Comme notre collègue Guy Fischer l’avait dit le 15 octobre dernier, alors que débutait la discussion générale, le groupe CRC votera en faveur de cette proposition de loi portant sur la recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires.
En effet, la rédaction retenue par les auteurs de cette proposition de loi, très proche de celle qui a été adoptée par notre assemblée lors de l’examen de la loi relative à la bioéthique, nous semble être un compromis réussi entre ce qui est possible et ce qui est souhaitable.
Le régime d’autorisation encadrée que la commission des affaires sociales – la droite était alors majoritaire – avait défendu contre l’avis du Gouvernement, et qui nous est proposé ici, apporte toutes les garanties requises pour que les errements ou les abus que nous refusons toutes et tous ne puissent se produire.
Je dois avouer que, dans un premier temps, nous nous sommes interrogés sur la portée de cet amendement et ses conséquences.
La recherche appliquée est généralement destinée à la commercialisation in fine des fruits de la recherche fondamentale. Elle est souvent réalisée par des structures privées commerciales, à la différence de la recherche fondamentale, dont l’utilité immédiate n’est finalement qu’un apport de connaissances indispensable pour que la recherche appliquée avance.
À l’inverse, les chercheurs des établissements publics, qui se consacrent principalement à la recherche fondamentale, attestent eux-mêmes que celle-ci progresse grâce aux découvertes et aux avancées de la recherche appliquée.
Certes, les différences entre la recherche fondamentale et la recherche appliquée sont importantes. Comme le précisait récemment Pierre Joliot, professeur honoraire au Collège de France, ancien titulaire de la chaire de bioénergétique cellulaire : « Dans la pratique de la recherche fondamentale, le chercheur doit être prêt à exploiter tout résultat inattendu en infléchissant à tout moment le programme qu’il s’était fixé. La pratique de la recherche appliquée impose au contraire de s’inscrire dans une finalité définie à l’avance ».
Pour autant, nos concitoyens ne comprendraient pas que la recherche fondamentale sur l’embryon ouvre des pistes concrètes de lutte contre certaines maladies et que, par impossibilité de poursuivre ces recherches de manière appliquée, les scientifiques ne puissent jamais passer du stade de la découverte à celui du traitement.
Une question reste en suspens, celle de la nature des opérateurs de cette recherche appliquée. Ceux qui craignent que la mise en œuvre de cet article ne débouche demain sur une commercialisation des fruits de cette recherche par des firmes privées devraient plutôt s’inquiéter du fait que la recherche appliquée est majoritairement investie par des fonds privés.
Ils devraient, comme nous le faisons, se mobiliser pour que soit constitué un pôle public de la recherche et de l’industrie du médicament. Les découvertes de la recherche fondamentale débouchant sur une recherche appliquée puis sur une commercialisation devraient être obtenues dans un cadre public, seul garant de l’intérêt général.
Nous souhaiterions toutefois avoir une précision : sera-t-il possible de breveter les innovations obtenues en recherche appliquée grâce à la recherche fondamentale sur l’embryon, ou bien, comme nous le craignons, la règle de la non-brevetabilité du vivant s’appliquera-t-elle ?