Séance en hémicycle du 4 décembre 2012 à 16h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • d’avenir
  • jeunesse
  • l’orientation
  • qualification

La séance

Source

La séance est ouverte à seize heures cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

En application des articles L.O. 325 et L.O. 179 du code électoral, M. le président du Sénat a reçu de M. le ministre de l’intérieur une communication de laquelle il résulte que, à la suite des opérations électorales du dimanche 2 décembre 2012, Mme Anne Emery-Dumas a été proclamée élue sénateur de la Nièvre.

Au nom du Sénat tout entier, je lui souhaite une cordiale bienvenue parmi nous.

Mmes et MM. les sénateurs applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

M. le président du Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courrier en date du jeudi 29 novembre 2012, le texte d’une décision du Conseil constitutionnel qui concerne la conformité à la Constitution de la loi relative à la reconnaissance du 19 mars comme journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d’Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc.

Acte est donné de cette communication.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre, en application de l’article 8 de la loi n° 2010-237 du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010 :

- la convention entre l’État et OSEO relative au programme d’investissements d’avenir, action « Aide à la réindustrialisation » ;

- l’avenant n° 2 relatif à la priorité 2 de la mesure « Renforcement de la compétitivité des PMI et des filières industrielles stratégiques » à la convention passée entre l’État et OSEO relative au programme d’investissements d’avenir, action « Financement des entreprises innovantes – États généraux de l’industrie ».

Acte est donné du dépôt de ces documents.

Ils ont été transmis à la commission des affaires économiques et à la commission des finances.

Ils sont disponibles au bureau de la distribution.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Conformément aux dispositions de la loi organique n° 2010-837 et de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relatives à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution et en application de l’article L. 2111-16 du code des transports, M. le Premier ministre, par lettre en date du 3 décembre 2012, a demandé à M. le président du Sénat de lui faire connaître l’avis de la commission du Sénat compétente en matière de transports sur le projet de nomination de M. Jacques Rapoport à la présidence du conseil d’administration de Réseau ferré de France.

Cette demande d’avis a été transmise à la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire, compétente en matière d’impact environnemental de la politique énergétique.

Acte est donné de cette communication.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

J’informe le Sénat que la question orale n° 207 de M. Marc Daunis est retirée du rôle des questions orales et de l’ordre du jour du mardi 18 décembre 2012, à la demande de son auteur. Elle est remplacée par la question orale n° 273 du même auteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

M. le président du Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courrier en date du vendredi 30 novembre 2012, une décision du Conseil sur une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’article 100 f et le troisième alinéa de l’article 100 s du code des professions applicable dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle (n° 2012-285 QPC).

Acte est donné de cette communication.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

L’ordre du jour appelle, à la demande du groupe socialiste, le débat sur l’emploi, la formation et la qualification des jeunes.

La parole est à M. Claude Jeannerot.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Jeannerot

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre pays connaît une situation particulièrement dramatique sur le front de l’emploi : voilà dix-huit mois que le nombre des demandeurs d’emploi augmente sans discontinuer et le cap symbolique des 3 millions de chômeurs a été franchi au mois d’août dernier.

Parmi les demandeurs d’emploi, les seniors et les jeunes sont les plus touchés.

C’est ainsi que le nombre des jeunes âgés de moins de vingt-cinq ans sans emploi a crû de près de 11 % en une année. Vous le savez, près d’un quart de ces jeunes n’ont pas d’emploi ; parmi les moins qualifiés d’entre eux, le chômage est encore plus dévastateur.

Quant aux seniors sans emploi, leur nombre a augmenté davantage encore, puisqu’il a connu une hausse de 17 % en un an.

L’heure est donc plus que jamais à la mobilisation.

Mes chers collègues, n’oublions pas que les statistiques montrant une progression rapide du chômage cachent des visages d’hommes et de femmes frappés de plus en plus par le désespoir. Pourtant, nous en sommes convaincus, il n’y a pas de fatalité !

Dans ce domaine comme dans tous les autres, l’action politique ne peut porter ses fruits qu’à la condition d’agir sur l’ensemble des paramètres qui entrent en jeu. En matière d’emploi, nous savons bien que seule une stratégie en faveur de la croissance et de la compétitivité sera efficace dans la durée.

C’est avec le souci de répondre au problème de l’emploi que le Gouvernement met en œuvre, depuis un certain nombre de mois, une action qui s’inscrit dans le temps. Il a décidé d’allouer aux politiques de l’emploi un budget qui, dans le contexte actuel, mérite d’être salué.

Il n’a pas toujours été possible d’en dire autant : songez, mes chers collègues, que le budget de l’emploi, qui s’élevait à 17 milliards d’euros en 2002, ne représentait plus que 9, 9 milliards d’euros en 2012 ! Entre 2008 et 2012, le nombre des demandeurs d’emploi a augmenté de un million, alors même que les crédits de la mission « Travail et emploi » baissaient de 20 %.

Le projet de loi de finances pour 2013, qui va être soumis à l’examen de la commission mixte paritaire, inverse cette tendance en prévoyant 10, 3 milliards d’euros de crédits pour l’emploi, soit un montant en hausse de 2 %.

L’augmentation des crédits atteint même 4 % si l’on veut bien tenir compte d’un changement de périmètre qui a conduit à transférer 250 millions d’euros vers le compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage ».

Le Gouvernement a défini cinq grandes priorités en matière d’emploi.

La première de ces priorités est l’emploi des jeunes, qui est le sujet de notre débat. Je considère néanmoins qu’il est difficile d’en parler sans prendre aussi en compte les autres populations, sous peine de provoquer des effets d’éviction.

Chacun se souvient que nous venons d’adopter la loi du 26 octobre 2012 portant création des emplois d’avenir ; les décrets sont signés, les premières conventions également.

Debut de section - Permalien
Thierry Repentin, ministre délégué auprès du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, chargé de la formation professionnelle et de l'apprentissage

En effet !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Jeannerot

C’est ainsi que dans mon département, le Doubs, le conseil général a conclu des contrats avec plusieurs dizaines de jeunes, qui occupent d’ores et déjà un emploi.

Je vous le rappelle, il est prévu d’embaucher 100 000 jeunes en emploi d’avenir au cours de l’année 2013. La montée en puissance de ce dispositif se poursuivra en 2014, pour arriver à un total de 150 000 bénéficiaires en rythme de croisière.

L’année prochaine, les crédits qui lui seront consacrés atteindront 2, 3 milliards d’euros en autorisations de programme et 466 millions d’euros en crédits de paiement.

Les moyens consacrés aux autres dispositifs en faveur des jeunes, notamment au contrat d’insertion dans la vie sociale, le CIVIS, seront maintenus.

En revanche, le Gouvernement a proposé de supprimer le contrat d’autonomie, qui avait été lancé, en 2008, dans le cadre du plan « Espoir banlieues ». Nous avons maintes fois dénoncé le médiocre rapport coût/efficacité de ce contrat, qui n’a pas atteint le public visé à l’origine. Sa suppression donnera lieu à une économie de 46 millions d’euros.

Dans quelques semaines – nous sommes là au cœur de la question de l’emploi des jeunes ! –, nous aurons à examiner un projet de loi relatif au contrat de génération, ...

Debut de section - Permalien
Thierry Repentin, ministre délégué

Absolument !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Jeannerot

M. Claude Jeannerot. ... texte qui, je crois, sera présenté demain en conseil des ministres

M. le ministre acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Jeannerot

Aux termes de ce texte, les entreprises de moins de trois cents salariés devraient bénéficier d’une aide de l’État lorsqu’elles recrutent un jeune tout en maintenant dans l’emploi un senior pour organiser entre eux un transfert de savoir et de compétences. Non encore inscrit dans le projet de loi de finances, le coût pour l’État de cette mesure devrait être de l’ordre de 1 milliard d’euros chaque année une fois la montée en puissance du dispositif achevée.

La deuxième priorité du Gouvernement consiste à atténuer les effets de la crise pour les publics les plus fragiles, en ayant notamment recours aux contrats aidés. Évidemment, cela représente un tout avec la question de l’emploi des jeunes.

Dois-je le rappeler ? le Gouvernement a d’ores et déjà adopté des mesures d’urgence pour remédier à la surconsommation des contrats aidés observée pendant les premiers mois de cette année. Au mois de juin, il a d’abord autorisé la conclusion de 80 000 contrats supplémentaires. Puis, au mois d’octobre, il a ouvert une nouvelle enveloppe de 40 000 contrats d’accompagnement dans l’emploi, les CAE. Un décret d’avance a été pris pour débloquer en urgence les 300 millions d’euros nécessaires pour financer ces contrats.

En 2013, si toutefois le projet de loi de finances est adopté, les entrées en contrats aidés seront une nouvelle fois élevées : sont prévus 1, 5 milliard d’euros et 186 millions d’euros pour financer respectivement 340 000 contrats d’accompagnement dans l’emploi et 50 000 contrats initiative-emploi, les CIE.

Comme le Gouvernement s’y était engagé, le déploiement des emplois d’avenir destinés aux jeunes ne se fera donc pas au détriment des autres contrats aidés ; je veux souligner ce point naturellement très important pour l’efficacité des politiques de l’emploi.

La troisième priorité gouvernementale, qui est l’accompagnement des mutations économiques, est plus que nécessaire dans le contexte de crise que nous traversons.

Il est notamment proposé de pérenniser le contrat de sécurisation professionnelle, le CSP, qui a été créé en 2011 et auquel 90 000 personnes ont déjà adhéré. Ce contrat permet d’offrir un parcours de transition professionnelle à des personnes licenciées pour motif économique. Plus de 100 millions d’euros sont prévus pour le financer l’année prochaine. On voit bien tout l’intérêt d’une telle mesure dans le présent contexte.

Mais c’est surtout sur la relance du chômage partiel que je voudrais insister. Il s’agit d’un dispositif utile qui permet d’éviter des licenciements en cas de retournement brutal de la conjoncture, toujours d’actualité... Le gouvernement précédent avait pourtant choisi de réduire considérablement la dotation qui y était consacrée : elle ne s’élevait plus qu’à 40 millions d’euros en 2011 et elle est de 30 millions d’euros cette année. Dans le projet de loi de finances, je le rappelle, il est proposé de fixer la dotation à 70 millions d’euros pour 2013.

Le Gouvernement a par ailleurs décidé – et c’est un autre point que je voudrais souligner, monsieur le ministre – de rétablir la procédure d’autorisation administrative préalable, qui avait été supprimée en début d’année, ce qui avait eu pour inconvénient d’entraîner une plus grande insécurité juridique pour les entreprises.

La quatrième priorité, sur laquelle je vais insister quelque peu, est le renforcement du service public de l’emploi, qui est très sollicité en cette période d’augmentation du chômage.

En 2011, la précédente majorité avait jugé opportun de supprimer 1 800 postes à Pôle emploi, alors que – rappelez-vous ! – le chômage repartait à la hausse. Cette année, à la suite du rapport de la mission commune d’information relative à Pôle emploi que je présidais, il a été décidé, au contraire, d’augmenter les moyens de Pôle emploi pour permettre l’embauche de 2 000 agents supplémentaires en CDI. Pour financer ces recrutements, la dotation de l’État à Pôle emploi va donc augmenter l’an prochain de plus de 100 millions d’euros pour atteindre 1, 47 milliard d’euros.

Je précise que ces 2 000 agents seront tous affectés à l’accompagnement des demandeurs d’emploi dans le cadre de la nouvelle stratégie définie par le conseil d’administration de Pôle emploi, laquelle vise à une plus grande personnalisation du service apporté.

En complément, Pôle emploi prévoit de redéployer 2 000 postes de travail des fonctions support vers l’accompagnement.

Au total, ce sont donc 4 000 conseillers supplémentaires qui vont être mis au contact direct des usagers.

Verront également leurs moyens augmenter les missions locales qui suivent les jeunes âgés de moins de vingt-six ans sur le plan non seulement de l’emploi, mais aussi plus globalement de l’insertion et de diverses problématiques : logement, social… C’est d’autant plus logique qu’il est en même temps confié à ces missions locales un rôle spécifique de référent dans le domaine des emplois d’avenir. À leur dotation de base de près de 180 millions d’euros s’ajouteront en effet 30 millions d’euros versés au titre de leur contribution au déploiement des emplois d’avenir.

La cinquième et dernière priorité du Gouvernement concerne aussi directement le public des jeunes ; il s’agit du développement des formations en alternance, l’objectif fixé par le Premier ministre étant d’atteindre 500 000 apprentis à la fin du quinquennat.

Mes chers collègues, cet objectif peut sembler en retrait par rapport à certaines annonces qui avaient pu être faites par le passé. Le 1er mars 2011, l’ancien président de la République avait, par exemple, souhaité que 800 000 jeunes soient formés par la voie de l’alternance dès 2015, ce qui aurait supposé d’augmenter le nombre d’alternants d’un tiers en quatre ans ! M. Jean-Marc Ayrault a préféré fixer un objectif plus modeste, mais sans doute plus réaliste.

Les régions vont donc recevoir une dotation de 550 millions d’euros au titre du financement de la prime d’apprentissage et 1, 2 milliard d’euros va être versé à la sécurité sociale pour compenser le manque à gagner lié à l’exonération de cotisations sociales applicable aux contrats d’apprentissage.

Je précise que l’Assemblée nationale a décidé de majorer de 2 millions d’euros la dotation prévue pour financer les actions de promotion de l’apprentissage, afin que soient prolongées certaines expérimentations tendant à prévenir les ruptures de contrats d’apprentissage qui, on le sait, sont encore trop fréquentes, notamment dans des secteurs comme l’hôtellerie et la restauration.

Monsieur le ministre, je ne peux conclure ce propos sans parler de l’avenir de l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, l’AFPA, à laquelle, vous le savez, les Français sont très attachés, et pour cause ! Pour des millions d’entre eux, et cela depuis maintenant soixante ans, l’AFPA a représenté une véritable seconde chance. Des jeunes en situation de décrochage scolaire, mais aussi des adultes en situation de rupture professionnelle ont trouvé, au sein de cette association, une nouvelle voie.

Vous connaissez les atouts de l’AFPA : 9 000 professionnels, une présence répartie sur l’ensemble du territoire national, des offres de formations qualifiantes dans des secteurs en développement et souvent à forte valeur ajoutée – là où, précisément, les autres organismes sont souvent absents ou défaillants en raison des investissements importants exigés – et de formations débouchant presque systématiquement sur l’emploi. Vous connaissez aussi la performance de cet organisme : près de trois stagiaires sur quatre trouvent un emploi dans les six mois qui suivent la formation.

Or l’AFPA est à l’heure actuelle en grand danger. Le précédent gouvernement avait fait des choix qui visaient à jeter l’institution dans le grand bain de la concurrence. Vous le savez, mes chers collègues, le désengagement financier de l’État s’est traduit par une réduction progressive de la subvention à l’AFPA. Les régions étaient censées prendre le relais au titre de leurs compétences de droit commun. Elles l’ont fait, selon des modalités très diverses et dans des conditions souvent très contrastées.

Si rien n’est fait aujourd’hui, l’AFPA va se trouver dans une situation de quasi-cessation de paiement. Mais, vous l’avez dit, monsieur le ministre, le Gouvernement est prêt à sauver et à relancer cette association, qui est indispensable dans le contexte actuel. Il a d’ailleurs déjà pris des mesures d’urgence en cours d’année pour éviter ce risque, mais une action plus structurelle est nécessaire pour redresser la situation. Le président de l’AFPA, quant à lui, a mis au point et proposé un plan de refondation qui vient d’être rendu public.

L’État peut encore aider cet organisme, d’abord en lui transférant le patrimoine immobilier dont il est propriétaire, via la conclusion de baux emphytéotiques, et, ensuite – c’est, je crois, ce qui est attendu –, en participant à sa recapitalisation. L’estimation des besoins en fonds propres est aujourd’hui de 200 millions d’euros à 300 millions d’euros.

Selon nous, à moyen terme, la définition d’un service d’intérêt économique général permettrait aussi de soustraire une partie du marché de la formation à la stricte application des règles de la concurrence, lesquelles, en l’espèce, ne servent pas précisément l’intérêt général ! Au surplus, cela aiderait l’AFPA à mieux faire valoir ses atouts.

