Intervention de Roland Ries

Réunion du 18 décembre 2012 à 9h30
Questions orales — Conséquences des distorsions de concurrence au niveau européen pour les producteurs français de fruits et légumes

Photo de Roland RiesRoland Ries :

Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur le contexte de distorsions de concurrence dont souffrent actuellement les producteurs de fruits et légumes français, plus particulièrement les producteurs frontaliers, vis-à-vis de nos voisins européens.

La production de fruits et légumes représente dans notre pays un potentiel de 200 000 emplois qui s’adressent en particulier à des personnels peu qualifiés ou en difficultés d’insertion et à des jeunes dans le cadre d’emplois saisonniers.

Cette production connaît, depuis plusieurs années, un recul continu des surfaces exploitées, donc des volumes produits. Au cours des quinze dernières années en effet, les surfaces cultivées en légumes, à l’exception des légumes secs, ont diminué de 30 % dans notre pays. Ce mouvement est particulièrement marqué pour certains produits comme les asperges, les fraises ou encore les carottes.

Ces produits qui composent notre quotidien alimentaire sont donc aujourd’hui largement importés. Dès lors, la question de notre indépendance alimentaire se trouve posée.

Ce recul des surfaces exploitées s’explique en grande partie par les distorsions de concurrence qui existent à l’échelon européen entre la France et ses voisins directs, l’Espagne et l’Allemagne, deux pays dans lesquels les salaires pratiqués sont souvent bien moindres. En effet, tandis qu’en France le coût horaire du travail est estimé à 12 euros, il est, par exemple, de 6 euros en Allemagne, où n’existe pas, pour l’heure, de salaire minimum.

Ces différentiels de coût de la main-d’œuvre constituent pour le secteur français des fruits et légumes un handicap lourd, qui menace la pérennité de nombreuses exploitations. En effet, comme vous le savez, monsieur le ministre, il s’agit d’un secteur dans lequel le poids de la main-d’œuvre, rapporté au coût de production total, est important, du fait des techniques de récolte souvent peu mécanisables.

Ce problème de distorsion de concurrence en matière de coût du travail, mais aussi de législation sociale, par exemple en ce qui concerne la durée de travail, se pose avec d’autant plus d’acuité pour les exploitants agricoles situés dans les régions frontalières. C’est le cas dans ma région, l’Alsace, où nos exploitants partagent le même marché que leurs concurrents allemands et sont donc touchés de plein fouet par cette concurrence faussée.

Face à cette situation, les précédents gouvernements s’étaient engagés dans des mesures d’allègement de charges. Je pense notamment à l’élargissement successif du dispositif dit « TO-DE », c'est-à-dire « travailleurs occasionnels et demandeurs d’emplois », dont l’objectif est la réduction des charges sur les salaires de ces catégories de personnel.

La solution véritablement efficace, monsieur le ministre, vous la connaissez : c’est une Europe plus intégrée, une Europe de l’agriculture renforcée et coordonnée, une Europe de l’agriculture pensée comme un espace de coopération plus qu’un espace de concurrence, une Europe de l’agriculture qui encourage une « solidarité de production », pour reprendre une expression de Robert Schuman. Cette Europe-là constitue pour les agriculteurs de nos territoires une attente forte. Elle est une attente, mais elle est aussi une urgence.

Monsieur le ministre, depuis les fameux discours de Jean Jaurès au monde paysan, les socialistes ont toujours su prendre la mesure des problèmes posés au monde agricole. C’est pourquoi je souhaite savoir quelles initiatives européennes le Gouvernement entend engager rapidement dans le domaine agricole, afin de parvenir à une plus grande harmonisation de nos systèmes fiscaux et sociaux.

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