Nous devons aider nos concitoyens à sortir du débat manichéen actuel où s'affrontent les tenants de la prohibition à ceux qui prônent la réouverture des maisons closes. Le choix n'est pas là, mais entre une société qui considère que la prostitution est un mal - voire un bien - nécessaire et une société qui ne peut accepter en son sein l'existence de la prostitution, dans son principe et sa réalité.
Prenons garde aussi au vocabulaire : abolir la prostitution, c'est faire en sorte que la société finisse par estimer que la prostitution n'y a pas sa place, qu'elle n'est plus une représentation naturelle utile à l'exercice d'une communauté de destin. L'abolition, ce n'est pas la prohibition, or certains voudraient que le débat ait lieu sur ce terrain là.
Au motif qu'il faut protéger les personnes les plus exposées au Sida, faut-il accepter qu'elles soient exposées ? L'argument est trop facile ! Pour qu'une personne soit le moins exposée possible, elle ne doit pas être soumise à la domination de fait qu'est le système prostitutionnel.
La dimension européenne est incontournable, mais les têtes des réseaux mafieux se trouvent souvent à la périphérie de l'Europe, en Ukraine ou en Moldavie. Nous devons lutter contre toutes les formes d'hypocrisies et être bien conscients que la prostituions n'est qu'une forme, parmi d'autres, de la traite des êtres humains.
Les divers pays que nous avons visités nous ont dit que la France avait une responsabilité majeure pour faire prendre conscience à l'Europe qu'il n'est plus possible de condamner la traite des êtres humains tout en tolérant la prostitution. Nous devrons voter une loi globale, référente, offrant une solution à tous ceux qui se demandent aujourd'hui comment sortir de la zone grise dans laquelle ils sont englués. Nous, parlementaires, devrons faire preuve, dans l'unité de nos consciences et dans la différence de nos engagements politiques, d'un courage politique majeur. De nombreuses bonnes âmes dénonceront notre puritanisme, notre pudibonderie. Nous devrons engager ce travail de longue haleine, tout en respectant les trois piliers que j'ai exposés, sans en abandonner un en cours de route. Nous avons gagné le combat de l'opinion publique sur les violences faites aux femmes. Nous devons nous atteler à ce nouveau combat pour faire comprendre à nos concitoyens que même si la prostitution existe, ce fait ne peut être considéré comme naturel dans une société digne de ce nom.