Monsieur le ministre, je vous remercie d’avance de nous apporter, à nous parlementaires, et, par notre intermédiaire, aux salariés de l’AFPA, mais surtout aux personnes actuellement en formation, toutes les informations dont vous disposez et qui pourraient contribuer à nous rassurer et à nous donner des perspectives.

Bien entendu, les mesures en faveur de l’emploi et de la formation des jeunes annoncées par le Gouvernement et soutenues par la majorité présidentielle depuis le mois de mai ne prennent sens que si elles s’inscrivent dans une ambition plus globale portée par le président de la République – faut-il le rappeler ? – et visant à donner à notre jeunesse toute la place qui lui revient.

Pour autant, nous le savons, l’emploi et la formation des jeunes constituent un préalable à cette ambition. Je vous prie, monsieur le ministre, de bien vouloir nous faire part de vos choix qui permettent précisément la réalisation de ce préalable. §

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, Claude Jeannerot vient de le dire, l’accès à l’emploi est une difficulté majeure pour les jeunes, particulièrement pour ceux qui sortent du système scolaire sans qualification. L’Observatoire de l’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire, l’INJEP, rend aujourd’hui un rapport dont les chiffres, malheureusement, sont éloquents : en France, le taux de chômage des jeunes a atteint 22, 7 % au second trimestre de cette année, soit plus de deux fois le taux moyen national. C’est une constante que ce multiplicateur par 2, 2 ; un chiffre brutal et permanent.

Le chômage frappe différemment les jeunes : son taux n’est que de 9 % pour les diplômés du supérieur, tandis qu’il s’élève à 22 % pour les titulaires d’un baccalauréat, d’un CAP ou d’un BEP, et à 46 %, soit près d’un jeune sur deux – chiffre terrible ! –, pour les non-diplômés.

Plus de 140 000 jeunes « décrochent » chaque année sans diplôme ni qualification. Depuis 1979, date du premier rapport de Jacques Legendre, secrétaire d’État chargé de la formation professionnelle sous le gouvernement de Raymond Barre, …

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

… ce chiffre n’a guère évolué, malgré la réforme du collège et la massification du lycée.

À l’heure actuelle, le taux de pauvreté des jeunes âgés de dix-huit à vingt-quatre ans atteint 22, 5% : c’est un renversement historique de tendance, puisque les jeunes sont désormais davantage touchés par la pauvreté que les personnes âgées. Quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégions, nous ne pouvons qu’être terrifiés par ce chiffre. En tant qu’ancien ministre délégué à l’emploi, au travail et à l’insertion professionnelle des jeunes, je dois reconnaître qu’il signe l’échec permanent des uns et des autres depuis environ vingt-cinq ans. Il doit être considéré avec vérité et courage, sans approche partisane.

C’est clair, les jeunes sont les premières victimes de la récession et de la crise, et l’écart se creuse entre ceux qui ont le bonheur de détenir un bon diplôme de l’enseignement supérieur ou de la formation en alternance et ceux qui n’ont rien ou dont les diplômes ne sont guère valorisables sur le marché du travail.

Aujourd’hui, 15 % des jeunes sont inactifs : ils ne suivent ni études ni formation et n’occupent aucun emploi. Il convient de mesurer les conséquences d’une telle situation.

Face à ce constat, nous partageons sur toutes les travées de cet hémicycle la conviction selon laquelle l’emploi des jeunes constitue bien une priorité nationale. Pour autant, la bonne volonté et les propositions de tous les gouvernements, y compris de l’actuel, en faveur de l’insertion des jeunes ne me paraissent pas à la hauteur de l’enjeu.

Examinons en effet ce que propose le Gouvernement pour l’emploi des jeunes.

À la rentrée, il a annoncé en urgence la création de 150 000 emplois d’avenir sur cinq ans. Il s’agit de CDD, dont la durée ne dépassera pas trois ans. Pourront-ils déboucher par la suite sur des emplois pérennes ? Pour avoir proposé moi-même des contrats aidés, je serais mal fondé de dire qu’une telle mesure ne présente pas d’intérêt. Mais je souhaite que l’on tire les conséquences de l’étude de la DARES, la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, consacrée au panel 2008, laquelle porte bien sur les contrats que Jean-Louis Borloo et moi-même avions proposés à l’époque. Il y est démontré que les contrats aidés dans le secteur non marchand sont beaucoup moins porteurs d’avenir que les contrats aidés dans le secteur marchand. La différence est même extrêmement forte.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Voilà pourquoi, monsieur le ministre, lors du débat sur les emplois d’avenir, nous aurions dû ne pas circonscrire le champ de notre réflexion au secteur public et associatif. À cet égard, je le répète, les chiffres de la DARES sont clairs : c’est bien le secteur marchand qui peut être porteur d’emplois durables, surtout au moment où les collectivités territoriales ont plutôt tendance à maîtriser leurs dépenses. Or chacun le sait, la masse salariale est un élément majeur de leur budget.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

On a en fait recréé les emplois-jeunes, qui servent simplement, comme l’explique dans Le Monde d’hier un représentant de l’INJEP, à faire baisser les chiffres du chômage. J’estime pour ma part que ces emplois ont une certaine utilité, bien que j’aie de vrais doutes sur la réalité des effets d’une telle mesure.

Les contrats de génération, seconde mesure phare du Gouvernement, seront-ils plus efficaces ?

L’idée est plus séduisante : les jeunes pourront être embauchés dans le secteur marchand et les seniors qui les formeront pourront se maintenir dans l’emploi. Aujourd’hui, seulement 43, 5 % des personnes âgées de cinquante-cinq à soixante-quatre ans ont un emploi, même si cette proportion a progressé depuis six ans. Reste à connaître le public ciblé. S’agira-t-il de jeunes sans qualification ? Quel sera le coût réel du dispositif, estimé pour le moment à 2, 5 milliards d’euros par an ? Comment sera-t-il financé ? Il faudra, par ailleurs, que l’incitation à l’embauche soit suivie d’effets.

La réussite des contrats de génération dépendra concrètement du carnet de commandes des entreprises. S’il n’y a ni commandes ni croissance, ce type de contrat ne sera pas mis en œuvre. Il convient, me semble-t-il, d’instaurer une forme de continuité entre l’emploi des seniors et celui des jeunes et de favoriser la confiance des entreprises dans un retour de la croissance, laquelle n’est guère encouragée par les mesures gouvernementales.

Le contrat de génération doit donc faire partie d’une politique globale cohérente à l’égard des entreprises, qui ne peuvent être incitées à recruter d’un côté tandis que de l’autre leurs charges et leurs impôts augmentent.

L’OFCE, l’Observatoire français des conjonctures économiques, a publié des estimations montrant que la portée du dispositif paraît surestimée : le Gouvernement affiche un optimisme excessif en prévoyant la création de 500 000 contrats de génération sur le quinquennat, l’OFCE tablant sur 100 000 emplois créés, avec des effets d’aubaine significatifs.

En résumé, les deux mesures phares du Gouvernement, à savoir les emplois d’avenir et les contrats de génération, ne peuvent suffire à faire reculer le chômage des jeunes, car il ne s’agit pas de réformes de fond.

Par ailleurs, la continuité des mesures décidées devrait faire l’objet d’une véritable réflexion de notre part. En douze ans, on aura changé quatre fois de politique en matière de contrats, au gré des alternances, y compris internes au sein d’une même majorité, ce qui soulève un problème de lisibilité. Monsieur le ministre, vous et vos collaborateurs le savez bien, entre le vote d’un dispositif par le Parlement et son appropriation sur le terrain, il faut souvent de longs mois. Entre le temps des espérances et celui des réalités, les pertes en ligne sont souvent extrêmement importantes !

Les réformes structurelles qu’il faut avoir le courage d’engager sont d’abord celles du système éducatif et de la formation professionnelle, qui est une clé pour l’emploi.

Après avoir réformé l’enseignement supérieur, le président Sarkozy voulait s’attaquer au vaste chantier de la formation professionnelle. Afin d’étudier les suites à donner à la loi du 24 novembre 2009 relative à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie, il m’avait confié, au mois de janvier dernier, une mission sur notre système de formation professionnelle, s’articulant autour de quatre préoccupations majeures : « orienter de manière efficace la formation professionnelle vers ceux qui en ont le plus besoin, notamment les demandeurs d’emploi ; inciter les entreprises à mieux former leurs salariés en y consacrant les fonds adéquats – c’est l’une des clés de la compétitivité, celle-ci ne reposant pas uniquement sur le coût du travail – ; développer la formation professionnelle comme outil de promotion sociale ; créer les conditions d’une meilleure adéquation entre l’enseignement professionnel et les réalités du monde économique ».

Le rôle du système éducatif est essentiel. Il appartient à l’éducation nationale de développer des démarches systématiques d’aide et de soutien durant le cursus scolaire, car l’avenir du jeune – depuis quelques mois, je ressens encore plus qu’auparavant une telle réalité – se joue dès la grande section de maternelle et l’école primaire, en particulier avant le CE2.

Le ministre Vincent Peillon paraît partager ce point de vue, puisqu’il convient, selon lui, de concentrer tous les efforts sur l’école primaire et les apprentissages fondamentaux. C’est là que se trouve la racine du décrochage futur. Luc Chatel avait d’ailleurs mis en place – j’y reviendrai – des plateformes destinées à « rattraper » ceux qui avaient décroché. Il faut lutter avant tout contre l’illettrisme et l’échec scolaire.

Vous le savez tous, 15 à 20 % des écoliers arrivent au collège avec d’énormes difficultés de lecture et de compréhension.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

On les retrouve quelques années plus tard, sortant du système scolaire sans diplôme et sans qualification.

La « grande loi de programmation pour l’école », annoncée par le ministre de l’éducation nationale, permettra-t-elle d’apporter les modifications nécessaires à notre système éducatif?

Un plan pluriannuel devra permettre de réduire très significativement le nombre de « décrocheurs », à savoir les jeunes sortant du système scolaire sans diplôme ni qualification.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Cet objectif volontariste suppose, je l’ai dit, de revoir l’accompagnement des élèves en difficulté, et ce dès l’école primaire.

Il faut recentrer l’action pédagogique sur les apprentissages fondamentaux, la lecture, l’écriture, l’arithmétique et la maîtrise des valeurs universelles, humanistes et républicaines.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Il faut aussi renforcer l’action en faveur d’une orientation professionnelle plus en lien avec le monde économique, ouverte à tous et tout au long de la vie.

L’amélioration de notre système d’orientation doit être radicale. Pour se préparer à la vie professionnelle dès la formation initiale ou pour développer ultérieurement ses compétences et changer de métier, il est nécessaire d’accéder plus facilement à une information complète sur les formations, les certifications, les métiers, les emplois. C’est cette mission qui a été confiée au Service public de l’orientation, le SPO, par la loi du 24 novembre 2009 : il s’agit de mettre en œuvre le droit à être informé, conseillé et accompagné tout au long de la vie en matière d’orientation professionnelle.

La mise en place du SPO doit se poursuivre par la création de véritables plateformes de l’orientation, à l’instar des « cités des métiers », lieux uniques, qui émergent peu à peu dans les départements et les régions.

Une cité des métiers régionale serait chargée de l’animation concrète de structures labellisées SPO, de la fourniture de ressources, de l’élaboration de pratiques professionnelles communes à l’ensemble des structures.

Notre système éducatif souffre d’une insuffisante valorisation des formations professionnelles. Nos jeunes doivent savoir que les formations par apprentissage et en alternance ouvrent sur des embauches sûres et sont des voies de réussite et d’excellence.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Année après année, les rencontres sénatoriales de l’apprentissage en témoignent.

Enfin, pour les décrocheurs, ceux pour lesquels le plan annoncé n’aura pas d’effet, il nous faut construire un droit à une seconde chance de formation.

Beaucoup d’initiatives existent déjà sur le terrain : les centres de l’EPIDE, l’établissement public d’insertion de la défense, les écoles et lycées de la seconde chance, les écoles de production. Le système scolaire fait des dégâts considérables chez les jeunes qui en sont éliminés. La « pédagogie du détour » s’impose donc tout naturellement. Des dispositifs doivent être mis en place pour faciliter l’accès à un premier emploi, sans avoir à repasser par les bancs du collège, lequel est souvent rejeté par ces jeunes.

Les écoles de production, dont nous avons parlé voilà deux semaines à l’occasion de l’examen d’une proposition de loi déposée par notre collègue Jean-Claude Carle, nous donnent l’exemple d’une voie parallèle. Le débat sur ce sujet n’est pas vain et ne doit pas être éternellement repoussé dans l’attente d’études.

Je propose dès à présent un maillage territorial étroit des initiatives existantes, au moyen d’un « pacte de réussite professionnelle » De quoi s’agirait-il ? Une convention régionale entre Pôle emploi, le rectorat et la région permettrait d’établir les responsabilités de chaque partenaire. Une telle voie, que je considère de réussite sociale, professionnelle et humaine, serait destinée à tous les jeunes sortis du système éducatif sans qualification suffisante.

Placé sous le pilotage des régions, en lien étroit avec les rectorats, ce pacte favoriserait une meilleure coordination et une plus grande synergie. L’objectif est d’insérer rapidement tous les jeunes, dès leur inscription à Pôle emploi ou dans une mission locale, dans une formation qualifiante et certifiante. Les financements existants, mieux orientés et plus ciblés sur cette finalité, devraient être suffisants, notamment pour l’apprentissage, avec la réorientation de la taxe afférente, que je souhaite voir affecter prioritairement sur les niveaux de formation IV et V. Aujourd’hui, en effet, la taxe d’apprentissage n’est pas destinée à celles et ceux qui en ont le plus besoin.

Telles sont les propositions que je souhaitais formuler. Elles figurent dans un rapport publié au mois d’avril dernier.

Pour paraphraser un journal de l’après-midi, il y a urgence pour nos jeunes sans diplôme, les plus fragiles, qui s’appauvrissent. Le monde qu’on leur propose doit être porteur d’espérance. En somme, il faut passer d’une gestion fataliste du chômage des jeunes à une gestion dynamique de leur entrée dans l’emploi.

Nous avons le devoir de trouver les voies et moyens d’une nouvelle école et d’une nouvelle dynamique de la formation professionnelle.

Quant à l’AFPA, vous trouverez, monsieur le ministre, dans le rapport précité, quelques propositions qui ne sont pas très éloignées de celles que j’ai pu entendre. Il faut veiller, selon moi, à ne pas laisser cet outil tomber en désuétude. J’avais d’ailleurs attiré l’attention du précédent gouvernement sur ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Les partenaires sociaux mènent actuellement des négociations sur l’emploi et la compétitivité. À cette occasion, je souhaite qu’ils prennent à bras-le-corps la question du premier emploi des jeunes.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Le paradoxe, c’est que notre droit du travail est un facteur d’éviction des jeunes du premier emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Au fond, ces jeunes qui « galèrent » entre intérim et CDD sans cesse renouvelés avant d’aborder le CDI tant espéré sont les victimes d’une certaine approche de notre droit du travail actuel. Il faut avoir à l’esprit que ces jeunes, en dehors de leur fonction sociale et sociétale, sont l’un des éléments de la compétitivité de notre économie. C’est pourquoi les partenaires sociaux doivent s’emparer de cette question du premier emploi ; on ne peut pas parler de compétitivité et d’emploi en excluant la frange de ceux qui construiront notre pays demain !

Voilà, mes chers collègues, les quelques observations que je souhaitais formuler dans ce débat. Les femmes et les hommes de bonne volonté devraient pouvoir se retrouver autour de ce sujet majeur. Si près de 23 % de nos jeunes sont maintenus en dehors du champ du travail, cela signifie qu’ils seront demain dans l’incapacité de fonder une famille, de se loger, d’appartenir et de contribuer pleinement à notre société. C’est un échec collectif dont nous portons la responsabilité.

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le présent débat sur l’emploi, la formation et la qualification des jeunes est effectivement extrêmement important, parce que ces trois thèmes sont évidemment liés et conditionnent l’avenir de notre pays, ni plus ni moins.

