'essentiel des réductions de dépenses opérées en crédits de paiement sur la mission « Défense ».

Pour mieux situer leur ordre de grandeur, les crédits du programme 212 représentent moins de 10 % de ceux de la mission : 3,51 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 2,85 milliards d'euros en crédits de paiement.

Ces derniers sont en baisse de 8,8 %, hors pensions, et les autorisations de programme ne progressent de 2,6 % que par la modification d'une règle comptable qui veut qu'à partir de cette année, on engage la totalité d'une tranche fonctionnelle en début de programme. En neutralisant cet effet, les engagements seraient également en diminution. Les réductions de dépenses portent naturellement en priorité sur les infrastructures, il est en effet beaucoup plus difficile de réduire sur le court terme des dépenses de personnel. Celles-ci progressent de 3,9 %. Les dépenses de fonctionnement connaissent une baisse de 5,8 %. Ainsi ce sont les crédits de titre 5 qui concentrent les réductions (- 19 %) et, en conséquence, les investissements d'infrastructures des actions 04 (politique immobilière) et 10 (restructuration : plan de stationnement). C'est dans ces budgets qu'ont été opérées les coupes les plus sévères. Si l'on compare à périmètre constant les crédits de paiement correspondant, on constate une diminution de l'ordre de 200 millions d'euros, dont la plus large part, 186 millions d'euros, porte sur les travaux destinés au nouveau plan de stationnement.

Quelle a été la méthode employée ? D'abord déterminer des priorités. La réduction des plans d'engagement a été menée par le SGA en lien avec l'État-major des armées selon les principes suivants :

- premièrement, l'obligation de préserver les conditions de vie et de travail du personnel, ce qui a conduit à maintenir les ressources consacrées au maintien en condition des infrastructures et au logement familial ;

- deuxièmement, faire porter l'effort principal sur des opérations liées au nouveau plan de stationnement et aux réorganisations ;

- troisièmement, faire également porter l'effort sur certaines opérations à impact capacitaire comme le décalage des programmes d'accueil de nouveaux matériels, en veillant à une cohérence pour s'assurer de la disponibilité des infrastructures lors de la livraison des armements. Par exemple, il est prévu de décaler de six mois le programme d'infrastructure pour l'accueil des frégates multi-mission FREMM.

Ensuite il a fallu anticiper dès la gestion de la loi de finances pour 2012 en annulant des autorisations d'engagement. Dès l'été 2012, le ministère a gelé les autorisations d'engagement de nombreuses opérations d'infrastructure à hauteur de 393 millions d'euros et, en 2013, à hauteur de 351 millions. Ce sont ainsi 744 millions de dépenses d'infrastructures qui auront été gelées en deux ans, ce qui montre l'ampleur des ajustements opérés.

Lors de son audition devant votre commission, le secrétaire général pour l'administration a estimé la réduction des crédits à 160 millions d'euros dans la mesure où il est prévu d'abonder les crédits en puisant jusqu'à 200 millions d'euros dans les recettes du CAS « gestion du patrimoine immobilier » - mais encore faut-il que ces recettes soient au rendez-vous. Nous avons trop été habitués aux surestimations en ce domaine. Or il y a un risque non négligeable que ces ressources ne soient pas disponibles. D'une part parce que le CAS ne disposera d'ici la fin de l'année que de 95 millions d'euros à la suite d'opérations réalisées en 2012 et qu'il faudra donc réaliser en temps utile, c'est-à-dire avant septembre 2013, 105 millions d'euros de cessions. C'est pour l'essentiel sur l'immobilier parisien disponible à la vente (la caserne Reuilly et l'îlot Penthemont-Bellechasse) que pourra être réalisé ce montant. D'autre part, parce que les cessions sont actuellement suspendues, les acquéreurs attendant l'entrée en vigueur de la loi sur la mobilisation du foncier public en faveur du logement social pour ajuster leurs offres et connaître le montant des décotes qu'ils pourront obtenir. Il n'est donc pas certain, en raison des décotes mais aussi du calendrier, que le ministère puisse mobiliser les 200 millions d'euros attendus du CAS.

Je dirai quelques mots sur la mise en oeuvre du PPP Balard. Le chantier suit son cours sans retard apparent malgré une opération inattendue de dépollution pyrotechnique. Il reste cependant sous la menace du contentieux porté par la Ville de Paris au sujet de l'implantation d'un garage à bus de la RATP. Les recours devant la juridiction administrative ont suspendu le démarrage des travaux sur la Corne ouest qui devait accueillir la construction d'immeubles de rapport dont l'exploitation participait à l'équilibre du contrat de partenariat public-privé. A défaut, c'est le portage même de l'opération qui serait compromis. Il y a tout de même des chances raisonnables pour que les choses s'aplanissent d'ici juin 2013. Le ministre a souhaité demander un audit sur la soutenabilité financière de l'opération au contrôle général des armées et à l'inspection générale des finances dont nous aurons les résultats à la fin de l'année. L'enjeu sera aussi dans l'exécution de ce contrat. Cela suppose pour le ministère de mettre en place une cellule efficace, d'en assurer le suivi et de s'assurer de la qualité des prestations délivrées, car le partenariat ne se limite pas au simple portage d'une opération immobilière mais englobe la fourniture d'un grand nombre d'équipements et de prestations. C'est donc là un véritable enjeu. Le chantier principal devrait être achevé en août 2014.

Avant de conclure, je dirai quelques mots sur l'accompagnement économique des restructurations. Je reconnais les efforts du ministère de la défense, mais est-il le mieux outillé pour conduire une politique d'aménagement du territoire, au moment où on lui demande déjà des efforts considérables de réorganisation et de restructuration et beaucoup de sacrifices. Il y a peut-être des outils plus interministériels, de type DATAR ou autres, pour aider les collectivités locales impactées et aménager les territoires. Le ministère doit être associé car ce sont ses terrains qui sont cédés mais on lui en demande beaucoup. Est-il réellement en mesure de piloter cette politique sous tous ses aspects ? Je me pose la question.

En conclusion, je souhaiterais attirer l'attention de la commission sur l'importance des dépenses d'infrastructure qui vont peser sur la prochaine loi de programmation car il va falloir réaliser des dépenses très importantes avec l'arrivée de nouveaux équipements comme les sous-marins nucléaires. Des coupes comme celles opérées en 2012 et 2013 ne pourront pas être renouvelées chaque année. Il nous faudra donc veiller à ce que les reports successifs d'opérations ne nuisent pas au maintien en conditions opérationnelles de nos équipements et à ce que le niveau des crédits reste suffisant pour ne pas compromettre l'accueil des nouveaux armements. Si l'on souhaite réaliser des économies, il faudra probablement optimiser la politique immobilière et s'interroger sur les coûts de maintenance du parc immobilier, sur son dimensionnement, sur sa gestion. A défaut, la question de la révision du plan de stationnement risque de se poser de nouveau.

Pour ce qui me concerne, je donnerai un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Défense ».

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