Dans le même esprit, j’ai demandé aux préfets, aux préfets délégués pour l’égalité des chances et aux sous-préfets à la ville de conduire un travail analogue avec l’ensemble des chefs de service de l’État pour que chaque politique sectorielle soit passée au prisme de son incidence sur les quartiers populaires et que soient concentrés les moyens de droit commun dans les territoires défavorisés.
Au cours de mes déplacements, en me fondant sur des expérimentations menées notamment à Amiens, j’exprime aux préfets le souhait qu’ils prennent en compte cette dimension de la politique de ville et mobilisent l’ensemble des services déconcentrés de l’État dans les territoires, sans même attendre les futurs contrats.
D’ores et déjà, le Gouvernement a pris plusieurs initiatives.
Le ministère de la ville a ainsi été associé à la définition des territoires où vont être organisées des zones de sécurité prioritaires, et il le sera également, je l’espère, à la mise en place des dispositifs opérationnels des politiques qui seront conduites dans ces zones.
Un quart des 1 000 postes d’enseignant créés à la rentrée de 2012 ont été affectés aux écoles relevant de l’éducation prioritaire.
Par ailleurs, nous avons pu pour la première fois, grâce aux travaux du Parlement, territorialiser une partie de la politique de l’emploi, puisque 30 % des emplois d’avenir sont réservés aux jeunes des zones urbaines sensibles, afin de prendre en compte la discrimination à laquelle ces jeunes sont confrontés, en particulier lorsqu’ils sont diplômés.
Dans la même perspective, je souhaite expérimenter les emplois francs. Il s’agira là aussi d’un dispositif anti-discrimination, destiné en particulier aux jeunes des quartiers en difficulté qui ont fait l’effort, avec le soutien de leurs parents et de leur entourage, de se former, mais ne trouvent pas d’emploi alors qu’ils ont le même niveau de qualification et, souvent, plus d’enthousiasme et de dynamisme que les jeunes issus de quartiers plus favorisés.
Cette expérimentation sera menée à Marseille, à Clichy-Montfermeil, à Grenoble et à Amiens. Ces quatre villes sont de tailles et de situations économiques différentes, ce qui nous permettra de vérifier que le dispositif ne présente pas de biais, avant de le développer dans le courant de l’année 2014.
Toujours au chapitre de la mobilisation du droit commun, nous avons veillé, avec Marylise Lebranchu, à garantir l’expression de la solidarité nationale, au travers d’une progression sans précédent de la péréquation l’année prochaine. Ainsi, la dotation de solidarité urbaine est augmentée de 120 millions d’euros, principalement au bénéfice des 250 communes qui bénéficient de la « DSU cible », tandis que la dotation de développement urbain est majorée de 25 millions d’euros. Cette majoration de la DDU profitera aux cinquante communes les plus pauvres de notre pays, sachant que j’essaie de faire en sorte que cette dotation soit déplafonnée en 2013 et qu’elle soit répartie avec toute la souplesse nécessaire par les préfets.
J’ai confié à François Pupponi, député de Sarcelles, une mission sur les outils de la péréquation. Claude Dilain l’a souligné, si ces outils ont joué un rôle important pour enclencher la solidarité entre l’État et les communes en difficulté, entre les communes riches et les communes plus pauvres, nous savons tous, d’une part, qu’ils ont des effets pervers, et, d’autre part, que l’on peut faire davantage en matière de solidarité. François Pupponi rendra ses conclusions et formulera des propositions concrètes avant la fin du mois de janvier.
Le deuxième objectif est lié au premier : il est de réformer la géographie prioritaire pour la simplifier et concentrer les interventions sur les quartiers qui en ont le plus besoin.
En effet, la politique de la ville doit être le marqueur territorial pour les politiques de droit commun et pour l’action publique en général. C’est à cette seule condition que les crédits spécifiques auront un véritable effet de levier pour ces territoires.
M. Dilain a fait référence à la superposition actuelle des différents zonages – ZUS, ZRU, ZFU, ZEP… –, dont l’enchevêtrement est tel qu’il est même difficile de déterminer le nombre des villes concernés par les dispositifs de la politique de la ville ! Ainsi, certains contrats urbains de cohésion sociale ont été signés par des villes seules, d’autres par des intercommunalités, d’autres encore par quelques villes à l’intérieur d’une intercommunalité, tandis qu’un cinquième des régions et un tiers à peine des départements se sont engagés dans ce dispositif.
L’ensemble est devenu illisible, et on a saupoudré, au fil des années, les actions de la politique de la ville, ce qui l’a parfois rendue contre-productive.
Jusqu’à présent, les opérations de rénovation urbaine ont été mises en œuvre sans être nécessairement accompagnées d’un volet de cohésion sociale suffisant. Les zonages ont conduit à stigmatiser et à enclaver les populations des quartiers ; il faut donc les revoir tous. Cette réforme a été continuellement repoussée, la dernière tentative remontant à 2009. Fort du soutien du Premier ministre, je suis résolu à la mener à bien, en prenant bien sûr en compte l’ensemble des contraintes des différentes collectivités, car elle est indispensable.
Je crois qu’il faut avoir le courage de dire qu’il existe des villes dont la situation ne justifie plus aujourd’hui qu’elles bénéficient des moyens spécifiques de la politique de la ville. Cela signifie que le travail qui y a été mené a produit des effets positifs. Les élus doivent, à mon sens, s’en satisfaire.