Déposée le 29 octobre dernier, la proposition de loi de M. Jacques Mézard et des membres du groupe RDSE autorise le recouvrement sur succession des sommes versées au titre de l'allocation personnalisée d'autonomie, l'Apa, sur les patrimoines supérieurs à 150 000 euros. Elle reprend un amendement au projet de loi de finances rectificative de cet été que ce groupe avait retiré à la demande de la commission des finances et du Gouvernement.
Son but est de préserver la capacité financière des conseils généraux à verser l'Apa dans des conditions satisfaisantes. Voilà un enjeu central : entre 2003 et 2009, les dépenses brutes d'Apa ont augmenté de 5,9 % par an, quand les dépenses restant à la charge des départements ont crû de 8,8 % par an. En 2011, la dépense totale d'Apa s'établissait à 5 264 millions ; la CNSA ne couvrant qu'un peu plus de 30 % de ce montant, la charge laissée aux départements s'établissait à 3,6 milliards. Nous sommes bien loin du respect du principe d'une égale répartition du financement de la prestation entre l'Etat et les départements qui, il est vrai, n'a jamais été gravé dans le marbre de la loi.
Si les difficultés des départements sont réelles, la réponse apportée par ce texte m'apparaît prématurée et inadaptée. Prématurée parce que nous reverrons en profondeur le mode de financement de l'Apa dans le futur projet de loi sur la prise en charge de la perte d'autonomie - ce sera aussi l'occasion d'aborder la lourde question du reste à charge en établissement. Le groupe de travail n° 4 relatif à la stratégie pour la couverture de la dépendance des personnes âgées comme le Conseil économique, social et environnemental ont étudié la piste du recouvrement sur succession avant de la rejeter dans leurs rapports de juin 2011. D'autres pistes sont envisageables : un prélèvement général mais limité sur l'ensemble des successions ou un alignement progressif du taux de CSG applicable aux pensions de retraite sur le taux de droit commun.
La réponse est inadaptée dans la mesure où, contrairement à l'aide sociale à l'hébergement servie par les départements à titre subsidiaire, l'Apa constitue une prestation universelle destinée à couvrir un risque identifié, la dépendance. Organise-t-on un prélèvement sur le patrimoine d'un malade du cancer afin d'obtenir le remboursement de ses soins ? Mme Bachelot, en son temps, avait clairement écarté cette option.