Intervention de Jean-Vincent Placé

Réunion du 10 décembre 2012 à 14h30
Création de la banque publique d'investissement – nomination des dirigeants de bpi-groupe — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi et d'une proposition de loi organique dans le texte de la commission

Photo de Jean-Vincent PlacéJean-Vincent Placé :

Par ailleurs, la Banque publique d’investissement, par son caractère national, pourra contribuer à la réduction des inégalités territoriales, autre mission essentielle. À cet égard, il me semble inconcevable que la BPI exclue – du moins, rien n’est précisé à ce sujet dans le projet de loi – les zones rurales et les outre-mer de son champ d’action, objets des préoccupations d’un nombre important de nos collègues.

Au-delà, la qualité première de la BPI est d’être au service d’un État stratège. En plus du soutien à l’emploi, à la compétitivité, à l’innovation, à la conversion numérique, à l’économie sociale et solidaire – ce sont des secteurs essentiels –, la référence explicite à la transition écologique et énergétique est primordiale, comme l’a rappelé M. le rapporteur général.

À Doha, il est clair que la conférence sur le climat n’a pas été à la hauteur. Démontrons, en France, que nous prenons la mesure des enjeux écologiques, faisons de la BPI une « institution exemplaire », comme le propose Pierre Moscovici.

Il y a un impératif environnemental : les émissions de CO2 sont supérieures à 50 gigatonnes par an, alors qu’elles devraient se situer aux alentours de 44 gigatonnes en 2020, selon le dernier rapport du Programme des Nations unies pour l’environnement.

Il y a aussi un impératif social et économique : nous devons créer de l’emploi et de l’activité en France. La transition écologique de l’économie est une chance pour permettre au secteur industriel et productif de se redresser réellement. Les énergies renouvelables, les transports, l’efficacité énergétique dans les bâtiments, pour ne citer que ces exemples, représentent des centaines de milliers d’emplois. La BPI doit faire confiance aux filières d’avenir et aux activités innovantes. Les projets d’économie circulaire, de fonctionnalité, la production de nouveaux matériaux sont également des pistes sérieuses pour une économie redynamisée et respectueuse de l’environnement.

Nous, écologistes, pensons que l’État doit saisir cette chance qui s’offre de répondre, de façon stratégique, aux difficultés présentes tout en préparant l’avenir. Nous avons donc déposé un amendement pour affirmer que la transition écologique et énergétique est un objectif, à part entière, de la BPI et conforter les dispositions issues des travaux de nos collègues députés.

Nous souhaitons également qu’un rapport statistique soit remis chaque année non seulement pour pouvoir apprécier les progrès de la banque en la matière, mais également pour renforcer la transparence et le contrôle du Parlement. « La confiance n’exclut pas le contrôle », selon la maxime bien connue !

J’aimerais que M. le ministre nous détaille les modalités d’application de ce projet de loi : l’institution financière va-t-elle se doter de barèmes, de critères sociaux et environnementaux, d’indicateurs pour respecter ses engagements ? L’écologie ne peut pas, une fois de plus, se contenter d’être inscrite comme un principe plébiscité, mais jamais concrétisé. Je sais cependant que telle n’est pas la volonté du Gouvernement.

Certes, la BPI, à elle seule, ne peut pas permettre la transition écologique de l’économie, mais elle peut y contribuer. Le financement est un outil indispensable de la mutation que nous appelons de nos vœux. Cependant, il n’est pas suffisant, et j’attire l’attention du Gouvernement sur la nécessité de mettre en œuvre à l’intention des entreprises un « signal prix » significatif, afin que les acteurs qui polluent soient pénalisés financièrement par rapport à ceux qui font des efforts, ou bien que ceux qui font des efforts puissent bénéficier d’un bonus. Tel est la vision positive qu’il faut développer, afin que tous aient un intérêt rationnel à modifier leur comportement productif. C’est aussi en imposant des normes que l’on pousse un secteur à se renouveler. Nous souhaitons donc qu’une « taxe carbone » – la « contribution énergie-climat » figurant dans le programme du Président de la République –, par exemple, soit mise en œuvre rapidement.

Ce n’est pas tout : les entreprises ont également besoin de lisibilité et de stabilité. Les réglementations mériteraient d’être définies pour la durée du quinquennat et ne plus changer. Ce point est très important, car les PME-PMI ont du mal à suivre les changements législatifs et réglementaires et éprouvent de fortes inquiétudes à chaque projet de loi de finances. Il faut permettre à nos entreprises de disposer d’une visibilité sur le long terme pour prévoir leurs investissements.

J’ai reçu récemment le directeur général d’un important producteur d’éoliennes. Bien que je ne fasse pas partie de ceux qui dénigrent constamment leur pays, j’ai dû admettre sa démonstration : cette entreprise installe des éoliennes en deux ans en Allemagne, contre huit ans en France. Nous devons absolument changer de méthode, pour ne pas décourager les entrepreneurs.

Les écologistes croient également en l’économie sociale et solidaire. Nous nous félicitons ainsi qu’une partie des affectations des fonds lui soit destinée, même si ces montants auraient pu être plus significatifs.

Pour conclure, j’indiquerai que la création de la Banque publique d’investissement est une très bonne initiative, car elle apportera de nouvelles capacités d’investissement et plus de lisibilité aux entreprises et pourra accompagner les projets dont la France a besoin, notamment en matière écologique. Par ailleurs, le Gouvernement a cherché à établir une gouvernance plurielle, paritaire et équilibrée. Aussi le groupe écologiste soutient-il le projet de loi.

Nous aurons l’occasion de vous présenter quelques amendements, qui ont vocation à contribuer au débat. J’espère qu’ils rencontreront un certain assentiment. En tout cas, vous le savez, nous avons prouvé notre capacité à exprimer notre insatisfaction, mais quand nous sommes satisfaits, nous le disons également ! Il est important que, dans notre famille politique, dans notre majorité, nous puissions travailler dans la franchise et sachions parfois faire preuve de résistance, parce que, comme chacun le sait, on ne peut s’appuyer que sur ce qui résiste !

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