Intervention de Yves Pozzo di Borgo

Réunion du 4 décembre 2012 à 22h00
Recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires — Vote sur l'ensemble

Photo de Yves Pozzo di BorgoYves Pozzo di Borgo :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme je le rappelais tout à l’heure à propos de la motion de procédure présentée par Dominique de Legge, je voterai avec certains de mes collègues de l’UDI-UC contre ce texte, parce qu’il modifie la loi de 2011 un an seulement après son adoption, parce que la loi de 2011 était le fruit d’un large consensus démocratique et parce qu’il s’agit d’une modification majeure qui, a contrario, n’a pas fait l’objet d’une nouvelle concertation suffisante, pour ne pas dire que celle-ci a été inexistante !

Ce vote participe donc d’une véritable insécurité et instabilité juridique, d’autant que c’est aussi le cas du sujet débattu. Il ne s’agit pas, en effet, d’un sujet politique. Comme l’indique le nom de la loi sur laquelle on veut revenir, il s’agit d’un sujet éthique.

Avec la présente proposition, vous entendez renverser le principe de la loi du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique. Toutefois, celle-ci n’est pas la loi d’une majorité politique. Elle est le fruit d’une large réflexion et d’un consensus défini à la suite des états généraux de la bioéthique, puis d’un long débat au Parlement et d’un compromis qui transcende largement les clivages partisans.

La question de la recherche sur l’embryon, en particulier, a fait l’objet d’une maturation au fil de débats nourris. Rappelez-vous ! Le texte finalement adopté est l’aboutissement d’un dialogue fécond entre les deux chambres du Parlement. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si la question n’a pas été tranchée en commission mixte paritaire. Le Sénat a débattu, réfléchi et finalement, en seconde lecture, s’est rangé aux raisons de l’Assemblée nationale, contre l’avis de sa commission, pour le maintien du principe de l’interdiction. Ce choix n’a rien d’arbitraire. C’est un choix éclairé, un véritable modus vivendi, car il est à la fois éthique et scientifique.

L’éthique commandait de ne pas ouvrir la boîte de Pandore en autorisant, par principe, la recherche sur l’embryon, c’est-à-dire en faisant de la vie humaine matière à expérimentation. L’éthique commandait le maintien de l’interdiction assortie d’exceptions.

La science ne réclame pas le contraire ! Les informations scientifiques portées à notre connaissance en juillet 2011 renforçaient déjà ce choix éthique. Elles indiquaient que, pour faire avancer la recherche, il n’y a plus aucune nécessité d’expérimenter sur l’embryon.

C’est bien pour avoir découvert une solution de rechange à l’utilisation des cellules souches embryonnaires que les professeurs John Gurdon et Shinya Yamanaka viennent de se voir décerner le prix Nobel de médecine de 2012.

Ainsi, avec la présente proposition de loi, vous entendez rayer d’un trait de plume, sans aucune consultation préalable, un aspect fondamental de la loi du 7 juillet 2011 qui, elle, avait été précédée d’un large débat public et avait fait l’objet d’un consensus parlementaire transpartisan, de surcroît tout récent et légitimé à la fois par l’éthique et par la science.

J’ai beaucoup de respect pour ce débat, qui est important et qui a nécessité une grande implication personnelle de chacun d’entre nous. Toutefois, franchement, comme je l’ai dit à mes collègues du RDSE, je regrette, quand il s’agit d’un débat faisant appel non pas aux idées politiques, mais à l’éthique personnelle, qu’on revienne sur une mesure très importante à l’occasion d’un changement de rapport politique. Je le regrette profondément.

Ce n’est pas à l’honneur du Sénat, ni du groupe RDSE, même s’il avait raison. Sans le partager, je respecte le combat des membres de ce groupe, mais je trouve que la méthode n’est pas très correcte. C’est la raison pour laquelle certains de mes collègues du groupe UDI-UC et moi-même voterons contre ce texte.

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