Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, comme tous les orateurs qui se sont succédé à cette tribune, je suis satisfait du rapport d’information consensuel de MM. Pillet et Vandierendonck, qui est exhaustif, fouillé et construit. Leurs très nombreuses propositions rejoignent le vœu que j’ai moi-même formulé plusieurs fois depuis le début de cette mandature : celui de voir la police municipale évoluer et être beaucoup plus largement reconnue par la société.
La police municipale existe, nous l’avons rencontrée. Elle compte aujourd’hui 18 000 agents – 27 000, en comptant les gardes champêtres et les ASVP –, alors qu’ils étaient seulement 5 600 en 1984. On voit bien que cette « accélération de l’histoire » vient du besoin et de l’attente qui existent dans notre pays. Aussi bien parmi la population que parmi les élus, cette demande de sécurité est forte et consensuelle ; on ne peut pas l’ignorer. Nous, les maires, essayons de satisfaire les demandes de nos concitoyens.
Aujourd’hui, nous reprenons à notre compte la formule du précédent Président de la République, qui avait parlé, à propos de la police municipale, de la « troisième force de sécurité en France ».
La police municipale, dont je viens de dresser l’état des lieux, quelles missions exercent-elles ? Le rapport d’information fait le constat d’une extrême diversité entre les missions du garde champêtre de village, celles des policiers d’une petite ville, qui sont peu nombreux, ne travaillent que de jour et ne sont pas armés, et celles de la police d’une grande ville.
À Nice, j’ai 602 personnes : 380 policiers municipaux, 150 agents de surveillance de la voie publique et 72 agents administratifs. La ville compte 10 postes de police municipale et 750 caméras. Grâce à l’action de la police municipale, 2 678 interpellations ont été menées en 2012.
Notre collègue Jean-Vincent Placé pourra constater que ses doutes sur l’efficacité de la police municipale sont contredits ! D’ailleurs, l’efficacité de la police municipale à Nice est si grande que la police judiciaire procède quasiment à deux réquisitions par jour. Monsieur le ministre, que 621 réquisitions d’officier de police judiciaire aient eu lieu en une année dit assez combien le travail de la police municipal est remarquable. J’ajoute que son action bénéficie d’un soutien populaire tout à fait large.
Le constat de l’extrême diversité des missions assurées par la police municipale justifie que nous conservions sa capacité à s’adapter aux situations locales. Le maire doit demeurer libre de définir les missions de la police municipale, dont je répète qu’elle est la seule à maîtriser les spécificités de la commune, les services de l’État ayant généralement des périmètres d’action plus larges. Méfions-nous donc des normes et des autres dérives technocratiques qui pourraient nous arriver d’en haut.
L’action de la police municipale, qui est toujours une police de proximité, repose sur deux socles : une mission de prévention, de tranquillité publique et d’aide, mais aussi, en fonction de l’environnement local, une mission de répression plus ou moins développée, complémentaire de l’action de la police nationale.
Compte tenu de l’état des finances publiques et de la judiciarisation des forces de l’État, un risque de dérive existe, signalé par le rapport d’information et par de nombreux maires. Je rappelle, quant à moi, que la police municipale doit rester par excellence une police de proximité et qu’elle n’a pas vocation à remplacer la police nationale ou, pis, à lui faire concurrence : l’une et l’autre sont complémentaires.
Dans le cadre que je viens de tracer, nous considérons que la police municipale, pour être encore plus efficace au service de nos concitoyens, doit disposer de tous les moyens dans son domaine de compétence actuel, et seulement dans ce domaine.
Alors, quelles améliorations apporter ? Plus que le sénateur, c’est le maire d’une ville de 50 000 habitants comptant plus de 70 personnes travaillant pour la police municipale qui s’exprime ici.
J’ai un avis globalement positif sur les propositions qui ont été émises. Toutefois, concernant le transfert à l’intercommunalité – la proposition 14 –, je mettrai tout de suite un bémol. Je rappelle, en effet, que le pouvoir de police administrative constitue le noyau dur des compétences du maire ; M. le ministre de l’intérieur le sait parfaitement pour avoir été maire, lui aussi. Toucher à ce noyau dur peut donc, à long terme, déstabiliser l’avenir de la commune elle-même.
À Nice, avec le président Christian Estrosi, que je tiens à remercier publiquement, alors que notre intégration est la plus complète qui soit, puisque nous faisons désormais partie d’une métropole, après nous être posé la question, nous n’avons pas voulu entrer dans une démarche susceptible d’aboutir à la limitation des pouvoirs des maires. C’est dire que, nous aussi, nous avons trouvé un modus vivendi, mais, monsieur le rapporteur, je vous ai écouté avec beaucoup d’attention.
Dans le cadre du groupe de travail sur la police municipale qui doit être mis en place par M. le ministre, je souhaite que cette question soit effectivement abordée, là encore sans idéologie, avec un examen cas par cas. Nous nous ferons ensuite notre religion !
Nous n’avons donc pas fait de transfert chez nous, mais je reste ouvert, à condition que l’on ne s’aventure pas à toucher à ces pouvoirs de police administrative qui me paraissent encore fondamentaux, surtout si l’on va vers plus d’intégration, d’intercommunalité.
J’en reviens aux propositions du rapport.
Il est évident qu’il faut améliorer la coopération avec les forces nationales ; je parlais d’ailleurs de complémentarité. Dans ma commune, une nouvelle convention de coordination est en discussion. Cette proposition ne nous pose donc aucun problème, bien au contraire, car nous estimons que nous devons travailler de manière transversale. Je le dis au ministère : il faut, dans les conventions en cours d’élaboration, éviter qu’il y ait des transferts unilatéraux de charges au détriment des communes. À cet égard, il y a peut-être des choses à revoir...
Pour bien fixer cette complémentarité, nous allons acheter un logiciel afin d’établir une cartographie avec la police nationale, pour nous entraider mutuellement et défendre l’intérêt général.
Nous avons poussé cette démarche de sécurité et de prévention de la délinquance en définissant, puis en et signant avec le préfet des Alpes-Maritimes, le procureur de la République – le président du conseil général et le recteur étaient associés à cette opération –, une stratégie territoriale de sécurité. C’est une première dans les Alpes-Maritimes ! Nous sommes extrêmement sensibles à cette amélioration de la coopération avec la police nationale et les autres institutions.
Le chapitre III, qui vise à renforcer la spécificité de la police du maire, ne pose aucun problème. Mais encore faudrait-il renforcer la proposition 9. En effet, contrairement à d’autres intervenants, je suis favorable au port, en plus de l’arme de quatrième catégorie, d’armes non létales.