Claude Jeannerot l’a dit avant moi : le surchômage des jeunes est un phénomène récurrent en France. Depuis les années soixante-dix, jamais le taux de chômage de cette catégorie n’a été inférieur à 15 %.

Depuis 2008, sous le double effet de la crise économique et de l’échec des politiques menées par le précédent gouvernement, le chômage des jeunes n’a cessé de croître, pour atteindre près de 23 % en moyenne et parfois plus de 50 % dans certains de nos territoires.

Pourtant, face à cette situation, entre 2002 et 2012, les budgets consacrés à l’emploi ont baissé, passant de près de 17 milliards d’euros à moins de 10 milliards d’euros !

Nous ne pouvons nous résoudre à laisser une partie de plus en plus importante de nos concitoyens, en particulier nos jeunes, sur le bord du chemin de l’emploi. La mobilisation de tous les acteurs de la société, notamment des politiques publiques, est un impératif. Le Président de la République a d’ailleurs fait de la jeunesse l’une des priorités de son quinquennat.

La formation tout au long de la vie est une belle formule, mais la formation initiale est fondamentale. On le sait bien : ceux qui sortent les mieux formés du système de formation initiale ont en général moins de difficultés à s’insérer. C’est ce qu’indique en effet l’article qu’a évoqué notre collègue Gérard Larcher.

Ce sont aussi ceux qui sortent les plus diplômés du système de formation initiale qui profitent le plus des dispositifs de formation continue. C’est pourquoi il importe de permettre à tous les jeunes de réussir leur formation initiale.

Monsieur Larcher, qu’a fait le gouvernement Fillon pendant toutes ces années ?

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

Mme Christiane Demontès. Il a supprimé 80 000 postes d’enseignant

Eh oui ! sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Nous verrons bien quels résultats vous obtiendrez !

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

… grâce auxquels des professionnels accompagnaient les enfants rencontrant quelques difficultés, il a stigmatisé les enseignants. Il ne faut donc pas être surpris de la régression de notre pays dans tous les palmarès éducatifs internationaux...

Dès le projet de loi de finances pour 2013, le gouvernement de Jean-Marc Ayrault, avec vous-même, monsieur le ministre, a entendu redonner toute sa place à la formation initiale, car elle est décisive pour le parcours d’un jeune. Nous nous en réjouissons.

Pourtant, chaque année, entre 130 000 et 150 000 jeunes sortent du système scolaire sans qualification ou avec une qualification insuffisante. Malheureusement, cette situation est appelée à perdurer encore quelque temps. On a vu, parfois depuis longtemps, se développer des dispositifs pour ces jeunes : les écoles et les lycées de la deuxième chance, les établissements publics d’insertion de la défense. Des crédits budgétaires sont maintenus pour 2013, à hauteur de près de 70 milliards d’euros, et c’est tant mieux.

Récemment, dans le cadre de l’examen de la proposition de loi relative aux écoles de production, nous avons eu l’occasion, dans cet hémicycle, d’évoquer la nécessité d’une réflexion globale sur les formations professionnalisantes. D’ailleurs, à la fin de ce débat, monsieur le ministre, la commission de la culture, de l'éducation et de la communication a souhaité, sur la proposition de notre collègue Françoise Laborde, la création d’une mission d’évaluation et d’inspection des dispositifs de formation en alternance. Ceux-ci sont bien sûr utiles, mais, mes chers collègues, il est nécessaire de réorienter le système de formation initiale sur la prévention de l’échec scolaire. On ne peut pas se contenter de dire que 140 000 jeunes chaque année ne sont pas adaptés à l’école ! Ces échecs ne sont pas une fatalité ; ils sont la conséquence notamment de l’orientation par l’échec au collège, de la suppression de sections de BEP au profit du « bac pro » en trois ans, alors que celui-ci était une réussite lorsqu’il durait quatre ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

En outre, le nombre d’apprentis stagne autour de 400 000, avec une part de plus en plus grande d’apprentis en post-baccalauréat, c'est-à-dire dans l’enseignement supérieur.

Voilà des sujets qui doivent être étudiés sérieusement !

Des décisions qui vont dans le bon sens ont été prises dans le projet de loi de finances pour 2013. Comme l’a dit Claude Jeannerot, nous aurions pu renforcer les dispositions en question si le débat s’était poursuivi au Sénat. Je pense, par exemple, à l’abondement d’un fonds dédié à la création de dispositifs d’accompagnement des apprentis et de leur maître d’apprentissage pour empêcher les sorties prématurées de l’apprentissage.

Aujourd’hui même, le ministre de l’éducation nationale lance une réflexion pour prévenir le décrochage scolaire. Une grande loi sur la refondation de l’école est en préparation. Nul doute qu’elle visera à la réussite de tous les élèves.

Je ne peux pas, dans le cadre de ce débat, passer sous silence la mise en œuvre par le Gouvernement des emplois d’avenir destinés à ces jeunes sans qualification ou peu qualifiés et qui perdent très vite pied. Ce sont ainsi 150 000 emplois d’avenir qui seront créés en deux ans, destinés aux jeunes âgés de seize à vingt-cinq ans vivant dans les territoires dont je parlais tout à l’heure et où le taux de chômage des jeunes dépasse les 50 %.

Je veux vous dire, monsieur le ministre, le formidable espoir que suscitent ces emplois non seulement pour ces jeunes dont l’avenir est parfois un trou noir, mais aussi pour ceux qui les accompagnent : les conseillers des missions locales, les animateurs sociaux, les éducateurs.

Je veux dire à ceux qui objectent qu’il s’agit d’emplois précaires que trois ans, c’est beaucoup pour ces jeunes qui n’ont souvent comme seule expérience du travail que le stage de découverte en entreprise qu’ils ont fait lorsqu’ils étaient au collège – stage qui s’est bien souvent effectué à la mairie ou dans une association locale, car comment aller frapper à la porte d’une entreprise quand on n’y connaît personne ? – ou encore un job d’été dans le cadre du dispositif « ville-vie-vacances », car leurs parents au chômage ne peuvent pas leur ouvrir les portes de l’entreprise.

Et je dis à ceux qui soutiennent que les emplois d’avenir ne sont pas de vrais emplois et qu’ils coûtent cher à la collectivité qu’un jeune qui travaille, c’est un jeune qui reprend confiance en lui, qui peut se projeter dans l’avenir, accéder à un logement, construire sa vie.

Je voudrais insister aussi sur l’impatience que suscite le projet des contrats de génération parmi ceux qui ont réussi à l’école, qui ont des qualifications, mais qui habitent dans des quartiers défavorisés, urbains ou ruraux. Les partenaires sociaux ont, semble-t-il, trouvé un accord. Il faut maintenant le projet de loi. Les jeunes l’attendent, nos concitoyens âgés de plus de cinquante ans, les seniors, les entreprises aussi, en tout cas certaines. Pouvez-vous nous éclairer sur le calendrier à venir de ces contrats de génération, monsieur le ministre ?

Je voulais évoquer la situation de l’AFPA. Dans la mesure où Claude Jeannerot et Gérard Larcher ont l’un et l’autre abordé ce sujet, je n’insisterai pas. Néanmoins, les questions de la sanctuarisation des formations des publics les plus fragiles à l’AFPA et du périmètre des formations considérées comme services d’intérêt économique général restent posées. Je ne doute pas que vous apporterez des réponses, monsieur le ministre.

Voilà un peu plus d’un mois, le Conseil économique, social et environnemental, le CESE, a remis un avis intitulé L’emploi des jeunes. Dans cet avis est proposé un socle stratégique qui, sur bien des aspects, rejoint celui que met en œuvre le Gouvernement : développement des formations professionnelles initiales, dispositifs de « deuxième chance », renforcement de la politique de l’emploi dans les quartiers prioritaires. Aussi, sachant que votre méthode est guidée par les deux principes que sont la prise en compte du point de vue des personnes et l’instauration d’un dialogue permanent avec tous les acteurs de la formation et de l’apprentissage, pouvez-vous nous indiquer, monsieur le ministre, quelles sont les intentions du Gouvernement eu égard aux propositions du CESE ?

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Le Scouarnec

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les chiffres du chômage au deuxième trimestre de 2012 confirment une tendance catastrophique. En France, le taux de chômeurs atteint 10, 2 %. Les jeunes sont toujours les plus touchés : près de 23 % de ceux qui sont âgés de quinze à vingt-quatre ans sont au chômage. L’analyse de ces chiffres nous révèle en outre que, si le taux de chômage a augmenté toutes catégories confondues, celui des jeunes a progressé plus fortement que les autres.

Les jeunes, premières victimes de la crise, doivent donc bénéficier d’une attention particulière. On sait également que ceux-ci ne sont pas tous frappés de la même manière par le chômage et que le choix de la formation et le niveau de qualification ont un impact sur l’accès à l’emploi.

Ainsi, les plus désavantagés parmi eux sont ceux qui sortent du système éducatif sans diplôme de l’enseignement secondaire. Une étude de l’INSEE montre que, en 2010, parmi les jeunes actifs sortis du système éducatif depuis moins de cinq ans, 11 % des diplômés du supérieur sont sans travail, alors que ce chiffre atteint 23 % pour les diplômés du secondaire et 44 % pour les non-diplômés ou les diplômés du brevet des collèges – des chiffres qui se rapprochent de ceux qu’a cités Gérard Larcher.

Au total, près de 140 000 jeunes quittent chaque année du système scolaire sans diplôme. Cette réalité est déjà ancienne et remonte sans doute à plus de trente ans.

Tout à l’heure, notre collègue Gérard Larcher indiquait : « Aujourd’hui, 15 % des jeunes sont inactifs : ils ne suivent ni études ni formation et n’occupent aucun emploi. » Si l’on approfondissait un peu, sans doute constaterait-on que ces jeunes en question sont également enfants de chômeurs de longue durée…

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Le Scouarnec

… et sont donc soumis à une double peine : un héritage très lourd à porter et une difficulté à trouver leur premier emploi.

Le diplôme et la qualification se révèlent être les meilleures protections contre le chômage. C’est pourquoi, s’ils ne peuvent être envisagés sous ce seul prisme, nous pensons que les enseignements scolaire et supérieur doivent être considérés tous deux comme prioritaires, car ils constituent des moyens de lutte efficace contre le chômage.

Nous nous étonnons par conséquent que le Gouvernement n’ait fait figurer parmi les ministères dits « prioritaires » que l’éducation – c’est bien certes – et ait exclu l’enseignement supérieur, alors même qu’il affirme vouloir faire de la jeunesse l’axe principal de sa politique.

Les universités, en déficit depuis l’entrée en vigueur de la loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités, réduisent leurs offres de formation, le nombre d’enseignants, et augmentent le nombre d’élèves en travaux dirigés. Pourtant, elles ne seront pas dotées de moyens nouveaux en 2013. C’est contradictoire avec les objectifs affichés de voir réussir les étudiants et de porter 50 % d’une classe d’âge jusqu’à la licence – ce que nous approuvons.

Nous serons particulièrement vigilants à ce que les projets de loi de refondation de l’école et d’orientation de l’enseignement supérieur soient à la hauteur des enjeux. Même si l’école et l’enseignement supérieur ne sont pas dotés de budgets adaptés, nous veillerons à ce que ces textes permettent de relever effectivement le défi de l’élévation du niveau de connaissances et de qualification de tous les jeunes, sans que les diplômes perdent en qualité ou en valeur.

Par exemple, il faut d’urgence réfléchir aux moyens de revaloriser les sections professionnelles et technologiques et de promouvoir la réussite de leurs élèves au baccalauréat, ainsi que la poursuite d’études supérieures.

Le Premier ministre a parlé de réserver à ces bacheliers des places dans l’enseignement supérieur technologique et professionnel, ce que nous jugeons positif ; mais pourquoi les réserver seulement à ceux qui ont obtenu des mentions, alors qu’ils connaissent moins de difficultés que les autres pour poursuivre leurs études ?

De véritables passerelles doivent être établies entre les trois voies, générale, professionnelle et technologique, afin de permettre la construction de projets d’orientation intégrant un droit à l’erreur et à une seconde chance.

Favoriser la réussite de tous, tel doit être l’objectif, mais on ne l’atteindra pas en mettant en œuvre une politique élitiste destinée à faciliter le parcours des seuls plus « méritants ».

Par ailleurs, vous nous savez opposés à la spécialisation précoce. C’est pourquoi nous aimerions savoir si le Gouvernement compte développer l’apprentissage dès l’âge de 14 ans. Forts des constats dressés précédemment, nous ne pouvons que réitérer notre opposition à une telle mesure.

Si la formation initiale joue un rôle déterminant pour permettre aux jeunes d’accéder à l’emploi, la formation professionnelle doit également tenir une place majeure pour aider les salariés, et singulièrement les jeunes, à progresser. Tous les salariés doivent pouvoir bénéficier de formations adaptées leur permettant d’évoluer au cours de leur vie professionnelle, en leur facilitant l’acquisition d’au moins un niveau de qualification supplémentaire.

Notre groupe a d’ailleurs soutenu cette exigence lors de l’examen, en séance publique, du projet de loi portant création des emplois d’avenir, et nous serons très attentifs à la nature des formations proposées dans le cadre des contrats de génération.

Toutefois, la formation professionnelle tout au long de la vie ne peut se limiter à ces formations « utilitaires ». C’est pourquoi nous proposons que les organismes de formation professionnelle soient soumis non pas à la libre concurrence, comme cela est le cas aujourd’hui, mais à l’application d’un critère d’utilité sociale. Devraient ainsi être privilégiées les structures qui proposent, hors du champ de la concurrence, les formations les plus qualifiantes et qui ne trient pas leurs stagiaires en fonction de leur capacité probable à atteindre le niveau attendu. Les organismes privés à but lucratif opèrent une telle sélection, car la formation est d’autant moins coûteuse que le stagiaire est assuré d’atteindre le niveau projeté.

Nous posons clairement la question de la construction d’un véritable service public de la formation, outil de sécurisation des parcours professionnels dont les salariés et les demandeurs d’emploi ont besoin pour sortir de la précarité. Seul un tel service public, dans lequel l’AFPA et le GRETA doivent jouer un rôle pivot, est de nature à associer l’ensemble des acteurs concernés. Les organismes complémentaires de formation, d’orientation, d’insertion, d’emploi, mais également l’école : tous doivent être mobilisés au sein d’un grand service public, capable d’instaurer une coopération organisée entre tous ces acteurs, en vue de proposer des formations professionnelles véritablement qualifiantes, et donc efficaces.

Je suis persuadé, tout comme le Président de la République, que l’accès à la formation professionnelle constitue une chance unique, pour les personnes privées d’emploi ou les salariés en début de carrière, de pouvoir bénéficier d’une réelle insertion professionnelle.

Là encore, il faudra veiller, monsieur le ministre – je sais que vous y êtes attaché –, à ce que des liens forts et durables soient tissés entre Pôle emploi et l’AFPA, notamment, qui apparaît aujourd’hui, plus que jamais, comme l’acteur essentiel de la formation professionnelle.

Il faut rompre avec le recours, par le service public de l’emploi, aux opérateurs de formation privés à but lucratif, dont tous les rapports soulignent que l’intervention est plus coûteuse et nettement moins efficace, en termes d’accès à l’emploi, que celle des opérateurs publics : privilégions donc l’efficacité.

Ce service public, qui pourrait évoluer vers un système de sécurité emploi-formation, nous le souhaitons national, condition indispensable pour permettre l’égalité d’accès et de traitement sur tout le territoire et pour garantir le maintien de la certification nationale.

Pour autant, nous ne souhaitons pas que les régions, qui, depuis 2004, jouent un rôle majeur, soient écartées. Les actions de formation qu’elles engagent participent au dynamisme de leur territoire.

Il faut donc trouver un équilibre, afin que les régions puissent pleinement intervenir dans le domaine de la formation sans que l’exercice de cette compétence ait pour effet d’accroître leurs dépenses ou de supprimer le cadre national actuel.

Malheureusement, depuis le transfert des budgets aux régions, les moyens de l’AFPA n’ont cessé de baisser, ce qui menace les emplois de formateur, et même aujourd’hui le fonctionnement d’établissements, et conduit à une contraction du nombre d’offres de formation.

