Nous comprenons mal à quelle logique répond l’idée de créer un fonds de 50 millions d’euros pour soutenir les collectivités territoriales et leurs groupements ayant contracté des emprunts structurés.
Bien entendu, ce n’est pas le constat de départ que nous contestons : nous sommes conscients de la situation très grave dans laquelle se trouvent certaines collectivités territoriales, qui sont aujourd’hui quasiment incapables de faire face au coût de refinancement de leurs emprunts.
Nous considérons cependant qu’un fonds de 50 millions d’euros apportera une réponse nécessairement incomplète au problème des emprunts toxiques souscrits par certaines collectivités territoriales. En effet, en décembre 2011, la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur les produits financiers à risque souscrits par les acteurs publics locaux a évalué à 22 milliards d’euros l’encours de la dette lié à ces produits et à 18 milliards d’euros le volume total des produits structurés les plus toxiques. Nous ne voyons pas très bien à quoi pourront servir 50 millions d’euros pour des difficultés chiffrées à 18 milliards d’euros !
Surtout, la réponse apportée par ce fonds au problème des emprunts toxiques serait inadéquate. En effet, il est prévu que son financement repose à parts égales sur l’État et sur l’ensemble des collectivités territoriales, 25 millions d’euros devant être prélevés sur le produit des amendes de police que ces collectivités perçoivent. Nous estimons curieux qu’il soit fait appel à la solidarité des collectivités territoriales dans leur ensemble.
D’ailleurs, M. le rapporteur général a exprimé le même avis et il a déposé, au nom de la commission des finances, un amendement visant à supprimer la participation des collectivités territoriales au financement du fonds.
Néanmoins, il nous semble préférable de supprimer tout simplement l’article 3 bis. À nos yeux, la création de ce fonds de soutien enverrait un très mauvais signal, dans la mesure où elle risquerait d’être interprétée comme une validation du comportement imprudent de certaines collectivités territoriales, ce qui soulève un problème non négligeable d’aléa moral.
Certes, les dysfonctionnements du secteur financier sont en grande partie responsables de la crise financière dont les emprunts toxiques sont l’un des aspects. Reste que l’ampleur des souscriptions, s’agissant d’emprunts dont le niveau élevé de risque était évident pour tout investisseur avisé, reflète également, sinon une certaine irresponsabilité, du moins un manque de prudence dans le comportement de quelques collectivités territoriales.
Enfin, comme M. Marc le souligne très justement dans son rapport, l’article 3 bis du projet de loi de finances rectificative, qui a été adopté précipitamment, sans évaluation et sans concertation, ne définit pas les critères selon lesquels seraient choisies les collectivités bénéficiaires du fonds. Il ne fixe pas davantage la procédure d’appel en cas de désaccord entre les différentes chambres régionales des comptes qui seraient appelées à donner leur avis sur la capacité des collectivités territoriales à prendre en charge le coût du refinancement de leurs emprunts.
Mes chers collègues, j’espère que toutes ces raisons vous convaincront de voter notre amendement de suppression de l’article 3 bis.