Ensuite, le ciblage serait inadéquat, ce que je ne crois pas, même si, chacun a pu le constater, l’industrie n’est pas seule directement concernée. Tous les législateurs ont rencontré ce type de difficulté, dès lors qu’il s’agit d’aider tel ou tel secteur de l’activité économique.
Sauf à tomber sous le coup d’une accusation d’aide d’État, irrégulière au regard des règlements ou directives de l’Union européenne, ces aides doivent embrasser la totalité ou quasi-totalité du secteur économique.
Pourtant, la manière dont les choses ont été envisagées fait que plus de 20 % de l’effort aboutira à aider l’industrie, qui ne représente que 12, 5 % de la valeur ajoutée des entreprises dans notre pays. L’industrie est donc surreprésentée si l’on considère le volume d’aides prévu par le plan gouvernemental qui lui est affecté. De plus, compte n’est pas tenu ici de l’aide apportée à toutes les activités que l’industrie a pu externaliser, comme, parmi d’autres exemples, l’informatique.
Je crois donc que l’aide à l’industrie est nettement plus importante que ce que l’on veut bien dire. Même ceux qui critiquent un dispositif insuffisamment ciblé savent parfaitement qu’il est très difficile, voire impossible, de cibler mieux que ce qui a été fait en préparant cette réforme.
L’effet de seuil induit par l’extinction du dispositif d’allégement de charges sociales pour les salaires supérieurs à deux fois et demie le SMIC donnera lieu, je le devine sans peine, à des débats intéressants. Nous avions en effet plusieurs options possibles, notamment une annulation progressive, en biseau, de ces aides, et non pas une extinction nette, comme nous le proposons.
Ce choix a été fait dans un souci de simplification, de manière à éviter la mise en place de mécanismes d’optimisation et nous garder d’une complexité probablement préjudiciable à l’efficacité du dispositif. Dans cet esprit, nous avons prévu un arrêt net des aides pour les salaires supérieurs à deux fois et demie le SMIC. Je ne crois pas que l’on puisse parler, à ce niveau de rémunération, de la création d’une trappe à bas salaires. Deux fois et demie le SMIC ne représente pas un salaire mirobolant, mais quand on sait ce qu’est le revenu médian, cela peut difficilement être jugé comme un niveau susceptible de constituer une trappe à bas salaires.
La conditionnalité du dispositif a donné lieu à des débats intéressants à l’Assemblée nationale ; j’imagine que tel sera également le cas au Sénat. Le Gouvernement n’a pas souhaité introduire, je le dis très clairement, des clauses de conditionnalité, car il a jugé qu’elles compliqueraient à l’excès un dispositif dont la simplicité est un gage de réussite.
En revanche, l’Assemblée nationale a imaginé un certain nombre de critères dont les partenaires sociaux devront s’emparer, et je suis sûr qu’ils le feront. De cette manière, lorsque le bilan sera fait après quelques mois, il pourra se fonder sur des critères que le législateur aura choisi de privilégier.
En la matière, chacun sait ce que serait une utilisation véritablement illégitime de ces montants d’argent public : l’augmentation de dirigeants ou la distribution de dividendes. L’on sait également que d’autres utilisations sont parfaitement légitimes, et d’ailleurs souhaitables : l’investissement, la formation et l’embauche, conformément à l’esprit du pacte pour la compétitivité et l’emploi que les pouvoirs publics veulent nouer avec les entreprises de notre pays.
Le financement de la mesure a fait l’objet, là encore, de critiques attendues, auxquelles j’opposerai des arguments qui ne le seront pas moins. Il se fera pour moitié par des économies, dont je veux bien reconnaître qu’elles restent à déterminer.
Le coût de ce financement devra être assumé progressivement à partir de 2014, complètement ensuite. Il est donc judicieux de se donner le temps, c'est-à-dire l’année 2013, pour définir comment doivent se faire ces économies. Il faudra alors décider des réformes structurelles à engager, afin de dégager le volume nécessaire au financement du crédit d'impôt pour la compétitivité et l’emploi.
La seconde moitié du financement est issue d’une modulation des taux de TVA. Le taux réduit est abaissé ; le taux intermédiaire est augmenté ; et le taux normal l’est également, mais dans des proportions moindres. La stratégie du Gouvernement consiste clairement, par les amendements qu’il propose, à définir le volume budgétaire attendu de cette hausse de la TVA, sans trancher définitivement la définition des taux s’appliquant à telle activité, tel bien ou tel service.
Ces éléments seront précisés durant l’année 2013. Chaque assemblée, toutes commissions confondues, travaillera en concertation avec les professionnels. Au terme de ce travail parlementaire, nous parviendrons à une affectation des différents taux de TVA aux biens et services produits et délivrés dans notre pays. Elle rencontrera certainement quelques oppositions, peut-être quelques critiques, car tous les secteurs ne pourront être satisfaits, mais elle pourra s’appuyer sur le travail sérieux mené conjointement par le Parlement et le pouvoir exécutif.