Les enjeux sont fort nombreux et les défis immenses. Vous pourrez compter sur la vigilance du groupe CRC, mais aussi sur son soutien, pour vous aider à les relever. Cette question nous tient à cœur. Nous devons réussir pour que renaisse l’espoir. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la mise en œuvre du principe de participation du public défini à l’article 7 de la Charte de l’environnement est parvenue à l’adoption d’un texte commun.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Nous reprenons le débat sur l’emploi, la formation et la qualification des jeunes.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Jean-Marie Bockel.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Bockel

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les chiffres sont accablants : chaque année, 120 000 jeunes sortent du système scolaire sans diplôme ; en 2011, on évaluait à 500 000 ou 600 000 le nombre de jeunes non diplômés de 16 à 25 ans n’étant ni employés ni en formation.

Pour autant, la situation des autres jeunes, ceux qui sont diplômés, est-elle plus enviable ? Oui et non.

Oui, bien sûr, parce que l’obtention d’un diplôme accroît considérablement les chances de trouver un emploi. Du fait de l’augmentation du niveau de qualification global des salariés, plus de la moitié de ceux-ci ont au minimum le baccalauréat ou un brevet professionnel.

Non, parce que le taux moyen de chômage des jeunes actifs de moins de 25 ans est tout de même de 19 %, soit près du double de la moyenne nationale, tous âges confondus.

Cela dit, un lien existe, nous le reconnaissons tous, entre l’insertion et l’emploi des jeunes, d’une part, et leur formation et leur niveau de qualification, d’autre part.

Gérard Larcher l’a dit tout à l’heure, le problème n’est pas nouveau ; son traitement a donné lieu à bien des tentatives, débouchant sur de petites réussites et de nombreux échecs… Les jeunes ne sont pas une population comme les autres : ils représentent l’avenir de notre pays, l’investissement le plus porteur qu’une nation puisse faire. Montrez-moi l’état de votre jeunesse, et je vous dirai quel futur vous préparez.

La condition des jeunes doit être envisagée dans sa globalité, ce qui nécessite de bousculer les classifications ministérielles traditionnelles.

Je voudrais mettre en exergue l’approche novatrice qui a abouti à la mise en place du plan « Agir pour la jeunesse » à partir de novembre 2009, projet ambitieux qui a tout de même porté quelques fruits et a pour vocation de faciliter l’orientation, de sécuriser la formation, de favoriser l’emploi et l’autonomie et d’encourager l’engagement. Cette approche globale me paraît importante, mais il semblerait, monsieur le ministre, que ce ne soit pas la vôtre et qu’à une politique transverse de la jeunesse, vous préfériez une approche sectorielle classique : ainsi, il n’est plus question que d’un volet « jeunes » au sein des politiques de l’emploi, de la formation initiale et continue, ce qui entretient le flou et pose la question de la cohérence de l’ensemble. Peut-être cette observation vous paraîtra-t-elle excessive ou injustifiée, mais c’est l’un des points sur lesquels il serait intéressant de vous entendre, car une clarification s’impose.

Nous nous interrogeons en particulier, monsieur le ministre, sur l’articulation de la politique que vous entendez mener en faveur des jeunes avec le plan « Agir pour la jeunesse ». D’ailleurs, que reste-t-il de ce plan ? À peu près tout apparemment, ce dont nous ne pouvons que nous réjouir, mais chacun des volets se trouve disjoint des autres, ce que nous regrettons.

Ainsi, le ministre de l’éducation nationale lance aujourd’hui un plan de lutte contre le décrochage scolaire, qui s’inscrit dans la droite ligne du plan « Agir pour la jeunesse ». Vincent Peillon n’a d’ailleurs pas manqué de saluer le travail effectué par ses prédécesseurs pour identifier les « décrocheurs ». Cet engagement spécifique s’inscrit donc dans une continuité.

Un autre point de continuité a trait à l’accent mis sur l’orientation, plus précisément sur la nécessité de nous doter d’un véritable service public de l’orientation, afin de passer d’une orientation trop souvent subie à une orientation enfin choisie.

Ce service public a été mis en place par la loi du 24 novembre 2009 relative à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie. Un service dématérialisé d’orientation a été créé par l’Office national d'information sur les enseignements et les professions, l’ONISEP, au début de l’année 2010, ainsi que des lieux physiques « uniques » de l’orientation.

Le 10 octobre dernier, vous avez annoncé à la commission des affaires sociales du Sénat vouloir aller plus loin en ancrant davantage ce service dans les territoires. Monsieur le ministre, nous voudrions en savoir un peu plus à ce sujet.

Un autre volet clef du plan « Agir pour la jeunesse » avec lequel vous semblez en phase est celui de l’accompagnement des jeunes, notamment des plus en difficulté d’entre eux, et du développement de l’alternance.

Le cœur de la question est donc bien entendu l’accès de tous les jeunes à une qualification. Nous ne pouvons que souscrire à l’objectif ambitieux que vous vous êtes fixé : diviser par deux, en cinq ans, le nombre de jeunes sortant du système scolaire sans formation.

Pour y parvenir, vous misez sur une carte des formations, établie par la région pour que l’offre soit – je vous cite – « définie au plus près du terrain ». Monsieur le ministre, comment comptez-vous définir une offre au plus près du terrain dans le cadre régional ? Nous ne nions nullement la complémentarité que vous signalez entre développement économique et formation, mais n’est-ce pas une vision théorique, surtout lorsque l’on sait le travail accompli par les communes et, surtout, les intercommunalités dans le cadre des plans locaux pour l’insertion et l’emploi, les PLIE, ou par les départements avec les maisons départementales de l’emploi et de la formation ?

Vous avez raison de dire que, avant toute autre chose, le système doit être simplifié, en particulier dans les territoires. Mais pour cela, encore faut-il se poser la bonne question : à quel échelon se situent les bassins d’emploi ? Nous ne sommes pas bien sûrs que ce soit à celui de la région. En disant cela, je ne remets pas du tout en cause le rôle très important de la région en matière de formation professionnelle, bien entendu, mais je m’interroge sur l’articulation avec l’échelon local, qui a vu naître de nombreuses initiatives et expérimentations, par exemple les maisons de l’emploi ou les écoles de la deuxième chance, avec une très bonne réactivité permettant de faire évoluer les dispositifs pour amplifier les réussites et remédier aux échecs.

Je voudrais à cet égard évoquer le cas de l’agglomération mulhousienne, où nous avons mis en place une maison de l’emploi. On observe qu’un certain nombre de jeunes sans qualification ont acquis des compétences dans le cadre de leur expérience professionnelle, voire extra-professionnelle, compétences qui peuvent être facilement transférables.

Notre expérience locale nous permet de dégager quelques principes.

Tout d’abord, l’approche ne doit pas être limitée à la seule formation, même si celle-ci est au cœur du problème, car les compétences acquises ou les transitions professionnelles ne doivent pas être négligées.

En outre – cette question est extrêmement difficile sur le terrain –, il convient de s’intéresser non pas exclusivement aux « stocks », c’est-à-dire aux jeunes extrêmement nombreux qui attendent une solution, mais aussi aux flux, pour éviter que les situations ne s’enlisent.

Enfin, dans toute la mesure du possible, il faut adopter une approche globale de la personne, plus efficace et préventive.

Par ailleurs, monsieur le ministre, vous annoncez vouloir développer l’alternance. Nous ne pouvons que souscrire à une telle ambition, car l’alternance est un dispositif clef. Mais comment comptez-vous procéder pour revaloriser l’alternance aux stades initiaux de la formation, là où elle est le plus nécessaire et, paradoxalement, le moins développée ? Surtout, comment comptez-vous le faire sans réformer parallèlement la formation professionnelle, comme le préconisait le rapport Larcher du 6 avril dernier ? S’agissant d’un problème aussi important, toutes les bonnes idées doivent être prises en considération, quelle que soit leur provenance.

Les contrats aidés – emplois d’avenir, contrats de génération – sont le dernier outil que vous évoquez pour donner aux jeunes qui en sont dépourvus une première qualification. Oui, le contrat d’avenir aurait pleinement pu jouer ce rôle s’il avait visé prioritairement les PME du secteur marchand, plutôt que le secteur non marchand. Vous constatez vous-même que « les petites entreprises restent les principales utilisatrices des contrats d’apprentissage », mais, dans le même temps, vous refusez de faire du contrat d’avenir un premier stade d’apprentissage en secteur productif.

Nous comprenons d’autant moins cette contradiction que, pour ce que nous en savons, le contrat de génération semble beaucoup mieux configuré pour les moyennes et grandes entreprises. Les deux dispositifs auraient pu être davantage complémentaires.

En conclusion, si, fondamentalement, le Gouvernement paraît vouloir poursuivre un certain nombre d’actions fortes engagées en faveur de la jeunesse, notamment sur le terrain de l’emploi, nous nous inquiétons de voir ces actions éclatées et parfois redéfinies selon des modalités qui, à nos yeux, sont problématiques, surtout en termes d’efficacité à long terme.

Reste un volet du plan « Agir pour la jeunesse » que nous ne retrouvons pas dans vos annonces : celui de l’engagement civique des jeunes. Cette dimension citoyenne, que nous promouvons les uns et les autres sur le terrain, est pourtant importante. Il convient en effet de créer un climat, un état d’esprit favorable à l’engagement des jeunes dans la cité, car l’avenir de la jeunesse ne se limite pas à l’emploi. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Baylet

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, « quand les jeunes ont un espoir, c’est toute la société qui avance » : ces mots, prononcés par le chef de l’État à l’occasion de la signature des premiers emplois d’avenir, nous rappellent combien il est important que la jeunesse soit et reste l’une des grandes priorités gouvernementales de ce quinquennat. Dans un contexte économique très difficile, nous devons placer la question de l’insertion professionnelle au cœur de notre volonté politique, et redonner enfin confiance aux jeunes de notre pays.

Avec la crise, le taux de chômage des jeunes, particulièrement sensible aux fluctuations conjoncturelles, a littéralement explosé, pour atteindre 22, 7 %, et ce sont les moins qualifiés qui sont touchés de plein fouet : trois ans après avoir quitté le système scolaire, 40 % des non-diplômés sont au chômage, contre seulement 9 % des diplômés du supérieur. Ces chiffres sont édifiants. La situation est très inquiétante, mais elle ne doit en aucun cas devenir une fatalité à laquelle nous nous résignerions.

Le Gouvernement s’est d’ailleurs rapidement attelé à combattre ce fléau social, avec la création des emplois d’avenir, qui devraient redonner confiance à 150 000 jeunes de 18 à 25 ans sans qualification.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Baylet

Prochainement, la mise en œuvre des contrats de génération devrait également permettre de mener efficacement la bataille contre le chômage.

Nous l’avons déjà souligné, ces dispositifs pertinents constituent des mesures d’urgence, adoptées pour répondre à une situation économique et sociale dramatique et permettre à des jeunes désabusés de trouver un emploi ! Cela étant, nous savons que ces dispositifs ne permettront pas d’inverser la tendance en matière de chômage des jeunes. Nous ne pourrons donc pas faire l’économie d’une grande réforme de l’emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Baylet

Toutefois, cette réforme ne pourra être menée sans que soit engagée parallèlement une profonde réflexion sur la formation professionnelle. Ce serait un signal fort envoyé aux jeunes de notre pays, surtout à ceux d’entre eux qui sont le moins qualifiés. Vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, la mobilisation pour améliorer l’accès des jeunes à la formation doit être érigée en priorité.

Il s’agit là de deux chantiers particulièrement ambitieux, qui exigent la mobilisation de toutes les forces vives de la nation.

Actuellement – faut-il le rappeler ? –, chaque année, près de 140 000 jeunes sortent du système scolaire sans diplôme : moins d’un tiers d’entre eux trouvent rapidement un emploi durable. La plupart des jeunes non qualifiés subissent la précarité des emplois temporaires – « petits boulots », missions d’intérim ou contrats à durée déterminée rarement renouvelés –, quand ils ne sont pas tout simplement au chômage. Cinq à dix ans après la fin de leurs études, 9 % des diplômés de l’enseignement supérieur occupent un emploi temporaire, contre 26 % des non-diplômés.

Sur la base de ce constat, il est clair que la formation des jeunes doit devenir un enjeu central. Cela implique avant tout la mise en place d’une véritable politique de l’orientation à l’école. Actuellement, celle-ci ne joue pas son rôle d’articulation entre le milieu scolaire et le monde du travail ; de nombreux jeunes se trouvent ainsi poussés dans une voie qui ne les intéresse pas, qu’ils ont choisie par défaut et qui les conduit souvent vers des formations sans avenir.

L’orientation doit impérativement répondre à la fois aux besoins du marché de l’emploi et aux aspirations des jeunes, ainsi que prendre en compte les compétences de ces derniers. Elle doit leur offrir la possibilité de découvrir plusieurs environnements professionnels. Enfin, elle doit mobiliser plusieurs acteurs, au-delà des seuls conseillers d’orientation.

Par exemple, pourquoi ne pas nous inspirer du système institué par certains pays, dans lesquels l’orientation fait partie intégrante du cursus scolaire ? Ainsi, en Allemagne, des enseignants formés à cette discipline consacrent une partie de leur temps à l’orientation, en mettant l’accent sur les exigences du monde du travail. Les élèves peuvent également se rendre à des ateliers d’orientation ou à des entretiens individuels et bénéficier d’un bilan de compétences personnalisé.

Monsieur le ministre, vous avez la volonté de rénover le service public de l’orientation, en lien avec le ministère de l’éducation nationale.

Debut de section - Permalien
Thierry Repentin, ministre délégué

Tout à fait.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Baylet

Aujourd’hui, l’orientation s’apparente encore trop fréquemment à un véritable parcours du combattant. Il faut opérer un rapprochement de l’école et des entreprises et permettre un véritable accompagnement des élèves dans leur choix de formation. Épauler les jeunes sortis du système éducatif sans qualification – comme, du reste, les salariés qui souhaitent modifier leurs choix professionnels – est une très bonne chose ; c’est même une priorité.

Garantir une qualification à tous les jeunes est également l’un des objectifs fixés par la conférence sociale des 9 et 10 juillet derniers. À ce titre, je me félicite de la volonté du Gouvernement et de l’Association des régions de France de diviser par deux en cinq ans le nombre de jeunes sortant du système scolaire sans aucune formation. C’est une ambition qui vous honore, monsieur le ministre !

Je profite de cette occasion pour rendre hommage au travail des régions, qui, en 2012, auront consacré plus de 4 milliards d’euros à la formation et à l’apprentissage, jouant un rôle considérable en la matière.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Baylet

Je sais que la formation fait partie des compétences régionales qui seront renforcées dans le cadre du nouvel acte de la décentralisation. Je m’en félicite d’autant plus que l’insertion professionnelle fait appel à un mécanisme complexe, sans véritable concertation entre les différents acteurs. Permettez à cet égard au président de conseil général que je suis de préciser que, même si cela ne relève pas directement des compétences des départements, ceux-ci accompagnent néanmoins les régions dans ce travail de formation.

Par ailleurs, vous avez récemment reçu les partenaires de la table ronde sur la formation professionnelle pour discuter des contours d’un accord-cadre pour la formation des jeunes et des demandeurs d’emploi. Pouvez-vous nous en dire davantage à ce sujet ?

Garantir à tous une qualification représente un enjeu considérable. Cela nécessite que l’on s’attache à développer les différentes voies de la formation, notamment celle de l’alternance, véritable passeport pour l’emploi des jeunes. Celle-ci permet d’apprendre un métier sans quitter tout à fait le système scolaire, d’obtenir une qualification reconnue et un savoir-faire indiscutable. Nous le savons, son intérêt et son efficacité en termes d’insertion professionnelle font l’objet d’un large consensus : de fait, parmi les jeunes bénéficiant de ce dispositif, huit sur dix obtiennent un emploi.

À mon sens, s’agissant des jeunes les moins qualifiés, il faut renforcer les actions de lutte contre l’illettrisme dans le parcours vers l’insertion professionnelle. Trop d’élèves quittent l’école sans avoir acquis les savoirs de base pourtant indispensables pour prétendre à un emploi.

