Intervention de Albéric de Montgolfier

Réunion du 14 décembre 2012 à 9h45
Loi de finances rectificative pour 2012 — Discussion d'un projet de loi

Photo de Albéric de MontgolfierAlbéric de Montgolfier :

Il y a le feu, mais, les mesures ne s’appliquant qu’à partir de 2014, nous avions tout le temps de les examiner selon la procédure normale, c’est-à-dire avec passage en conseil des ministres, avis du Conseil d’État et, bien sûr, étude d’impact. Si le Gouvernement considérait que c’était urgent, il pouvait avoir recours à une lettre rectificative !

Quelques mois après avoir taxé les entreprises, à la faveur d’un rapport, vous réalisez votre erreur et décidez donc de leur accorder un crédit d’impôt pour la compétitivité !

Quelques mois après avoir fustigé et supprimé la hausse de la TVA, vous la mettez en œuvre !

Le ministre nous opposera son argument sur la justice sociale, nous expliquera que l’effort fiscal vise les grandes entreprises et que le crédit d’impôt s’adresse aux entreprises innovantes et exportatrices. Mais ce sont peut-être les mêmes qui sont concernées, nos grandes entreprises figurant, on le sait bien, parmi les plus innovantes et étant généralement exportatrices.

Selon le dernier classement établi par Thomson Reuters et publié voilà quelques jours, treize entreprises françaises figurent dans le Top 100 des champions mondiaux de l’innovation. Nous sommes en troisième position mondiale derrière les États-Unis et le Japon, et en première position en Europe, donc devant l’Allemagne.

Vous affirmez que la compétitivité a aussi une dimension hors coût – c’est indiscutable, je vous en donne acte et le rapport Gallois le dit aussi –, que l’innovation en est le moteur et que vous allez faire ce que nous n’avons pas réussi à faire en la matière.

Or ce classement semble montrer que notre politique en matière d’innovation et de recherche a été plus que payante, malgré la crise qui nous a frappés de plein fouet, grâce au renforcement du crédit d’impôt recherche, grâce à la réduction d’ISF au titre des investissements dans les PME, grâce aux investissements d’avenir, grâce aux pôles de compétitivité, grâce à la sanctuarisation du budget de la recherche et de l’enseignement supérieur, sans oublier l’autonomie des universités, qui leur a permis de se rapprocher du monde de l’entreprise.

Cela dit, le choc fiscal que vous imposez aux entreprises concerne également les entreprises de taille intermédiaire et les PME. Du reste, ses conséquences lourdes sur les grandes entreprises, dont dépend très largement notre balance commerciale, ne vont pas manquer d’avoir aussi des répercussions sur les sous-traitants et les fournisseurs, qui sont essentiellement des petites et moyennes entreprises.

Nous nous félicitons que Louis Gallois vous ait fait prendre conscience de la nécessité de soutenir nos entreprises, qui sont le moteur de notre croissance, des créatrices majeures de la richesse nationale et des emplois. Pour ces raisons, notre groupe ne s’opposera pas sur le fond au crédit d’impôt que vous allez mettre en place. En revanche, nous sommes très critiques sur la forme et jugeons erratique la démarche qui consiste à commencer par prendre pour redonner après.

Vous changez d’opinion et vous prônez désormais une hausse de la TVA. Si vous aviez eu, dès le départ, une vision économique claire et une vraie stratégie fiscale, vous n’auriez pas supprimé la TVA compétitivité et anti-délocalisation que nous avions mise en place. Au lieu de cela, vous allez redonner un chèque aux entreprises, mais en établissant une conditionnalité excessive, dans le cadre de ce qui sera probablement une usine à gaz, après les avoir bien trop lourdement ponctionnées.

Le CICE apparaît comme une bouée de sauvetage, certes, mais au milieu d’une tempête de fiscalité !

Au moment même où nous examinons ici, au Sénat, la proposition de redonner 20 milliards d’euros aux entreprises, les députés, quant à eux, discutent des 10 milliards d’euros dont on va les ponctionner. C’est, monsieur le ministre, à quoi s’emploie en ce moment même votre collègue en charge du budget. Avouez quand même que tout cela ressemble à du bricolage !

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