Intervention de Michel Berson

Réunion du 4 décembre 2012 à 22h00
Recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires — Vote sur l'ensemble

Photo de Michel BersonMichel Berson :

Au terme de l’examen de la présente proposition de loi, pouvons-nous dire que nous avons délibéré de façon précipitée, pour ne pas dire bâclée, comme cela a été affirmé encore ce soir ? Assurément non !

L’examen de cette proposition de loi nous a permis de poursuivre et d’approfondir une réflexion engagée voilà près de vingt ans.

Cette question avait été au cœur de la loi de bioéthique de 1994, qui avait prohibé la recherche sur les embryons et les cellules souches embryonnaires humaines.

Lors de la première révision de cette loi, en 2004, le législateur avait décidé de maintenir l’interdiction de ce type de recherche. Toutefois, il avait pris soin de mettre en place un moratoire de cinq ans, avec possibilité de dérogation.

Les dérogations étaient accordées dès lors que ces recherches étaient susceptibles d’amener à des progrès majeurs en matière de recherche fondamentale ou en matière thérapeutique, ce qui n’était d’ailleurs guère aisé à démontrer.

Une deuxième révision de la loi de bioéthique est intervenue en 2011. Elle avait été préparée par une large concertation, par la remise de plusieurs rapports, notamment celui qui avait été rédigé par l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, par l’organisation des états généraux de la bioéthique et par la constitution d’une commission spéciale, dont les débats ont été denses.

Le texte adopté l’an dernier par le Parlement a confirmé le principe d’interdiction, mais il a surtout institué un régime dérogatoire pérenne, preuve d’une reconnaissance largement partagée, bien au-delà du monde scientifique, de l’importance des recherches sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires.

Depuis vingt ans, étape après étape, le législateur s’est donc efforcé, en prenant en compte les progrès de la connaissance, de faire évoluer la loi pour permettre à la recherche de répondre aux enjeux de l’avenir.

C’est ce travail que nous venons de poursuivre aujourd’hui, pour lever les dernières ambiguïtés que la loi de 2011 avait maintenues, en substituant à ce principe d’interdiction avec dérogation un principe d’autorisation strictement encadré.

Les sénateurs du groupe socialiste n’ignorent pas que, dans le cas de la recherche sur les embryons et les cellules souches embryonnaires, le débat scientifique se double d’un débat éthique.

Dans une République laïque, il n’appartient pas au législateur de juger des appartenances philosophiques ou religieuses. Son rôle, en revanche, est de mettre à la disposition des scientifiques le cadre légal qui leur est nécessaire pour déployer leurs recherches.

Personne ne conteste que les cellules souches embryonnaires humaines présentent une singularité qui tient à leur nature même, puisqu’il s’agit de cellules issues d’embryons humains, conçus lors d’une fécondation in vitro, dans le cadre d’une procréation médicale assistée.

Pour autant, il n’y a pas lieu de conférer un statut de « personne humaine » à un embryon qui ne s’inscrit pas dans un projet parental, puisque, conformément à l’article L. 2141-4 du code de la santé publique, les embryons surnuméraires ont vocation à être détruits après cinq ans de congélation, si les membres du couple ont renoncé à leur projet parental.

Dès lors, la question est tranchée de fait, et en débattre plus à fond n’a pas de raison d’être, d’autant que nous délibérerons en nous portant garants de deux principes intangibles : le respect de la dignité de la personne humaine et l’interdiction de toute marchandisation.

Il revient en effet au législateur de fixer, pour les chercheurs, les limites à ne pas dépasser et les obligations à respecter, pour éviter toute dérive.

Il convient également de distinguer la recherche, qui doit toujours être libre, de l’usage de ses résultats, qui peut être réglementé.

Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste votera cette proposition de loi autorisant, sous certaines conditions, la recherche sur les embryons et les cellules souches embryonnaires, afin que de nouveaux champs d’exploration scientifique, aujourd’hui fermés, puissent enfin être ouverts.

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