Enfin et surtout, si l’on veut mener une grande réforme de la formation professionnelle, il faudra évidemment revaloriser l’enseignement professionnel. C’est indispensable.

Pendant très longtemps – et c’est malheureusement encore largement le cas aujourd’hui –, les métiers manuels ont pâti d’une image négative auprès des jeunes, mais aussi et peut-être surtout auprès de leurs parents. L’orientation vers les filières technologiques ou professionnelles est souvent méprisée, considérée comme une voie d’échec qui accueille les « décrocheurs » et les élèves les moins bons. Pourtant, chaque année, certains métiers peinent à recruter, faute de candidats. Cette situation est totalement aberrante, particulièrement au regard du marché de l’emploi actuel.

Monsieur le ministre, la tâche qui vous incombe est ambitieuse et ardue. Soyez assuré que les sénateurs radicaux de gauche et, plus largement, ceux du RDSE, toutes sensibilités confondues, vous épauleront dans cette démarche, pour que la jeunesse de notre pays puisse garder espoir dans son avenir ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, fin septembre, à l’occasion de l’examen du projet de loi portant création des emplois d’avenir, nous avons rappelé la situation préoccupante des jeunes face à l’emploi, et plus particulièrement celle des moins qualifiés d’entre eux. De fait, le taux de chômage des jeunes est deux fois plus élevé que celui de l’ensemble des actifs, et atteint 45 % pour ceux qui n’ont pas de diplôme : les chiffres sont frappants.

L’étude publiée par la DARES en novembre 2011 soulignait que « les jeunes actifs cumulent deux handicaps sur le marché du travail : ils sont en moyenne peu diplômés, car au sein d’une génération ce sont les jeunes les moins diplômés qui entrent le plus tôt sur le marché du travail, et ils ont moins d’expérience professionnelle que les plus âgés ».

Monsieur le ministre, savoir que, depuis quelques jours, les premiers contrats « emplois d’avenir » sont signés ne peut donc que nous réjouir.

Certes, nous le savons, ce dispositif n’a pas à lui seul le pouvoir d’inverser l’évolution du taux de chômage des jeunes. Néanmoins, il faut saluer le pari de la formation que nous avons fait à travers ce dispositif, notamment via son ciblage sur les jeunes sans qualification, en situation de précarité.

Si la crise accentue les difficultés rencontrées par les jeunes qui s’insèrent dans la vie professionnelle, elle n’est pas seule responsable de leur taux de chômage élevé. C’est pourquoi il s’agit de s’intéresser à ce qui bloque aujourd’hui l’accès à l’emploi, à l’insertion professionnelle, à une situation personnelle stable.

Si, depuis plusieurs années, nous avons fait des jeunes une catégorie cible des politiques publiques et de leur insertion professionnelle un enjeu socioéconomique majeur, c’est bien parce que leur rapport à l’emploi a été profondément bouleversé – M. Larcher l’a particulièrement souligné – et parce que l’acquisition de la première expérience professionnelle ne va plus de soi.

Monsieur le ministre, je souhaite donc saisir l’occasion du débat que vous avez engagé pour évoquer trois points essentiels : l’orientation professionnelle, l’accueil et l’accompagnement, enfin et surtout l’évolution de l’organisation du travail et ses conséquences pour les jeunes.

En ce qui concerne les deux premiers points, je m’appuierai sur les résultats de l’enquête « orientation et formation professionnelle » conduite par la Jeunesse ouvrière chrétienne, la JOC.

Cette étude, qui s’est conclue à la fin de la semaine dernière par des états généraux régionaux, est particulièrement intéressante eu égard à la méthode utilisée et au public interrogé.

S’agissant de la méthode, dans le droit fil des principes de l’éducation populaire, cette enquête a été réalisée par des jeunes, pour les jeunes, …

Debut de section - Permalien
Thierry Repentin, ministre délégué

Absolument !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

… en mettant l’accent sur leur vécu, leurs préoccupations et leurs espérances, mais aussi sur leur analyse des modes d’organisation du travail dans lesquels on leur demande de s’insérer.

En ce qui concerne le public interrogé, plus de la moitié des jeunes ayant répondu à l’enquête ont des parents ouvriers, employés ou inactifs. Cette étude a donc permis l’expression de jeunes que l’on entend peu dans la sphère publique.

Que peut-on retenir de ces travaux ?

Tout d’abord, 40 % des jeunes interrogés ne se sont adressés à aucun acteur institutionnel, que ce soit un conseiller d’orientation, une mission locale ou un point information jeunesse, pour être aidés dans leur orientation.

Ensuite, les jeunes éprouvent des difficultés à réfléchir à leur avenir professionnel en fonction d’un métier. De surcroît, plus ils avancent en âge, moins ils ont une idée précise de leur avenir professionnel. Ce constat peut sembler paradoxal, mais il ne l’est pas tant que cela, puisque plus on avance en âge, plus on prend conscience de la réalité du monde du travail, de sa complexité et de l’évolution rapide des métiers.

Il ressort donc que disposer d’une information de qualité et diversifiée est une condition nécessaire, mais non suffisante, pour que les jeunes puissent construire leurs parcours d’orientation.

L’accompagnement tient une place tout à fait centrale.

Ces dernières années, et nous pouvons nous en féliciter, les formules d’accompagnement des jeunes rencontrant des difficultés d’insertion sur le marché du travail ont été renforcées, en lien avec Pôle emploi. Pour les missions locales, les permanences d’accueil, d’information et d’orientation, accompagner un jeune n’est plus seulement l’informer, l’orienter, mais aussi lui proposer des formations, des offres d’emploi, trouver avec lui des réponses pour accéder à un logement, pour pouvoir se déplacer vers son lieu de formation ou son travail ; c’est prendre en compte l’ensemble des aspects connexes à la réussite de son insertion professionnelle.

Or, si les missions sont renforcées, la multiplicité des interlocuteurs peut être un frein pour des jeunes peu habitués aux méandres de l’administration, d’autant que l’accès aux droits n’est pas une évidence et que l’on observe une montée du non-recours aux prestations parmi les « salariés pauvres » qui cumulent les situations de précarité – en matière d’emploi, de salaire, de couverture maladie –, catégorie dont font partie les jeunes précaires.

Le développement de l’offre de services doit s’accompagner d’une bonne coordination et d’une bonne articulation sur le territoire.

Or, nous ne pouvons ignorer les difficultés des structures concernées, à l’image de celles que rencontre Pôle emploi suite à la fusion des ASSEDIC et de l’ANPE. La réduction du personnel, la restructuration conduisent à gérer le fonctionnement et le tout-venant plutôt qu’à assurer les missions d’accompagnement en vue de répondre au mieux aux besoins des personnes. Un agent pour deux cents demandeurs d’emploi, c’est très peu…

Une meilleure articulation des intervenants et des niveaux d’intervention sur les territoires est donc indispensable.

Enfin, que nous disent les jeunes ? Ils nous disent qu’ils veulent un travail, un vrai ! En effet, toutes ces dispositions ne pourront suffire dans un contexte de délitement de l’organisation du travail et de la gestion des ressources humaines.

Parce que jeunes, parce qu’inexpérimentés, parce que demandeurs d’emploi, parce qu’en situation de précarité, ils sont davantage enclins à accepter des conditions de travail difficiles. Comme cela a été dit sur toutes les travées, ils sont surreprésentés parmi les titulaires de contrats atypiques, enchaînent sans fin stages, missions d’intérim, CDD, ce qui crée chez eux un sentiment de relégation. Dans ses enquêtes sur l’insertion des jeunes, le sociologue Bernard Eme le souligne : « Chaque nouvelle situation de travail ou d’insertion est ressentie comme une mise à l’épreuve pour une embauche définitive, mise à l’épreuve qui, finalement, ne fera que succéder à la précédente sans jugement donné. »

Qui plus est, au titre de ces contrats atypiques, les jeunes sont davantage assujettis à une tâche qu’inclus dans un collectif de travail et assimilés à l’entreprise. Soumis à l’exécution de cette tâche précise, ils n’ont pas accès à ce que le travail apporte d’autre que le salaire : la participation à un projet commun, la sociabilisation… Astreints à une course sans fin entre contrats, ils ne peuvent bénéficier de l’émancipation qui accompagne l’accès au travail et l’inscription dans un collectif.

Les jeunes expérimentent de fait les nouvelles formes d’organisation consommatrices de main-d’œuvre, cloisonnées, segmentées, au détriment d’une vision globale garante de sérénité et de créativité au travail, tant et si bien qu’ils semblent avoir fait une croix sur un emploi stable permettant de se projeter dans l’avenir et de construire sa vie. Ils expérimentent au quotidien le délitement d’une organisation du travail qui atomise les tâches et oublie que la reconnaissance individuelle passe par des mécanismes de reconnaissance collectifs et des appartenances sociales, familiales et professionnelles. Entre sentiment de déclassement et injustice sociale, l’expérience des jeunes préfigure celle de tous.

Aussi nos politiques publiques ne peuvent-elles se contenter d’additionner les dispositifs pour répondre au « mépris social » institutionnalisé ressenti par les jeunes. Est posée aujourd’hui la question des modes d’organisation du travail et de gestion des ressources humaines, qu’il nous faut repenser. Nous devons saisir, monsieur le ministre, l’occasion offerte par la conférence sociale pour prendre cette question en considération. Je vous remercie d’avoir ainsi ouvert le débat.

Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

M. Serge Dassault . Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le budget de l’emploi pour 2013, que seule l’Assemblée nationale aura eu l’occasion de voter, ne servira pas plus à sauvegarder l’emploi que les précédents, parce qu’il leur est identique et comporte les mêmes actions. Il ne propose rien de nouveau, et ce n’est pas en remplaçant les contrats aidés par des emplois d’avenir ou des contrats de génération que vous apporterez des solutions : c’est du cinéma, cela ne sert à rien !

Murmures sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Ce n’est pas ainsi que l’on va former des jeunes qualifiés, des techniciens capables de développer des produits innovants. Les emplois d’avenir sont des emplois administratifs, et non des emplois marchands, qui seuls ont une utilité ! Ne mettez pas trop d’espoirs en ces emplois d’avenir, car ils ne serviront à rien !

En effet, le chômage est dû au manque de travail : les entreprises n’embauchent pas parce qu’elles ne conçoivent pas suffisamment de produits compétitifs ! Pour remédier à ce problème, il faudrait d’abord travailler plus. À cet égard, le fameux pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi présente une lacune fondamentale : il n’évoque pas les 35 heures, qui sont pourtant une des causes déterminantes de notre manque de compétitivité. Il est évident que l’on ne travaille pas assez dans notre pays, mais on ne veut pas le comprendre ! De surcroît, ce dispositif coûte 21 milliards d’euros au budget.

Il faut de plus savoir que les entreprises n’embaucheront pas si elles ne peuvent pas licencier quand elles n’ont plus de travail à fournir à leurs salariés. La flexibilité de l’emploi est nécessaire !

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Si vous ne voulez pas l’instaurer, les entreprises n’embaucheront pas ! À l’inverse, mettre en œuvre la flexibilité de l’emploi leur permettrait d’embaucher tout de suite et ne coûterait rien à l’État. Mais les syndicats n’en veulent pas et vous vous rangez à leur avis, alors que le souci de l’efficacité devrait être au cœur de votre action !

Si les jeunes ne trouvent pas de travail, c’est aussi parce qu’ils ne savent rien faire, parce qu’on ne leur a rien appris, parce que l’éducation nationale ne fait pas son travail. §

Certes, ce n’est pas nouveau : cette situation dure depuis quinze ans, et nous en sommes tous responsables ! Il faut commencer par réformer l’éducation nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Il faut d’abord rétablir l’examen du certificat d’études. Des enfants qui ne savent pas lire, écrire et compter ne devraient pas pouvoir passer dans le secondaire, comme c’est le cas aujourd’hui. Une fois que ces enfants sont au collège, croyez-vous qu’ils progressent ? Bien sûr que non ! Il y en a même qui ne parlent pas français…

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

Ça suffit maintenant, monsieur Dassault, les limites sont dépassées !

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

M. Serge Dassault. Eh oui, dans ma ville, on nous impose d’inscrire dans les écoles des enfants qui viennent d’ailleurs et ne parlent pas français

Protestations sur les travées du groupe CRC, du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Besson

Vous proposez quoi ? De les mettre dans un ghetto ?

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

… mais on ne leur apprend pas notre langue. Ensuite, au collège, c’est pareil : ils ne travaillent pas davantage, échouent au brevet mais sont néanmoins admis sans difficulté au lycée, où ils ne travaillent toujours pas et ratent leur bachot. D’ailleurs, pourquoi vouloir absolument que tout le monde passe le bachot ? Cela ne sert à rien pour ceux qui ne veulent pas faire des études supérieures !

De même, le collège unique est une absurdité ! Il faut rétablir les collèges d’enseignement professionnel, afin de préparer les jeunes à la vie professionnelle à partir de 15 ans et de leur apprendre un métier. Beaucoup de jeunes ne s’intéressent pas à la géométrie ou à la chimie ; ils veulent apprendre un métier manuel, des choses concrètes.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

On manque de spécialistes dans tous les domaines. Il faut former les jeunes à ces emplois.

Sachant que 9 % des jeunes diplômés ne trouvent pas de travail, imaginez la situation des non-diplômés ! J’en connais, à Corbeil-Essonnes : une fois sortis de l’école, certains deviennent des délinquants, malheureusement, …

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Kerdraon

Et voilà, le raccourci est fait ! C’est honteux !

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

… d’autres se rendent à la mission locale. C’est à elle qu’il revient de mettre ces jeunes au travail, et non à Pôle emploi, dont la vocation est de s’occuper des personnes qui ont perdu leur emploi, c’est-à-dire des chômeurs, et non des jeunes n’ayant jamais travaillé.

Il faut donc donner des moyens aux missions locales, notamment afin qu’elles puissent offrir des formations aux jeunes. Par exemple, les missions locales doivent pouvoir financer la préparation du permis de conduire. Aujourd’hui, cela n’est pas possible !

On parle d’offrir aux jeunes une seconde chance, mais pourquoi ne leur donne-t-on pas une première chance ? Pourquoi ne leur assure-t-on pas dès le départ une formation professionnelle ? Pourquoi veut-on absolument conserver le collège unique ? Finissons-en avec tout cela !

En Allemagne, les jeunes trouvent du travail parce qu’on les forme d’emblée à un métier. On ne les prépare pas à passer des diplômes qui ne servent à rien !

Le problème, ce n’est donc pas uniquement le budget de l’emploi, qui atteint tout de même 50 milliards d’euros, une somme dépensée en pure perte, sachant qu’elle inclut 21 milliards d’euros d’allégements de charges au titre des 35 heures ! C’est tellement simple à comprendre ! En réalité, ce budget sert seulement à maintenir des emplois, il n’en crée pas. Or il faut former des ingénieurs, des techniciens capables de développer des produits nouveaux dans de bonnes conditions de compétitivité. Pour cela, il faut travailler plus et former plus !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

Le temps est dépassé ! On en a assez entendu !

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Laissez-moi parler ! Ce n’est pas une question politicienne, le problème de la formation des jeunes concerne tout le monde, au-delà des clivages partisans, et nous n’hésiterons pas à applaudir si vous prenez de bonnes initiatives pour lutter contre le chômage, ce qui n’est malheureusement guère le cas jusqu’à présent…

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Je voudrais insister sur la nécessité de réformer l’éducation nationale. Ce n’est pas votre mission, monsieur le ministre, je le sais bien, mais voilà dix ou quinze ans que nous entendons les ministres de l’éducation nationale successifs nous dire que 150 000 jeunes sortent chaque année du système éducatif sans aucun bagage. Le problème n’est pas nouveau ! C’est aussi de notre faute, nous n’avons pas fait le boulot !

Debut de section - Permalien
Thierry Repentin, ministre délégué

Sur ce point, je suis d’accord !

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

M. Serge Dassault. Pourquoi ne le feriez-vous pas ? Si ces 150 000 jeunes apprenaient un métier, il y aurait moins de problèmes dans les quartiers !

