Intervention de André Reichardt

Réunion du 20 décembre 2012 à 15h00
Vérification du droit au séjour et délit d'aide au séjour irrégulier — Adoption des conclusions d'une commission mixte paritaire

Photo de André ReichardtAndré Reichardt :

Ce cap, nous l’avons tenu avec responsabilité, et sans céder au chant des sirènes, grâce à l’introduction de nouvelles exigences, imposées notamment par l’Europe.

Mais ces efforts dans la préservation de notre système d’intégration sont vains si l’ensemble de nos procédures sont inopérantes.

Or, vous la savez, la Cour de cassation a, le 5 juillet 2012, déclaré illégale l’utilisation de la procédure de garde à vue pour procéder au contrôle d’identité des étrangers susceptibles de s’établir irrégulièrement sur notre territoire, jugeant que, désormais, les services de police et de gendarmerie n’avaient plus la possibilité de placer en garde à vue un étranger en situation irrégulière auquel nulle autre infraction n’est reprochée.

Cependant, la garde à vue était jusqu’à présent la principale procédure permettant aux services de police ou de gendarmerie de retenir un étranger pour faire le point sur sa situation et, le cas échéant, décider de le placer en rétention administrative en vue de son éloignement.

On comprend bien qu’il devenait urgent de proposer aux services de police et de gendarmerie un nouvel instrument juridique qui permette à l’autorité administrative de prendre des décisions appropriées d’éloignement et de placement en rétention.

Pour faire face à cette difficulté, votre gouvernement a souhaité, monsieur le ministre, mettre en place une procédure relativement proche de la garde à vue : la retenue.

Il s’agit d’une nouvelle mesure de retenue administrative, plus brève que la garde à vue mais plus longue que la simple vérification d’identité, et explicitement destinée à vérifier le droit au séjour de la personne appréhendée.

La création d’une nouvelle mesure permettra donc aux forces de l’ordre et à l’administration de disposer du temps minimal nécessaire à l’établissement de la situation des étrangers au regard de leur droit à la circulation et au séjour, et, le cas échéant, à la prise des décisions qui s’imposent.

Ce projet de loi, soucieux donc des droits et libertés individuelles comme de la défense de notre territoire, nous semble donc tout à fait pertinent.

Il l’est d’autant plus à nos yeux que l’intégrité du délai de seize heures a été préservée, conformément à ce que nous souhaitions. L’examen devant le Sénat avait permis de revenir sur une possible scission de ce délai, mais, malheureusement, la crainte que nous n’avions cessé d’exprimer concernant la complexification de la procédure n’avait pas été entendue par l’Assemblée nationale.

Ce point est particulièrement important, car, je vous le rappelle, le délai de seize heures que nous instaurons reste très inférieur à celui de la garde à vue. Ainsi, sur le fond, nous sommes arrivés à un consensus.

J’aimerais également attirer votre attention sur la partie du projet de loi qui concerne l’élargissement de l’immunité pour aide au séjour irrégulier.

Ce texte supprime, en même temps que le « délit de solidarité », le risque, pour les militants des associations d’aide aux immigrés ou pour les simples particuliers, de se voir mis en examen pour aide au séjour irrégulier au même titre que les organisateurs de filières d’immigration clandestine.

Nous ne pouvons que nous féliciter de la différence opérée entre l’état objectif de détresse de la personne qu’il s’agit d’aider et le but lucratif ou non de celui qui aide l’étranger. Ainsi, la clé d’entrée pour apprécier le caractère coupable de l’aide apportée à la personne étrangère est le fait que celui qui aide poursuit un but lucratif.

N’imaginez pas que nous soyons insensibles à ces cas particuliers. Au contraire, nous avons fait en sorte depuis de nombreuses années de répondre à ces situations, sans pour autant nous en servir pour un quelconque affichage politique.

Ainsi, la loi du 16 juin 2011 permettait la poursuite des passeurs et animateurs de filières qui exploitent les étrangers, en prévoyant une peine de cinq ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende. Dans le même temps, elle prenait en compte l’état de nécessité de l’étranger en laissant au juge le soin, selon les termes de la décision du 5 mai 1998 du Conseil constitutionnel, « d’interpréter strictement les éléments constitutifs de l’infraction [...], notamment lorsque la personne morale en cause est une association à but non lucratif et à vocation humanitaire, ou une fondation, apportant aide et assistance aux étrangers ».

Plus largement, le juge constitutionnel avait, dans le même sens, rappelé, dans sa décision 2 mars 2004, que « le délit d’aide au séjour irrégulier commis en bande organisée ne saurait concerner les organismes humanitaires d’aide aux étrangers ».

Ce sont ces éléments qui ont permis au texte d’allier efficacité et pragmatisme. Certes, d’aucuns diront qu’il ne change rien de prévoir expressément dans la loi l’élargissement de cette immunité. Toutefois, j’aime à penser qu’il est bien souvent imprudent d’anticiper sur les inconvénients théoriques d’une norme qu’en réalité seule la pratique révèle.

Le groupe UMP approuve donc bien volontiers ce texte, car il faut agir avec urgence dans ce domaine. C’est pourquoi, mes chers collègues, et sans grande surprise, il votera ce texte utile au service des forces de police et de gendarmerie dans l’accomplissement de leur mission.

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