Nous sommes contre l’article 24 bis, qui est selon nous d’inspiration patronale.
Si je vous ai bien compris, monsieur Delattre, 20 milliards d’euros ne vous suffisent pas ; vous rejoignez sur ce point Mme Parisot, qui demande 50 milliards d’euros.
L’examen de cet article montre donc que, pour dire le moins, un certain discours patronal n’est pas dénué d’influence sur la gestion des affaires du pays. Nous avons eu l’occasion de nous exprimer sur l’université d’été du MEDEF ; je n’y reviendrai pas.
Le dispositif de l’article 24 bis ne permettra pas de sortir de l’ornière dans laquelle la plupart des politiques économiques se sont enfoncées depuis trente ans. Le coût du travail serait trop élevé : c’est le credo de tous ceux qui cherchent à masquer leur incapacité à agir sur les autres facteurs de compétitivité.
Tant de mesures d’allégement du coût du travail pour les entreprises ont été mises en place depuis trente ans que l’on peut se demander si une bonne partie des emplois privés ne sont pas, en fait, subventionnés sur fonds publics… Nous ne sommes pas seuls à affirmer cela : la Cour des comptes, notamment, l’a souligné au fil de ses rapports.
Un emploi mal payé coûte aujourd’hui 25 000 euros par an aux finances publiques, un emploi « aidé » par le biais du pacte pour la croissance, la compétitivité et l’emploi leur coûtera finalement, à terme, près de 60 000 euros : voilà une curieuse conception du libéralisme ! Au total, on nous demande de voter une dépense de 20 milliards d’euros pour financer la création de 318 000 emplois à moyen terme.
Un tel gaspillage de fonds publics ne peut manquer d’interpeller les parlementaires que nous sommes, soucieux en principe d’une allocation juste et efficace de l’argent public.
La mesure proposée permettra-t-elle d’améliorer durablement la situation économique ? Les prévisions les plus optimistes ne semblent pas confirmer qu’une croissance de 2 % de notre PIB soit un objectif accessible, alors qu’atteindre ce taux est nécessaire pour au moins stabiliser un marché du travail passablement déprimé.
Le CICE permettra sans doute d’améliorer la rentabilité des entreprises à court terme. Certaines d’entre elles pourront ainsi dégager des marges de manœuvre pour financer leurs investissements, lesquels, au demeurant, peuvent fort bien être réalisés pour substituer des machines au travail humain…
Enfin, comme nous l’avons déjà dit, trente années se sont écoulées durant lesquelles la contribution de l’activité économique aux budgets nationaux et sociaux s’est sans cesse réduite.
À cet égard, je rappelle que plus de 130 milliards d’euros ont été consacrés à la réduction de l’impôt sur les sociétés, que les cotisations sociales ont été allégées à hauteur de 30 milliards d’euros, que la taxe professionnelle a été supprimée, que les aides budgétaires directes se multiplient, que les finances des collectivités locales sont de plus en plus sollicitées : tout cela aboutit au résultat que nous constatons aujourd'hui, et l’on nous propose d’en rajouter encore, alors que notre pays compte 5 millions de chômeurs, 3 millions de smicards, plus de 8 millions de salariés bénéficiaires – si l’on peut dire ! – de la prime pour l’emploi, la pauvreté continuant à s’étendre.
Il est temps que cela cesse, c’est pourquoi nous voterons contre l’article 24 bis.