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Kerdraon

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’ai beaucoup apprécié les propos tenus par le président Larcher voilà quelques minutes. Je regrette simplement qu’il n’ait pas été entendu par le précédent gouvernement…

Par contre, j’ai beaucoup moins apprécié les propos tenus à l’instant par le sénateur Dassault. Je me suis cru revenu au XIXe siècle ! Il est heureux que M. Dassault n’ait jamais été ministre de l’éducation nationale !

Voilà quelques semaines, nous avons commencé à mettre en place les premiers emplois d’avenir. Ils s’adressent aux jeunes de 18 à 25 ans n’ayant pas ou peu de formation et ne trouvant pas de travail. C’est une première mesure qui se décline dans nos communes et nos départements.

Oui, ces emplois d’avenir constituent un immense espoir pour les jeunes concernés ! Ceux que j’ai pu employer grâce à ce dispositif dans ma commune de Plérin, dans les Côtes d’Armor, pourraient en témoigner.

Les orateurs précédents ont mis l’accent, à juste titre, sur la situation des jeunes peu diplômés. Pour autant, je ne voudrais pas que soient oubliées les difficultés spécifiques rencontrées par certains jeunes diplômés. En la matière, les ambitions sont complémentaires.

En France, près de 40 % des jeunes âgés de 25 à 34 ans sont titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur, ce qui fait de notre pays l’un des plus avancés en Europe ou au sein de l’OCDE. C’est une excellente chose, néanmoins de très fortes disparités existent entre nos territoires. En effet, certaines régions, comme l’Île-de-France, la Bretagne, Midi-Pyrénées ou Rhône-Alpes, se distinguent par un pourcentage de jeunes diplômés à la fois élevé et en progression. D’autres territoires, en revanche, comme les départements d’outre-mer, doivent être aidés pour atteindre de tels résultats.

Selon l’Association pour faciliter l’insertion professionnelle des jeunes diplômés, près d’un tiers des jeunes diplômés de l’année 2011 n’ont occupé aucun poste depuis la fin de leurs études et 43 % d’entre eux étaient employés en avril 2012. En outre, il convient de noter que 42 % de ces derniers étaient employés au titre d’un contrat précaire, c'est-à-dire un CDD ou une mission d’intérim de moins de six mois. Il s’agit là d’un véritable paradoxe !

Nous constatons ici la précarisation de la situation des jeunes, qui oscillent entre des périodes de chômage et des emplois qu’ils qualifient d’« alimentaires ». Pour ma part, je parlerais plutôt d’emplois précaires !

Dans ce domaine aussi, le gouvernement précédent a failli ! Il faut renouer le dialogue avec les partenaires sociaux, les régions, élaborer des stratégies de confiance pour redonner à la jeunesse une vision plus positive et moins sombre de l’avenir, de son avenir. Monsieur le ministre, je sais votre détermination et celle du Gouvernement en la matière.

Nos propositions doivent être justes et adéquates ; nous ne devons pas oublier les diplômés sous prétexte que les jeunes très qualifiés s’en sortent mieux, car ce n’est pas toujours vrai. Ce qui est dramatique, c’est qu’ils sont de plus en plus nombreux à accepter des postes sans perspectives de carrière et sans rapport avec leurs études.

De surcroît, les salaires d’embauche sont en chute libre en 2012, même dans les entreprises qui se portent bien, monsieur Dassault ! Plus de la moitié des diplômés de 2011 qui travaillent ont un salaire brut inférieur à 1 600 euros par mois. Les plus diplômés gagnent en moyenne 1 729 euros brut par mois, ce qui est peu au regard de leur niveau de formation.

La réalité de notre pays est cruelle : la barre des 3 millions de chômeurs a été atteinte ; cela représente près de 10 % de la population active. Aujourd’hui, les jeunes perdent confiance en l’avenir. Ils sont les premières victimes de la crise que nous traversons et de la précarisation accrue du marché du travail.

Cette aggravation du chômage des jeunes n’est malheureusement pas une surprise : elle résulte en partie de dix années d’inertie et de désengagement coupable de la part de l’ancien gouvernement. La « flexibilité » dont parlait le sénateur Dassault repose sur leurs épaules : la moitié des salariés embauchés en contrat à durée déterminée, en stage ou en apprentissage ont moins de 29 ans, alors que la moitié des salariés recrutés sous contrat à durée indéterminée ont plus de 43 ans.

En outre, les jeunes servent de variable d’ajustement des effectifs en période de crise. Ainsi, la proportion d’intérimaires est plus de deux fois supérieure parmi les jeunes que dans l’ensemble de la population active occupée. Ce sont eux, mes chers collègues, qui grossissent les cohortes de chômeurs. On n’est finalement pas très loin de la fameuse « armée de réserve de travailleurs » dont parlait Karl Marx !

Ce sont également eux qui subissent l’essentiel de la précarité : 17 % des jeunes de 18 à 29 ans disposent de revenus inférieurs au seuil de pauvreté, contre 13 % de l’ensemble de la population ; en 2008, plus d’un pauvre sur deux avait moins de 35 ans

Le chômage des jeunes résulte de plusieurs facteurs.

Le premier est bien entendu l’école, 120 000 jeunes sortant chaque année du système scolaire sans formation. C’est pourquoi nous approuvons le Gouvernement lorsqu’il fait de l’éducation nationale une de ses priorités.

L’accompagnement est un autre facteur décisif. Je souhaite souligner ici, après Claude Jeannerot, le rôle important joué par le réseau des missions locales, la mobilisation et le professionnalisme de ses conseillers. Nous nous réjouissons donc de l’annonce par le Gouvernement du renforcement des moyens d’accompagnement des missions locales, à hauteur de 30 millions d’euros pour la première année.

La difficile adéquation entre offres et demandes d’emploi est un troisième facteur. Les rapprocher est un casse-tête pour tous les gouvernements depuis trente ans. Depuis 2008, faute de moyens humains suffisants, Pôle emploi a laissé en jachère la prospection des offres d’emploi, pour assurer l’inscription des chômeurs…

Alors oui, monsieur le ministre, il était urgent de prendre la question de l’emploi des jeunes à bras-le-corps ! « Aux jeunes, ne traçons pas un seul chemin ; ouvrons-leur toutes les routes », disait Léo Lagrange. Mes chers collègues, c’est à cette tâche que nous nous sommes attelés, avec le Gouvernement ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la situation de l’emploi est particulièrement préoccupante, le chômage atteint un niveau historiquement élevé, et l’on peut craindre que la mobilisation des contrats aidés, la mise en place des emplois d’avenir et même celle des contrats de génération ne suffisent pas à inverser la tendance.

Voici quatre ans s’est déclenchée une véritable catastrophe sociale, dont l’ampleur est particulièrement inquiétante. Ce sont toujours les mêmes catégories sociales, les mêmes catégories d’âge et souvent les mêmes territoires qui sont le plus touchés. La réponse à un tel défi dépasse la seule politique de l’emploi ; elle relève de la politique économique générale.

Le pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi qui a été annoncé récemment vise naturellement à répondre à cette problématique. Compte tenu du contexte, il sera sans doute nécessaire d’envisager de le compléter dans les prochaines semaines ou dans les prochains mois par un soutien actif à l’investissement. Cela ne sera cependant possible que si l’Union européenne veut bien considérer que ce type d’investissements n’a pas à être pris en compte dans le calcul du déficit public…

Pour autant, la politique de l’emploi n’est pas réduite à ne jouer qu’un rôle subsidiaire, ne serait-ce qu’eu égard à l’importance des moyens mis en œuvre à ce titre : l’ensemble des dispositifs concernant de près ou de loin l’emploi mobilisent près de 100 milliards d’euros chaque année. Le problème est qu’aucun de ces dispositifs, qui visent des objectifs et des publics différents, ne fait l’objet d’une évaluation, qu’elle soit régulière ou ponctuelle. La collectivité ne se donne donc pas réellement les moyens d’atteindre une efficacité optimale.

Je n’hésite pas à dire, monsieur le ministre, que c’est le poids des habitudes et des corporatismes, plutôt que le souci d’atteindre des objectifs crédibles, qui gouverne aujourd’hui le système de formation et d’emploi.

Nous ne pouvons évidemment pas nous satisfaire d’un tel constat ! Il nous faut envisager des transformations qui devront s’inscrire dans la durée, et ne pas nous limiter à des réformes ponctuelles. Trois au moins me paraissent indispensables : pratiques, opérationnelles, elles sont de nature à bouleverser certaines des habitudes auxquelles je faisais allusion.

En premier lieu, il est absolument nécessaire de mettre enfin un pilote dans l’avion. Sur le terrain, malgré la création des maisons de l’emploi et la fusion des ASSEDIC et de l’ANPE, la multiplication des acteurs a encore été accrue. Ils avouent consacrer près de la moitié de leur temps à se coordonner, au lieu de mettre en place des politiques actives. Il faut désigner un responsable, que ce soit l’État ou les régions. Dans les bassins d’emploi, un seul interlocuteur doit être en mesure d’actionner l’ensemble des leviers, en coopération avec les collectivités locales et les partenaires sociaux, de définir les objectifs sur une durée raisonnable, par exemple triennale. Son action devra être évaluée et permettre d’atteindre des résultats qui auront préalablement été discutés avec l’ensemble des parties prenantes. À défaut d’un tel regroupement sous une même autorité, nous n’atteindrons pas l’efficacité nécessaire sur le terrain.

En deuxième lieu, il faut aller plus loin dans la fongibilité. L’ensemble des crédits, qu’ils relèvent des politiques de l’emploi, de l’indemnisation du chômage ou de la formation, doivent pouvoir être mobilisés en fonction des besoins locaux. Cela suppose de faire tomber les barrières qui peuvent exister entre différents interlocuteurs, entre différents systèmes.

En troisième lieu, les partenaires sociaux doivent être placés devant leurs responsabilités. J’ai apprécié que, lors de sa conférence de presse, le Président de la République invite les syndicats et le patronat à s’engager au service de l’emploi et de la compétitivité. Mon seul regret est qu’il ait indiqué que si les partenaires sociaux ne prenaient pas leurs responsabilités, alors l’État les prendrait à leur place, une fois de plus. Dans ce domaine, l’État ne doit pas se substituer aux partenaires sociaux : il faut exiger des organisations syndicales, patronales et de salariés, qu’elles fassent en sorte d’orienter les moyens consacrés à l’indemnisation du chômage ou à la formation vers la lutte contre le chômage, la formation des personnes les moins qualifiées et la mobilisation de l’ensemble des acteurs autour de ces objectifs.

De ce point de vue, concernant l’emploi des jeunes, nous persévérons, d’une certaine manière, dans deux erreurs classiques.

La première est de vouloir mettre en place des dispositifs spécifiques. Je comprends l’intérêt des emplois d’avenir ou des contrats de génération : il faut répondre à l’urgence. Mais l’instauration de mesures spécifiques pour les jeunes conforte les employeurs dans l’idée qu’ils ne peuvent embaucher un jeune qu’à condition de pouvoir bénéficier de tels dispositifs.

Trente ans après la mise en place des missions locales, trente ans après les efforts engagés sur l’initiative de Bertrand Schwartz, nous devons ramener la politique de l’emploi des jeunes dans le droit commun, d’autant que, en mettant en place des mesures spécifiques, nous risquons de créer des tensions entre les diverses catégories d’âge, qui ont le sentiment de ne pas être traitées de la même manière alors qu’elles font face aux mêmes difficultés.

La seconde erreur classique, d’ailleurs difficilement évitable, est de faire une partie du travail qui incombe aux partenaires sociaux, et plus encore aux branches professionnelles. Sur le terrain, il est frappant de constater que ce sont les services des missions locales ou de Pôle emploi, ainsi que les élus pour une part, qui sont de fait chargés d’aider les jeunes à accéder à l’emploi. C’est pourtant la responsabilité des branches professionnelles. Où sont leurs moyens, leurs crédits, leurs ressources, leurs agents sur le terrain ? À quoi servent ces organisations, si elles se contentent de gérer les structures des organismes paritaires collecteurs agréés ou les secteurs particulièrement protégés, et de mobiliser les financements qui y sont attachés ? Peut-on considérer que le service public est parfaitement rendu dans ces conditions ?

Si nous voulons obtenir des résultats, en particulier en matière d’emploi des jeunes, en faisant en sorte que ces derniers puissent entrer plus tôt sur le marché du travail, il faut mobiliser les branches professionnelles, leur demander de s’impliquer sur le terrain et de servir d’intermédiaires entre les jeunes et les employeurs qu’elles représentent. Cela suppose de mettre en œuvre les moyens nécessaires pour accompagner la mise en place des contrats en alternance. Je pense en effet que c’est en s’appuyant sur ce dispositif, plutôt que d’en inventer d’autres, et en encourageant la signature de contrats à durée indéterminée que l’on pourra apporter une solution satisfaisante et pérenne au problème de l’emploi des jeunes.

Monsieur le ministre, je me réjouis de la volonté du Gouvernement d’apporter à ces questions des réponses rapides, mais je pense que nous ne pourrons pas faire l’économie d’une réflexion plus globale sur ce que doit être une politique de l’emploi mobilisant les moyens alloués à l’indemnisation du chômage, à la formation ou à la défense de l’emploi via des allégements de charges et autres mesures. Nous devons engager aujourd’hui une transformation radicale des politiques de l’emploi menées depuis trente ans. Il est naturellement plus difficile de conduire de telles réformes en période de crise, mais cela est indispensable pour sortir de cette crise. §

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Repentin

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d’abord remercier le groupe socialiste d’avoir pris l’initiative de ce débat sur l’emploi, la formation et la qualification des jeunes, qui fait écho à la priorité à la jeunesse affirmée par le Président de la République. Cette priorité à la jeunesse doit infuser dans toutes nos actions, toutes nos politiques, en premier lieu bien sûr celles de l’emploi et de la qualification.

À cet égard, je veux dire à M. Bockel que mes objectifs ne sont pas disjoints de ceux d’autres membres du Gouvernement. Chacun l’a compris, la jeunesse constitue une priorité transversale. D’ailleurs, un comité interministériel dédié à ce sujet se réunira au tout début de l’année 2013.

Les questions qui nous occupent ne sont pas déconnectées de celles de l’école, de l’accès aux savoirs ou de l’accès au logement : savoirs, compétences et sécurité matérielle sont indissociables pour la réussite d’un parcours professionnel.

Mon collègue Vincent Peillon a participé dans cet hémicycle, voilà quelques mois, à un débat riche sur les conditions de la réussite à l’école. Moi-même, j’ai eu récemment l’occasion d’aborder ici même la question de l’insertion professionnelle des jeunes lors de l’examen de la proposition de loi relative aux écoles de production.

La thématique de l’emploi et de la qualification des jeunes est complexe, car elle combine des facteurs très divers. Elle concerne aussi bien nos politiques de formation que nos politiques sociales, d’aménagement du territoire, de logement, de transport et d’accompagnement. Elle est également liée aux politiques de ressources humaines des entreprises, lesquelles sont souvent réticentes à l’embauche de jeunes sans expérience. De plus, elle implique de nombreux acteurs institutionnels ou associatifs, dont la coordination est un objectif en construction permanente.

Il y a là un enjeu majeur pour notre société, une urgence humaine, sociale, sociétale et même économique à agir en faveur de l’emploi des jeunes, afin de leur assurer une place dans la société.

Or le constat est édifiant.

Premièrement, ce sont les jeunes qui sont particulièrement touchés par le chômage. Avec un taux de chômage dramatiquement élevé, s’établissant aujourd’hui à près de 23 %, contre 10 % pour l’ensemble de la population active, notre jeunesse subit de plein fouet les effets de la crise.

Pis encore, on observe une inégalité territoriale : 43 % des jeunes sont au chômage dans les quartiers dits « défavorisés », et la situation est plus grave encore outre-mer.

Ce triste constat nous oblige, et le Gouvernement est résolu à tout faire pour enrayer ce phénomène.

Deuxièmement, on note que les jeunes sont les premières victimes de la précarité sur le marché du travail, et ce quel que soit le niveau de diplôme.

