Madame la garde des sceaux, je souhaitais attirer votre attention sur les conditions de sortie des personnes détenues bénéficiant d’une mesure d’aménagement de peine sous écrou – semi-liberté, placement à l’extérieur ou sous surveillance électronique.
Ces détenus, contrairement aux personnes libérées définitivement ou bénéficiant d’une mesure de libération conditionnelle, n’ont pas le droit de récupérer à leur sortie les sommes figurant sur leur compte nominatif en prison.
Ce compte est en effet divisé en trois parts : premièrement, la part dévolue à l’indemnisation des parties civiles ; deuxièmement, la « part disponible » laissée à la disposition du détenu pendant l’incarcération ; troisièmement, le « pécule de libération », somme bloquée jusqu’à la levée d’écrou.
Ce compte n’est liquidé qu’à la fin de l’exécution de la mesure d’aménagement, et les personnes qui en bénéficient ne peuvent accéder à l’intégralité des fonds de la part disponible avant ce terme.
L’article D. 122 du code de procédure pénale donne d’ailleurs pouvoir au chef d’établissement de déterminer le montant laissé à la disposition de la personne pour faire face à ses besoins à l’extérieur : « Le chef de l’établissement apprécie, au moment de la sortie des intéressés, l’importance de la somme qui doit leur être remise, par prélèvement sur leur part disponible […] ».
Or, selon les constats de l’Observatoire international des prisons, les sommes remises à la sortie des personnes bénéficiant d’aménagements de peine sous écrou sont souvent insuffisantes au vu de leurs besoins.
Ainsi, par exemple, en avril dernier, une personne placée sous surveillance électronique est sortie de la prison d’Annœullin avec 30 euros en poche, alors qu’elle disposait de 1 300 euros sur sa part disponible, somme acquise grâce à son travail en prison.
L’absence de ressources suffisantes pour « reprendre pied » à la sortie est dramatique.
La précarité de la condition de sortie est, en outre, souvent renforcée par un manque de préparation à la sortie. Comme l’a relevé le Contrôleur général des lieux de privation de liberté dans son dernier rapport d’activité, le renouvellement des pièces d’identité n’est pas systématiquement organisé. De nombreuses personnes détenues sortent dès lors sans justificatif d’identité. Or il s’agit d’un préalable indispensable à de nombreuses démarches administratives : sans compte bancaire, il est impossible, par exemple, de contracter un abonnement mensuel de transport pour se rendre à Pôle emploi ou au travail.
Face à cette situation, madame la garde des sceaux, entendez-vous modifier l’article D. 122 du code de procédure pénale afin que les personnes sortant en aménagement de peine sous écrou puissent systématiquement bénéficier de l’intégralité des fonds relevant de leur part disponible ? Je suggère par ailleurs de leur permettre également de bénéficier des fonds figurant sur leur « pécule de libération », car il apparaît absurde et contre-productif, en termes de prévention de la récidive, d’attendre la fin de la mesure pour le leur remettre.
Enfin, je souhaiterais connaître votre position, madame la garde des sceaux, concernant la recommandation du Contrôleur général des lieux de privation de liberté d’instaurer un recensement des documents d’identité des personnes détenues, avec mention de leur date de validité, afin que leur renouvellement soit systématiquement organisé en détention par les services pénitentiaires d’insertion et de probation.