Monsieur le sénateur, vous m’avez tout d’abord interrogé de manière globale en exprimant votre inquiétude face à l’évolution des aides et surtout face à cette fameuse convergence de ces dernières. Il s’agit effectivement d’un enjeu capital.
Ainsi, depuis le début de cette bataille, le combat que je mène s’appuie sur la conviction qu’un découplage total des aides, avec un taux unique à l’hectare pour l’Europe entière, constitue un risque majeur. §
Pour nous, tout l’enjeu est d’imposer la prise en compte de cet aspect du problème, tout en défendant, via le couplage des aides, les positions que vous avez évoquées concernant l’agriculture de montagne, et notamment le pastoralisme. Tous ces éléments seront pris en compte, ainsi que les indemnités de compensation du handicap, sans oublier, bien entendu, la prime à la vache allaitante. Nous ne lâcherons pas là-dessus !
Ensuite, sur la question des DPU, notamment pour ce qui concerne leur plafonnement, comme sur la prime aux premiers hectares, le véritable problème à l’échelle européenne est le suivant : à l’heure actuelle, il est très difficile d’opérer des transferts. Il y a quelques années, Michel Barnier a employé le système de la modulation des aides pour opérer le transfert d’une partie des aides consacrées aux céréales vers les productions fourragères et herbagères, donc vers l’élevage.
Avec la prime aux premiers hectares, nous allons procéder, en partie, à ce type de transfert, pour éviter que la perte de DPU d’une partie des exploitations de polyculture-élevage ne remette en cause leur viabilité économique même. Parallèlement, il nous faut assurer une nouvelle répartition des aides à l’échelle de notre pays. Là est l’enjeu de tout ce débat.
Concernant le plafonnement, j’ai déjà mentionné le véritable problème : certains pays s’y opposent d’une manière très claire. Voilà pourquoi, même si j’y suis pour ma part favorable, je n’ai pas axé la proposition de la France sur ce seul sujet, sachant que, au bout du compte, je me heurterai à de très fortes oppositions de la part d’un certain nombre de pays, notamment l’Allemagne.
Comment ce pays justifie-t-il cette position ? Dans les anciens Länder est-allemands, subsistent des exploitations héritées du modèle communiste, qui atteignent 1 000 à 1 500 hectares et sur lesquelles ont été mis en place des coopérateurs agricoles. Les Allemands considèrent donc que le plafonnement des aides à l’hectare reviendrait à remettre en cause des emplois dans ces territoires, et ils ne l’accepteront jamais ! Cette position a été très clairement réaffirmée par l’Allemagne.
Ainsi, nous sommes obligés d’envisager non pas seulement l’idée du plafonnement, mais aussi la dégressivité des aides. §C’est tout l’enjeu de la question des premiers hectares : parvenir à prouver qu’une telle dégressivité est possible et, surtout, qu’il est prématuré d’instituer un taux unique à l’hectare.
Au surplus, s’il était totalement découplé, ce taux unique conduirait à la spécialisation de grandes zones de production agricole à l’échelle de l’Union, en fonction de leurs avantages comparatifs. Cela, nous ne le voulons pas ! §