Sur le front de l’emploi, les jeunes partent bien souvent désavantagés, du fait de leur position d’entrants sur le marché du travail. De ce fait, il leur est difficile d’accéder à un emploi stable au cours de leurs premières années de vie active. Celles-ci sont très souvent marquées par une succession de stages et de contrats courts, entrecoupés de périodes de chômage, l’âge moyen d’accès au CDI se situant aujourd’hui aux alentours de 28 ans. Globalement, près d’un tiers des jeunes qui travaillent sont employés sous contrat temporaire. Leur situation de primo-accédants à l’emploi les rend également particulièrement sensibles aux variations de conjoncture.

Troisièmement, la situation est plus dramatique encore pour les jeunes qui ne détiennent aucune qualification.

Accéder au diplôme demeure, nous le savons, une protection contre le chômage. Sans être une garantie, le diplôme reste un atout précieux pour entrer sur le marché du travail, puisque le taux de chômage des non-diplômés ou des diplômés du seul brevet des collèges est quatre fois et demie plus élevé que celui des diplômés du supérieur. Je le dis à l’intention de M. Le Scouarnec, la situation s’est encore aggravée au cours des dernières années : 40 % des jeunes sortis du système scolaire sans diplôme en 2007 étaient au chômage trois ans plus tard, contre 33 % de ceux qui ont quitté l’école sans diplôme en 2004.

Cette situation inacceptable est celle que me décrivent les jeunes que je rencontre un peu partout en France lorsque je vais parrainer des emplois d’avenir. Tous, à Marseille, à Toulouse, à Clermont-Ferrand, à Saint-Etienne, dans le Doubs, s’accordent à dire la même chose : « on nous fait toujours la même réponse : pas de qualification, pas d’expérience, vous n’êtes pas employable ». C’est tout de même un comble : en somme, on reproche aux jeunes d’être jeunes !

Pourtant, la jeunesse est la richesse, le capital de notre pays. Ce que veulent les jeunes, c’est non pas l’assistanat, mais l’autonomie, ce qui est tout à fait différent !

Parce que la réussite de la jeunesse sera la nôtre, investir en sa faveur constituera notre réussite collective. C’est pourquoi – certains d’entre vous l’ont souligné –, dès son entrée en fonctions, le Gouvernement a pris des mesures fortes en direction de la jeunesse et de l’école.

La grande conférence sociale qui s’est tenue en juillet dernier en a été le moteur. Nous avons défini notre feuille de route en nous appuyant sur la même ligne de force : le dialogue avec les partenaires sociaux, bien sûr, mais aussi avec tous les autres acteurs, notamment les collectivités territoriales. En effet, pour être partagées, les politiques doivent être co-élaborées avec celles et ceux qui doivent les appliquer. Ce dialogue a été concluant pour ce qui concerne le contrat de génération ; j’espère qu’il le sera également s’agissant de la sécurisation de l’emploi.

Dans le domaine de la formation professionnelle et de l’apprentissage, l’action que je porte avec Michel Sapin s’organise selon quatre axes : ouvrir un accès à la qualification pour tous les jeunes, développer l’alternance, réformer le service public de l’orientation et, enfin, permettre un accès à l’emploi plus sécurisant pour les jeunes.

Sur le plan de la méthode, cette action s’appuie sur deux grands principes : le dialogue social et territorial, d’une part, l’interministérialité, d’autre part. Ce n’est en effet qu’en « jouant collectif » au sein de l’État et en conjuguant nos efforts avec ceux des partenaires sociaux et des collectivités territoriales que nous mènerons une action efficace.

Sur ce point, je suis d’accord avec Gaëtan Gorce : il faut que chacun joue sa partition, mais dans un cadre étroitement coordonné. Telle est bien ma volonté. D’ailleurs, dans le cadre des travaux préparatoires du projet de loi de décentralisation, je propose de mettre en place une gouvernance unifiée des politiques d’emploi et de formation, car ces deux politiques sont liées et associent l’État, les régions et les partenaires sociaux.

Le premier axe est donc l’offre d’un accès à la qualification pour tous les jeunes.

Le 12 septembre dernier, à l’occasion d’une déclaration commune à l’Élysée, l’État et l’ensemble des régions ont confirmé l’objectif très ambitieux de diviser par deux en cinq ans le nombre de jeunes entrant sur le marché du travail sans qualification.

Pour donner une portée concrète à cette déclaration, je viens d’envoyer aux préfets, ainsi qu’aux présidents de région, un document-cadre, qui a lui aussi fait l’objet d’une large concertation avec les participants de l’atelier « formation » de la grande conférence sociale, visant à mettre en place, dans chaque région, des « pactes régionaux pour la réussite éducative et professionnelle des jeunes » avant la fin du premier trimestre de 2013.

Ces pactes tendront à coordonner les efforts de chaque acteur – les autorités académiques via la mission générale d’insertion, le service public de l’emploi par le biais des missions locales, les régions au travers des dispositifs de formation continue, les partenaires sociaux porteurs de l’accord national interprofessionnel des jeunes de 2011, les dispositifs dits « de nouvelle chance », tels que les écoles de la deuxième chance ou l’établissement public d’insertion de la défense –, afin de lutter ensemble plus efficacement contre le décrochage et de proposer à chaque jeune sans qualification une solution adaptée pour réamorcer un parcours de formation.

Parmi les solutions qui seront déclinées dans ces pactes, il y a évidemment l’alternance, notamment pour ce qui concerne les premiers niveaux de qualification ; j’y reviendrai ultérieurement.

Ces pactes ne sont pas un effet d’annonce, un « coup de communication » ; ils marquent l’engagement d’un effort qui, pour porter ses fruits, s’inscrit dans le temps. J’ai demandé aux préfets de région et aux présidents de conseil régional d’en organiser sans tarder la mise en œuvre.

Je m’assurerai personnellement de la mobilisation et de la bonne coordination des différents intervenants, car je veux donner à ces pactes un caractère très opérationnel. Si vous le souhaitez, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous en rendrai compte au cours de l’année prochaine.

Réinscrire les jeunes dans des parcours de formation, mais aussi leur mettre le pied à l’étrier pour obtenir un emploi, telle est la finalité des emplois d’avenir, qui sont destinés aux jeunes peu ou pas qualifiés, ceux que les refus d’embauche successifs conduisent aujourd’hui au découragement, voire au désespoir.

Ces jeunes, qui ont souvent connu un échec scolaire, parfois douloureux, ne sont généralement pas en capacité de reprendre une formation qualifiante. D’ailleurs, ne les opposons pas à ceux qui sont en apprentissage. Dès lors, la mise en œuvre des emplois d’avenir a deux objectifs : d’une part, permettre aux jeunes bénéficiaires de connaître une expérience professionnelle réussie, inscrite dans la durée – trois ans, cela compte dans un curriculum vitae –, et, d’autre part, leur offrir, alors qu’ils sont peu ou pas diplômés, un parcours d’accès à une qualification reconnue. En effet, c’est la première fois, dans l’histoire du droit du travail, qu’une formation qualifiante ou diplômante obligatoire est inscrite dans un contrat de travail.

Un peu partout sur le territoire, Michel Sapin et moi-même partons à la rencontre de ces jeunes, pour la signature des premiers contrats et des conventions-cadres avec les collectivités et les associations. Croyez-moi, il est extrêmement plaisant de pouvoir mettre des visages sur un dispositif que l’on a défendu avec conviction devant le Parlement et que vous avez voté. En voyant la satisfaction de ces jeunes quand ils signent leur contrat, on comprend l’importance que revêt pour eux ce dispositif volontariste en matière d’insertion et de formation.

Nous avons été cohérents dans la mise en place du dispositif, y compris d’un point de vue budgétaire, puisque les missions locales « jeunes » bénéficieront de 30 millions d’euros supplémentaires en 2013. Cela faisait bien longtemps qu’elles n’avaient pas reçu un tel coup de pouce de la part de l’État !

Debut de section - Permalien
Thierry Repentin, ministre délégué

Avec 150 000 emplois d’avenir prévus en 2014, dont 100 000 dès 2013, l’objectif est ambitieux. Toutefois, au-delà des chiffres, nous concentrerons nos efforts sur la qualité de ces emplois. En la matière, je voudrais bien évidemment insister sur le volet de la formation, qui leur est consubstantiel, ce qui n’avait jamais été le cas auparavant pour aucun contrat aidé.

À cet égard, je veux dire à M. Larcher que la comparaison faite par la DARES ne tient pas : les contrats aidés du passé ne prévoyaient pas de formation obligatoire. Je souhaiterais que la DARES puisse examiner, dans trois ou quatre ans, quels auront été les effets réels de ce nouveau dispositif.

Debut de section - Permalien
Thierry Repentin, ministre délégué

On m’objecte parfois qu’il crée une dépense importante pour l’État, son coût étant de plus de 2 milliards d’euros. Pour ma part, j’estime qu’il s’agit non pas d’une dépense, mais d’un investissement pour l’avenir.

Debut de section - Permalien
Thierry Repentin, ministre délégué

Aujourd’hui, l’ensemble des acteurs compétents sont dans les starting-blocks.

Ainsi, nous avons voulu associer les partenaires sociaux, monsieur Gorce, au développement des emplois d’avenir. Pour ce faire, depuis le mois de juillet dernier et la grande conférence sociale, nous nous sommes employés à rebâtir la confiance. Les partenaires sociaux gestionnaires du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels, le fameux FPSPP, avec lesquels nous avons abouti à un accord sur une nouvelle convention-cadre pour la période 2013-2015, consacreront, en 2013, 30 millions d’euros à un appel à projets dédié aux compétences transversales et à la sécurisation du parcours professionnel des jeunes en emploi d’avenir. Ils ont compris qu’il s’agissait d’un objectif essentiel de l’État et ont accepté, parce qu’ils ont confiance, de mettre de l’argent dans un dispositif créé par la loi, dont ils auraient pu se détourner.

Les organismes paritaires collecteurs agréés vont, quant à eux, s’engager sur leurs fonds mutualisés à hauteur de 40 millions d’euros afin d’assurer la formation des jeunes en emploi d’avenir.

L’État sera également actif, puisqu’il mobilisera au niveau national le Fonds social européen à concurrence de plus de 10 millions d’euros pour apporter un appui direct aux OPCA.

Enfin, les collectivités territoriales sont elles aussi impliquées dans la mise en place de ce dispositif. Un décret en cours de finalisation prévoit une contribution spécifique de 0, 5 % pour financer, au sein du CNFPT, le Centre national de la fonction publique territoriale, des formations dédiées aux jeunes embauchés en leur sein.

C’est la première fois que le CNFPT a obligation d’accompagner la formation de jeunes employés sous contrats de droit privé au sein des collectivités territoriales.

Je viens d’écrire aux présidents de région, qui commencent à adapter leurs dispositifs de formation à destination des jeunes en emploi d’avenir, afin de souligner qu’il s’agit pour eux moins d’un surcoût que d’un investissement.

Cet investissement collectif massif dans la formation des jeunes en emploi d’avenir illustre bien le « nouveau modèle français » voulu par le Premier ministre et caractérisé par le dialogue, la construction en commun, la détermination d’objectifs partagés et l’engagement au service de nouveaux droits.

Le deuxième axe est le développement de l’alternance.

La formation et la qualification des jeunes, ce sont également les contrats en alternance, qui en demeurent l’un des leviers essentiels.

Je souhaite vous faire part de quelques convictions et perspectives à cet égard.

Les voies d’accès à la qualification professionnelle sont diverses : les voies de l’école, de l’apprentissage et du contrat de professionnalisation doivent être développées. Il est bon de le répéter, le Gouvernement entend faire jouer non pas la concurrence, mais la complémentarité entre ces différentes modalités de formation. Toutes ont leur utilité, toutes sont des voies de réussite d’une égale dignité. Chaque jeune doit pouvoir trouver son chemin au sein de nos dispositifs de formation.

Notre effort collectif doit porter sur l’adaptation de la carte des formations aux besoins et aux mutations de notre économie. J’ai dit « adaptation », et non pas « adéquation », car l’enjeu est de donner à chacun un niveau de qualification qui lui permette de trouver rapidement un emploi et, en même temps, d’être doté de suffisamment de compétences transversales pour construire son propre parcours et ses propres mobilités.

Cette question de la carte des formations, de son élaboration et des responsabilités dans sa mise en œuvre, qui intéresse particulièrement la Haute Assemblée, sera traitée dans le projet de loi de décentralisation dont vous serez prochainement saisis.

Si la carte des formations doit évidemment être construite à partir des besoins recensés dans les bassins d’emploi, il ne peut y avoir une carte par bassin d’emploi. Ce serait un enfermement, et cela ne permettrait pas d’offrir une variété de formations aux jeunes. Je le répète, le bon niveau de régulation est celui de la région ; telle est, du moins, l’idée que nous développerons. C’est en effet à cet échelon que l’on peut mettre en perspective besoins en matière d’emploi et solutions de formation.

En ce qui concerne la complémentarité, des passerelles entre les voies de formation doivent être assurées. C’est pourquoi tout ce qui va dans le sens du rapprochement des différentes voies au sein d’un même lieu est positif. En effet, outre qu’elles permettent au jeune de progresser dans un parcours sous le statut qui lui conviendra le mieux, les passerelles constituent aussi un filet de sécurité contre les échecs.

Au demeurant, cette complémentarité est de plus en plus fréquente sur les campus des métiers. Elle pourrait se développer davantage au sein des lycées professionnels. C’est un sujet dont je discute avec mon collègue Vincent Peillon.

Un problème d’image demeure incontestablement. Il est lié à notre histoire, à notre culture, à une tendance à survaloriser les modèles académiques par rapport aux autres modalités d’acquisition de connaissances.

Le développement de l’apprentissage que l’on constate depuis un certain nombre d’années dans l’enseignement supérieur est non seulement une bonne chose en soi, mais il présente en plus l’avantage d’avoir un effet positif sur l’image de l’apprentissage. Je m’en réjouis. Toutefois, il ne faudrait pas que les moyens nécessaires à la formation des premiers niveaux de qualification, c'est-à-dire les niveaux V et IV, s’en trouvent dans le même temps réduits.

Debut de section - Permalien
Thierry Repentin, ministre délégué

Je pense que beaucoup d’entre vous partagent cette analyse.

Je porterai une attention toute particulière à ces premiers niveaux de qualification : l’alternance doit demeurer une voie privilégiée pour l’insertion professionnelle des jeunes.

M. Gérard Larcher acquiesce.

Debut de section - Permalien
Thierry Repentin, ministre délégué

Monsieur Le Scouarnec, nous ne sommes pas favorables à l’entrée en apprentissage dès 14 ans. Ce n’est pas une découverte ; nous l’avons déjà dit par le passé. Il est en effet impensable de placer des jeunes en contrat de travail à 14 ans. Cela ne signifie pas pour autant que nous soyons hostiles à la mise en place de dispositifs de découverte des métiers, offrant aux jeunes concernés un contact plus étroit avec les pédagogies du « faire » et leur permettant de se préparer ainsi à l’entrée dans un contrat d’apprentissage ou en alternance.

En ce qui concerne le chapitre de la formation des premiers niveaux de qualification, j’évoquerai brièvement l’AFPA pour répondre à des inquiétudes et à des interrogations légitimes soulevées notamment par Mme Demontès, M. Jeannerot et M. Larcher.

Il faut le dire, à notre arrivée aux responsabilités, nous avons trouvé l’AFPA dans une situation dramatique : l’association était au bord du dépôt de bilan, menacée d’une rupture de trésorerie dès l’été.

Debut de section - Permalien
Thierry Repentin, ministre délégué

À la fin du mois de juin, lorsque j’ai pris mes fonctions, on m’a avisé qu’il n’y avait pas de quoi assurer la paye des 9 300 salariés pour le mois de juillet. Telle était la réalité !

Nous avons travaillé d’arrache-pied pour maintenir le soutien des banques, changer la gouvernance, assurer les bases juridiques des paiements dus à l’AFPA – vous y avez d’ailleurs contribué en votant le projet de loi portant création des emplois d’avenir, ce qui nous a permis de délivrer 20 millions d’euros –, accompagner l’établissement d’un plan de redressement.

