Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon intervention, au nom du groupe UMP, a été élaborée pour l’essentiel par M. Philippe Marini.
L’article 22 bis constitue le premier des articles du présent projet de loi de finances rectificative ayant trait aux taux réduit de TVA applicables, aujourd'hui encore, aux activités équestres. Un second article, l’article 23, vise à exclure du bénéfice du taux réduit de TVA les ventes de chevaux de loisirs, de compétition et de courses, ainsi que les gains de course, qui seront donc désormais soumises au taux normal de TVA.
En réalité, les articles 22 bis et 23 ont pour point commun de tirer les conséquences d’un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne, rendu le 8 mars dernier. Cet arrêt a contesté l’application de certains taux réduits à la filière équine, dans le cas particulier où cette filière ne relève pas de l’activité agricole. Il a donc apporté une réponse claire à la question du fondement agricole de l’application du taux réduit de TVA des activités équines.
Cependant, il n’a pas répondu à la question de la légalité du fondement sportif du taux réduit, lequel permet de satisfaire les attentes d’une partie importante de la filière – presque exclusivement, les centres équestres.
L’article 22 bis, introduit par un amendement du Gouvernement lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale, prévoit l’abrogation des dispositions de l’alinéa b sexies de l’article 279 du code général des impôts, selon une modalité complexe nécessitant la parution d’un décret. Alors que le présent projet de loi de finances rectificative n’avait initialement pas pour objet de modifier les dispositions relatives au fondement sportif de la TVA à taux réduit applicable à la filière équine, l’article 22 bis traduit la remise en cause de ce fondement.
Le Gouvernement fait donc le choix d’anticiper l’issue d’un futur contentieux, alors même qu’il a déclaré à plusieurs reprises qu’il ne reviendrait pas sur le dispositif de l’alinéa b sexies de l’article 279 du code général des impôts. Le ministère de l’économie et des finances a lui-même défendu cette position : il a ainsi répondu à plusieurs questions écrites de collègues députés qu’« il n’est pas envisagé de supprimer cette disposition qui permet d’appliquer le taux réduit notamment aux activités des centres équestres, la Cour de justice de l’Union européenne ne s’étant pas prononcée sur ce dispositif ».
Lors de la campagne électorale, le futur Président de la République François Hollande avait lui-même déclaré qu’il ferait regarder attentivement toute mesure qui permettrait d’atténuer pour les propriétaires de chevaux l’impact du changement de taux de TVA.
Monsieur le ministre, cette situation nous conduit à vous poser plusieurs questions.
Première question : à combien le Gouvernement évalue-t-il notre chance de perdre un nouveau contentieux communautaire ? À cet égard, quel est le contenu de la lettre de mise en demeure adressée à la France par la Commission européenne le 21 novembre dernier ?
Deuxième question : quel est le montant précis de l’amende et des astreintes qui pourraient nous être infligées ?
Troisième question : pouvez-vous, monsieur le ministre, vous engager à ce que l’alinéa b sexies de l’article 279 du code général des impôts, qui établit le fondement sportif de la TVA à taux réduit, ne soit abrogé qu’en cas de condamnation définitive de notre pays dans ce contentieux ?
Nous nous demandons également si les articles 22 bis et 23 sont de nature à répondre aux attentes de la filière, notamment à celles des 8 000 centres équestres que compte notre pays, car c’est essentiellement d’eux qu’il s’agit. Le dispositif proposé par le Gouvernement, qui anticipe sur le résultat du contentieux, crée en effet une insécurité juridique pour les centres équestres, puisqu’il permet de maintenir des taux réduits de TVA pour une durée incertaine, qui s’achèvera de toute façon le 31 décembre 2014. Cela signifie que, à cette date, les centres équestres seront automatiquement soumis au taux normal de TVA. Nous avons cependant renoncé à déposer un amendement tendant à supprimer cette échéance, parce que l’article 22 bis du projet de loi de finances rectificative aurait alors risqué d’être jugé inconstitutionnel pour incompétence négative du législateur.
Au final, le dispositif proposé n’est pas satisfaisant. C’est pourquoi nous demandons au Gouvernement de bien vouloir poursuivre son dialogue avec la Commission européenne afin de la convaincre de notre bon droit.
D’une part, le taux réduit de TVA doit être maintenu pour les activités sportives équestres – il s’agit essentiellement des disciplines olympiques. D’autre part, le droit communautaire permet l’application d’un tel taux réduit, contrairement à ce que prétend la Commission européenne.
À cet égard, nous demandons solennellement au Gouvernement, au cas où la Commission européenne ferait la sourde oreille à nos arguments, de proposer la modification de l’annexe III de la directive « TVA », qui énumère les produits éligibles au taux réduit de TVA, afin de procéder à l’ajout des activités équestres à l’occasion de la prochaine révision de cette directive.
Enfin, si la communauté hippique au sens large ne conteste pas la suppression du taux réduit de TVA pour les ventes de chevaux et les gains de course, elle souhaite voir aligner le statut des « propriétaires non intervenants » sur celui qui existe pour l’élevage, à l’image des « éleveurs hors-sol », ces propriétaires d’animaux non professionnels qui en confient l’élevage à un exploitant agricole. Il s’agit de donc de soumettre à la TVA les propriétaires de chevaux de courses non professionnels, afin de leur permettre de pouvoir récupérer la TVA. Une instruction fiscale, par exemple, pourrait avantageusement prévoir un tel régime.