Intervention de Delphine Bataille

Réunion du 24 janvier 2013 à 15h00
Débat sur l'avenir du service public ferroviaire

Photo de Delphine BatailleDelphine Bataille :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dès sa mise en place, au XIXe siècle, le chemin de fer fut conçu dans une logique de service public restée depuis une spécificité française.

L’interventionnisme économique de l’État s’est justifié par le besoin d’un contrôle public pour la sécurité et pour le développement des infrastructures.

Cette logique qui a perduré est désormais remise en cause par les directives européennes, qui introduisent la concurrence comme principe d’efficacité.

Aujourd’hui, un « quatrième paquet ferroviaire » préparé par le Parlement européen appelle, dans une nouvelle ouverture à la concurrence, le marché domestique de voyageurs et suscite de nombreuses appréhensions, chez les cheminots notamment, qui sont particulièrement inquiets pour leur statut, et, bien sûr, pour la filière ferroviaire dans son ensemble qui est déjà fortement impactée par le démantèlement subi ces dernières années.

Ainsi, l’organisation mise en place dans le cadre des directives européennes a entraîné d’importants dysfonctionnements opérationnels. Certaines installations, en très mauvais état, nuisent à la qualité du service, et le marché du transport de marchandises, ouvert à la concurrence depuis 2006, s’est effondré.

La mise en place, sans anticipation, d’un système ferroviaire éclaté et le désengagement financier de l’État ont donc particulièrement fragilisé le système ferroviaire français.

Nous sommes attachés à un service public d’intérêt national et, à cet égard, nous rejetons toute scission d’un service qui a toujours fonctionné de manière satisfaisante au nom de l’intérêt général.

Le rapprochement de la Société nationale des chemins de fer français et de Réseau ferré de France va dans la même direction que celui qui est souhaité par l’Allemagne. Un système national unifié répond beaucoup mieux à la notion de service public qui a toujours été retenue à propos de l’organisation ferroviaire.

C’est l’idéologie libérale qui veut le tronçonnement en plusieurs services et, dans le cas du ferroviaire, la scission entre le transport et l’exploitation du service.

En Europe, plusieurs services nationaux peuvent coexister, se coordonner, tout simplement vivre ensemble dans des conditions satisfaisantes.

Ceux qui font de l’idéologie, ce ne sont pas les partisans du service public, ce sont M. Barroso et la Commission européenne qui, d’une manière obstinée, veulent libéraliser et s’attaquer aux services qui expriment la solidarité et la cohésion à l’échelle des nations.

Le précédent gouvernement avait l’intention, malgré les conséquences désastreuses, d’accélérer la libéralisation en avançant la date d’ouverture à la concurrence du marché domestique de passagers.

Je suis heureuse de constater, monsieur le ministre, que vous avez choisi de ne pas précipiter la mise en place de cette directive afin de mieux préparer les entreprises de la filière.

Parce qu’un service public ferroviaire de qualité concourt à la défense de l’industrie européenne, une bonne maîtrise de la filière permettra de sauvegarder des industries telles que Alstom, Siemens, voire les filiales de Bombardier qui préservent notre savoir-faire et notre emploi.

D’ailleurs, vous avez procédé voilà quelques jours, dans le département du Nord, à l’installation du Comité stratégique de la filière ferroviaire.

Accompagné du ministre du redressement productif et de la ministre du commerce extérieur, vous avez à cette occasion confirmé votre stratégie de renforcement de la compétitivité des filières et de relance de la commande publique afin de structurer une véritable équipe de France du ferroviaire chargée de défendre les intérêts de notre industrie et de ses salariés.

Cette annonce conforte la filière ferroviaire, qui est l’un des facteurs clés du développement de la région Nord–Pas-de-Calais, qui se place actuellement au troisième rang mondial dans ce secteur, et qui est, au surplus, pionnière pour ce qui concerne le développement, sur son territoire, du transport ferroviaire.

Forte de plusieurs décennies d’expérience, notre région mesure l’importance des services publics ferroviaires dans l’aménagement du territoire et le développement économique local. En effet, le maintien de la qualité du service public des transports collectifs et l’amélioration du réseau ferroviaire sur tout le territoire régional sont des nécessités structurantes pour l’avenir économique de notre région.

Vous le savez, certaines parties de ce territoire sont plus touchées que d’autres par la détérioration des transports ferroviaires, notamment dans les zones rurales. Or il s’agit justement d’espaces qui subissent déjà de graves difficultés économiques et sociales.

Monsieur le ministre, je compte sur votre soutien et sur l’appui du Gouvernement tout entier pour mener à bien ce chantier capital : construire un service public de transports assurant l’égalité des citoyens et permettre un aménagement du territoire dynamique, de qualité et équilibré. §

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