Intervention de Gérard Larcher

Réunion du 4 décembre 2012 à 16h00
Débat sur l'emploi la formation et la qualification des jeunes

Photo de Gérard LarcherGérard Larcher :

On a en fait recréé les emplois-jeunes, qui servent simplement, comme l’explique dans Le Monde d’hier un représentant de l’INJEP, à faire baisser les chiffres du chômage. J’estime pour ma part que ces emplois ont une certaine utilité, bien que j’aie de vrais doutes sur la réalité des effets d’une telle mesure.

Les contrats de génération, seconde mesure phare du Gouvernement, seront-ils plus efficaces ?

L’idée est plus séduisante : les jeunes pourront être embauchés dans le secteur marchand et les seniors qui les formeront pourront se maintenir dans l’emploi. Aujourd’hui, seulement 43, 5 % des personnes âgées de cinquante-cinq à soixante-quatre ans ont un emploi, même si cette proportion a progressé depuis six ans. Reste à connaître le public ciblé. S’agira-t-il de jeunes sans qualification ? Quel sera le coût réel du dispositif, estimé pour le moment à 2, 5 milliards d’euros par an ? Comment sera-t-il financé ? Il faudra, par ailleurs, que l’incitation à l’embauche soit suivie d’effets.

La réussite des contrats de génération dépendra concrètement du carnet de commandes des entreprises. S’il n’y a ni commandes ni croissance, ce type de contrat ne sera pas mis en œuvre. Il convient, me semble-t-il, d’instaurer une forme de continuité entre l’emploi des seniors et celui des jeunes et de favoriser la confiance des entreprises dans un retour de la croissance, laquelle n’est guère encouragée par les mesures gouvernementales.

Le contrat de génération doit donc faire partie d’une politique globale cohérente à l’égard des entreprises, qui ne peuvent être incitées à recruter d’un côté tandis que de l’autre leurs charges et leurs impôts augmentent.

L’OFCE, l’Observatoire français des conjonctures économiques, a publié des estimations montrant que la portée du dispositif paraît surestimée : le Gouvernement affiche un optimisme excessif en prévoyant la création de 500 000 contrats de génération sur le quinquennat, l’OFCE tablant sur 100 000 emplois créés, avec des effets d’aubaine significatifs.

En résumé, les deux mesures phares du Gouvernement, à savoir les emplois d’avenir et les contrats de génération, ne peuvent suffire à faire reculer le chômage des jeunes, car il ne s’agit pas de réformes de fond.

Par ailleurs, la continuité des mesures décidées devrait faire l’objet d’une véritable réflexion de notre part. En douze ans, on aura changé quatre fois de politique en matière de contrats, au gré des alternances, y compris internes au sein d’une même majorité, ce qui soulève un problème de lisibilité. Monsieur le ministre, vous et vos collaborateurs le savez bien, entre le vote d’un dispositif par le Parlement et son appropriation sur le terrain, il faut souvent de longs mois. Entre le temps des espérances et celui des réalités, les pertes en ligne sont souvent extrêmement importantes !

Les réformes structurelles qu’il faut avoir le courage d’engager sont d’abord celles du système éducatif et de la formation professionnelle, qui est une clé pour l’emploi.

Après avoir réformé l’enseignement supérieur, le président Sarkozy voulait s’attaquer au vaste chantier de la formation professionnelle. Afin d’étudier les suites à donner à la loi du 24 novembre 2009 relative à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie, il m’avait confié, au mois de janvier dernier, une mission sur notre système de formation professionnelle, s’articulant autour de quatre préoccupations majeures : « orienter de manière efficace la formation professionnelle vers ceux qui en ont le plus besoin, notamment les demandeurs d’emploi ; inciter les entreprises à mieux former leurs salariés en y consacrant les fonds adéquats – c’est l’une des clés de la compétitivité, celle-ci ne reposant pas uniquement sur le coût du travail – ; développer la formation professionnelle comme outil de promotion sociale ; créer les conditions d’une meilleure adéquation entre l’enseignement professionnel et les réalités du monde économique ».

Le rôle du système éducatif est essentiel. Il appartient à l’éducation nationale de développer des démarches systématiques d’aide et de soutien durant le cursus scolaire, car l’avenir du jeune – depuis quelques mois, je ressens encore plus qu’auparavant une telle réalité – se joue dès la grande section de maternelle et l’école primaire, en particulier avant le CE2.

Le ministre Vincent Peillon paraît partager ce point de vue, puisqu’il convient, selon lui, de concentrer tous les efforts sur l’école primaire et les apprentissages fondamentaux. C’est là que se trouve la racine du décrochage futur. Luc Chatel avait d’ailleurs mis en place – j’y reviendrai – des plateformes destinées à « rattraper » ceux qui avaient décroché. Il faut lutter avant tout contre l’illettrisme et l’échec scolaire.

Vous le savez tous, 15 à 20 % des écoliers arrivent au collège avec d’énormes difficultés de lecture et de compréhension.

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