Le présent amendement tend à supprimer certaines dispositions correctrices de l’impôt de solidarité sur la fortune, l’ISF, qui, selon nous, nuisent à sa bonne répartition entre les contribuables.
Est d’abord visée la disposition permettant aux membres de pactes d’actionnaires, qui constituent le « noyau dur » de l’actionnariat d’une entreprise, de diminuer leur contribution à l’ISF à proportion de leur participation. Cette exonération des intérêts minoritaires, instaurée par la loi pour l’initiative économique, dite « loi Dutreil », n’a pas rencontré un grand succès, malgré les assurances contraires qui figuraient à l’époque dans le rapport sur le fondement duquel elle avait été élaborée.
À en croire l’annexe « Voies et moyens » au projet de loi de finances, 12 700 ménages recouraient à ce dispositif en 2012, pour une dépense fiscale globale de 70 millions d’euros. Ce coût est estimé à 170 millions d’euros cette année, du simple fait du quasi-retour au tarif antérieur, ce qui signifie tout de même un bonus de plus de 13 000 euros par contribuable.
Quant au dispositif de l’article 885 I quater du code général des impôts, son coût serait de 40 millions d’euros pour 11 700 ménages déclarants ; lui aussi est estimé à la hausse cette année, du fait de l’article 9 tel que rédigé, qui le porte à 120 millions, soit un bonus de plus de 10 000 euros par contribuable.
Cela sans faire d’effort, puisque ce n’est pas la valeur des biens imposables qui augmente, mais uniquement l’effet du tarif...
Cela signifie qu’un peu plus de 3 % seulement des redevables de l’ISF font jouer ces dispositifs pourtant déjà relativement anciens, et de fait peu utilisés.
Le pacte d’actionnaires concerne, au premier chef, des actionnaires minoritaires et non impliqués dans la gestion courante de l’entreprise : il s’agit d’abord d’une technique d’optimisation fiscale pour celles et ceux dont le rapport avec l’entreprise se limite à la perception de dividendes. Elle est fort utile aux riches dynasties industrielles que notre pays compte encore.
Lesdits pactes d’actionnaires font parfois l’objet de contestations et de controverses, comme le montre l’affaire Wendel, dans laquelle des actionnaires minoritaires, parmi les héritiers de cette grande famille industrielle de Lorraine, ont déposé plainte contre les agissements de certains cadres du groupe qu’ils accusent d’avoir mésusé de leurs titres et actions dans la gestion des affaires du groupe. Or, comme le pacte Wendel est précisément celui qui a largement inspiré le dispositif Dutreil, on peut se demander si le bien-fondé du maintien de ce dispositif est tout à fait assuré.
Au vu de ces éléments, nous ne pouvons qu’encourager le Sénat à confirmer, comme l’an dernier, sa position de suppression du dispositif Dutreil, niche fiscale coûteuse, inutile et peu opératoire de l’impôt de solidarité sur la fortune, dont elle réduit le rendement de manière inacceptable.
Vous me demandiez précédemment, monsieur le ministre, de mieux équilibrer les comptes lorsque je faisais des propositions de dépenses. En l’occurrence, je vous propose une recette !