Le nouveau président de l’association, M. Yves Barou, dont je salue le dévouement, s’est dépensé sans compter, depuis sa nomination, pour rétablir le dialogue social en interne, ce qui n’était pas simple, et construire les bases du rétablissement de la situation. Un plan de refondation a été établi ; il est actuellement soumis au Comité interministériel de restructuration industrielle, le CIRI.

L’État, nous l’avons dit et répété, prendra ses responsabilités pour soutenir ce plan au côté du pool bancaire. Les discussions sont en cours. Je ne peux évidemment pas en dévoiler le détail aujourd’hui, mais nous nous engagerons sur deux points essentiels : le patrimoine et la capitalisation.

Le patrimoine appartient à l’État. Nous en confierons la gestion à l’AFPA, afin que celle-ci puisse en disposer et investir pour son activité, peut-être d’ailleurs en recourant à la formule du bail emphytéotique administratif.

En ce qui concerne la capitalisation, il faut que l’AFPA soit dotée de capitaux propres pour faire face à ses besoins de financement. Nous participerons au tour de table.

Il existe une autre piste de travail, dont vous aurez à connaître lors de l’examen du projet de loi de décentralisation : il faut déterminer quelle part de formation professionnelle pourrait être reconnue en tant que service d’intérêt économique général, ou SIEG. Je pense surtout aux dispositifs destinés aux publics les plus éloignés de l’emploi. Cela permettrait d’avoir une commande plus facile, euro-compatible, de la part des donneurs d’ordres qui s’adressent aujourd'hui à l’AFPA.

Nous ne sommes pas sortis des difficultés, mais nous sommes sur la bonne voie. La mise en œuvre du plan exigera des efforts des personnels de l’AFPA, une réduction de ses charges et une redéfinition de la carte de ses formations. Si de telles aides sont apportées, c’est pour assurer la pérennité de cet organisme. Je pense pouvoir affirmer que l’AFPA ne disparaîtra pas ; je ne me serais pas avancé sur ce point au mois de juin dernier. Cela a été rappelé, des solutions avaient été proposées en vain à un gouvernement précédent ; je forme le vœu que le gouvernement actuel les entende…

Pour conclure mon propos sur l’accès à un premier niveau de qualification, et plus spécifiquement sur l’alternance, j’indique que je veux une alternance marchant sur ses deux jambes : la quantité et la qualité.

Comme l’a souligné Mme Demontès, le taux de rupture en apprentissage présente de fortes disparités selon les secteurs d’activité et les diplômes préparés. C’est pourquoi il est utile de soutenir l’accompagnement renforcé des apprentis et de leurs maîtres d’apprentissage, qui est de nature à sécuriser les parcours.

Sur ce point précis, lors de l’examen en séance publique des crédits du compte d’affectation spéciale du Fonds national de développement et modernisation de l’apprentissage, l’Assemblée nationale a adopté un amendement tendant à permettre l’expérimentation de modalités originales d’accompagnement des apprentis qui connaissent des difficultés particulières. Je regrette que le Sénat ne soit pas en mesure de confirmer cette démarche…

Debut de section - Permalien
Thierry Repentin, ministre délégué

Des expériences de ce type se développent dans plusieurs régions, notamment à la suite de la parution du Livre vert de 2009 sur la mobilité des jeunes. Il est donc apparu intéressant d’étendre cette démarche en y allouant à titre expérimental 2 millions d’euros pour prévenir les ruptures de contrats d’apprentissage.

Un tel effort en faveur de la qualité de l’apprentissage ne signifie pas pour autant que nous sacrifions le développement de l’alternance, comme je l’entends dire parfois, à tort, par des personnes qui connaissent sans doute mal le sujet.

D’ailleurs, les chiffres des contrats en alternance à fin octobre sont très encourageants, comparés à ceux de l’année 2011 à la même date. En effet, si le nombre des contrats de professionnalisation a connu un léger tassement, celui des contrats d’apprentissage enregistrés a, pour sa part, progressé de 8 %. Dans une période où tous les indicateurs sont à la baisse, un tel résultat représente une éclaircie. C’est assez remarquable dans un contexte économique difficile, où les employeurs sont plutôt enclins à ne pas signer de contrats pour insérer dans leurs effectifs des jeunes en professionnalisation ou en apprentissage. Cela prouve peut-être que nous avons réussi à instaurer un climat de confiance avec l’ensemble des acteurs de cette voie de formation.

La franchise et le parler-vrai sont les moteurs de notre démarche. Il en est ainsi de l’objectif d’atteindre le chiffre de 500 000 apprentis en 2017, que j’ai fixé voilà quelques semaines maintenant. C’est, je le crois, parce que cet objectif est réaliste qu’il est pris beaucoup plus au sérieux par les professionnels que les déclarations fracassantes faites ces dernières années sur la progression du nombre d’apprentis.

Enfin, une réflexion est engagée sur la taxe d’apprentissage, en vue de rationaliser le réseau de collecte et de parvenir à une meilleure répartition du produit.

Debut de section - Permalien
Thierry Repentin, ministre délégué

Je suis persuadé que vous en entendrez parler sur le terrain !

Il faut une répartition juste, qui ne pénalise pas les premiers niveaux de qualification et qui profite mieux à l’apprentissage. La réflexion est menée dans le cadre d’une large concertation avec tous les partenaires concernés : les réseaux consulaires, les partenaires sociaux, les branches professionnelles et, bien entendu, les régions. Sur ce sujet, je suis d’ailleurs très intéressé par le rapport de votre collègue François Patriat.

Le troisième axe est la réforme du service public de l’orientation.

En amont de la formation, du contrat en alternance ou de l’entrée dans l’emploi, il est une séquence fondamentale dont on parle trop peu souvent : celle de l’information et de l’orientation professionnelle. Elle est d’autant plus décisive pour les jeunes que ceux-ci ont bien souvent besoin de mûrir leur projet et que l’orientation va conditionner une bonne partie de leur parcours professionnel à venir, sa réussite ou son échec. Ne nous le cachons pas, une information déficiente ou une orientation mal négociée expliquent dans de nombreux cas les décrochages.

L’enjeu est donc de permettre à chaque jeune de trouver des réponses à ses questionnements professionnels, quels que soient son âge, son adresse, son niveau, son genre ou son parcours. L’objectif est de passer d’une orientation parfois subie, très souvent liée à un statut social, à une orientation choisie, débouchant à terme sur un métier dont le jeune apprécie l’exercice.

Comme vous l’avez montré dans votre rapport La formation professionnelle : clé pour l’emploi et la compétitivité, monsieur Larcher, l’orientation professionnelle est un enjeu essentiel pour la construction de parcours de qualification réussis. Beaucoup de travaux ont été réalisés au Sénat sur cette question ; ils seront repris au sein de mon ministère.

Aujourd’hui, le processus d’orientation des jeunes se heurte à plusieurs écueils. Il est trop segmenté et insuffisamment fluide, ce qui ne permet pas au jeune de bien mûrir son projet. Il souffre d’une méconnaissance ou d’une image biaisée de certains métiers et de leurs débouchés, ainsi que de préjugés sur certaines voies de formation.

Vincent Peillon et moi-même travaillons à améliorer cette situation : d’une part, en promouvant une véritable éducation à l’orientation, et, d’autre part, en donnant corps et sens à la belle idée du service public de l’orientation ; nous l’inscrivons dans une perspective tout au long de la vie, c’est-à-dire ouverte à tous les publics et à tous les âges de la vie professionnelle. Je note au passage qu’il n’est pas habituel, dans notre République, que le ministre de l’éducation nationale travaille de pair avec un ministre relevant du grand pôle emploi-travail-dialogue social.

En ce qui concerne le service public de l’orientation, une mission interministérielle d’inspection devrait nous rendre ses travaux à la mi-janvier 2013. Ils nous permettront à la fois d’évaluer l’existant et de définir des pistes de progrès.

À mon sens, nous devons affronter deux questions.

La première est celle de la nature et de la qualité du service rendu. L’orientation souffre d’une approche trop institutionnelle, portant en priorité sur les structures, leurs missions et leurs personnels. Bien sûr, cette question est importante, mais nous devons aussi avancer sur le contenu et le rythme de l’information délivrée au jeune, sur la qualité de l’écoute qui lui est donnée et de l’accompagnement qui lui est proposé afin de l’aider dans sa décision.

La deuxième question est celle de l’animation globale de ce service. L’orientation est un maillon essentiel de la chaîne qui relie la formation et l’emploi ; elle doit donc être pilotée au plus proche de la réalité des tissus économiques et des territoires.

Dans la perspective de la prochaine étape de décentralisation – comme vous le constatez, cette grande loi comprendra de nombreux articles –, nous estimons que le conseil régional est le mieux à même d’assurer le pilotage de proximité, notamment en raison des lieux de concertation déjà mis en place, en particulier en termes de coordination unique ; je pense aux CCREFP, les comités de coordination régionaux de l’emploi et de la formation professionnelle. Néanmoins, pour avancer sans nous payer de mots, nous devons lui confier de véritables leviers dans un contexte où aucun des réseaux ne se trouve sous sa tutelle. La détermination des critères de qualité, les modalités de sa reconnaissance, la contractualisation, la professionnalisation des acteurs sont des leviers concrets à explorer. Nous devrons également veiller à la bonne articulation avec les acteurs territoriaux des outils nationaux d’information sur les métiers et les formations, afin d’en démultiplier l’usage.

Debut de section - Permalien
Thierry Repentin, ministre délégué

Je reprends d’ailleurs volontiers à mon compte les observations de M. Baylet sur la nécessité pour le service public de l’orientation de développer des liens forts avec les branches et le monde économique, dans le respect, bien sûr, des compétences des uns et des autres. Il est indispensable que les orienteurs connaissent les métiers vers lesquels ils proposent une orientation.

Debut de section - Permalien
Thierry Repentin, ministre délégué

Ils doivent notamment connaître les perspectives de carrière, les conditions de travail. Voilà ce qu’est un bel acte d’orientation. Las, ce n’est pas toujours le cas.

Le quatrième axe est un accès à l’emploi plus sécurisant pour les jeunes.

Ainsi que je l’ai rappelé à l’ouverture de mon propos au travers des quelques chiffres que j’ai cités, les jeunes sont aujourd’hui, quel que soit leur niveau de diplôme, les principales victimes de la précarité sur le marché du travail.

M. Jacky Le Menn opine.

Debut de section - Permalien
Thierry Repentin, ministre délégué

Michel Sapin et moi-même n’acceptons pas cette situation paradoxale. C’est dès le début de la vie active que l’on a besoin de sécurité professionnelle, pour acquérir un logement, disposer des moyens de mobilité, consolider un couple, bref démarrer sa vie avec une dose légitime d’espoir, comme l’a souligné avec conviction Jean Desessard. C’est pourquoi notre objectif est que l’embauche en CDI redevienne la norme, notamment pour les jeunes.

Debut de section - Permalien
Thierry Repentin, ministre délégué

Nous avons ouvert plusieurs chantiers dans cette perspective.

Je citerai, pour commencer, la mise en œuvre du contrat de génération, qui vise à appuyer financièrement à la fois l’embauche de jeunes en CDI et le maintien dans l’emploi des seniors. Ce dispositif facilitera également l’embauche en CDI de jeunes déjà présents au sein de l’entreprise en contrat d’apprentissage ou de professionnalisation. Nous y veillerons. Je vous invite également à être vigilants sur ce point, mesdames, messieurs les sénateurs, lorsque vous examinerez le projet de loi.

Debut de section - Permalien
Thierry Repentin, ministre délégué

En conformité avec la méthode gouvernementale, le contrat de génération a d’abord été acté via un accord national interprofessionnel unanime des partenaires sociaux en octobre dernier, auquel nous donnerons une traduction législative dès le début du mois de janvier prochain. La présentation du texte en Conseil des ministres est imminente.

Avec des objectifs cumulés de 500 000 contrats de génération, de 500 000 contrats d’apprentissage et de 150 000 emplois d’avenir à l’horizon de 2017, ainsi qu’un soutien renouvelé aux contrats de professionnalisation via le FPSPP, le Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels, peu de gouvernements auront, sur une période aussi courte, mené une politique de l’emploi aussi volontariste pour la jeunesse.

Debut de section - Permalien
Thierry Repentin, ministre délégué

En lien avec le déploiement du contrat de génération, nous favoriserons également l’émergence de dispositifs contribuant à l’intégration durable des jeunes dans leur emploi.

En la matière, la nouvelle convention-cadre signée avec le FPSPP jouera aussi un rôle important : d’une part, le dispositif dit de « péréquation », soit près de 250 millions d’euros, soutiendra notamment les actions de professionnalisation des jeunes embauchés dans le cadre des contrats de génération ; d’autre part, la convention prévoit le financement de l’élaboration de référentiels interbranches relatifs au rôle de tuteur et de référent, qui faciliteront la qualité de l’accueil de ces jeunes dans l’entreprise, ainsi que la transmission des savoirs et de l’expérience.

Pour répondre aux attentes que certains intervenants ont exprimées à cette tribune, je souligne que le FPSPP investira 54 millions d’euros dès 2013 afin de lutter contre l’illettrisme et de favoriser l’acquisition des savoirs de base.

Enfin, je citerai un dernier chantier, plus difficile, mais décisif, celui de la négociation en cours entre les partenaires sociaux sur la sécurisation de l’emploi. Plusieurs sujets sont en discussion, qui pourraient, eux aussi, sécuriser le parcours professionnel de jeunes trop souvent soumis aux aléas de la précarité : la taxation des contrats précaires, la mise en place de droits rechargeables à l’assurance chômage, l’accès assoupli à ce formidable outil de qualification qu’est le congé individuel de formation d’un salarié en contrat à durée déterminée, le CIF-CDD.

Michel Sapin et moi-même misons sur un accord ambitieux – il n’est pas encore finalisé –, un compromis social historique susceptible de réduire les injustices inhérentes à notre marché du travail, tout en permettant aux entreprises de faire face au changement rapide de leur environnement.

La formation, la qualification, la compétence sont au cœur des discussions. Facteurs de lutte contre le chômage et l’exclusion, facteurs de sécurisation de l’emploi, facteurs de compétitivité, facteurs de réactivité et d’adaptation des organisations productives, elles sont, on le voit, un enjeu déterminant pour aujourd’hui et pour demain.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je me félicite que les aléas de l’agenda du Sénat aient permis un débat que nous n’aurions sans doute pas eu sinon. Cela m’a donné l’occasion de vous exprimer ma détermination à être présent sur les fronts que vous avez les uns et les autres évoqués pour l’avenir de la jeunesse.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Nous en avons terminé avec le débat sur l’emploi, la formation et la qualification des jeunes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat que le Conseil constitutionnel a été saisi ce jour, en application de l’article 61, alinéa 2, de la Constitution, par plus de soixante sénateurs, d’une demande d’examen de la conformité à la Constitution de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013.

Le texte de la saisine du Conseil constitutionnel est disponible au bureau de la distribution.

Acte est donné de cette communication.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Par courrier en date de ce jour, M. François Rebsamen, président du groupe socialiste et apparentés, demande :

- le retrait de l’ordre du jour réservé de la séance du jeudi 13 décembre 2012 de la proposition de loi visant à verser les allocations familiales et l’allocation de rentrée scolaire au service d’aide à l’enfance et de la proposition de loi visant à accorder la nationalité française aux pupilles de la Nation ;

- et l’inscription à l’ordre du jour de cette même séance de la deuxième lecture de la proposition de loi visant à la suspension de la fabrication, de l’importation, de l’exportation et de la mise sur le marché de tout conditionnement à vocation alimentaire contenant du bisphénol A.

Acte est donné de cette demande.

En conséquence, l’ordre du jour de l’espace réservé au groupe socialiste du jeudi 13 décembre, de neuf heures à treize heures, est ainsi modifié.

Pour l’examen de la proposition de loi relative au bisphénol A, la durée globale du temps des orateurs dans la discussion générale pourrait être fixée à une heure et le délai limite pour le dépôt des amendements en séance au mercredi 12 décembre à dix-sept heures.

Il n’y a pas d’opposition ?...

Il en est ainsi décidé.

Mes chers collègues, l’ordre du jour de cet après-midi étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-huit heures quarante, est reprise à vingt-deux heures.